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mardi, 12 février 2013

Immédiatement sa raison s'en alla...

J’aurais volontiers déposé un autre baiser sur sa joue mais je n’osai pas et partis.
Je parcourus le chemin jusqu’à la maison dans l’état d’esprit du petit garçon qui marche sur le bord du trottoir.
Mais si, vous savez bien, quand on marche sur la bordure et qu’on se dit « si je ne touche pas un seul trait jusqu’au coin, c’est qu’elle m’aime » ou bien « de chaque côté il y a un précipice et si je glisse, je tombe dedans et je meurs ».
La régression totale, en somme. C’est beau d’être grand…
En arrivant à la maison, tout le monde dormait. Le monde se résumait à mes deux sœurs cadettes, l’aînée était mariée et mes parents commerçaient à la campagne. Oui, le linge de maison n’est pas très nourrissant en juillet à Paris…
Je me suis couché et je rêvais avant même de dormir.
J’eus d’ailleurs du mal à m’endormir, c’est fou comme rêver vous tient éveillé parfois.
« Je m’voyais déjà », non pas en haut de l’affiche mais dans les salles du Louvre, avec une jeune fille accrochée à mon bras.
Et pas n’importe quelle jeune fille, celle dont je sentais encore les bras autour de mon cou et dont les cheveux me chatouillaient le nez.
Les bruits de la rue et un soleil éclatant me réveillèrent brutalement. Faute de montre, la panique me saisit. Je me levai en hâte et me ruai à la cuisine où le réveille-matin indiquait bêtement huit heures.
Oui, lectrices chéries, j’ai de la chance, depuis que « je fais mes nuits », je ferme l’œil et ne l’ouvre que huit heures plus tard, au grand dam de tous ceux et celles qui jalousent cette belle aptitude au repos.
Aptitude que j’entretenais sérieusement, surtout pendant certains cours d’histoire…
Donc, soulagé d’un grand poids devant ce réveille-matin compréhensif, je me mis aussitôt à bouillir d’impatience.
Je me bichonnai comme une cocotte, chose rare, puis je décidai de lâcher les Clark au profit de mocassins abandonnés pour cause d’entretien trop prenant.
Pour la seconde fois depuis que je les avais, je cirai avec un soin jaloux ces mocassins bordeaux.
J’abandonnai lorsque j’eus quasiment besoin de mettre des lunettes de soleil pour les regarder.
Je n’allais tout de même pas sacrifier tout mon confort pour elle, me mentis-je avec un manque de conviction affligeant, aussi je choisis mon jean « milleraies », un des deux seuls vrais « Newman » de la maison, le « vert Empire », superbe.
D’ailleurs je ne les choisissais que vert ou bleu-marine, je n’aimais pas les autres couleurs.
En revanche, j’étais, et serais encore pour des décennies, toujours aussi mal peigné et rien n’y ferait jamais, donc…
Très en avance, j’en profitai pour me relaver les dents, des fois que...
Elles ne se transformeraient pas en publicité pour « Email Diamant » et je ne récupèrerais pas le sourire de Stewart Granger dans « Conjiura dei dieci » -où Sylva Koscina m’avait déjà fait chavirer il y a des années-, mais au moins, j’aurais essayé !
Je vérifiai soigneusement que je n’avais pas envoyé un panache de gouttelettes de dentifrice sur ma plus belle chemise bleue, pris mon pull « ras du cou » gris, le jetai négligemment sur mes épaules puis je partis joyeux vers une probable gamelle…
Comme prévu, j’arrivai largement en avance, j’avais pourtant fait le chemin à pied mais vous savez ce que c’est.
J’avais gagné, de haute lutte et à grandes enjambées, le droit de trépigner devant la statue de la Victoire de Samothrace pendant plus d’une demi-heure.
Demi-heure que je mis à profit pour salir le bas de mon Newman à y essuyer mes mocassins toutes les cinq minutes pour en restaurer l’éclat éblouissant.
Eh oui, la cour du Louvre, en 1966, n’était pas asphaltée, encore un plan pour empêcher les garçons d’avoir des chaussures propres.
Je me demande encore comment faisaient les filles pour avoir des chaussures impeccables au même moment.
J’étais si absorbé par le lustrage de mon mocassin gauche –ou droit, je ne sais plus- que je sursautai en entendant « Vous trouvez ça propre, d’astiquer vos chaussures avec votre bas de pantalon ? »
C’était elle. J’en oubliai de re-astiquer l’autre chaussure !
Toujours en mini-jupe mais rouge celle-ci, toujours avec ses ballerines –propres, les siennes, alors qu’elle avait traversé la cour-, toujours avec sa veste d’un vert gris assez doux dont j’ai appris depuis que ça s’appelle « vert sauge » et un chemisier blanc qui donnait à son teint de rose pâle un éclat sans pareil. Et surtout une envie folle d’y poser ses doigts.
Bref, un teint à devenir cannibale
Mais comment avait-elle pu accepter un rendez-vous avec un type comme moi ?
Pour paraphraser un des Marx brothers, même moi je ne serais pas sorti avec moi !
Mon cœur, déjà fendillé, perdit alors un morceau quand elle me tendit sa joue.
Il en perdit un autre quand elle m’embrassa sur la joue avant de passer son bras sous le mien pour m’entraîner vers les sculptures…

Commentaires

mais! mon pauvre ! il n'allait plus rien rester de toi, à ce rythme là! Tu devais te sous-estimer, pourquoi doutais -tu de tes chances ? Elle était là! Non ?

Écrit par : emiliacelina | mardi, 12 février 2013

ah elle est bien venue !!!! j'aimerai savoir dans quel état va finir le Goût à la fin de la balade, au vu de l'état de stress intense, avant même qu'elle soit arrivée.

Écrit par : Rivka | mardi, 12 février 2013

(Je fais la même chose avec mes bottes... à cause du sel sur les routes.)

De toute évidence, si elle avait accepté le rendez-vous, c'est qu'elle te trouvait charmant, quoi que tu puisses en dire.

Écrit par : livfourmi | mardi, 12 février 2013

Alors , La suite ! Je crois voir dernier Fiston , je trouve qu'il va souvent chez le coiffeur en ce moment , il sort avec une infirmière , brune pour une fois !

Écrit par : Brigitte | mardi, 12 février 2013

Eh eh...le vrai dragueur, mais je me dis..." je crois que c'est elle qui a lancé l'hameçon....." Si si, c'est toujours la femme qui nous choisit...et parfois nous rejette.....

belle soirée

Écrit par : patriarch | mardi, 12 février 2013

Mais tu te sous estimes, c'est quoi ce balagan ? rhoooo le coup de la bordure c'est tout à fait ça, ça me fait bien marrer, moi aussi j'ai joué à des trucs cons dans le même genre !!

Écrit par : Ysa | mardi, 12 février 2013

chaussures bordeaux, pantalon vert... hum... les couleurs de l'époque !

Écrit par : liliplume | mardi, 12 février 2013

viteeeeeeeeeeeeeeee! la suiteeeeeeeeeeeeeeeeee! Par pitiéééééééééééééééé! Merci.
.....:-)

Écrit par : Mme Farfa | mercredi, 13 février 2013

ha elle est pile poil au rancart c'est bien ça !! même si sa jupe rouge ........

Écrit par : maevina | mercredi, 13 février 2013

Les commentaires sont fermés.