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lundi, 05 août 2019

Avec le temps, va, tout s'en va...

devoir de lakevio.png

Je la voyais tous les jours.
Tous les jours je passais devant la grille toujours ouverte, rouillée, penchée, tenant par on ne sait quel miracle.
Le gond du haut de la porte avait cédé depuis longtemps, avant même ma naissance j’en suis sûr et la porte penchait dangereusement mais ne tombait toujours pas.
Ce matin, il fait beau et doux.
Le temps n’était pas chaud de cette chaleur qui donne à tout endroit inconnu un côté inquiétant, il était simplement doux et quasiment printanier en ce mois d’août.
Alors, en prenant garde à ne pas toucher ni même frôler la grille, je suis entré dans l’allée bordée d’arbres que j’ai remontée jusqu’à ce tournant qui me cachait le reste de l’endroit.
Un moment, l’allée, de terreuse et sèche qu’elle était, m’apparut soudain vaguement pavée, une sorte d’esplanade s’arrêtant à l’orée d’une pièce au sol déformé et mal carrelé.
Une porte béait dont je me demandais quelle utilité elle pouvait avoir car toutes les vitres étaient brisées.
Quelque chose d’inquiétant commençait à se dégager de l’endroit tandis que j’entrai dans la maison.
De printanier et clair, le temps semblait devenir automnal.
Il faisait frais dans la pièce, trop frais…
Je me suis avancé, les pièces que je voyais depuis le pas de la porte du fond avaient dû elles aussi être magnifiques.
Malgré la fraîcheur envahissante qui me poussait à boutonner mon blouson, je me suis avancé dans ce qui me parut être une salle de réception.
Tandis que j’entrai dans cette salle, je me demandais comment cette maison avait pu rester ainsi, en un état somme toute excellent, pendant toutes ces décennies sans être vandalisée voire incendiée ni même simplement squattée par des gens de passage qui l’auraient souillée de leurs déjections et auraient abandonné là les maigres reliefs de repas misérables.
Et c’est là que je l’aperçus.
Elle était allongée sur le sol, semblant dormir d’un profond sommeil.
J’eus un coup au cœur, affolé à l’idée de découvrir peut-être un meurtre quand je vis son sein se soulever régulièrement.
Elle respirait donc…
Je me suis approché et l’ai regardée.
Elle avait le teint pâle et rose des jeunes gens en bonne santé et ses cheveux étalés sur le carrelage lui donnaient l’air de la « Vénus sortant de l’onde » de Botticelli.
Son accoutrement toutefois m’étonna.
S’était-elle trouvée là après une soirée costumée ?
Vêtue d’une robe de bal à la mode des années 1900, elle était malgré tout extrêmement élégante et gardait quelque chose de touchant.
J’ai toussoté dans l’espoir de la réveiller.
Elle ne bougea pas.
Je me suis penché, souriant intérieurement en pensant à « La belle au Bois Dormant » et lui touchai la main.
Elle ouvrit un œil étonné et demanda « Qui êtes vous ? »
Je répondis, « Un voisin, et vous ? » vaguement inquiet qu’elle pût être un peu folle.
Elle me sourit et dit « Yvonne de Galais , mais où est Augustin ? Je me suis endormie en l’attendant… »
J’ai vérifié la présence de mon smartphone dans le poche de mon blouson et me suis enfui, paniqué…