vendredi, 12 octobre 2012
Il faut un début à tout...
Finalement il n’était pas si mal.
Si on passe évidemment sur quelques inconvénients liés à la mâlitude.
Le plus gênant, par ces temps d’obsession de la sécurité, c’est qu’il était de la famille de ceux qui sont obligés de se raser deux fois par jour.
Quand on prend le RER plusieurs fois par jour, il faut éviter d’avoir la tête qui appelle le contrôle d’identité avec bavure…
Cela mis à part, il n’était pas repoussant. A condition de ne jamais porter de ces Nike qui lui faisaient non seulement transpirer les pieds mais, lorsqu’il les quittait le soir, exhalaient un de ces parfums qui justifiaient à eux seuls la Convention de Genève de 1925.
Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes de, vous n’allez pas le croire, de Jean Dupont dit « Nono ». A moins que ce ne soit Dupond, il ne savait plus très bien, depuis le temps qu’on le chambrait avec cette histoire sortie tout droit de chez Tintin.
« Nono », donc, se trouvait plutôt pas mal. Et il en avait besoin car il avait en vue une poulette qui, si elle savait qu’il l’appelait poulette lui aurait sur le champ collé une baffe. Il le gardait donc pour lui afin de ne pas entamer une idylle directement par la rupture.
Ça faisait un moment qu’il se faisait la réflexion que plus les nanas –avant il disait « les gonzesses » mais il avait appris à manier l’euphémisme à force de rebuffades et surtout de râteaux à répétition-, plus les nanas, donc, étaient « libérées » plus elles étaient chochottes. Mais bon, « faut c’qu’y faut », si on veut suffit pas de vouloir, faut aussi apprendre à causer, la belle époque du sifflet ou de la claque sur les fesses était malheureusement révolue depuis qu’Alphonse Boudard avait jeté sa gourme.
C’est toi, dis-je, qui sus ravir
Mon ferme cœur à te servir ;
A jamais tu seras servie
De lui, tant qu’il sera vivant.
Peut-on mieux conserver sa vie
Que de la perdre en te servant ?
D’ici qu’il faille leur réciter des conneries genre ça, il n’y avait pas loin.
Celui là, il avait chopé les deux premiers vers sur une pub de bijoux, après avoir cherché dans les librairies, il avait vu de quoi il retournait.
Il avait aussitôt décrété que c’était chiant, ajoutant « m’étonne pas que le mec qui a écrit ça ait appelé le tout « Les tragiques », c’était bien vu. ». Il s’en doutait, faut croire, le d’Aubigné. Mais si on veut être un peu efficace, faut quand même faire un effort…
Il avait du boulot pour avoir le droit de faire un tour entre les draps de la belle. Elle était bégueule et il avait été élevé du côté de la Porte de Clignancourt. Vous en avez peut-être entendu causer.
A l’époque de son enfance il n’y avait même pas le périph’, juste un camp de gitans à la place du stade. « La table » ça s’appelait parce qu’on pouvait voir venir de loin. C’est même là que les voyous se donnaient rendez-vous, justement pour être sûrs qu’il n’y avait pas d’entourloupe. Ça n’empêchait pas les bagarres de « blousons noirs ». La chaîne de vélo, ça faisait les choux gras des infos à la radio mais il y avait en vrai un truc infâme. Le tournevis de 3x300. Un machin épouvantable qui vous trouait le cœur à coup sûr. C’est pour ça que gamin, sa mère ne voulait pas qu’il « fricote » avec ces lascars.
Il en avait quand même attrapé le langage.
Et ça n'allait rendre les choses faciles...
21:22 | Commentaires (8)
Commentaires
C'est vrai que la drague, c'était out un art.... Sourires... Belle journée.
Écrit par : patriarch | samedi, 13 octobre 2012
Oui et tu veux en venir où?
Écrit par : mab | samedi, 13 octobre 2012
chouette! ça commence bien! encore une fois tu vas nous tenir en haleine! En plus, au détour d'un passage par-ci, d'un passage par là, je visite ou revisite mes classiques! Déjà, j'aime bien le ton!
Écrit par : emiliacelina | samedi, 13 octobre 2012
J'adore. Le style, l'histoire. Et même si ça s'arrête là, je suis conquise.
J'avais écrit ça : http://berthoise.canalblog.com/archives/2009/06/22/14174100.html
et ça : http://berthoise.canalblog.com/archives/2009/06/27/14223830.html
dans le temps, du temps où je me décarcassais un peu plus.
Écrit par : Berthoise | samedi, 13 octobre 2012
Chic, une histoire !
Mais "bousons" noirs, tu es sûr ?... Plutôt terre à terre, ça manque d'aile !
Écrit par : lakevio | samedi, 13 octobre 2012
C'est-y-pas que Le Goût il nous écrirait un roman-feuilleton ? Comme ce gars-là qui avait écrit des histoires sur les mauvais coins de Paname. Mais si, un mecton qui transpirait tout le temps. Eugène Sue, qu'on l'appelait !
Écrit par : liwymi | samedi, 13 octobre 2012
C'est ptêtre du vécu qu'il va nous raconter...
Y'a qu'une chose à dire aux gonzesses : "t'as d'beaux yeux, tu sais !"
Écrit par : juliette | samedi, 13 octobre 2012
Nono est content de lui mais il doit s'en prendre des vestes
Écrit par : maevina | samedi, 13 octobre 2012
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