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lundi, 17 février 2020

Devoir de Lakevio du Goût N° 26

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J’ai profité qu’il était parti dans la cuisine voler un gâteau dans la boîte.
Je le savais, chaque fois qu’on allait chez ma grand’ mère je le voyais faire.
Il semblait ronchon et sérieux, assis devant la porte du « bâtiment » ouverte, le filet qu’il tissait, qu’il appelait « une araignée », accroché par un coin à un clou planté dans la porte.
Il faisait toujours la même chose : Il prenait un morceau de « câble PTT », ces câbles enrobés d’une gaine de plomb, il en coupait un morceau de quelques centimètres, l’ouvrait délicatement à l’aide de son « Opinel » de façon à en faire comme un grand « plomb de pêche » et le posait dans le couvercle de la petite boîte qui en contenait déjà plusieurs.
Et là, il commençait.
Il regardait de l’autre côté du jardin si la cuisine était vide.
Il avait encore la vue perçante et de beaux yeux verts, mon grand-père.
Il savait que la cuisine était vide quand il entendait le raclement des chenets sur le carrelage de la cheminée et la grand’ mère pester contre la poussière de cendre à balayer.
Il se levait de sa chaise et traversait le jardin jusqu’à la cuisine, y entrait et volait un gâteau dans la boîte trop haute pour que je puisse en voler moi aussi…
J’ai vite attrapé la bobine de « fil à rôti » dont il tissait les filets et j’en ai coupé un grand bout en l’usant sur la bordure de pierre du jardin et je me suis enfui vers la plate bande du devant de la maison.
Je voulais faire un bouquet de violettes pour maman.
Je savais qu’elle aimait les violettes parce que quand papa lui en rapportait un en revenant du travail, elle le disputait à cause des sous et avait ce sourire avec juste les lèvres qui bougent un peu et elle l’embrassait quand même et elle était contente.
Arrivé devant le devant de la maison, j’ai commencé à cueillir les violettes, il y en avait toujours pendant les vacances de Pâques.
Maman les regardait, me disait de ne pas les toucher et aussi « ta grand’mère a beaucoup de mal à les garder, c’est fragile… »
J’ai commencé à cueillir les violettes.
Je sentais chaque violette chaque fois, j’aimais leur parfum délicat, je le humais jusqu’à ce que l’odeur de la tige cassée me parvienne, légèrement acide, alors je la mettais dans l’autre main.
Je les ai presque toutes cueillies.
Je me suis arrêté quand j’ai entendu maman m’appeler.
J’ai lié le bouquet avec le grand bout de « fil à rôti » et je suis retourné vers le jardin.
Mon grand-père pestait parce que sa bobine de fil était emmêlée.
Maman se demandait où j’étais passé.
Dès qu’elle m’a vu elle a commencé à crier « Les violettes de ma mère !!! Il a arraché toutes les violettes !!! Mon dieu ! »
J’étais sûr qu’elle allait me donner une claque sur les cuisses parce qu’on n’avait pas le droit de cueillir les fleurs mais quand même, c’était pour elle…
Je me suis approché et je lui ai tendu le bouquet.
Maman s’est arrêtée de crier et elle a eu ce petit sourire avec juste les lèvres serrées qui bougent et m’a ouvert les bras.
Elle a juste dit « Bon... Je vais voir ça avec ta grand’mère… » et elle m’a embrassé en me serrant contre elle.
Pas comme papa mais elle m’a embrassé.