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samedi, 04 janvier 2014

Des chaussons aux paumes...

De tous les personnages qui meublaient le voisinage de mon enfance, deux ou trois restent gravés dans ma mémoire.
Un type notamment, un nommé Maillot.
C’était un suppôt actif de la classe ouvrière.
Non qu’il travaillât beaucoup mais il manifestait souvent. Il tirait parti d’une ressemblance frappante avec le général de Gaulle au point que les agents en pèlerine ne l’interpellaient que quand il ne pouvait plus marcher.
En fait quand ils devaient le ramasser dans le caniveau.
Il était si souvent à quatre pattes que les jeunes gens du coin lui conseillaient de se mettre des chaussures aux mains…
Les jours de grande forme, il arpentait le début de la rue Championnet. Il titubait de « l’Ecole de Jeunes Garcons » qui jouxtait « L’Ecole de Jeunes Filles » jusqu’à la place Albert Khan en hurlant « De Gaulle au poteau ! De Gaulle au poteau ! ». Il était grand, comme son célèbre sosie, affublé du même appendice Cyranobergeracien et d’une grande gueule qui réveillait le quartier dès potron-minet car il avait la cuite matutinale.
Quand il avait le petit déjeuner mauvais, il descendait de chez lui et arpentait la rue en zigzagant et en hurlant un mécontentement  qu’il attribuait immanquablement à « Mon Général » et à sa politique en Afrique du Nord.
A croire que tous ceux –dont ma mère- qui trouvaient qu’il y avait trop d’Algériens dans le quartier finançaient son vin à la tireuse.
Ce « vin à la tireuse » était la boisson commune des gens du quartier car le « vin en bouteille » était réservé aux jours de cérémonie ou aux réceptions d’amis ou de la famille.
Pour en revenir à Maillot, j’avais une douzaine d’années quand, en revenant du lycée, j’appris la nouvelle.
« Maillot a dévissé ! »
Une voisine de ma mère, « Française de souche » comme on dit aujourd’hui au FN, malgré tout fâchée avec certaines locutions de sa langue maternelle, particulièrement « se rendre compte », lui asséna ce jour-là « Non mais vous vous rencontrez, madame S. ? Maillot est mort ! »
Oui, à l’époque, on ne nous quittait pas, on ne disparaissait pas, on mourait, tout bêtement. Ma mère, pragmatique, maugréa « il est tombé, la tête sur le bord du trottoir ? »
Madame M. la renseigna, ce qui n’était pas si aisé car Maillot avait à peu près trois résidences. Souvent le commissariat du XVIIIème, parfois les urgences de l’Hôpital Bichat et plus normalement un des nombreux galetas du quartier. Il n’en sortait que pour boire et hurler après le monde.
Madame M. s’étendit un peu plus sur les circonstances de la fin de Maillot.
Il était paraît-il tombé dans l’escalier en sortant de chez lui. Ma mère, craignant le fait divers horrible, me mit la laitière dans les mains et m’envoya sur le champ chercher le lait à « La Laiterie Parisienne ».
C’est là que j’appris les circonstances de la mort de Maillot.
Son voisin, à qui une cliente venait de dire « Il a fini par mourir de trop boire ! » a pris sa défense.
« Ah mais non Médèèèème –il parlait « précieux » aux dames mariées - il est tombé dans l’escalier en s’enfuyant pour échapper aux pieuvres qu’il y avait chez lui ! C’était pas la première fois qu’il y en avait ! »
Et l’autre de répondre « Bref, il était encore bourré et il s’est cassé la gueule… »

Exit Maillot…

Commentaires

Je ne sais pas s'il existe encore des poivrots de cette sorte , ils se cachent ?

Écrit par : Brigitte | samedi, 04 janvier 2014

Une figure cet homme là, il y en a encore quelques uns qui arpentent le samedi soir les rues du village, ils ont souvent le vin mauvais.

Écrit par : mab | samedi, 04 janvier 2014

Le pauvre, il avait le delirium pas mince du tout !

Écrit par : lakevio | samedi, 04 janvier 2014

le pôvre! s'il voyait des pieuvres...il avait un sacré delirium...tremens...punaise! tu racontes bien j'aime tes souvenirs...c'était quand même une sacré époque...kiss!

Écrit par : mialjo | samedi, 04 janvier 2014

S'appelait-il Jacques de son prénom ? J'ai eu un frère qui ressemblait un peu à ça. Les villages ont encore leur Maillot.

Écrit par : juliette03 | samedi, 04 janvier 2014

Personnage qui a du manquer au quartier par la suite...Très joli souvenir...
J'ai un copain de ce genre à qui il m'arrive d'offrir des bières à la sortie du Lidl ...Pourvu qu'aucune pieuvre ne le poursuive ....

Écrit par : MG | samedi, 04 janvier 2014

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