mardi, 02 mai 2017
Les gens…
En attendant dimanche prochain et son choix qui ne devrait pas être cornélien, comme Heure-Bleue je me rappelle certaines gens qui m’ont frappé.
Pas le facteur qui levait si bien le coude que Stéphane Collaro était allé faire un reportage idiot et cruel au café en face de chez nous.
Collaro avait trouvé drôle de l’interroger après lui avoir fait ingurgiter une quantité phénoménale de rosé.
Comme c’était gratuit, le facteur s’en était donné à cœur joie…
Ce n’était pas de ce facteur que j’allais vous parler mais d’une vieille dame.
Elle était folle et il lui arrivait parfois de se faire raccompagner chez elle par ceux qui la croisaient, nue et échevelée en pleine rue.
Tous la connaissaient et la plaignaient.
Elle passait régulièrement chez ma libraire préférée.
Elle lui tendait une vieille photo en noir et blanc et demandait « Vous pourriez me faire faire un tirage, s’il vous plaît ? »
Après un soupir elle ajoutait « J’attends mes enfants vous savez, l’autre jour les Allemands sont venus les chercher… Je les attends »
Puis elle partait.
Parfois elle venait rechercher le tirage et disait « Non, ils ne sont toujours pas revenus… Mais ils vont revenir...»
Elle ne venait pas toujours chercher le tirage noir et blanc mais la lumière de mes jours l’a toujours fait faire.
Et quand elle faisait faire un tirage, on se disait « On ne va pas tarder à la trouver dans la rue en pleine nuit en train d’errer… »
C’est aussi à cause de ça que je ne manque jamais de voter.
Il y a, comme ça, des « détails » qui marquent plus que d’autres…
10:27 | Commentaires (14)
lundi, 01 mai 2017
Mes champs en mal d’aurore…
Je sais que ça ne tombe pas tout à fait juste, Mab…

Il est beau, ce champ.
Bon sang qu’il est beau !
Pourtant il a quelque chose de triste, je le sens bien.
Ça fait déjà plusieurs heures qu’assis sur ma souche je regarde ce tracteur préparer la prochaine récolte et je ne parviens pas à me débarrasser de cette impression de manque qui me serre la gorge.
Et d’un coup ça me revient.
Je le connais depuis toujours, ce champ.
Depuis que je suis petit je le regarde.
Seulement avant j’étais assis « en tailleur » à côté de l’arbre sur la souche duquel je suis assis aujourd’hui.
Avant je crois que l’herbe était plus verte.
Non, je suis sûr qu’elle était plus verte.
Je suis même sûr qu’il faisait toujours beau.
Je sais aussi que le monde était plus beau.
D’ailleurs, j’étais heureux avant.
Les choses étaient stables.
Tout était mieux avant.
Même l’air sentait bon.
J’attendais que ma grand’ mère m’appelle pour « mon quatre heures ».
Même ce pain était le meilleur que j’aie jamais mangé.
Le tracteur approche et s’arrête.
Le conducteur, un gamin d’une trentaine d’années, en descend et s’approche du fossé qui borde le champ.
Il arrose l’herbe et se rebraguette puis il me voit.
- Ça va ? Il fait beau hein ?
- Moins qu’avant, avant il faisait toujours beau avant…
- Mais non, juste vous étiez jeune, c’est tout.
- Non non, j’en suis sûr, c’était mieux !
- Pfff… Moi aussi quand j’étais petit il faisait toujours beau…
Il retourne vers son tracteur.
Je l’entends grommeler « non mais quel vieux con… »
Il a peut-être raison, c’est peut-être juste parce que j’étais jeune…
09:11 | Commentaires (12)

