mercredi, 16 mars 2022
Allo maman ! Bobo !
Ce vieux monsieur qui m’émeut n’est pas un Ukrainien.
Je vous avoue que je suis un peu effrayé à l’idée de vous révéler qui est ce monsieur.
Non que je le connaisse, simplement cette photo a amené chez moi quelque chose de rare.
Une réflexion…
Une réflexion à propos d’un qualificatif qu’on me jette de temps à autre à la figure.
Je lis et entends trop souvent quelque chose qui me déplaît profondément, surtout depuis le début de ce qui n’est pas vraiment une campagne électorale.
Me hérissait déjà le « racisme de comptoir ».
Celui qui consiste à trouver que le Noir court plus vite que le Gaulois mais devrait se contenter de bananes selon une interprétation étrange des Evangiles répandue par certains bigots.
Il semblait prouvé aussi, selon des sources voisines, que le Maghrébin vole mieux, plus vite et surtout plus souvent que nos avions.
Pour en revenir à ce vieux monsieur, sur la photo, il pourrait être un Ukrainien, tout aussi bien un Malien mais il n’est pas noir.
Parmi tous les malheurs qui le frappent, en plus c’est un Arabe ! Un Syrien !
Alors, ces temps-ci, inutile de vous dire qu’il ne pourrait pas être « un réfugié » mais au mieux « un migrant »…
Mais ma réflexion porte plutôt sur un autre racisme, le « racisme social ».
La droite, d’abord extrême puis plus récemment dite « droite décomplexée », c'est-à-dire la même mais sans Chirac pour les calmer, a donc trouvé il y a quelque temps un nouvel ennemi, une classe indéterminée dont votre Goût adoré s’honore de faire partie.
« Le bobo » !
Dès que quelqu’un les invite à y aller doucement, remarque que la vie n’est pas drôle mais qu’elle est courte et qu’il faut en profiter, qu’il faut vivre et laisser vivre, que la fin ne justifie pas tous les moyens.
Ou encore qu’il y a des choses qu’on ne fait pas, surtout si ce n’est que pour l’argent.
Eh bien le type qui dit des choses comme ça est un « bobo ».
Vous n’êtes pas dans la misère et vous trouvez que le trader est beaucoup trop payé compte tenu de son apport à la société ?
Vous êtes aujourd’hui un bobo alors qu’il y a cinquante ans vous auriez été un « crypto-communiste ».
Vous vivez dans un appartement plutôt sympa mais vous trouvez que La Lanterne est une chouette maison qui vous plairait bien ?
Alors là vous êtes un « sale bobo ».
En plus vous trouvez que la façon de traiter les Roms ou les gens qui fuient la guerre ou la misère est scandaleuse et indigne ?
Là vous devenez un de ces « affreux bobos ».
Vous trouvez débile et indigne d’aller distribuer des horions à des gens dont les préférences ne sont pas les vôtres ?
Là, ça s’aggrave, vous devenez alors un de ces « horribles bobos ».
Pour ces gens, être bobo est un dévoiement de la pensée alors qu’elle consiste surtout à s’apercevoir que si la vie n’est pas drôle tous les jours et en aucun cas quelque chose de sérieux.
Pour ceux qui aimeraient en savoir un peu plus sur le monsieur de la photo, c’est là :
09:59 | Commentaires (22)
Commentaires
Ça fait très longtemps que je rêve de la Lanterne, alors pas touche, j'ai la priorité.
Écrit par : Olivier | mercredi, 16 mars 2022
Sur le pré !
Demain, 6 H avec deux témoins !
Écrit par : le-gout-des-autres | mercredi, 16 mars 2022
Lequel de vous deux sera Gaston Defferre ?
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
Je serai Gaston Deferre !
D'abord il était de gauche (quoique...)
Et il a été vainqueur.
Écrit par : le-gout-des-autres | mercredi, 16 mars 2022
Les mots sont faits pour ça, dire ce qui nous réjouit, ce qui nous émeut, ce qui nous époustoufle, ce qui nous terrifie, les beautés et les laideurs du monde, ses délices et sa douleur. Ça n'empêche pas de vivre, mais ça permet de se regarder en face sans oublier de regarder les autres, tous les autres, de se reconnaître humain (humaine en ce qui me concerne) parmi les humains, impliqué, engagé, lié à tous ceux d'où qu'ils viennent qui sont contraints de remettre leur dignité d'humain à plus tard.
C'est donc sans aucun souci que j'assume ma boboïtude, ainsi que ma bien-pensance.
:-)
Écrit par : La Baladine | mercredi, 16 mars 2022
Etre bobo ou faire bobo : Doit-on choisir ?
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
Je crains que c'est "avoir bobo" qui nous attend .
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
Ah, le bobo !
Un drôle d'animal...
Qui vit à Paris, mais pas seulement...
Qui se nourrit de bio, mais ne plante jamais une carotte...
Qui est intelligent,
mais dont toutes les pensées sortent du dernier journal...
Qui écrit sur les pauvres et sur les réfugiés,
mais qui n'en accueillerait jamais chez lui...
Qui est riche (et même très riche par rapport à celui de la photo)
mais qui se considère comme juste "un peu aisé"...
Qui dit ce qu'il faut dire,
qui est là où il "faut" être...
Qui est complètement "dans le système"
mais qui se vit comme "en-dehors", "éclairé"...
Qui est plutôt gentil,
mais qui contribue, sans s'en rendre compte,
à toutes les horreurs du monde...
Un drôle d'animal, donc...
Et comme dit Renaud,
on fait tous un peu "partie du lot" ????
Écrit par : La Licorne | mercredi, 16 mars 2022
Bien calqué sur du Renaud effectivement, bourré de raccourcis et de procès d'intention :-P
Écrit par : La Baladine | mercredi, 16 mars 2022
Renaud est extra. J'en rajouterai une couche avec "Bo comme Bowie" :)
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
Heureusement, il y a tous ces autres qui ne sont pas bobo et qui leur reprochent de "ne pas faire des choses".
Au fait, tu as accueilli combien de migrants chez toi ?
Écrit par : le-gout-des-autres | mercredi, 16 mars 2022
La question qui tue :)) Je parie pour la réponse:"c'est trop petit chez moi".
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
Aucun migrant chez moi, effectivement...
(j'ai bien dit que je "faisais partie du lot")
Mais 25 ans de relations avec l'Afrique et le Tiers-monde...
Écrit par : La Licorne | mercredi, 16 mars 2022
@La Licorne
Moi aussi, mêmes relations pendant 17 ans vu, le coin où je suis né... ;-)
Cela dit, pour avoir parcouru l'hémisphère nord pendant 27 ans, j'ai constaté que la misère, la corruption et autres fléaux trouvent partout de quoi y faire leur nid.
Écrit par : le-gout-des-autres | mercredi, 16 mars 2022
@ Nina : j'ai une GRANDE maison...à la campagne.
Écrit par : La Licorne | mercredi, 16 mars 2022
A vous tous: je suis une "moqueuse"; c'est ma façon de ne pas déprimer. Les avis de tous m'intéressent. Etant "pied-noir" et fille de réfugiés politiques, je sais que la situation de "migrants" est difficile à régler. Il y a de plus en plus de "personnes déplacées" dans le monde et il y en aura encore plus. C'est le sujet qui me préoccupe le plus (que de plus!).
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
@nina.
Mon père, "pied-noir" lui aussi, a fait la guerre pendant 53 mois.
Il en est revenu, blessé, esquinté et cinglé, gentil mais cinglé, à fait des cauchemars jusqu'au milieu des années 50.
Lors de conflit qui a tué plus de 50 millions de personnesen a déplacé 500 millions.
Un tiers de la population mondiale de l'époque a été frappée de troubles psychologiques dont certains ne se sont jamais remis.
Tu crois que ça les aurait calmés ?
Que nenni !
Écrit par : le-gout-des-autres | mercredi, 16 mars 2022
J'interviens depuis des années, avec Amnesty, dans des lycées et collèges et notamment sur le thème des migrants. Je m'attache depuis toujours aux définitions et à l'interprétation des chiffres (c'est quoi peu, beaucoup et trop) et on fait un peu d'histoire (les 46 000 habitants des bidonvilles dans les années 60-70, la banlieue parisienne ville la plus peuplée du Portugal...). Et je m'attaque aux idées reçues (non les pays "riches" ne sont pas ceux qui accueillent le plus de migrants, carte à l'appui). Ces jours-ci, j'ai un peu modifié mon approche, je leur demande comment on appelle les Africains qui arrivent dans des canots pourris sur les côtes grecques et italiennes (migrants), comment sont qualifiés les étrangers qui vivent en France depuis 30, 40 ans ou plus (immigrés) et comment on désigne les Ukrainiens qui fuient leur pays (réfugiés). Ensuite je définis ces termes (définition ONU et termes utilisés dans la législation française). Ils comprennent vite.
Mais impossible de leur dire que les Ukrainiens nous ressemblent, la moitié ou plus des élèves de ces banlieues parisiennes ne ressemblent pas du tout aux Ukrainiens !
Je ne sais pas si je ne vais pas changer ma conclusion : "Apprenons à vivre ensemble comme des frères ou nous mourrons tous comme des idiots" Martin Luther King par "Peu importe le terme utilisé, le plus important c'est qu'on puisse voir l'être humain derrière."
Écrit par : GM | mercredi, 16 mars 2022
Ok! L'être humain est un prédateur. Ce qui m'horrifie, c'est qu' un "chef " puisse, à lui seul, mettre la pagaille.
Écrit par : Nina | mercredi, 16 mars 2022
ou comme une insulte peut devenir un compliment :-)
Écrit par : Adrienne | jeudi, 17 mars 2022
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