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vendredi, 11 janvier 2019

Il y a des jours où le fil est mignon…

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Comme souvent en janvier, ce matin le temps est triste…
La maigre lumière du dehors me donne l’impression de vivre dans un film en noir et blanc.
En y réfléchissant, plutôt dans un film en gris et gris.
Même les enfants du collège en face entrent sans bruit.
Pas un piaillement de fille, pas un ricanement bête de garçon, pas de cris ni de chamailleries comme je les entends vers huit heures le matin.
J’attends qu’Heure-Bleue se réveille.
Je passe une main sur son épaule, elle soupire doucement et se tourne alors je me lève.
Pendant que la radio me raconte des bêtises par la voix de Ségolène Royal, je prépare les petits déjeuners et je rêvasse.
Ça doit être la grisaille du temps et surtout sa tristesse crasse car d’un coup j’ai devant les yeux l’image de la vieille miss Havisham affolée, un tisonnier à la main, contemplant le tison qui vient de mettre le feu à sa robe de dentelle.
Pourquoi diable cette scène des « Grandes Espérances » m’est-elle venue à l’esprit à ce moment ?
Je n’en ai aucune idée.
J’ai vu ce film un jeudi après-midi chez mes fondus du bon dieu.
Je me rappelle qu’on a réussi à se tenir tranquille pendant deux heures.
Ce film en noir et blanc m’a marqué, tant et si bien que le plan où la robe de miss Havisham s’enflamme alors qu’elle tisonne la cheminée est toujours vif.
Et toujours en noir et blanc…
Je me rappelle aussi que, bien que tirée de ce mauvais pas par le héros, elle mourra plus tard de ses blessures.
Ce qui me revient le plus, à ma grande honte, ce n’est pas que miss Havisham trépassa, non.
C’est la beauté dévastée de cette robe de dentelle blanche, comme une robe de mariée.
Je la revois encore et j’ai quasiment dans le nez l’odeur de brûlé qu’elle a sans doute dégagée lors du tournage.
Maintenant que j’ai grandi, enfin… vieilli, je me rends compte que je n’ai connu de ces « Grandes espérances » que ce film en noir et blanc des années quarante, le film de David Lean et le livre de la « Bibliothèque verte » avec sa couverture unie.
En dehors de ça, je n’ai lu de Dickens que « La maison d’Âpre-Vent » et « La petite Dorrit ».
Mais ce matin, c’est miss Havisham et sa robe de dentelle qui m’ont semblé se marier le mieux avec ce temps à se jeter dans la Seine…