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lundi, 19 octobre 2020

Devoir de Lakevio N°53.

devoir de Lakevio du Goût_53.jpg

Ça faisait longtemps.
Très longtemps.
Trop logntemps sans doute…
J’étais sûr qu’au sol il y avait des tomettes, de grandes tomettes rouges.
Quelqu’un avait dû faire des travaux car ces grandes tomettes avaient été remplacées par du béton nu, une bête dalle de béton…
Une dalle qui sonnait comme une chambre de HLM des années 60 sous mes pas tandis que j’arpentais lentement ce qui fut la chambre dans laquelle nous dormions, mes petites sœurs et moi pendant les vacances de Noël ou de Pâques.
J’ai regardé autour de moi, oubliant délibérément la réalité bien trop triste de ce qui ressemblait plus à un squat qu’à la chambre de nos vacances de Noël.
Un petit éclat blanc dans le coin gauche de ce qui était devenu un galetas sans mémoire ni avenir, révélé par un rai venu de la fenêtre, attira mon regard.
Je me suis approché lentement, espérant peut-être la découverte si ce n’est d’un bijou, au moins d’un souvenir…
Une petite boule blanche était restée dans le coin gauche.
Je me suis approché, étonné je l’ai regardée et l’ai ramassée.
Une « bombe algérienne » ! C’était une « bombe algérienne » !
Je me demandai par quel miracle elle était restée là, après des décennies, coincée dans la plinthe et comment elle avait pu échapper à des années de ménage manifestement approximatif.
Le genre de ménage qui faisait dire « si les coins veulent être nettoyés, il faut qu’ils s’approchent… »
Je ramassai cette petite chose qui ressemblait à un bonbon mal emballé et la tournai doucement dans mes doigts.
Je me demandais comment le papier pelure qui enveloppait ces graviers magiques avait résisté à tant d'années.
J’ai piétiné le matelas défoncé pour atteindre la fenêtre que j’ai ouverte et jeté sur la route cette « bombe algérienne ».
Une explosion sèche retentit dans le silence de l’après-midi.
Je m’attendais presque à voir sortir la voisine en face, celle de mon enfance, toujours plus ou moins fâchée avec ma grand’ mère, une louche ou une cuiller à pot à la main.
Elle m’a sautée à la mémoire, regardant comme toujours la rue d’un air méfiant, le sourcil froncé et la bouche amère.
D’aussi loin que je me la rappelle, je ne lui ai jamais connu que cet air revêche.
Même quand ma grand’ mère allait boire le café chez elle, elle gardait cet air coléreux.
Plus tard, j’appris qu’elle avait une fille et je me suis demandé qui avait été assez téméraire pour lui faire un enfant…
Encore plus tard, je me suis dit que peut-être elle avait un jour su sourire et s’était laissé aimer.
Je ne sais pas ce qui s’était passé, je l’avais toujours connue seule, dans la maison tout juste de l’autre côté de la rue.
Tout le monde que je connaissais était mort.
La cousine qui vendait les « illustrés » et les « bombes algériennes » sur la place.
La voisine revêche de ma grand’ mère, elle aussi « avait passé » comme on disait.
Elle était sûrement allongée sous les cyprès du cimetière.
Ce qui me vient à l’esprit en regardant cette chambre aux murs d’un rose écœurant, c’est le « Kiwi » numéro 1, avec « Roddy, le petit trappeur » et « Blek le Roc » collant des raclées aux « Tuniques rouges » en soutien « aux patriotes de Portland ».
Puis m’a sauté à la mémoire le souvenir aussi des premiers numéros de  « Meteor » et de « Sidéral ».
Mais qu’étais-je venu faire ici ?
Vérifier qu’il y a des endroits où le temps ne s’écoule pas ?
Que peut-être m’y accueilleraient ceux que j’ai aimés et qui m’aimèrent.
La tristesse du lieu m’a saisi alors.
Vivre ici c’est déjà être un peu mort.
Alors je suis parti sans me retourner, finalement convaincu de ce que je pensais depuis longtemps.
Convaincu de la seule chose que j’ai apprise et vérifiée au cours de toutes ces années.
Tant que, les jours et les nuits, on peut toucher du regard et du bout des doigts une autre peau que la sienne, tant que l’on peut sentir d’autres doigts que les siens se poser sur sa peau, on fait partie des vivants.
Le reste n’est que littérature…

Commentaires

Adrienne a trouvé quelque chose de drôle dans cette toile triste à mourir.
C'est là :

https://adrienne414873722.wordpress.com/2020/10/19/question-existentielle-72

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Alainx nous rappelle que Balzac était un type assez finaud en matière de caractères...
C'est là :

https://alainx3.blogspot.com/2020/10/chambre-avec-vue-davenir.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Colombine brise le suspense caché par les annonces "Ravissante studette à rafraîchir, très lumineuse, ensoleillée, pleine de charme, cuisine équipée" où il faut traduire "piaule en ruine au 7ème sans ascenseur, avec camping-gaz sur une table de nuit, sous les toits avec toilettes à l'étage mais pour toutres les chambres de l'étage"

C'est là :

http://demainestunautrejour.eklablog.com/a-louer-a203659020

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

conclusion: je suis morte depuis la mi-mars :-)

Écrit par : Adrienne | lundi, 19 octobre 2020

Delia nous conte la mésaventure d'un bailleur, l'inverse de Colombine qui conte les déboires qui attendent un locataire face à un bailleur rapace.
C'est là :

https://deshirondellesetdespapillons.blogspot.com/2020/10/histoire-dhorreur.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

EmiliaCelina nous rappelle une chanson d'élégante façon.
C'est là :

http://emiliacelina.canalblog.com/archives/2020/10/19/38594457.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Fabie nous conte ce qui pourrait être une histoire vraie si un minimum de justice immanente existait réellement...
C'est là :

http://monparcourscancerdusein.eklablog.com/desolation-a203630694

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Littérature. Peut être. Mais la tienne est pleine d'émotion et de souvenirs d'enfance. Tu l'écris tellement bien ! La nostalgie nous nourrit : il ne faut pas passer outre. J'aime la nostalgie. Comme toi je crois. Et nous sommes bien vivants ! Cela n'empêche pas.
Devoir accompli aussi.

Écrit par : Yvanne | lundi, 19 octobre 2020

Gwen me rappelle -et peut-être à d'autres- que le confort n'est pas toujours allé de soi mais qu'il est finalement relativement récent et que certaines petites joies d'aujourd'hui furent grandes à leur époque.
C'est là :

http://bourlingueuse.canalblog.com/archives/2020/10/19/38597389.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Il est là :

http://etcaeteraet.canalblog.com/archives/2020/10/17/38595008.html

Écrit par : SdL | lundi, 19 octobre 2020

Heure-Bleue nous raconte un truc qui "nous pend au nez comme un sifflet de deux sous".
C'est chouette et c'est là:

http://heure-bleue.blogspirit.com/archive/2020/10/19/la-chambre-3156167.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

PassionCulture nous montre le côté peu reluisant de l'humanité, non seulement elle est cruelle mais stupide parce que coller des amendes à des gens insolvables n'est pas malin.
Quant à dénoncer de pauvres gens aux autorités, bien à l'abri derrière ses rideaux, hein...
C'est là :

http://passionculture.be/2020/10/19/e-comme-expulse/

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Sylvie de L nous parle de toutes ces maisons abandonnées et des vies qu'elles ont abritées.
C'est là :

http://etcaeteraet.canalblog.com/archives/2020/10/17/38595008.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Les souvenirs sont toujours un peu tristes dans le sens où ils ne reviendront pas. Ton texte en est encore tout tremblant mais ils n’appartiennent qu'aux vivants. J'aime bien le fin.

Écrit par : delia | lundi, 19 octobre 2020

Il est gai comme un jour de couvre feu ton devoir.

Écrit par : heure-bleue | lundi, 19 octobre 2020

Ambre-Neige nous montre - d'une étrange façon- que le ventilateur de son PC est bien utile et qu'il ne faut pas le débrancher.
Sinon ça chauffe mais pas ce qu'il faut chauffer...
C'est là :

http://enviededouceur.canalblog.com/archives/2020/10/19/38598183.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Yvanne pense à la vie de Rimbaud en regardant le tableau.
Son devoir m'a donné une idée de "Une saison en enfer" mais elle y voyait d'autres vers.
C'est là :

http://yvanne19.canalblog.com/archives/2020/10/19/38598143.html

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Manque le lien...

Écrit par : Yvanne | lundi, 19 octobre 2020

Merci.

Écrit par : Yvanne | lundi, 19 octobre 2020

Est-ce que tu n'avais pas déjà évoqué un souvenir de « bombe algérienne » ?
Ou bien est-ce que j'ai lu ça sur un autre blog ?
Et sinon bien sûr : « les tuniques rouges », « météor »… ça fait remonter les souvenirs des années 50.
Et sinon, j'avais une préférence pour Buck Danny

Écrit par : alainx | lundi, 19 octobre 2020

J'ai déjà évoqué une "bombe algérienne" dans une note il y a des années.

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Je me rappelle de tes bombes algériennes. Tu vois, ta façon d'écrire est tellement agréable qu'on n'oublie pas tes articles...
J'ai fait mon devoir, hyper drôle..ha, ha. Je sens qu'avec cette photo d'un taudis, je vais bien rigoler avec tes liens..
Ah, si tu nous avais montré une photo de Versailles, il en eût été autrement !

Écrit par : julie | lundi, 19 octobre 2020

Dis-moi... tu n'aurais pas par hasard réchauffé un texte ancien ?

Écrit par : Gwen | lundi, 19 octobre 2020

J'ai ravivé un souvenir ancien.
Alainx et Juliette l'ont remarqué aussi.

Écrit par : le-gout-des-autres | lundi, 19 octobre 2020

Tiens, t'es trop chou - à la crème ou de Bruxelles, c'est selon si on aime le sucré ou le salé - mr le Goût. Merci.

Écrit par : julie | lundi, 19 octobre 2020

le couvre-feu ne te réussit pas toi !!

Écrit par : ang/col | lundi, 19 octobre 2020

Moi aussi je me souviens de la bombe algérienne ;)
Tu racontes bien tes souvenirs, on imagine tellement les scènes évoquées !

Écrit par : Fabie | lundi, 19 octobre 2020

C'est par toi que j' appris ce qu'était une bombe algérienne.

Ton texte n' est pas triste , je dirai plutôt nostalgique..... même si en voyant cette toile ç a ne donne pas envie de revenir en arrière

Écrit par : Emiliacelina | lundi, 19 octobre 2020

Je me souviens de la bombe Algérienne et c'est là que j'en ai appris le nom. La nostalgie est toujours ce qu'elle était.

Écrit par : SdL | lundi, 19 octobre 2020

C'est bien la première fois que j'entends parler de "bombe algérienne", mais il faut dire qu'en Belgique, l'Algérie...
Comme d'habitude, peut-être même encore plus aujourd'hui, j'ai trouvé ton texte beau et émouvant.
Juste une petite pensée pour toutes celles et ceux qui voudraient bien se sentir vivants, mais qui n'ont aucune autre peau à toucher que la leur...

Écrit par : Passion Culture | mardi, 20 octobre 2020

Julietet nous dit une histoire vraie, vraie et pleine de digression dont Juliette est coutumière mais qu'on lit toujours avec le même plaisir qu'un roman à redbondissements.
C'est là :

http://cearriveenfrance.over-blog.com/2020/10/devoir-du-lundi-du-gout-le-taudis.html

Écrit par : le-gout-des-autres | vendredi, 23 octobre 2020

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