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mercredi, 12 août 2015

Des « Oh ! » et des bas…

Alors vous voyez, lectrices chéries, qui connaissez Paris où on arrive quand on entre dans le jardin du Sacré-Cœur, non, le Square Willette, m… ! Le square Louise Michel, par la rue Muller.
Eh bien, la première chose qu’on fait, c’est se taper des escaliers.
Et quels escaliers…
Pauv’ miséreux que les ailes des moulins, tout ça...
Donc, avec un regard de regret vers la vitrine de cette boulangerie dont je vous ai déjà parlé, je suivais ma grande sœur qui me tirait par la main.
On montait cet escalier et on prenait l’allée qui nous amenait à un endroit qui ne nous plaisait pas trop.
On l’appelait, comme tous les gens du coin, « le Parvis du Sacré-Cœur ».
Plus tard j’ai vu que ça s’appelait « rue du Cardinal Dubois ».
Ma sœur n’aimait pas trop passer là parce qu’il y avait beaucoup de monde.
Ma grande sœur était mignonne et il y avait plein de garçons, dont beaucoup étaient de ces Arabes dont il fallait se méfier.
Alors elle craignait d’être draguée par un qui ne lui plairait pas.
Elle détestait ça, et une fois, que je vous raconterai peut-être, elle fut obligée de coller une gifle à un garçon trop entreprenant.
Je sais qu’elle a fini par être draguée par celui qui allait lui valoir une tarte pour cause de paire de bas.
On arrivait sur cette place où il ne passait que rarement une voiture parce qu’elle menait là où ma sœur voulait aller.
On traversait le parvis et on prenait la rue qui longeait la basilique jusqu’à la rue du Chevalier de la Barre. Là on traînait lentement. Ma sœur jetait des coups d’œil furtifs en croyant que je ne la voyais pas. On passait derrière le Sacré-Cœur jusqu’à la rue de la Bonne. Là, ça devenait plus intéressant, ma sœur me tirait plus lentement par la main et même, finissait par me lâcher la main.
Libre ! J’étais libre !
Et c’était vachement bien parce qu’au bout, quand on arrivait au tournant, là où la rue de la Bonne devient la rue Saint-Vincent, eh bien il y avait une rambarde.
Et cette rambarde nous empêchait de tomber dans un immense ravin verdoyant.
Il y avait encore en bas, au fond à gauche de ce ravin, une ferme.
Oui lectrices chéries, il y avait une ferme !
Et même un coq que j'ai entendu chanter !
Alors, arrivés là, on avançait encore un peu et on s’accoudait pour regarder l’herbe, les arbres et les poules.
Ma sœur, une fois arrivés là, me laissait admirer le spectacle tandis qu’elle se mettait parfois à soupirer.
J’étais petit mais je savais bien qu’elle était déçue, qu’elle s’attendait à voir quelqu’un qui n’était pas venu.
Alors, au bout d’un moment que j’avais passé à rêvasser en regardant dans ce ravin magique, ma grande sœur poussait un dernier soupir, tendait le bras vers moi et me demandait « on rentre ? » d’une voix un peu triste.
Alors je lui prenais la main et on redescendait vers la maison en prenant les escaliers de la rue du Mont-Cenis.
On descendait toute la butte jusqu’en bas. Ma grande sœur me serrait la main au carrefour des rues Custine, Caulaincourt et du Mont-Cenis parce que là, la circulation, quoique maigre n’était plus l’absence de voitures de la butte Montmartre.
Plus on approchait de la mairie, à Jules Joffrin, plus ma sœur me serrait la main et plus son pas se faisait lent.
Arrivés place Championnet c’est moi qui l’ai tirée pour qu’on traverse la place.
Et ne me dites pas qu’elle ne s’appelle pas « place Championnet », je le sais.
Il fallait bien la traverser quand même pour aller chez Galy.
Je lui avais dit, moi. Je n’avais pas oublié qu’il fallait acheter un pain, moi.
C’est un peu plus tard, un peu avant que n’arrive cette histoire de paire de bas, qu’elle s’est mise à avoir l’air moins triste. Pas triste du tout même.
Mais là, je n’ai pas souvenir qu’elle m’ait emmené…

Commentaires

Faut lutter tout de même pour être une fille!
J'aime bien qu'elle ait eu ce petit frère ta soeur, tu lui auras simplifié la lutte.

Écrit par : Lumières&papiers | mercredi, 12 août 2015

Chez Atget j'ai trouvé la rue du Chevalier-de-la-barre, la rue Saint-Vincent mais je ne pense pas que ce soit la ferme que je vois, puis Atget c'était 1899...des siècles avant toi.

Écrit par : Lumières&papiers | mercredi, 12 août 2015

une ferme? j'aurais voulu voir ça... quand aux moulins, très belle surprise lorsque je suis tombée dessus la première fois. Ma mère qui était allé x fois à Paris ne les avait encore jamais vu elle. Et avec moi la first, elle les voit... faut dire que je l'ai fait marcher et marcher...

Écrit par : pucca | mercredi, 12 août 2015

Vive les collants, oui je sais les hommes préfèrent les bas.

Écrit par : mab | mercredi, 12 août 2015

Jolie balade.

Écrit par : Berthoise | mercredi, 12 août 2015

Ce quartier est tellement riche en souvenirs pour toi ! Je comprends que tu aimes l'arpenter.

Écrit par : lakevio | mercredi, 12 août 2015

toujours pareil : je ne connais pas Paris ni ce quartier... mais que de souvenirs pour toi Je me demande comment tu fais pour te rappeler tous les petits détails! Chez moi, quand-même, j'avais souvent la colère en voyant tous les avantages qu'avaient mes frères. Moi, je devais tricher le lus possible pour profiter de moments de liberté! Je crois que ce sont les seules fois où j'ai su mentir !

Écrit par : emiliacelina | mercredi, 12 août 2015

Dans les années 50 il y avait encore une ferme là haut? t'as pas des photos? Franchement? J'adore tes souvenirs...continue à nous charmer...bisous.

Écrit par : esthériane, mialjo | mercredi, 12 août 2015

Je viens de te répondre.

Écrit par : Berthoise | jeudi, 13 août 2015

jolie complicité entre vous

Écrit par : liliplume | jeudi, 13 août 2015

Suis un peu paumée avec tes rues que je ne connais pas... mais j'aime bien l'idée de votre promenade main dans la main (qui ne semblait pas t'enchanter plus que ça d'ailleurs) et le moment libérateur de la main lâchée...

Écrit par : Ysa | jeudi, 13 août 2015

Les commentaires sont fermés.