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vendredi, 30 septembre 2022

139ème devoir de Lakevio du Goût

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D’après vous, qu’est-ce qui m’a poussé, à voir cette toile, à vous proposer un devoir ?
Oui, comme la semaine dernière, c’est une toile d’Émile Friant.
Celle-ci m’a particulièrement interpellé.
Pourquoi ?
Je vous le dirai lundi.
Mais vous ? Que vous a-t-elle inspiré ?
Ce qui serait vraiment bien, c’est que vous commenciez votre explication par :
« J’arrive tout couvert encore de rosée »
Et que vous la finissiez par :
« Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches. »

jeudi, 29 septembre 2022

Mon père, ce héros au sourire si doux.

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Et aux réflexions parfois si cruelles…
Comme vous le subodoriez peut-être, lectrices chéries, le couple de mes parents allait cahin-caha.
Cahin quand l’un voyait bien l’autre dans le rôle d’Abel.
Rôle assez bref si vous vous rappelez cette sombre histoire qui survint dans la Genèse. Caha car il était rare que tout allât bien dans un logement exigu où six personnes devaient cohabiter.
Là où ça se passait le moins bien, c’était les samedis et les dimanches d’hiver. Ma mère était frileuse comme une vieille chatte et mon père supportait mal que l’appartement « sentît la loutre » selon son expression.
Ça entraînait immanquablement de nombreuses disputes que ma mère savait lancer plutôt astucieusement.
Elle savait pouvoir compter sur la réflexion désagréable qui lancerait mon père.
Elle oubliait souvent que sa réflexion permettrait à mon père de faire montre de l’humour détestable dont il savait faire preuve quand ma mère le titillait un peu trop. Ça marchait à tous les coups, elle sortait perdante de la joute et ils se disputaient jusqu’à ce que le soufflé retombât et qu’arrive l’heure de préparer le repas ou celle des informations à la radio.
Un de ces samedis de février me revient où ma mère s’était levée du pied gauche.
Il faisait froid dans la maison, le poêle s’était, comme toujours, éteint vers le milieu de la nuit.
Mon père, qui travaillait comme un esclave, devait encore aller faire « des heures sup’ » histoire d’allonger la dose de margarine dans les pâtes.
Notre drame ? Personne n’aimait les épinards et le beurre était trop cher.
Ce matin-là, ma mère lui demanda d’allumer le poêle avant de partir.
Il aurait dû se méfier, mes sœurs et moi avions depuis longtemps remarqué que, quand notre mère était en forme, elle appelait mon père « Lemmy ».
Quand tout semblait aller pour le mieux entre eux, elle l’appelait « Chéri ».
Hélas, quand elle était « mal virée » elle l’appelait « Gaby ».
Ce fut donc un jour néfaste qui commença par :
- Gaby !
 Mon père, qui la connaissait aussi bien que nous, savait que « Gaby » ça voulait dire emmerdements à brève échéance.
Il en profitait parce qu’il savait aussi que quand il l’appelait « ma poule », elle détestait ça et le piétinerait volontiers.
- Oui ma poule ?
Ça ne rata pas. Profitant d’heureuses dispositions pour la chamaillerie elle jeta :
- Rhoouuuu ! Je te giflerais quand tu m'appelles « ma poule » je déteste ça !
- Oui ma poule…
- Il faut rallumer le poêle, les enfants vont attraper la crève !
Il s’y mit, froissa deux ou trois feuilles de « Paris Presse-L’intransigeant », mit une poignée de petit bois par-dessus et la séance commença :
- Fais attention en retirant le bac à cendres, Gaby ! Tu vas en mettre partout.
Silence paternel, pas même un soupir.
Il prit le bac à cendre et le versa dans la poubelle en ne soulevant qu’un peu de poussière.
Je le regardai attentivement car, comme tous les petits garçons, j’aimais bien l’idée de jouer avec le feu.
Il remit le bac à cendre à sa place, ouvrit la gueule du poêle, prit le seau à charbon et en versa un peu sur le petit bois.
«  Aaaaattttentiooonnn !!! » Cria ma mère, « tu vas tout salir !!! »
- Mais non ma poule…
- Je te connais comme si je t’avais fait ! Tu ne sais pas faire le feu !
J’ai senti que c’est là que ça allait commencer car mon père allumait souvent le feu, et très bien.
Il releva la tête.
- Ouais, ben à propos de feu, il y a des jours où je comprends le docteur Petiot…
- Justement, si tu étais docteur, on ne serait pas là, dans ce taudis.
Quand on en arrivait là, nous savions tous que ma mère avait perdu la bagarre qu’elle avait elle-même lancée.
- Si j’avais été médecin, je ne t’aurais pas croisée, ma poule…
Et il se mit à chantonner l’air de « Comment épouser un millionnaire ».
Ma mère est partie, vexée, vers le boyau qui servait de cuisine en pestant « j’aurais dû me marier avec un gendarme, au moins ils sont bien logés ! »
Puis mon père est parti travailler…
Il savait, en dehors de chercher des histoires à ma mère, faire des tas de choses qui intéressaient les enfants.
Quelques années plus tard, nous saurions même exactement quand elle lancerait la mauvaise réflexion, celle qu’attendait mon père, confiant dans le caractère routinier de ma mère.

mercredi, 28 septembre 2022

Ô Rom, unique objet de mon ressentiment…

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Mais non, ce n’est pas du racisme ni une forme quelconque de xénophobie.
Je serais mal placé pour me livrer à ce genre de bêtise, une grande part de ma vie de forçat ayant consisté en de nombreux voyages dans des pays par essence étrangers vu que les autres pays ne sont pas la France.
Deux éléments motivent ma note d’aujourd’hui.
D’abord un articulet qui m’a sauté à la figure hier, disant que la France est un pays raciste.
Généralisation évidemment hâtive et qui pourrait s’appliquer au monde entier car chaque pays comporte son lot de racistes et de xénophobes, marque de la crainte courante de ce qu’on ignore sans y réfléchir plus avant.
Le plus surprenant de l’articulet étant que le « racisme » majoritaire en France, contrairement aux espoirs de l’extrême droite, ne concerne pas « les immigrés », « les Noirs » ni même « les Arabes ».
Non, l’étranger le plus détesté en France est le Rom.
Une longue habitude des transports publics parisiens et mon affection pour les quartiers qui m’ont vu grandir, m’a fait croiser suffisamment de ces Roms pour m’aider à comprendre le sentiment, si ce n’est de détestation, du moins celui de méfiance à leur égard.
Hélas, ma confiance innée en l’humanité, qui inclut donc les Roms, m’a coûté trois téléphones, deux cartes Visa et le portefeuille plein de cartes de crédit de la lumière de mes jours.
Pourquoi vous parlé-je ce ça aujourd’hui ?
Parce que la note d’Adrienne ce matin a éveillé quelque chose chez moi.
Sa note comporte une remarque en roumain.
Et alors ? Vous interrogez-vous lectrices chéries.
Eh bien, sa réflexion m’a rappelé une pancarte lue sur la vitrine d’une boutique d’achat de bijoux à Tel-Aviv « Aici vorbim romaneste », soit « Ici on parle roumain ».
Je me suis dit alors « si on voyait cette pancarte dans une vitrine d’achat de bijoux à Paris, il y entrerait plus de policiers que de Roms… »
Alors qu’en Israël, ce genre de chose ne surprend personne car nombre de boutiquiers manipulent au moins quatre alphabets mais n’allez pas croire qu’Israël est un vivier d’intellectuels de haut niveau.
Bien sûr, comme partout il y en a.
La pratique de la circulation dans les rues de Tel-Aviv ou Jérusalem vous convainc rapidement que ça ne concerne, comme partout ailleurs, que peu de monde…

lundi, 26 septembre 2022

Devoir de Lakevio du Goût No138

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Cette toile d’Émile Friant m’a frappé car elle me dit quelque chose.
Mais quoi ?
La discussion semble animée autour de ce pichet de vin.
Sur quoi peut-elle bien porter ?
À lundi…

Ça me rappelle quelque chose.
À Nina aussi, je suppose...
Non, ce n’est pas l’Algérie où je n’ai jamais mis les pieds.
C’est plutôt du côté d’Albi, là où ma grand’ mère paternelle vivait avec ses autres enfants.
Le seul qui s’était exilé à Paris était mon père.
Il était arrivé bien avant les autres…
De fait, cette toile me rappelle les discussions sans fin avec des cousins, les Martinez, les G. de G. très fortunés et très « collet monté » mais qui se « dessalaient » en présence des « autres ».
Tous, même mon père reprenaient cet accent et ces mots qu’il m’a fallu traduire.
Comme « mais entention ho ! » pour « mais attention hein ! »
C’était une langue à part, qu’ils appelaient selon leur état de fortune « sabir » ou « pataouète ».
Mon père, qui la manipulait parfaitement quand les circonstances s’y prêtaient, m’en traduisait certaines tournures.
D’autres, il les gardait pour lui, refusant d’enseigner « des gros mots » à son fils.
Comme « La purée de nous otres ! ».
D’autres passaient plus volontiers quand on arrivait à « attraper » la prononciation adéquate.
« Tchi a ontondu, hein ? » pour « tu m’écoutes, hein ? » quand un ordre était signifié, avec de « on » prononcé curieusement que je n’ai entendu que chez certains juifs d’Afrique du Nord ou certains Arabes d’Algérie et qui pouvait aussi bien remplacer le « en » que le « in ».
Le « juif d’Afrique du Nord » étant circonscrit à deux bleds, Constantine et El Kantara pour les uns, Oran et Mostaganem pour les autres.
Mon père prononçait parfaitement ce son « on » étrange que je n’ai entendu plus tard que chez un Tunisien avec qui j’ai travaillé et qui « causait pied-noir » quand il était énervé.
C’était de fait plus une langue qu’un accent qui pouvait aussi bien enfanter des phrases comme « Qu’est-ce que tchi as oncore envonté ! » que « Tchu m’as bien ontondu ! »
Le tout agrémenté de « Moi j’te l’dis » pour appuyer ou pire, de « C’est vré c’que j’dis » qui annonçait un arrangement avec la vérité…
« La purée de nous otres ! Qu’est-ce qu’y m'fait r’monter ce tableau ! J’te jure ! »
Avec ce « u » prononcé entre « u » et « i »...

samedi, 24 septembre 2022

Jour de repas sage...

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Ça fait longtemps que nous en avons envie.
Seulement voilà, le Covid-19 nous empêche depuis plus de deux ans d’aller manger un « döner » là où il est vraiment bon.
D’un commun accord, un ami, Heure-Bleue et moi avons décidé de faire un couscous pour nous consoler.
Un couscous pour trois, ça fait bizarre alors nous avons invité une autre amie à le partager.
Pour me remonter le moral avant une séance d’épluchage de légumes à décourager un marmiton, je vais plutôt vous parler de « döner ».
Heure-Bleue m’a précisé souventes fois « Je ne peux pas manger ce genre de chose autrement que sur une assiette » car, ajoute-t-elle « sinon je ne sais pas manger élégamment ».
Elle a oublié qu’avant la découverte de ce « döner » de la rue des Petites Écuries, celui de la rue des Batignolles nous voyait déjeuner comme des clochards sur un banc de la place où se trouve l’église Sainte Marie des Batignolles.
Il faut néanmoins que je vous le dise : Il est impossible de manger un sandwich quelconque élégamment.
Que ce soit un « sec-beurre-cornichons » ou un döner.
Bon, d’accord, il y a pire que le döner.
La « pita-houmous-schwarma » par exemple qui vous flanque des gouttelettes de houmous pleines d’huile d’olive sur le plastron pendant que vous essayez vainement de rattraper le bout de poulet qui vient d’arriver sur votre pantalon, histoire d’y laisser une autre tache…
Pour le döner, je peux néanmoins dispenser quelques lumières, aidé par une longue expérience qui m’a coûté un bras en pressing.
D’abord, tout d’abord, éviter de faire comme Heure-Bleue qui tient absolument, malgré les objurgations de votre Goût préféré, à commencer par mordre dans cette merveille par le milieu.
Erreur ! Tragique erreur qui voit chaque fois se réaliser la prophétie de votre serviteur.
La déformation du petit pain laisse échapper de chaque côté des lèvres bien-aimées un tas de petits morceaux de veau.
Veau délicieux lui aussi mais qui sera irrémédiablement perdu.
Il finira, après avoir constellé de taches de gras le chemisier de la lumière de mes jours et un bref passage par le devant de sa jupe, sur le sol.
Parfois, avant d’arriver per terre, un orphelin décorera tristement la chaussure d’Heure-Bleue.
Il convient donc tout d’abord de faire attention et de se pencher sur sa serviette de papier.
Surtout ne pas tenter d’amener à sa bouche cet échafaudage instable.
Ensuite, tourner la tête pour commencer, en ayant pris grand soin de maintenir le döner aussi parfaitement horizontal que possible, de commencer à mordre dedans par un bout !
Et continuer, un peu comme si vous faisiez un zig-zag vertical, de façon à conserver un flanc aussi droit que possible.
Reste un dernier piège, hélas.
Non, vous n’échapperez pas à la rondelle d’oignon, vicieusement planquée qui, accrochée à vos dents lors d’une morsure enthousiaste, entraînera la moitié du reste de viande hors du petit pain.
C’est là que le conseil de se pencher sur sa serviette prend tout son sens.
Vous pourrez récupérer, avec les doigts certes,  le veau qui vous narguera sur le morceau de sopalin.
Ne lui en veuillez pas ! Pensez une seconde à ce qui serait arrivé si, dans un souci d’élégance masticatoire, vous aviez alors amené le döner jusqu’à ta bouche. Bien droite sur votre chaise comme votre maman vous l’a seriné toute votre enfance.
Ce « Tiens toi droite ! » qui a gâché vos repas pendant des années.
Imaginez l’effet de l’avalanche de petits bouts de veau délicieux que non seulement vous ne pourriez pas déguster mais qui, vicieusement, auraient pourri vos habits.
Et ne me cherchez pas d’histoires car celui qui serait capable d’avancer des arguments irréfutables pour que j’écrive « aurait pourri » plutôt que « auraient pourri » est prié de se faire connaître et de démontrer que le sujet est « l’avalanche » plutôt que « petits bouts de veau » non mais...

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