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vendredi, 14 juin 2019

Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !

Ce matin, « heureux d’être au monde et de voir clair », d’autant que je n’étais pas « aveugle des yeux » comme je l’entends parfois, je me suis levé.
Habituellement, je ne vérifie au réveil que quelques détails.
Ne vous attendez pas à quelque leste remarque à propos du baromètre de la santé...
Non, il s'agit de choses, triviales, certes mais importantes :
Reste-t-il du lait ?
Le pain est-il assez frais ?
Doit-il être grillé ?
Toutes ces petites choses de chaque matin.
Ce matin, j’ai vérifié quelque chose d’autre.
Non, toujours pas ça...
Mais aussi important :
Vois-je encore correctement ?
Je me suis approché de la fenêtre, avec un peu d’appréhension toutefois à cause du souvenir de la matinée de mercredi.
Ô merveille ! Ô bienveillance du sort !
Je revoyais comme avant !
Comme quand j’étais petit.
Enfin plus tard car quand j’étais petit je regardais le monde avec deux yeux.
J’ai tourné les yeux vers la droite et j’ai pu lire totalement l’enseigne du bout de la rue.
Et sans plisser les yeux !
Je me suis donc lancé dans la confection du petit déjeuner avec l’enthousiasme de la jeunesse que je pensais avoir retrouvée.
Hélas, pas assez retrouvée puisque qu’à me tortiller j’ai réveillé ce foutu genou…
J’ai fait alors la constatation désolante que la vie n’est pas un chemin continu qu’on aimerait parcourir peinardement.
Il n’est pas non plus seulement plein d’ornières qui font qu’on se relève régulièrement après moult chutes.
Non, en y réfléchissant plus avant, surtout avant qu’il ne soit trop tard, c’est surtout une course de haies, une course d’obstacles.
Après la « haie des dix ans », vous devez sauter celle des vingt ans puis celle des trente ans, etc.
La cruauté de la chose restant que bien que les haies soient de moins en moins hautes, elles semblent de plus en plus difficiles franchir.
Pas tant du point de vue de la hauteur que de celui de la vue.
Puis, passant dans la salle de bains, je me suis dit que finalement, voir moins clair en vieillissant n’était pas forcément un malheur.
Surtout quand on voit ce que je vois dans le fichu miroir de cette fichue salle de bains.
Avant, il suffisait d’une toilette pour effacer sans peine une nuit blanche sur des paupières à peine marquées.
Maintenant, même après une nuit de sommeil, c’est un ravalement complet auquel il faut se livrer.
Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !