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mardi, 12 mars 2019

J’ai une dent contre lui…

Le dentiste est venu la chercher.
Un jeune homme brun, jeune et aux yeux bleu foncé.
Elle l’a suivi, évidemment, jeune, brun…
J’ai pris une revue sur la table.
« Geo ». Le numéro anniversaire de la quarantième année de parution.
À peine ouvert, une publicité a attiré mon attention « De quels moments vous souviendrez vous dans quarante ans ? »
J’ai commencé à y réfléchir le plus sérieusement du monde.
Quel optimiste que votre serviteur, tout de même…
La réalité, d’un coup m’a sauté à la figure !
Dans quarante ans je ne me souviendrai de rien !
Je ne saurai pas même que je risque de n’être qu’un souvenir fuligineux dans l’esprit de Merveille ou de P’tite Sœur.
Cette publicité de Lufthansa dans « Geo » m’aura au moins fait rire de moi.
J’étais heureux de n’avoir pas perdu une journée qui était partie pour être désolante pour Heure-Bleue et moi.
J’étais inquiet depuis la veille, peur que j’ai depuis longtemps que la lumière de mes jours ne soit abîmée par un arracheur de dents quelconque.
Ces gens non seulement lui mentent mais lui font parfois mal…
Ce fut finalement une bonne journée, sans douleur et avec de bonnes nouvelles.

lundi, 11 mars 2019

J ai la gêne éthique. Et toc !

Ouais, bon… Je sais, j’ai fait mieux, ne dites rien…

lakevio.jpg

On ne distingue pas pas encore les traits mais on y projette toujours quelque chose.

Ouaip ! Ça m’a fait ça quand je l’ai vue.
Elle était floue.
Pourtant sa démarche m’évoquait quelque chose…
Quelque chose entre un appel et une danse, une danse ondulante, élégante et troublante.
Je ne pouvais pas dire « lascive » car je ne la connaissais pas plus qu’elle ne me connaissait.
Pourtant je sentais bien qu’elle se dirigeait vers quelqu’un, quelqu’un que je ne connaissais pas mais qu’elle tremblait d’envie de connaître.
Elle avançait de ce pas dansant que j’avais déjà vu ailleurs et en d’autres temps.
Elle n’avait en avançant aucune difficulté à tenir sa pochette qui, tenue par quelqu’un d’autre, n’aurait demandé qu’à glisser jusqu’au caniveau.
Même le balancement de ses hanches avait quelque chose de magique, quelque chose de miraculeux qui imposait le silence.
Une perfection qui interdisait toute autre manifestation qu’une admiration muette.
Il ne serait venu à l’idée de personne, à la regarder avancer sur ce trottoir rendu éblouissant par l’averse récente, de se permettre quelque chose d’aussi déplacé qu’un regard salace ou un sifflet, admiratif et gentil mais malvenu.
Je l’ai regardée plus attentivement.
Elle avançait élégamment, telle Maya Plisetskaya, cygne volant pour la dernière fois  sur la musique de Tchaïkovski.
C’était bien ça !
Je me demandais encore, alors qu’elle était déjà dans les bras qui l’attendaient, si elle volait vraiment où si c’était sa hâte délicate qui me l’avait fait prendre pour le cygne.
C’est là que je me suis rendu compte que c’étaient mes larmes qui l’avaient rendue un peu floue…
C’est fou ce que l’émoi peut faire à un homme qui regarde la beauté…

dimanche, 10 mars 2019

Z'avez pas vu ma soeur ?


Hier j’ai appelé ma grande sœur.
Hier ma grande sœur a eu soixante-dix-sept ans.
Elle eut la malchance de naître en 1942.
L’année 1942 fut un mauvais plan pour beaucoup.
D’abord pour son père qui avait eu non seulement l’idée de résister à l’occupant mais pour un de mes oncles qui avait eu l’idée de le faire avec lui.
Ce fut pour notre oncle et son père une idée d’autant plus funeste qu’ils y laissèrent tous deux leur peau.
Ce fut funeste aussi pour les relations entre ma mère et une de mes tantes, l’épouse de l’oncle tué par les Allemands.
Pourquoi ça ?
Parce que de 1946 à 1995 ma mère détesta sa sœur pour une des raisons les plus bêtes qui soient.
Je vous explique : La ville d’Aubervilliers décida, peu après la Libération, d’honorer ses « Résistants morts pour la France » et donna à la rue où furent abattus le père de ma grande sœur et mon oncle le nom de… mon oncle.
Oncle inconnu car je n’étais pas né quand il est mort et dont j’eus connaissance par ma grande sœur car c’est elle l’archiviste de la famille.
Ma grande sœur a donc atteint hier l’âge respectable de soixante-dix-sept ans.
Elle vit dans un village minuscule du Gers et bien que je l’appelle régulièrement, je ne l’ai pas vue depuis 2005, à l’enterrement de notre mère.
En raccrochant, j’ai eu de la peine pour elle.
Elle me déchire le cœur.
J’en parle peu mais j’ai mal au cœur pour elle.
Je l’ai vu rire, bien sûr, mais je crois bien que je n’ai pas vu ma grande sœur vraiment heureuse depuis qu’elle s’est mariée la première fois.
Je l’ai vue plus ou moins joyeuse quelques fois mais jamais plus aussi heureuse qu’elle l’était avant 1963.
Ma grande sœur va d’ennuis en malheurs depuis la naissance de sa première fille.
Elle est maintenant partie pour enterrer sa première fille et son mari.
L’incertitude ne porte que sur le fait de savoir qui mourra avant l’autre et à quelle date.
Vous vous rendez compte, lectrices chéries ?
N’avoir jamais connu autre chose que de « bons moments » depuis cinquante-six ans !
Ma grande sœur était une jolie fille douée pour le bonheur jusqu’à l’âge de vingt ans.
Ce don pour le bonheur a été tué par son premier mari.
C’est le dernier type avec qui j’ai failli me battre passé vingt ans.
Il a brisé là car il s’était soudain aperçu que je n’étais plus un petit garçon d'une douzaine d’années et étais devenu plus grand que lui.
Il fut trompé parce que ma sœur est si petite qu’il avait oublié qu’il y avait des gens plus grands que lui et moins gentils qu’elle…
Bref, elle est partie pour être malheureuse et seule.
Le pire ?
Mon père, qui savait reconnaître le « faisan » de loin, avait pressenti ce qu’était le premier mari et avait prévenu ma mère et ma grande sœur.
Ma mère hélas n’avait été sensible qu’au fait qu’il avait une dent en or, signe indubitable de réussite, et surtout qu’il y aurait un peu plus de place à la maison…
À quoi tient le malheur d’une vie…

vendredi, 08 mars 2019

La tradition...

baguette-tradition.jpg

Hier nous avons reçu à déjeuner un ami que nous partageons avec « Tornade ».
Il est grand, et me rend huit bons centimètres.
Il faisait du sport jusqu’il y a peu.
Il est donc resté mince.
J’avoue que je l’enviais un peu.
Méchant comme je suis, j’ai été rassuré quand il a avoué qu’il avait le dos défoncé et que ses pieds étaient dans un état lamentable et nécessiteraient probablement une opération.
Je lui avais laissé un message.
Laconique le message : « Tu pourrais arriver avec une baguette « Tradition » bien cuite, s’il te plaît ? »
Il avait amené donc amené cette baguette « Tradition » bien cuite selon le souhait de la lumière de mes jours.
Elle était délicieuse et accompagna parfaitement les « tagliatelle alla carbonara » que je m’étais échiné à préparer.
Cette baguette était vraiment très bonne.
Je ne sais pourquoi me vint à l’esprit cette réflexion de ma mère « Et n’entamez pas le pain frais ! Ça fait mal à l’estomac ! »
Sans doute en opposant cette « Tradition » brune à souhait, dorée et craquante.
Elle donnait envie de croquer dedans à peine le morceau à côté de votre assiette.
Pendant qu’Heure-Bleue faisait la conversation je suis allé chercher la tarte fine aux pommes qui m’avait occupé au début de la matinée.
Un dessert que ma mère n’aurait fait mais que ma grande sœur faisait avec plaisir quand elle était bien disposée.
En fait quand on lui avait fait une cour éhontée pour l’amener à couper les pommes en petites tranches parfaitement égales et parfaitement disposées en éventail sur la pâte.
Elle faisait même la pâte feuilletée et ça lui prenait des heures.
Souvent, dans ces moments là on se moquait de ma mère avec son injonction « Surtout, vous dites bien bonjour et vous demandez un pain parisien, et bien blanc s’il vous plaît ! »
Ce qui était immanquablement suivi de « ET DE CHEZ GALY ! PAS CHEZ MARION HEIN !!! »
« Marion » faisait du pain « moulé » et ma mère détestait ça.
Hier midi j’ai eu de la chance, j’ai de la chance depuis que je ne mange plus chez ma mère.
Depuis que je ne mange plus chez ma mère, je mange du pain frais.
Je ne mange plus, sauf exception, de ce « pain d’hier », le « pain parisien de quatre cents grammes », ce « pain d’ouvrier ».
On en avait marre, mes sœurs et moi de cette exhortation quotidienne de ce « PAS LE PAIN FRAIS ! Il en reste d’hier, il est encore bon ! »
Mais à y réfléchir, je me suis dit en coupant la tarte que ma mère n’avait pas forcément tort.
Amollie par une nourriture équilibrée et du pain frais, dorlotée par une éducation qui la fit passer de la batiste à la soie, Heure-Bleue a des digestions difficiles.
À défaut d’enfants sans névroses, ma mère a au moins fait de nous des gosses aptes à digérer des briques jusqu’à un âge aujourd’hui avancé.
Bref, ces « tagliatelle alla carbonara », cette baguette « Tradition » et cette « tarte fine aux pommes » ont été avalées avec délectation par tout le monde.
Chouette déjeuner.

mercredi, 06 mars 2019

« Madame Sans Gêne »

Hier, j’ai dîné avec un ami dans le quartier du Sentier.
Nous avions rendez-vous dans un bistrot à l’angle de la rue Saint Sauveur et de la rue Montorgueil.
Le chemin est simple : Prendre le 95 jusqu’à l’Opéra puis attendre tranquillement le 20 qui vous emmènera jusqu’à Sentier.
Dans ce trajet, tout eut été parfait si, dans le 95 je n’avais eu l’idée saugrenue de m’asseoir à la seule place libre.
Place mal placée…
Une des quatre places normalement dédiée aux « bancals ».
Ne restait qu’une place, celle contre la fenêtre, celle où la paroi du bus précise « Place prioritaire ».
Je me suis glissé avec bien du mal entre la paroi et une dame.
Enfin, je dis « une dame »…
Elle se tenait les jambes écartées, exactement ce que les femmes reprochent aux hommes.
Une fois assis, elle s’est serrée contre moi.
Du moins l’ai-je pensé.
Je me suis dit « Waouh ! J’ai un ticket d’enfer ! Elle me fait du genou ! »
Discret, je fis semblant de rien et regardai la rue par la fenêtre d’un air dégagé.
Dès l’arrêt suivant, j’ai senti un coup de coude dans les côtes.
Je me suis tourné vers elle alors que le virage pris par le bus pour passer sur le pont qui surplombe le cimetière de Montmartre envoyait la dame contre moi.
Un « ticket d’enfer » ? Je t’en foutrais, moi du « ticket d’enfer !
Une femme jeune, plus que dodue, l’air revêche, plongée dans la contemplation de l’écran de son smartphone, se secouait pour mordre sur la demi-place qu’elle m’avait allouée à contrecœur.
Il fut heureux qu’elle descendît à la station suivante faute de quoi je serais probablement mort étouffé avant d’atteindre la gare Saint Lazare…
M’est venue une idée peu charitable à l’endroit de certaines femmes et la prochaine qui me parle de « man spreading », cette détestable habitude qu’ont certains hommes de « s’étaler en vache maîtresse » comme disait ma mère, quand ils s’asseyent dans le bus ou le métro, eh bien je l’envoie tâter du « woman spreading » dans le 95 !
Cela dit, une telle exagération dans le comportement finit par en être drôle.
Et puis, j’avais peut-être affaire à une personne « transgenre » ayant gardé le mauvais comportement qu’elle avait dans son genre précédent
, allez savoir…
Mais bon, je peux dire aujourd’hui sans crainte de faire de peine à la Maréchale Lefèbvre qu’hier soir j’ai voyagé avec « Madame Sans-Gêne »…
Quoique celle-ci n’eût absolument rien de commun avec la Sophia Loren du film éponyme sorti en 1961.