samedi, 20 décembre 2014
Houx la vilaine !
La note de Lakevio, muette mais expressive comme beaucoup de ses notes, me remet en mémoire des vacances de Noël chez mes grands-parents maternels.
Comme nous n’avons plus de photos depuis longtemps, au lieu comme Lakevio, de vous montrer des images, lectrices chéries, eh bien je cause…
Le sapin n’était pas de rigueur, la Nationale 7 était en travaux pour transformer une route en quasi « autostrade » comme disaient les gens du coin, dont le langage gardait des traces d’un passé encore récent.
La partie la plus chouette des préparatifs était que ma grande sœur nous emmenait, ma sœur cadette et moi, dans la forêt de Montargis toute proche pour y cueillir du houx.
Rien que le voyage était bien. Le pont du canal était vite passé mais nous nous hâtions vers le « pont de la Girafe » pour voir le Loing qui débordait de partout. Une fois passés derrière le château, on traversait les voies de chemin de fer, la nationale et on entrait dans la forêt.
Il y avait du monde dans cette forêt, à l’époque la cueillette du houx n’était pas encore interdite. Plein de gamins, des « grands », censément à la recherche de houx. Je sais maintenant quel genre de houx ils cherchaient. Ça ne manquait pas de piquant…
Ma sœur et moi jouions avec les glands de chênes. On a appris pour l’occasion qu’on les utilisait pour fabriquer de l’encre. Rien qu’à les manipuler on avait les mains pleines de taches que ma mère avait un mal fou à retirer. Si elle avait pu, elle nous aurait lavé les mains au papier de verre pour nous guérir de tripatouiller des galles de chêne.
On rentrait à la nuit tombée, ma grande sœur nous faisait allonger le pas, elle me tenait, en réalité me tirait par la main tandis que je tirais ma petite sœur par l’autre main.
Nous arrivions essoufflés et ma petite sœur, qui ne savait pas encore qu’il ne fallait jamais, au grand jamais, dire quoi que ce soit à ma mère, commençait :
- On a vu G. et A. dans la forêt !
Ma mère levait la tête de la casserole, l’air inquiétant qu’elle prenait quand elle sentait venir la nécessité de rappeler la loi de la maison.
- Et… ?
- Eh ben, ils étaient drôlement gentils avec A.
Mon père sortait de la conversation avec le cousin F. et disait :
- Quoiiii ?????
- Ben oui, ils voulaient l’embrasser, G. a même porté A. dans ses bras pour lui faire traverser les rails, quand on est rentré.
- A. ma fille ! Si je te vois encore avec ces gars là, je te fous une volée !
Ma mère s’est mise à crier :
- Toi tu ne touches pas à ma fille !
Le cousin F. a renchéri :
- Mais enfin, Gaby ! Fous-y la paix ! Tu vois bien qu’elle est « en chasse » c’te môme !
- Ouais, ben moi ce qui m’inquiète, c’est pas le chasseur, c’est le gibier, et le gibier il a une…
- Gaaabyyy !!!!!!!!!!
Hurla ma mère.
Je me suis piqué avec le houx.
Ça a été un chouette Noël.
Je revois encore ma grande sœur sourire en douce.
Ma petite sœur avait sept ans, j’en avais huit.
Ma grande sœur avait quinze ans.
C’est plus tard que j’ai su ce que la cueillette du houx pouvait avoir de passionnant…
08:50 | Commentaires (8)
Commentaires
Il y a de charmantes dames qui arpentent l'orée de la forêt mais des cueilleurs de houx je ne sais pas.
Écrit par : mab | samedi, 20 décembre 2014
Ben dis donc ! Le Bois de Boulogne s'est drôlement étendu depuis mon enfance !
Écrit par : le-gout-des-autres | samedi, 20 décembre 2014
je ne savais même pas qu'il y avait du houx la bas ......
Écrit par : maevina | samedi, 20 décembre 2014
Voilà, je remets mon houx au bon endroit. Tu me donnes une idée d'article, enfin, article, je ne sais pas, si, quand je commence à écrire, j'en aurai pour 2mn ou 2 heures.
- Quant au houx, tiens, je ne sais plus si je l'ai déjà mis sur mon blog. Le houx du Morvan, fleuri en novembre. Nous n'avons plus rien, je ne savais pas que le houx fanait aussi vite, enfin que les jolies boules rouges flétrissaient et tombaient. Il eusse fallu que j'aille chez ma mère pour en chercher, mais vu le temps pourri, pas envie.
Je rajoute "quand je pense que, l'année dernière, nous avons arpenté de long en large la Montagne Bourbonnaise, celle-là même qui vient de trouver un repreneur pour sa station de ski sans neige, station qui avait fait le buzz dans les médias, la Loge des Gardes...et que nous n'avons rien trouvé où alors, il eusse fallu que je grimpasse sur les épaules de mon mari pour atteindre les hautes branches. Mais, vu ma corpulence, je pense que je lui aurais écrasé les os.
Écrit par : juliette | samedi, 20 décembre 2014
J'ai déjà entendu cette expression : elle chasse ! dans la bouche de ma mère , on savait alors qu'il fallait bien se tenir .
Écrit par : Brigitte | samedi, 20 décembre 2014
Seulement la cueillette? Ou également ce qu'on y fait dessous?
Écrit par : livfourmi | samedi, 20 décembre 2014
Sacré couple tes parents, ça devait valoir le coup d'oeil...
Écrit par : Allye | dimanche, 21 décembre 2014
Rien que la transcription "Fous-y la paix, elle est chasse c'te môme" m'amène l'émoi et le sourire. J'adore !
Écrit par : lakevio | dimanche, 21 décembre 2014
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