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samedi, 09 février 2019

Le ver de trop...

Ouais, bon, je sais…

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Hier nous sommes allés au cimetière du Montparnasse et nous avons bien ri.
Heure-Bleue a un talent inné pour désacraliser n’importe quoi.
Dans une des allées menant au tombeau de Charles Baudelaire, un vieux monsieur avançait péniblement, à petits pas mesquins, on sentait bien qu’il y allait quasiment à reculons.
Cette démarche incertaine nous a d’abord inquiétés.
Va-t-il arriver au bout de l’allée ?
Ne va-t-il pas tomber sous peu ?
Heure-Bleue a eu à ce moment une illumination, de celles qui la rendent célèbre.
« Tiens ! Celui là est venu en reconnaissance… » a-t-elle dit le plus sérieusement du monde.
J’étais effectivement déjà venu dans ce cimetière mais il y a longtemps et m’étais sorti de l’esprit qu’il était si bien rangé.
C’est sans doute pour ça que je préfère, et de loin, le cimetière du Père Lachaise ou, mieux encore, le cimetière de Montmartre, beaucoup plus drôles et en foutoir.
Nulle part comme dans les cimetières –ou dans les bus- on ne voit combien l’humour de la nature est si bien exposé.
Je me rappelle ainsi un tombeau au cimetière du Père Lachaise, une copie à l’échelle ¼ du tombeau de Napoléon dans laquelle repose un certain monsieur Martin, tout à fait inconnu des foules.
Que dire des tombes que l’on voit au cimetière de Montmartre, où « Dédette et Poulet » reposent ensemble de leur dernier sommeil.
Certaines tombes vous poussent à refréner un fou-rire.
D’autres vous serrent le cœur, pleines de poésie.
D’autres encore vous font sentir la douleur des séparations éternelles.
Certaines vous parlent de ce manque de l’une qui ne cesse qu’avec la mort de l’autre…
Hier, « percé jusques au fond du cœur » par une bise effroyable, j’ai pensé en voyant cette tombe, qu’il y avait quand même eu quelqu’un pour penser qu’il y avait peut-être des morts frileux.
L’idée de la couette de verdure m’a, sur le moment, parue astucieuse bien que je ne sois pas pressé d’en vérifier l’efficacité…

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J’ai aussi constaté ce vendredi après-midi  que la dernière volonté d’un mort ne pesait pas lourd quand à ma grande surprise, je n’ai pas vu sur la tombe de Baudelaire, l’épitaphe qu’il avait préparée.

« Ci-gît qui, pour avoir par trop aimé les gaupes,
Descendit jeune encore au royaume des taupes. »

Il est vrai que Baudelaire repose dans un tombeau qui n’est pas le sien mais celui de son beau-père mort depuis dix ans.
Tout de même, que j’eusse aimé lire cette épitaphe.
Je suis sûr qu’Heure-Bleue m’aurais demandé « C’est quoi une gaupe ? »
D’ailleurs ça n’a pas raté.
À peine lui ai-je lu cette note –elle aime que je les lui lise à haute voix, les siennes et les miennes - qu’elle a dit « Oui, au fait, une « gaupe » c’est quoi ? »

vendredi, 08 février 2019

L’insoutenable légèreté de lettres…

D’accord avec toi Mab, j’aurais pu faire un effort…

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J’écoute la radio.
Comme souvent des propos accrochent mon oreille.
Souvent des propos tenus manifestement par des aficionados de la foire d’empoigne qui, comme beaucoup de ceux qui ne manquent de rien trouvent que l’on s’occupe trop de ceux qui n’ont pas assez.
Exceptionnellement, ce matin je n’ai pas entendu de ces raisonnements à l’emporte-pièce, de ceux qu’on révise généralement à la première menace de métastase.
Ce matin, un détail de la revue de presse m’a poussé à réfléchir.
Comme ce n’est pas courant chez moi, j’ai été vaguement estourbi par ce remue-ménage neuronal  puis écouté avec attention.
Et ma réflexion n’a abouti qu’à une question : Le patron d’Amazon France a-t-il les mêmes préoccupations en matière de liberté d’expression que son patron à lui.
J’ai nommé Jeff Bezos, dont je ne suis pas un admirateur inconditionnel, loin de là.
De Jeff Bezos, dont on savait la cervelle agile, on apprend  que le « dick » l’est autant.
Il a fait paraître en « une »  un article dans le « Washington Post », journal qui lui appartient mais dont il ne se mêle pas de la ligne éditoriale.
Il dénonce dans cet article les méthodes douteuses d’un journal ardent supporter de Donald Trump.
Jeff Bezos reproche au « National Enquirer » de pratiquer le chantage au moyen de lettres de menaces envers ceux qui financent des journaux qui ne sont pas d’accord avec Donald Trump et l’a dit publiquement haut et fort.
Le « National Enquirer » demandait au patron d’Amazon d’interdire au « Washington Post » de critiquer Donald Trump sous peine de voir des photos compromettantes de Jeff Bezos occupé à des jeux qu’on ne pratique généralement pas dans les salles de rédaction.
Assez gonflé, Jeff Bezos a donc pris la plume –non, pas celle-là, l’autre, celle pour écrire- pour envoyer le « National Enquirer » se faire voir.
Le rapport avec la liberté d’expression et Amazon France ?
Eh bien, d’après la même revue de presse de ce matin, le journal « L’Humanité » était scandalisé par le comportement du patron d’Amazon France qui licenciait des employés pour avoir soutenu le mouvement des « Gilets jaunes ».
C’est à ça qu’on voit que la démocratie avance.
La tendance était au droit à penser ce qu’on veut à condition de penser comme tout le monde.
C’est devenu le droit de penser ce qu’on veut à condition de penser comme le chef…
Enfin…
Cet après-midi, j’emmène Heure-Bleue voir si la tombe de la liberté d’expression est dans les allées du cimetière du Montparnasse.
Peut-être bien car il y a celles de Charles Baudelaire et Guy de Maupassant  qui, en matière de liberté d’expression ont donné de mémorables leçons au monde…

jeudi, 07 février 2019

Les tas d’urgence…

Ne dites rien lectrices chéries, j’ai déjà honte…mauvaise.jpg

Hier, nous sommes allés nous balader après avoir déjeuné d’un « bô bun » chez « Notre cantine », petit restaurant vietnamien près du cimetière de Montmartre.
Nous sommes descendus jusqu’à l’Opéra en flânant tranquillement.
Comme souvent, nous avons terminé notre promenade rue Auber, à l’Opéra.
A l’arrêt du 95 une voix rappelant celle d’Arletty dans « Hôtel du Nord » nous interpella.
La dame n’avait pas une gueule d’atmosphère mais presque…
Cette pauvre femme était perdue dans des désirs contradictoires, oscillant entre le « C’était mieux avant » et le « Ça ira mieux quand on les aura virés ».
Elle pestait après le 95 précédent, rempli de poussettes elles mêmes remplies quasiment d’ados fainéants se faisant trimballer par leurs parents.
« Les mômes, y veulent pus marcher maint’nant ! À cinq ans, y sont dans leur poussette ! Pas moyen qu’y marchent ! »
Heure-Bleue, indulgente et gentille avait beau dire « Ce sont des femmes qui partent travailler tôt le matin et les petits dorment… » rien n’arrêtait la vindicte de la dame.
Sentant que l’affaire des « petits feignants » n’allait pas être rentable, la dame attaqua avec les « Gilets Jaunes ».
«  C’est des bandits ! Y z’ont cassé l’Arc de triomphe ! »
J’ai tenté de dire « Ce sont des gens qui réclament de vivre un peu mieux, c’est tout, si vous mettez dix mille personnes dans la rue, il y aura toujours une douzaine de casseurs. »
Heure-Bleue a dit « Ces gens veulent seulement que la fin du mois n’arrive pas le dix du mois, il faut les comprendre… »
J’ai entendu la dame penser « Damned ! Encore raté ! »
Elle a alors soutenu farouchement les « Gilets Jaunes » qui pour une bonne part  touchaient comme elle une misère à la fin du mois.
« Y z’ont protégé la Tombe du Soldat inconnu » quand les casseurs ont voulu la casser ! »
Elle ajouta « D’ailleurs, paraît que le deuxième gosse d’avant son mariage, c’est Hollande qui lui a fait… »
« Surlecuté » par cette nouvelle d’importance,  j’ai demandé « mais comment… » je n’ai pas eu le temps de finir.
« Je suis retraitée de la Ville de Paris, ben j’peux vous le dire qu’Hidalgo, elle a le cul plus large que le porte-monnaie ! Je touche 1078 € de la Ville et 56  € du privé ! »
Heure-Bleue a dit « ça ne fait pas gras, mais bon, j’étais libraire et… »
Et la dame de reprendre « tout ça c’est la faute des… »
Quand le bus est enfin arrivé, j’avais retiré de cette conversation quasiment monologue que le mieux ce serait qu’il n’y ait ni Arabes, ni Noirs, ni Europe, ni « Gilets Jaunes », ni socialistes, ni droite, ni gauche, ni étrangers, ni chômeurs, ni communistes, ni retraités, ni jeunes, ni vieux…
Je me suis senti menacé.
Puis rassuré quand elle est montée à l’avant du bus et nous à l’arrière.
Comme c’était un « bus à rallonge », ça nous a protégés d’un nettoyage ethnique que je craignais assez large et peu regardant sur la cible…

lundi, 04 février 2019

Les raisons de la colère…

Ouais, bon…  


Mais qu'a donc bien pu écrire Saul Smitger à Miss Sarah
pour que celle-ci soit si en colère ?...

Je compte sur vous pour enquêter. 

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                             Chère, très chère Sarah,
Je dois te dire que j’ai vu ton fils sortir de ta chambre. Jules avait tout l’air d’un gamin qui a commis un larcin quelconque. Je pense que tu devrais le surveiller un peu plus. Déjà que beaucoup de gens se demandent pourquoi ils devraient t’appeler « Miss » alors que tu emmènes cet enfant à l’école chaque jour de la semaine…
Ce garçon, que j’aime déjà comme mon fils, a manifestement besoin d’un père. Il serait temps je crois qu’il l’ait enfin et tu sais .que je rêve d’être ce père.
Et plus encore d’être ton mari…
Tu sais que je serai toujours là pour toi.
Ton dévoué.

Saül.

                                             *****

Elle va me punir, c’est sûr…
- Qu’as-tu fait Jules !
- Mais rien maman !
- Tu me prends pour une idiote ? Où as-tu pris ça ?
- Je l’ai trouvé…
- Tu sais que je n’aime pas quand tu mens !
- C’est parce que…
- Parce que quoi !
- Il était bien plus drôle que le mien.
- Tu sais que je n’aime pas que tu fouilles dans mes affaires.
- Mais je n’ai pas…
- Tais toi !
Elle va me battre, j’en suis sûr alors que je n’ai rien fait de grave.
- Donne-moi ça, tout de suite !
Je ne sais pas pourquoi elle est dans une telle colère.
Pourtant ce n’est qu’un canard et il est bien plus drôle que le mien, il avance tout seul sur le plancher en faisant « bzzzz ».
- Et que je ne te reprenne pas à fouiller dans ma table de nuit !
Là j’ai bien cru qu’elle allait me battre mais non.
Elle a juste rougi en me reprenant le canard…

samedi, 02 février 2019

La jeunesse donne des zèles parfois...

Ce samedi, aujourd’hui donc, nous sommes allés manger un « döner » chez notre Turc préféré.
Ça faisait longtemps…
C’est juste avant de mordre dans le sien qu’Heure-Bleue m’a dit « Tiens ! On n’aura jamais emmené Süzel ici… »
Ça a fait passer un nuage de tristesse sur la table…
Heureusement, nos voisins de table nous ont distrait un moment.
D’abord parce qu’ils parlaient en des langues aux sonorités connues mais néanmoins changeantes suivant le moment de la conversation.
Je leur ai demandé quelles langues ils utilisaient.
Lui m’a répondu « Le turc et le syriaque, comme le patron du restaurant ».
Elle a ajouté « l’arabe littéraire et le syrien aussi, nous venons de la région d’Antioche. »
La dernière fois que j’avais entendu parler d’Antioche, c’est en lisant les Évangiles…
Tous deux nous ont répondu en un français qui fleurait les écoles Jésuites du Moyen-Orient.
Nous pensons qu’ils parlent l’anglais, probablement avec la même fluidité.
Quand je l’ai vu lui, mordre dans un piment, je n’ai pu retenir un « sshhh ! », ce qu’on fait habituellement en regardant un accident se produire.
Il a levé les yeux et dit platement « je ne peux pas manger s’il n’y a pas de piment…  »
Là-dessus, il en a pris un second, l’a aspergé de citron, d’une pincée de sel et l’a croqué avec délices.
C’est la première fois que je vois quelqu’un arroser une assiette déjà copieusement épicée, de poudre de piment « sinon c’est un peu fade ».
Après ce déjeuner, instructif comme tous ceux que nous prenons chez notre Turc, nous sommes partis  tranquillement vers « les passages ».
Nous avons vu au passage la rue de Trévise dévastée par l’explosion due au gaz.
Quelques fenêtres et vitrines soufflées témoignaient de la puissance de l’explosion jusqu’à la rue Montmartre.
L’absence de bus, rendus prudents par les « gilets jaunes », nous a contraints à continuer notre promenade presque jusqu’à la place de l’Europe pour y prendre le 80, seul bus qui nous rapprochait de chez nous.
Le voyage fut agréablement animé par un trio de filles qui discutaient des mérites et risques qu’il y avait à boire du Coca.
- Le Coca, je bois du sans sucre, ils ne mettent pas de sucre ils le remplacent par de l’asperg… Asprot… Du faux sucre…
- Moi je bois du normal.
- Si t’en bois trop, tu vas avoir du diabète !
- Oui mais avec le faux sucre, tu risques le cancer…
La troisième est alors intervenue, très sagement.
- Moi je bois de l’eau.
- Ah ?
- Oui, ma mère dit que le Coca ce n’est pas bon.
Celle qui le boit nature s’est récriée :
- Mais non ! C’est bon ! Surtout avec du vrai sucre !
La « no coke » a clos par :
- Et en plus, avec le faux sucre tu peux même attraper le cancer de la prostate…
Quand je vous dis que le monde vacille sur ses bases.
Elles sont descendues au même arrêt que nous.
Elles avaient entre dix et douze ans…
Elles m’ont rassuré sur la persistance de l’enfance dans notre monde féroce.