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lundi, 23 mai 2016

Maquignonnage...

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Je l’écoute.
Mais il est en train d’essayer de se vendre cet idiot !
Ou de m’acheter…
Il me vante tout ce qu’on aurait si je veux l’épouser.
Je fais un gros effort pour lui sembler attentive mais je ne vais pas pouvoir tenir longtemps.
Franchement, ce type échappé d’un chromo de cuisine prétend me mettre dans son lit !
Comme si je ne le connaissais pas.
Je sais qu’il a quelques terres de l’autre côté du pont mais rien d’intéressant.
Moins que les miennes, en tous cas.
Les siennes sont inondées tous les ans et on a du mal a en tirer l’avoine du cheval qui les laboure.
Et puis, ce qui me dérange, ce n’est pas qu’il veuille me faire des enfants.
Là il rêve ! Il ne me les fera pas, je ne le laisserai pas s’approcher de moi et encore moins me toucher.
Non, ce qui me dérange, et même me vexe, c’est qu’il me prenne pour une imbécile.
Avec son air de maquignon !
Avec les doigts qui miment les billets qu’on compte !
À voir le geste je me demande s’il me prend pour une oie ou pour une grue…
Je garde l’air sérieux quand même, je le regarde avec intérêt.
Juste pour voir jusqu’où il est prêt à aller.
J’aimerais bien qu’il me propose quelque chose d’inconvenant maintenant, là tout de suite car la plus mauvaise langue du département arrive sur le pont.
Juste pour le gifler en le traitant de malotru devant quelqu’un qui répandra la nouvelle dans le bourg avant ce soir.
Oui, ça me plairait bien.
Mon regard se fait de plus en plus intéressé.
Je vais l’adoucir encore.
Tel je le connais ça devrait marcher.
Je sens déjà mes doigts picoter...

samedi, 21 mai 2016

Mieux vaut une bougie intelligente que deux concierges…

Je vous ai déjà parlé de mon père ?
Ce héros au sourire si doux.
Et à la dent si dure…
Cousine adorée m’a envoyé une photo de mon père.
J’ai cru au premier regard sur mon téléphone qu’il portait cet imperméable gris que je connais bien.
Cet imperméable qu’il portait quand il est rentré un soir.
Ce treize juillet 1956 où il est arrivé tanguant puis vomissant sur le lino de la chambre.
C’était la veille du dernier défilé où j’ai vu des spahis sur des chameaux.
Le lendemain il nous avait emmené, ma sœur cadette et moi au défilé, silencieux et un peu « péteux ».
Le coup du « Ma poule, c’est ce foutu Claquesin qui m’a rendu malade » avait marché moyen.
De fait ça n’avait pas marché du tout…
J’ai encore dans les yeux cet imperméable gris assez épais et plutôt rêche.
Alors j’ai eu un doute, j’ai agrandi la photo noir et blanc et j’ai vu que ce n’était pas cet imperméable qu’il portait mais un manteau.
Un manteau jaune assez épais.
Pas jaune poussin mais pas non plus ocre.
Entre les deux.
C’était un manteau en poil de chameau qu’il portait l’hiver en pestant qu’il pesait une tonne.
Mais il était doux, ce manteau.
Et puis il allait bien à mon père.
Mon père avait plein de qualités et quelques défauts.
Ces quelques défauts, dont celui de préférer perdre un ami plutôt que rater un bon mot, lui valait régulièrement des engueulades de ma mère.
Il avait aussi de grandes mains et avait un talent qui m’éblouissait : Il pouvait plier la dernière phalange de chaque doigt et garder la main à plat devant lui.
Je n’ai jamais réussi.
Ce manteau le faisait plus large qu’il n’était et personne ne l’embêtait.
Même pas le fils de la concierge.
Un soir, ma mère a eu l’attention attirée par des vociférations venant du bougnat du rez-de-chaussée et a dit à mon père qui venait d’entrer « Lemmy, va donc voir ce qui se passe, je crois bien avoir entendu le père M. crier comme si on allait le battre. »
Mon père est redescendu, je l’ai suivi avant que ma mère n’ait le temps de crier « Non non non ! Tu restes là, toi ! »
Arrivés au rez-de-chaussée, le fils de la concierge s’était mis en tête d’empêcher monsieur M., le voisin du dessous, de sortir son vélo de la courette et menaçait de confisquer le vélo.
Monsieur M. était un homme petit maigrelet avec une mini-moustache qui n’osait pas dire grand’ chose.
Il a soupiré de soulagement en voyant arriver mon père.
Mon père a demandé ce qui se passait et a dit
- Le vélo, il me l’a donné, il est à moi maintenant. 
Le fils de la concierge à dit :
- Vous n’avez pas le droit de le mettre dans ma cour.
J’attendais Zorro, ce fut John Wayne.
- Ben je l’ai mis et je vais le reprendre et je le remettrai tout à l’heure… La cour ne vous appartient pas.
- Ah mais si !
- Bon je vais chercher le vélo.
- Vous ne sortirez pas ce vélo de MA cour !
A crié le fils de la concierge.
Mon père, qui était encore un peu vif de caractère à l’époque a dit doucement entre ses dents :
- Vous pariez combien que vous sortez avant le vélo ?
J’ai eu un peu peur parce que les grands quand ils se battent ils se font mal mais le fils du concierge a dit :
- Bon mais normalement on n’a pas le droit…
Mon père a rendu le vélo à monsieur M. et a dit au fils du concierge :
- Bon, on va boire un jus chez le père C. ?
Ça sert vachement un manteau qui vous élargit…

vendredi, 20 mai 2016

Amour, amour... Quand tu nous tiens. Ânes que nous sommes…

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J’ai vu « Amour » de Haneke, hier soir.
Alors je vais vous parler dAmour...
Je suis indécis.
D’autant qu’Heure-Bleue a décrété d’entrée que ça la saoulait.
Elle a menacé de téléphoner à l’Ours pour lui dire « ton père, décidément, il aime vraiment les trucs chiants »
Comme je voulais voir le film et qu’elle ne me regardait pas, j’ai gardé pour moi ce qui m’est venu illico à l’esprit.
Alors, « Amour »…
Je suis indécis, partagé.
Une chose est sûre, c’est extrêmement bien fait.
Une autre chose me semble évidente, s’il n’y avait pas eu ces deux monstres sacrés que sont Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant, la palme serait passée sous le nez d’Haneke.
J’ai été frappé d’entrée par un détail : La voix d’Emmanuelle Riva.
Elle a à peine changé depuis « Hiroshima mon amour » et « Kapo ».
Rien que pour ça, ça valait le coup de regarder « Amour ».
Un film qui vous retire cinquante deux ans, c’est pas rien.
En revanche, Jean-Louis Trintignant n’a plus du tout la voix de « Ma nuit chez Maud » ni de « Un homme et une femme »…
On entend bien que l’un a clopé et pas l’autre…
Cela dit, j’ai eu au début l’impression que ce film était une escroquerie.
Trop de détails relevaient du procédé.
Et je n’aime pas ces « plans » si l’on peut dire, de l’écran noir pendant une dizaine de secondes.
A part bouffer de la pellicule, je ne vois pas…
Mais je ne suis pas un intellectuel.
Puis je me suis laissé embarquer et si j’ai regretté qu’il n’y ait pas eu l’aisance de Rohmer pour dire les choses, c’est quand même pas mal.
Un moment, Heure-Bleue a relevé le nez de ce qu’elle faisait pour me dire « Ils ont fait beaucoup de théâtre et ça s’entend. »
J’ai cru qu’elle avait mis le doigt dessus, Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant ne « dialoguaient » pas comme au cinéma, ils « disaient » comme au théâtre.
Je me suis dit qu’Haneke, qui n’est pas né de la dernière pluie, le savait et le voulait…
Puis j’ai suivi l’enfermement de ce couple.
De moins en moins couple et de plus en plus enfermé.
Jusqu’à la mort de la femme.
Dont je ne sais s’il l’a tuée pour la délivrer, se délivrer, ne garder d’elle que le souvenir de ce qu’elle fut .
Amour , altruisme ou égoïsme ?
Mais bon, en y réfléchissant un peu, je me suis dit aussi que, l’amour est peut-être l’altruisme ultime, c'est-à-dire la forme la plus achevée et la plus efficace de l’égoïsme.
En plus, Haneke est un dégonflé qui s’est défaussé de la fin sur le spectateur…

jeudi, 19 mai 2016

Rage dedans…

Ça a mal commencé.
Mais on a bien ri après, rien qu’à repenser à la tête de l’architecte
.
L’expert est venu accompagné de l’architecte, d’un type du bâtiment et de la dame du syndic.
L’architecte fait partie de ceux qu’on devrait condamner à vivre dans ce qu’ils conçoivent comme bâtiment.
Ou pire : En face.
Et puis, comme il est architecte il est sûr qu’il peut toiser l’habitant de son œuvre.
Hélas, trois fois hélas, la réalité est cruelle et les faits malheureusement têtus.
Heure-Bleue commente la longue série de problèmes rencontrés auprès de la représentante du syndic qui est une femme charmante.
L’expert, lui, est quelqu’un que nous connaissons pour l’avoir déjà rencontré.
Il est affable et a de la mémoire car il me remercie à voix basse de lui avoir donné lors de sa dernière visite la méthode pour calculer facilement un angle avec une calculette et un double-décimètre.
L’architecte, lui, est en posture de combattant.
C’est un homme qui est pourtant censé gagner sa croûte en convaincant le client que ce qu’il fait est une merveille et que par conséquent il sait qu’on n’attrape pas les mouche avec du vinaigre.
Ben non !
Il commence par me demander ce qui cloche.
Je lui montre la champignonnière qui a élu domicile sur le mur qui jouxte la baie vitrée.
Je lui parle de la dérive de la fenêtre, malheureusement équipée de charnières pour huisserie en PVC alors que c’est une huisserie aluminium.
Ce brave garçon me jette, plein de mépris :
- Qu’est-ce qui vous permet de dire ça ? De quelles connaissances disposez vous ?
- Ben, je ne suis pas architecte ni menuisier…
Un sourire carnassier commence à fleurir sur le visage de l’architecte.
- Alors ? Qu’est-ce qui vous fait croire que ce ne sont pas les bonnes pièces ? Hmmm ?
- Oh, je ne jurerais pas que je serais capable de monter une fenêtre…
- Vous voyez bien, je me demande pourquoi vous dites ça.
- Eh bien, je ne suis pas architecte, vous disais-je mais ingénieur, j’ai une assez bonne idée des lois de la mécanique.
- Aaahh…
- Si les avions étaient fabriqués comme ça, vous monteriez dedans ?
- Euh…
Il m’a haï pile poil à ce moment là et m’a expliqué longuement qu’il passait beaucoup de temps à contrôler mais qu’il ne pouvait pas surveiller tout le monde.
Sa haine est devenue inexpiable quand je lui ai demandé si cet immeuble avait été réellement « recetté ».
Heure-Bleue lui a dit tout ce qui clochait et que l’immeuble avait été « fait à vue de nez, comme le bon dieu a fait les bossus ».
Il l’a haïe elle aussi.
Il m’a dit que le responsable du bâtiment était le promoteur, pas lui.
L’expert buvait du petit lait.
Il a pensé, lui, à demander une bassine d’eau et à vérifier un truc que l’architecte aurait dû vérifier lui-même.
Du coup il a achevé l’architecte en lui signalant que la pente d’évacuation des eaux pluviales était dans le mauvais sens et favorisait les infiltrations, qu’il allait falloir déposer toute la baie et faire quelques travaux de maçonnerie.
C’est le problème des gens comme ça, ça pense que les retraités sont des analphabètes craintifs.
Ça a oublié que les « petit vieux soixantehuitards » ça ne se laisse pas impressionner si facilement.
Même par un architecte.

mercredi, 18 mai 2016

Ah la la, sacré cœur, va !

On avait rendez-vous avec une amie bien connue des blogueurs de ma liste de favoris pour ses images.
Nous devions, elle, Heure-Bleue et moi, nous retrouver à la brasserie « Le Barbès ».
En face du « Louxor ».
Descendus du 54 à « Barbès-Rochechouart », nous avons traversé le boulevard et nous sommes arrêtés devant le « Louxor », aussi beau mais plus propre que quand j’étais petit.
Je n’ai pas pu résister.
Pendant que la lumière de mes jours regardait ce qui était affiché, je suis entré.
La caisse n’était plus au même endroit.
Un « vieux » papotait avec la jeune caissière.
Elle l’écoutait patiemment avec un peu d’affection dans le regard.
Elle m’a demandé ce que je voulais.
- Les places, quand c’est au premier ou au deuxième balcon, c’est le même prix ?
- Oui monsieur…
Le vieux a laissé échappé un petit rire.
La caissière a dit :
- Ah oui ! On m’a dit que plus on était en haut, moins c’était cher !
- Ah ! Vous voyez !
- Oui, mais ça, c’est ma grand’ mère qui me l’a dit, maintenant c’est le même prix partout…
Le « vieux » et moi on s’est regardé, on a haussé les épaules et je suis ressorti.
Nous nous sommes engagés dans le boulevard Barbès, Heure-Bleue voulait voir ce qu’était devenue la rue de la Goutte d’Or.
On nous a proposé, sur quelques dizaines de mètres, des « Marlboro » de contrebande, de nous désenvoûter, tout ça.
Heure-Bleue m’a serré le bras plus fort que d’habitude, inquiète, ça m’a rappelé quelque chose qui ne date pas d’hier sur ce boulevard.
Heure-Bleue, qui a l’impression de tomber dans un coupe-gorge dès qu’on s’éloigne du parc Monceau, a renoncé et nous sommes entrés à la brasserie « Le Barbès ».
On s’est installé devant la vitrine qui fait face à la sortie du métro, « ligne 2 » d’où devait normalement sortir notre amie.
Ce qui arriva.
Après un autre café, nous sommes sortis, soulagés de quitter un endroit où la sonorisation empêche d’entendre ce que disent ceux avec qui on parle.
Nous sommes allés tout de même rue de la Goutte d’Or.
Puis, nous avons remonté le boulevard de Rochechouart jusqu’à la rue d’Orsel et nous sommes allés nous asseoir sur un banc du Sacré-Cœur.
Je ne me rappelle pas quand le sable a été partout remplacé par de l’asphalte mais aujourd’hui, les allées ressemblent toutes à des autoroutes.
Des choses subsistent néanmoins, une boutique de souvenirs sur la place Saint Pierre, face au jardin, n’a pas changé depuis que je suis entré en sixième.
Si, peut-être le tenancier.
Mais pas le store, toujours jaune, seule a disparu la mention « Pellicules Kodak »…
Nous avons écouté, puis « accompagné », sauf Heure-Bleue qui chante faux, « La vie en rose », « J’suis snob » et « Les roses blanches ».
Nous avons reculé de soixante ans ou plus pendant un moment.
Les unes n’avaient plus mal au dos ou aux pieds, je n’avais même plus mal au genou droit.
Ce fut vraiment une chouette journée, avec juste ce qu’il faut de souvenirs pour faire un petit peu mal aux âmes, vous savez, cette sensation bizarre dont ne sait pas bien si on a mal ou si c’est du bonheur.
Mais il y avait assez de joie pour que ça passe très bien.
On est retourné boire un café rue Ronsard, à la « Halle Saint Pierre » où ils ont une librairie super chouette, pleine de livres de poésie.
Je n’aime toujours pas Michaud mais bon…
Pour être sûr que ça passe encore mieux, j’ai fait des « spaghetti alla carbonara » en rentrant.
Vraiment chouette, cet après-midi.
Si si, lectrices chéries, je vous assure, vraiment chouette…