dimanche, 10 juin 2018
Famille, je vous ai…
Heure-Bleue et moi avons fait le test « Mais qui donc est Icare ? » du Télérama de cette semaine.
Nous nous sommes aperçus avec stupeur que si on avait oublié de quoi on avait dîné la veille, on se rappelait parfaitement ce que nous avions appris en quatrième.
Ça nous a occupés quelques minutes…
Depuis, je m’inquiète de cette façon qu’a la mémoire de nous jouer des tours pendables.
Comment se fait-il qu’après des décennies, on arrive à ressentir des émotions telles on les a ressenties au moment où elles nous ont étreints alors que leur source a disparu depuis longtemps ?
Comment se fait-il que les mêmes images et les mêmes lieux les ravivent si bien ?
Comment se fait-il que la même passoire, pour peu qu’elle ait échappé à notre attention et notre regard quelques minutes ait complètement disparu de notre esprit alors qu’on l’a posée là le temps de sortir la casserole du feu et qu’on n’arrive plus à mettre la main dessus?
On dirait que, comme pour les artères qui se bouchent et empêchent le sang de circuler correctement pour cause d’étranglement mal placé, il y ait une sorte d’étranglement entre l’hippocampe et le reste de la cervelle qui empêche le mécanisme de stockage de fonctionner correctement.
Ce petit test a ravivé d’autres souvenirs.
Évidemment, j’en ai retiré que je n’étais pas un enfant très sage et que ça a donné un adulte pas vraiment plus sage.
Bon, un adulte pas sage du tout.
En y réfléchissant un peu, même adulte est un abus de langage…
De proche en proche, ça m’amène à penser à ma cousine.
Et à sa fille.
Je ne sais pas comment lui dire « Maintenant tu sais que la vie est brève, tu as vu qu’elle peut s’arrêter avant que tu n’aies le temps de dire « ouf », alors ma biche, profite de la vie. Ne laisse personne la gâcher, c’est la seule que tu as. Soit gentille mais ne te laisse pas marcher dessus. »
Je n’ai aucune idée de la façon de s’y prendre pour lui dire ça...
Sa fille à qui il faudra bien dire de ne pas se morfondre car la vie est brève et qu’il faut en goûter tous les moments.
Les bons comme pour les « resucer » comme des bonbons un peu poussiéreux retrouvés par hasard au fond d’une poche.
Les mauvais, pour les jeter car se rappeler leur goût amer gâche l’instant présent.
Plus tard peut-être, lui répéter les horribles histoires que racontait sa mère.
Et puis lui raconter le côté maternel étrange de la famille dont elle est issue.
Même si cette jeune fille est plutôt sérieuse, je pense que ça devrait lui donner un regard plus réservé sur ce qu’est vraiment « être adulte ».
Mais comment lui dire que non, sa mère ne l’a pas abandonnée.
Elle lui a été arrachée.
Tu vas devoir marcher toute seule maintenant, toi, ma petite-cousine.
Si tu veux, je te raconterai des histoires de ta grand’ mère, « sérieusement tachée ».
Et des histoires de ton grand-oncle, mon père, qui ne valait pas mieux…
Et des histoires d’une autre grand’ tante, carrément « fondue au noir », celle qui lavait les œufs « parce que le cul des poules, c’est sale. »
10:20 | Commentaires (8)
Commentaires
Pour la première partie de ton billet, je ne peux qu'acquiescer vigoureusement ; et malheureusement ça ne fait que s'intensifier les années passant, tu verras. L'esprit s'occupe à classer tout ce qu'il a emmagasiné, et pour le quotidien, bof, il s'en occupera quand il aura une minute !!!
Pour ta petite nièce, je ne sais que te dire ; j'ai eu à gérer une situation pesqu'identique avec des petits-neveux qui ont perdu un père de manière brutale. Comme ils sont "mutiques" habituellement, pas moyen de nouer un dialogue. Je n'ai pu que les entourer d'affection, d'attentions, de présence aussi fréquente que possible. Je crois que, pour l'instant, ce n'est pas le temps de la parole, enfin c'est comme ça que je le ressens, mais l'assurer de votre soutien et votre affection.
Écrit par : Sophie | dimanche, 10 juin 2018
oui le cul des poules c'est sale, mais pas trop, il y a pire ! Lui dire, comment ? simplement avec les mots simples du coeur, il n'y a pas d'autres façon et puis lui dire qu'elle ne devra compter que sur elle même si vous êtes bien présents à ses côtés. Lui dire que sa mère lui a été arrachée et que oui, elle a lutté jusqu'au bout pour ne pas l'abandonner. Enfin quand le temps viendra de le faire, car pour l'heure, place au chagrin et il a toute sa place. Il est nécessaire, il est indispensable, le deuil, tu le sais bien, passe par là. A ceux qu'on aime, on leur doit bien ça.
pour la mémoire, oui, c'est une chose étrange que le fonctionnement de notre cerveau. Je suppose qu'il sélectionne ce qui lui apparru important à l'époque où ça c'est produit et qu'il occulte ce qui n'est que routine et broutille même en un temps récent.
Écrit par : Délia | dimanche, 10 juin 2018
Encore un billet dense...
La jeune fille devra faire son deuil, bien sûr... A son rythme... Comme me l'a dit un psy un jour... Tu feras ton deuil, je peux te l'assurer... Mais je ne peux pas te dire quand. Mais ce qu'on peut dire à une adulte, on ne sait trop comment le dire à une adolescente. Sauf si elle pose la question. Je ne sais pas comment mes neveux ont fait (ils étaient un peu plus âgés, mais jeunes quand même quand ils ont perdu leur maman - de la même maladie) - nous ne parlions pas de cela.
Tu peux toujours écrire... o;) Tu fais ça bien o;) Un beau petit cahier... Sinon, pour la mémoire, je ne sais pas trop quoi répondre. La passoire trie parfois de façon aléatoire, gardant des choses sans importance, en laissant passer d'autres... Et puis, la mémoire fonctionne par flashes, je m'en suis rendu compte, alors qu'on pense se souvenir "en continu"... Je me pose aussi souvent ces questions.
Écrit par : Pivoine | dimanche, 10 juin 2018
Sauf que peut-être que sa mère lui a déjà parlé... Laissé des indications... Parfois, les parents font cela...
Ce que toi tu peux lui apporter, c'est tout bonus...
Écrit par : Pivoine | dimanche, 10 juin 2018
dis lui simplement que tu es là pour elle si elle a besoin de parler ou que tu lui racontes des choses sur sa mère ou sur la famille. Laisse la venir.... Il y a un père ?
Écrit par : ang/col | dimanche, 10 juin 2018
Cette question de la présence ou non du père est très intéressante, primordale !
Écrit par : Julie | lundi, 11 juin 2018
Comment lui dire ?
Mais comme tu nous le dis, à nous.
« Maintenant tu sais que la vie est brève, tu as vu qu’elle peut s’arrêter avant que tu n’aies le temps de dire « ouf », alors ma biche, profite de la vie. Ne laisse personne la gâcher, c’est la seule que tu as. Soit gentille mais ne te laisse pas marcher dessus. »
Moi je trouve qu'une jeune fille est capable d'entendre ça...
¸¸.•*¨*• ☆
Écrit par : celestine | dimanche, 10 juin 2018
Pour l'instant, juste la serrer fort dans les bras et lui dire qu'on partage sa peine. Lui écrire ensuite une jolie lettre avec plein de ces souvenirs que tu sais si bien conter, sur sa mère, sur la famille, pour transmettre.
Écrit par : lakevio | lundi, 11 juin 2018
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