jeudi, 06 février 2014
On te fera la peau, névrose !
Un peu assourdi mais apparemment en forme, j’allais me désoler d’avoir gaspillé du si beau matériel quand j’entendis des cris dans la cour.
La voisine en face était à la fenêtre et hurlait « Un attentat ! C’est un attentat ! Ah ces salauds de bicots ! Etrangers ! »
La voisine en face, Espagnole, ne se laissait pas déranger par le fait qu’elle-même était une étrangère, pas plus que par des bêtises du genre « politiquement correct ».
J’avais néanmoins eu un peu peur.
Gêné par quelque chose comme des larmes, je me suis passé la main sur le visage.
C’est quand j’ai regardé ma main pleine de sang que j’ai eu les genoux qui se mirent à trembler. Je suis allé à la cuisine, suis monté sur la chaise pour être à la hauteur du miroir dont mon père se servait pour se raser et ma mère pour se maquiller les grands jours.
J’ai eu la peur de ma vie en contemplant mon visage ensanglanté, mes joues constellées de petites blessures et mon œil droit qui saignait.
Je me suis mis à pleurer puis, constatant que je n’étais ni mort ni aveugle –l’élevage à la schlague des Frères avait au moins un côté positif qui faisait se soucier des choses vraiment graves- je sortis sur le palier, frappai chez la voisine, madame S.
Personne ne répondit. Je savais qu’à l’étage au dessous, tout le monde travaillait et les quelques enfants qui étaient là savaient qu’il leur était interdit d’ouvrir à qui que ce soit.
Je descendis donc encore un étage.
Je frappai à la porte de madame C., la femme du bougnat du rez-de-chaussée.
- Qui c’est qu’c’est ? Demanda-t-elle de sa voix de mêlé-cass mâtinée faubourien.
- C’est Patrice, du quatrième… Dis-je d’une voix mal assurée.
- Qu’est-ce que t-as mon bonhomme ? Dit-elle en ouvrant la porte.
Dès que la porte fut ouverte, madame C. me regarda, poussa un soupir et s’effondra d’un coup.
Je la crus morte et me mis à crier, la voisine d’en dessous ouvrit sa porte et se précipita.
Elle me prit dans ses bras et m’emmena au rez-de-chaussée et entra dans le bistrot du bougnat en disant « Emmenez le gamin à l’hosto ! Et toi, va ramasser ta bonne-femme ! »
Je sais que la voisine du premier ne portait pas madame C. dans son cœur depuis qu’elle l’avait sortie de son lit où elle était fort occupée avec son mari.
Madame C. s’était comme ça retrouvée en costume d’Eve dans la rue, en demeure de fournir une explication à son bougnat de mari tandis que la furie du premier réclamait les mêmes à son mari qui s'était finalement révélé fort occupé pendant une période de chômage.
Le bougnat et le chômeur s’entendaient plutôt bien, l’un dépensant libéralement les sous de sa femme chez l’autre.
Attention lectrices chéries, si vous saviez tout ce que les enfants peuvent voir, entendre et se rappeler, vous seriez épouvantées…
Le bougnat avait appelé l’hôpital Bretonneau, hôpital pour enfant mais il n’avait pas de service d’ophtalmologie et avait dit « emmenez le à Bichat ! ».
Et il fallut m’emmener à l’hôpital Bichat.
Ce qui ne se passa pas sans mal…
07:15 | Commentaires (9)
Commentaires
Ben mon bonhomme j'imagine que tu as eu après la raclée de ta vie.
Écrit par : mab | jeudi, 06 février 2014
c'est pas croyable! Comment peux-tu arriver à me faire rire avec une histoire pareille!? J'ai honte! je devrai être pleine de compassion! Mais..... Et je crois comprendre que ce n'est pas fini, alors ...à demain, parce-que je pense qu'il reste à connaître la suite lorsque tes parents ont été avertis que tu étais à l'hosto !
Écrit par : emiliacelina | jeudi, 06 février 2014
Purée ! Ta mère va être contente ! j'attends la raclée !
Écrit par : Brigitte | jeudi, 06 février 2014
mais c'est horrible !!!!!!!! tu m'as fait dresser les quelques poils qu'il me reste !
Écrit par : maevina | jeudi, 06 février 2014
Oh, mon dieu, le spectacle devait être épouvantable, j'aurai aussi tourné de l'oeïl, j'imagine la panique de ta mère en voyant ton visage ensanglanté.
Je me souviens quand je me suis cassé le poignet à 7h du soir (c'est comme ça qu'on disait à l'époque)
En faisant les fous dans l'étable avec mes frères et ma soeur, je suis tombée et me suis cassé le poignet. La première chose qu'a fait mon père, c'est de me donner une gifle, pourtant, il avait la main moins leste que ma mère. Le pauvre devait aller au cinéma, avec un ou 2 ainés, il ne devait y avoir de séance qu'une fois/mois, voir moins, on imagine sans peine sa frustration.
Écrit par : unefidèlelectrice | jeudi, 06 février 2014
c'est sûr qu'il devait y avoir de quoi tomber dans les pommes, déjà y en a qui ne supporte pas la vue de sang...dis donc...pendant tout ce temps...tu avais au minimum j'espère une serviette sur l'oeil? ça devait pisser le sang...et tes parents? j'imagine même pas leur état en découvrant le drame...car c'est est un...allez la suite...vite...merci et Kiss.
Écrit par : mialjo | jeudi, 06 février 2014
Comme quoi, tout le monde ne peut pas être Wernher von Braun !
Écrit par : alainx | jeudi, 06 février 2014
Je suis suspendue à ton récit.
Mais je prévois une issue mi-figue, mi-raisin.
Écrit par : Berthoise | jeudi, 06 février 2014
j'ai eu des trucs du même style avec mon fils (et frôlé aussi l'évanouissement plus d'une fois), notamment la fois où il avait obtenu le même genre de résultat que toi dans le deuxième endroit où se trouvent les (le ?) neurone chez les hommes...
Écrit par : liliplume | jeudi, 06 février 2014
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