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lundi, 29 novembre 2021

Devoir de Lakevio du Goût N° 106

Devoir de Lakevio du Goût_106.jpg

Mais que diable fait cette barque vide au bord de l’eau ?
Au moins ça m’inspire…
Mais vous ?
J’espère que lundi vous aurez dit quelque chose sur cette embarcation mystérieuse.

La veille, le bruit nous avait réveillés en sursaut, celui d’un petit groupe qui marchait dans la nuit, parlant doucement, trop fort pour que ce soit un chuchotement.
Le bruit de pas sur la route, accompagné de celui d’une charge qu’on traînait, nous a inquiétés.
J’étais alors allé à la fenêtre, je l’avais ouverte et m’étais penché.
Des bribes de conversation dans une langue inconnue parsemée de mots d’anglais m’arrivèrent aux oreilles.
Ce n’était pas la première fois, je me suis alors tourné vers la femme qui partage ma vie et ai dit « Ce sont encore ces pauvres gens, ils tentent de partir « en face », tu verrais leur bateau… Une barcasse qui ne tiendra pas deux encâblures… »
Elle a tapoté l’oreiller pour me faire revenir et m’a dit « Ces malheureux vont encore payer pour des évènements et des décisions dans lesquels ils ne sont pour rien. C’est désespérant… »
Elle avait soupiré tristement et clos sur « Allez, reviens te coucher… »
Puis elle s’est rendormie.
Cette nuit, je ne sais pourquoi, je me suis réveillé.
Il était trop tôt pour me lever, trop tard pour me rendormir, ce moment où on est encore fatigué mais où dormir est impossible.
Alors je me suis levé précautionneusement, ai refermé la porte de la chambre, me suis rhabillé et suis parti vers la mer.
Elle était belle et beaucoup plus calme que la veille.
Je suis descendu vers la plage.
La barque que j’avais entendue, traînée sur la route par la petite troupe de malheureux, était là.
Échouée.
Apparemment vide.
J’ai regardé la plage et la mer.
Rien, seuls le bruit du ressac et la lumière chiche de la Lune meublaient la nuit.
Je me suis approché quand j’ai entendu un vague bruit venir de la barque.
Un vagissement plutôt.
Je me suis penché.
La barque était presque vide.
Presque, un bébé vaguement emmailloté d’un bout de couverture, agitait les mains en tétant dans le vide.
Qu’auriez-vous voulu que je fisse ?
Je l’ai ramassé et suis revenu à la maison.
Ma femme m’a accueilli en disant « Où étais-tu passé ? »
Je lui ai tendu le bébé :
- On a un bébé, c’est le seul survivant du groupe qui est passé la nuit dernière… 
On s’est trouvé dans une triste situation.
Celle où on ne peut pas le garder car on n’a pas le droit.
Ce gosse me semble mal parti car si on le garde, les flics le prennent et si on le leur porte, ils vont le donner à la DASS et il finira encore plus mal.
Alors on a choisi de risquer la prison pour le délit « d’aide au séjour d’un immigré en situation irrégulière ».
On l’a gardé et on va l’élever.
On a juste à déménager…