Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 13 août 2012

Les 50 jours de vacances

 « Soudain, le drame ! » comme affiche régulièrement la une de Voici.

Et pourquoi ce drame ? Une idée saugrenue vint à ma mère et donna un coup qui faillit être fatal à ce qui promettait d’être une passion à renvoyer celle de Titus et Bérénice au rang de bluette de comptoir.

Ma mère préférée, et fort heureusement unique, décida que ce dimanche je l’accompagnerai le matin et passerai l’après-midi à la maison à ramasser le souk de bricolages, de piles, de bouts de fil électrique, etc. que je semais régulièrement dans la maison.
Comme si ça ne suffisait pas à mon malheur, je fus désigné volontaire d’office pour l’accompagner le lundi et porter les colis de son réassortiment hebdomadaire.

Mes tentatives d’argumenter se soldèrent par un échec retentissant. Hélas, trois fois hélas, ma mère me connaissait trop bien et depuis trop longtemps pour se rendre à mes arguties.
Mes arguments, pourtant théoriquement  imparables, restèrent donc sans effet sur ses décisions et l’époque n’était pas, du moins à la maison, à désobéir ouvertement aux parents.
Deux jours sans la voir et surtout sans la regarder, deux jours sans sentir sa main accrochée à mon bras, sans sa voix.
Sur la porte de l’appartement ma mère aurait dû écrire à la peinture noire « Vous qui entrez ici, laissez toute espérance », Dante avait prévu mon désespoir, j’en suis sûr.
J’eus beau, le dimanche après-midi me livrer à une folie de rangement, il restait toujours quelque chose à ramasser, à ranger, à essuyer, à plier.
L’après-midi touchait à sa fin lorsque ma mère parut satisfaite, elle m’envoya faire quelques courses et l’heure du dîner arriva.
Je me morfondis tout le repas, débarrassai la table et partis me coucher.
Plus exactement je partis me noyer dans le sommeil –un peu comme pendant les cours d’Histoire, vous voyez ?-.
Je commençai la journée du lendemain en faisant une figure de six pieds de long. Je savais que ma dulcinée  consacrait  sa matinée à la maison et je savais hélas que je devrais consacrer l’après-midi à aller vers Voltaire porter des colis.
Autant dire que la Terre déserte, telle celle décrite dans certains livres de science-fiction existait, c’était la mienne.
Un Lamartine avait eu beau écrire « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé », ça faisait petit joueur à côté de ma peine.
Je notai tout de même à cette occasion que le ban et l’arrière ban des cadors de la littérature française semblait avoir eu vent de la tragédie qui me frapperait à peine leur tombe refermée.
Cette reconnaissance anticipée par la gent des lettres ne me consolait pas –je souffrais mille morts et oubliai de le noter pour plus tard, quand je serai célèbre-.
Pire, nous étions si certains de nous voir dès le dimanche, que nous n’avions pas songé un instant qu’un trente-deuxième de poil était suffisant pour ficher par terre un mécanisme réglé au quart de poil.
« La Princesse de Clèves » n’était pas imaginaire, le duc de Nemours, c’était moi ! Le principe du roman tel que pensé par Madame de Lafayette était là, son esprit soufflait, l’amour perpétuellement contrarié, les amants qui, malgré une inclination irrépressible, ne parviennent jamais à s’unir et ne font que se manquer.
Se manquer dans tous les sens du terme.

De fait je passai quarante-huit, que dis-je cinquante six heures, à attendre le mardi après-midi.
Moi qui n’avais jamais pensé qu’un jour je n’aurais pas faim –ben oui, on dirait que vous n’avez jamais eu quinze ans et demi !- je mâchonnai sans entrain mais rapidement –essayez, vous verrez, c’est faisable- le repas de midi et partis la dernière bouchée avalée, non sans avoir débarrassé la table, histoire d’éviter les foudres maternelles à mon retour.
Je marchai d’un bon pas jusqu’à « the café », où je ne vis personne,  regardai la rue Saint Vincent, vide. Je descendis vers Jules Joffrin, des fois que… Mais non…

Commentaires

Je sens venir une fin dramatique.

Écrit par : mab | lundi, 13 août 2012

Arrrghh!!!!! Pauvre gamin! Mais tes malheurs de l'époque me font mourir de rire! ...avec quand-même beaucoup de compassion rétroactive!!! Mais que veux-tu? Tu racontes trop bien!!!T'as intéret à ce que la conclusion soit à la hauteur de tes dernières notes, hein?

Écrit par : emiliacelina | lundi, 13 août 2012

mon pauvre, ce rendez vous raté va t il vous être fatal !!!!!!!

Écrit par : maevina | lundi, 13 août 2012

Tu racontes tellement bien, le suspens est insoutenable...

Écrit par : ange-etrange | lundi, 13 août 2012

... je sens bien que Zorro(te) ne pas pas arriver... et que nous allons pleurer dans les chaumières !
Vite... la suite !
Gwen

Écrit par : Gwen | lundi, 13 août 2012

les mères ont un instinct très sûr quand la concurrence s'approche...

Écrit par : liliplume | lundi, 13 août 2012

déjà les affres de l'amour..... bel après midi !!

Écrit par : patriarch | lundi, 13 août 2012

je sens une déception se pointer !

Écrit par : Brigitte | lundi, 13 août 2012

Je garde un souvenir plutôt mitigé de la "Princesse de Clèves". D'un coup, tu me mets le doute, faudra-t-il que je le relise pour y voir, tout ce que j'avais occulté à l'adolescence?

Que d'affres à attendre!

Écrit par : Livfourmi | mardi, 23 octobre 2012

Les commentaires sont fermés.