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samedi, 21 juillet 2012

Un été 62

L’année 1962 n’appelle pas de commentaire sauf les colonies de vacances.
Le premier mois se passa dans un camp de vacances de la mairie du XVIIIème.
Pour faire tenir tranquilles des gamins de douze à quatorze ans, rien de tel qu’un sac à dos, des « barres à feu », un duvet, une tente canadienne pour quatre, portée par le plus fort, et des « pataugas ».
C’était super ! Au bout de trente à quarante kilomètres dans la journée, on s’arrêtait pour la nuit, on faisait des feux de camp, on chantait pendant que les moniteurs commençaient à dodeliner de la tête.
Les vieux, ça ne tient pas l’effort…
Au bout du premier mois, les moniteurs étaient épuisés.
Pas nous. Nos parents étaient venus nous attendre à la Gare de Lyon.
Ils nous trouvèrent tous dans une forme éblouissante.
Quelques détails clochaient néanmoins.
Nous étions bronzés mais en partie à cause d’une couche de saleté à gratter au couteau.
Habillés aussi, mais de façon curieuse, chacun portant le short de l’un, la chemise de l’autre.
Je ne suis pas même certain que les chaussures allaient bien par paire…
Une vraie bande de vagabonds descendit du train.

Le second mois, en revanche fit une partie de mon éducation.
J’appris enfin à quoi pouvait peut-être servir vraiment « comment c’est fait en face »…

Mes parents nous dispersèrent, histoire de souffler quelque temps.
J’appris plus tard que ma mère fut heureuse pendant les trois premiers jours et passa le reste du mois à pleurer en attendant notre retour…
Je fus quant à moi envoyé en Bretagne dans une « colonie de curés » et contraint, comme tous les arabes, juifs et le seul chinois bouddhiste à aller à la messe le dimanche.
Mais ça valait le coup.
Cette colonie, à un ou deux kilomètres de Roscoff, était couplée à une « colo de filles » proche de Santec, charmant village face à l’île de Sieck.

Si les directeurs et trices de ces deux colonies avaient su à quel point « couplée » était vrai  ils auraient entouré chacune de trois rangs de barbelés.
Les moniteurs étaient de jeunes gens dont quelques séminaristes.
La vocation résiste mal aux mouvements hormonaux de la jeunesse et il y eut un peu trop de promenades communes entre les « équipes » de chaque colonie pour que persistât longtemps l’idée de consacrer sa vie à un ministère censé être assez pauvre en joies séculières….
Je me rappelle avoir croisé « mon mono » avec une bouche telle qu’on aurait dit qu’il s’était endormi face contre terre sur un sol en béton.
En voyant la monitrice de « l’équipe » compagne de promenade, les lèvres dans un état lamentable, il n’y avait aucun doute, ils « s’étaient roulé des patins de luxe » -on ne disait pas encore « d’enfer ».
J’eus quant à moi l’occasion, sans effort aucun, de voir une blondinette aux yeux bleus, affectée curieusement d’un accent pied-noir à couper au couteau, tomber amoureuse de votre serviteur.

La mort de Marilyn Monroe me donna l’occasion de la consoler.
Hormis la tentative d’Arlette il y a plusieurs années et quelques bisous sur les lèvres je ne savais absolument rien du baiser.
Cette Isabelle, tandis que nous étions assis à l’abri d’un rocher, se tourna vers moi et me dis « Je t’aime Le Goût ».
C'était la première fois qu'on me disait quelque chose comme ça.
Même ma mère ne me le disait pas, c'est dire. En plus ça semblait avoir une autre signification que quand ma mère m'appelait « mon trésor»...

Je fus fort flatté et un peu interdit mais elle avait de si beaux yeux interrogateurs que je m’approchai pour lui faire « le bisou qui tue ».
Et là, c’est moi qui fus « tué ». Elle colla sa bouche, qu’elle avait fort douce, à la mienne et, une chose en entraînant une autre, je sentis sa langue.
Ça me fit un drôle d’effet.
Contre toute attente, et à rebours de ce que disaient les adultes qui nous prévenaient du danger de ce genre de chose avant le mariage, ce n’était ni « sale », ni « mal ».
Bien au contraire.
Nous continuâmes donc ce jeu passionnant un long  moment.
Elle à se coller contre moi et à se débarrasser de mains indiscrètes.
Moi à essayer d’en savoir plus.
Le tout en s’embrassant.
La souplesse articulaire de la jeunesse est absolument remarquable.
C’est à cette occasion aussi qu’on se rend compte que les maillots de bain, chez les filles ça ne dévoile pas grand-chose.
En revanche chez les garçons, avoir les sentiments à fleur de maillot de bain, c’est voyant et pour tout dire gênant.
Je dus attendre de longues minutes avant de pouvoir reparaître en public.
Il me fallut faire attention aussi à ne pas regarder ma dulcinée trop attentivement…
Cette année là marqua le début de longues, très longues études en « psychophysiologie  appliquée».
Si cette année vit aussi ma première expérience,  –que je ne vous raconterai pas, j'en ai encore vaguement honte, malgré l'indulgence que je porte à la jeunesse et à l'inexpérience, complètement ratée, trop rapide et finalement décevante qu’elle fut, surtout pour celle qui en fit les frais-,  ma plus belle découverte se fit l’année suivante.

Commentaires

c'était le mois du patinage de luxe, pendant que ta maman pleurait, t'as pas honte ?????

Écrit par : maevina | samedi, 21 juillet 2012

Des émois plus sérieux, la physique appliquée !

Côté colo des filles : les lèvres rouges et gonflées des "fiancées" et la sombre jalousie de toutes celles qui n'avaient pas été élue !

Écrit par : lakevio | samedi, 21 juillet 2012

J'ai toujours proclamé que l'année 62 était une grande année, surtout l'été 62 marqué à jamais par la naissance de la plus charmante personne de l'univers : MOI ... ;-)

Écrit par : Moune | samedi, 21 juillet 2012

ça fait rien t'étais un vrai tombeur!!! et....tous ces souvenirs te sont restés en mémoire alors que tant de personnes veulent faire croire qu'ils les ont oubliés.....
les menteurs!!!!!!

Écrit par : emiliacelina | samedi, 21 juillet 2012

les belles années !

Écrit par : liliplume | samedi, 21 juillet 2012

mes souvenirs de colos sont un peu différents, j'avais 7 ans, la première fois, et mon meilleur souvenir c'est de m'être battue avec un garçon de 12 ans, et d'avoir gagné!!! mais le fourbe s'en fut se plaindre au mono que je l'avais "griffé", et il avait en effet une marque, alors qu'il s'etait simplement accroché avec la boucle de ma sandale.. je ne l'ai pas revu depuis... il me l'aurait payé!^^

Écrit par : tarmine | dimanche, 22 juillet 2012

1962 c'était aussi J'entends siffler le train, la première parution de Salut les copains et mes 18 ans!

Écrit par : mab | dimanche, 22 juillet 2012

ha ha mab va être contente elle l'a son baiser...MDR...les colos qu'est ce que c'était bien, rien a voir avec celle de maintenant...continue ça devient intéressant...kisss

Écrit par : mialjo | lundi, 23 juillet 2012

Jo m'a dit que tu racontais aussi tes souvenirs, je suis venue et ne suis pas déçue...
Tu dis que tu as passé tes vacances en Bourgogne...Je suis bourguignonne, enfin, plutôt morvandelle, du 58, Alésia, mais quel Alésia, celui du 21 ou du 71 ?..Le passage du Tour de France, je me rappelle de la seule fois où il est passé dans mon village, peut-être la même année que toi..
Mon mari est aussi allé en colo en Bretagne, chez les curés, pendant 7 ans, lui qui n'a jamais été "un cureton", mais, du côté de St Lunaire.Pourquoi les colos appartenaient surtout aux curés ?...Les filles et les garçons étaient aussi séparés..Faudra que je lui demande comment c'était, côté "émoi", bizarrement, nous n'avons jamais parlé de nos 1eres amours..Faut dire que j'ai un mari très jaloux (comme HB), qui serait capable, 40 après, d'être jaloux d'un gamin boutonneux, comme s'il pouvait encore m'émouvoir.

A partir de 8 ans, les garçons et les filles sont déjà travaillés par leurs hormones, que dis-je ! Ca commence à la maternelle...Je me rappelle des bonbons cachés dans mon bureau d'écolière, mais, pas forcément par celui qu'on attend, bizarrement, c'est surtout cette histoire de bonbons que j'ai gardé en souvenirs, le reste a sombré dans l'oubli..

Écrit par : juju | vendredi, 03 août 2012

Ton récit est très plaisant à lire, j'ai du retard que j'essaie de rattraper

Écrit par : ange-etrange | vendredi, 10 août 2012

Merci de me rassurer! D'autant plus que je viens de recevoir un mail de Petite Perle, ravie de m'annoncer que dans les cours, il y a 10 garçons angolais de 15 à 22 ans ...et elle!

Écrit par : muse | mercredi, 09 janvier 2013

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