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samedi, 17 août 2019

Romance sur argent...

Le devoir de Gwen me remet en mémoire quelque chose de la même génération que son père.
Le père de Gwen, est né en 1871, ce que vous savez si vous avez lu son « devoir de Lakevio du Goût ».
Autant dire que mon grand-père était un gamin, lui qui est né en 1875…
Je n’ai aucune idée du moment où il a croisé ma grand’mère ni des circonstances dans les quelles c’est arrivé.
Tout ce que je sais, c’est qu’elle s’appelait Florence et qu’elle lui avait tapé dans l’œil.
Contrairement à elle, née en 1878, il était allé à l’école et s’en était apparemment assez bien tiré pour lui écrire des lettres.
Je les ai encore dans l’œil, ces lettres.
Elles étaient magnifiquement écrites à l’encre violette sur un mauvais papier à lignes rendues à peine visibles par les années.
Je les ai lues un jour où ma mère, en veine « d’archivisme »  familial, me les avait mises dans la main, en même temps que les vieux cahiers de ma grande sœur et des photos passées par le temps.
Ah ça ! Il écrivait bien le papy de moi !
Oh ça ! S’il était question de licence, elle n’était que poétique.
Même si la suite des évènements montra qu’elle était parfois autre puisque le plus vieux de mes oncles est né vers 1897 et fut suivi par huit frères et sœurs…
Ces lettres, disparues depuis à moins qu’elles ne soient dans un classeur chez ma grande sœur, étaient tournées en un français impeccable et il est dommage à mon sens que mon grand-père ait choisi d’être marinier à son retour de la guerre.
Je suis sûr que quelqu’un qui pouvait, s’il était « bien viré » au saut du lit, chanter « La romance de maître Pathelin » à ma grand’mère était capable de grandes choses.
Reste tout de même une question jamais élucidée : Qui avait lu à ma grand’mère les lettres envoyées par son promis ?
Car ma grand’mère n’était jamais allée à l’école.
C’est un jour de vacances de Noël de mon enfance qu’elle me l’a appris.
Je lui montrais quelque chose dans un livre.
« Tu as vu ce qu’il lui dit ? »
C’est la première fois et la seule où je l’ai vue gênée.
« Mais, mon garçon,  je ne sais pas lire ! Je ne suis jamais allée à l’école ! »
C’est moi qui fus vaguement honteux…
J’étais pourtant persuadé du contraire car elle racontait des histoires si terribles sur les sorciers et les « meneux de loups » du Berry qu’elle ne pouvait que les avoir lues…
Elle n’était jamais allée à l’école, était terriblement avare de câlins –je ne me rappelle pas un seul bisou venant d’elle- mais bon sang, qu’elle racontait bien ces contes épouvantables !


Commentaires

Au moins ta grand-mère avait licence à lire dans sa mémoire , as-tu connu , gamin , l'effet "ah , c'est ça lire" ce petit instant teinté de désillusion quand tu te rends compte que , non , ce ne sont pas tes pensées qui se projettent in situ sur le papier
les câlins , incurable romantique Goût , bien souvent même le mot n'existait pas

Écrit par : epalobe | samedi, 17 août 2019

Bonjour Le Goût
si ta grand-mère racontait bien à l'oral, toi, tu racontes drôlement bien à l'écrit. Je m'offre souvent le luxe de venir te lire avec gourmandise même si je ne commente pas (mon PC fait de plus en plus souvent des bruits très bizarres et je me demande toujours à quel moment il va me sauter à la figure, alors je me dépêche de "surfer"!)

Dassary! Ma grand-mère l'adorait... Cet homme m'était complètement sorti de la tête :-)

Belle journée à toi!

Écrit par : Ambre Neige | samedi, 17 août 2019

ça me touche beaucoup, ce genre de "témoignage du passé"
merci le Goût

Écrit par : Adrienne | samedi, 17 août 2019

La transmission orale se perpétuait de génération en génération, chacun arrangeant à sa sauce et à la mode du pays des histoires héritées du passé, je l'ai connu moi aussi, car mon grand père né en 1873, était un fameux conteur. Je lui dois beaucoup. Il savait lire et écrire et je me régale de ses lettres quand je retourne dans mon grenier, là où sont entreposées mille choses du temps passé. Les recherches que j'ai faite sur les deux branches de ma famille, jusqu'à la fin du 17eme siècle (maternelle et paternelle) m'ont permis de constater que tous savaient lire et écrire, parfois avec difficulté et maladresse, mais ils signaient de leur patronyme, alors que nombreux étaient ceux qui le faisaient d'une croix.
Par contre, il est vrai que les effusions étaient rares , mais il y a tellement de façons de dire qu'on aime et surtout de le montrer, ce dont je n'ai jamais été privée et dont je n'ai jamais douté.

Écrit par : delia | samedi, 17 août 2019

C'est vrai que tu as du être surpris d'apprendre que ta grand mère ne savait pas lire !
Ma grand mère maternelle, née en 1895, sourde et muette de naissance, lisait et écrivait, mais ses lettres étaient difficilement compréhensibles, c'étaient des mots à la suite des autres, pas des phrases.

Écrit par : Fabie | samedi, 17 août 2019

Finalement, heureusement que tu as appris à écrire pour notre plus grand plaisir.
Imagine que tes parents soient restés dans le Berry et que toi-aussi, tu y sois encore ! Ta grand-mère avait un don oral à défaut de savoir écrire et certainement beaucoup d'autres qualités. Ton grand-père ne savait peut-être pas qu'elle ne savait pas lire. Tu dois tenir de lui, question amour des mots...Des lettres d'amour, fallait trouver quelqu'un de confiance pour les lui lire, sans que toute la contrée ne soit au courant..
Tu sais que mon mari a un oncle berrichon qui est peu allé à l'école, est un autodidacte qui écrit encore sur une vieille machine à écrire ses livres qu'il essaie en vain de vendre. Tiens, il raconte dans un de ses livres, les légendes du Berry….Hélas, sa vieille machine à écrire vient de le lâcher et il ne veut pas se mettre à l'ordinateur (bon, aussi, parce qu'il n'a pas les moyens de s'en offrir un)...Il est très pauvre et n'a jamais "percé" comme on dit, n'ayant pas de connaissances. Lui est resté dans le passé, pendant que le progrès avançait…Parfois, on a peine à imaginer que des gens, encore de nos jours, vivent comme au siècle dernier, début du siècle dernier.
Tu te rends compte le chemin que nous avons parcouru, nous qui sommes issus de la campagne profonde...car, vu que tu avais des grands-parents berrichons, tu es un peu provincial, comme moi...Ha, ha...C'est quand même marrant de penser que tu es issu de la France profonde, toi le pur parisien...

Écrit par : julie | samedi, 17 août 2019

Jolie histoire... quelles disparités sociales! On pourrait écrire des heures là dessus. Mais en effet, bien conter est un don - et une discipline- et ce n'est pas donné à tout le monde...

Écrit par : Pivoine | samedi, 17 août 2019

Un vrai personnage de roman, ta grand-mère... On a l'impression que le moule est cassé, on n'en voit plus, des comme ça... ;-)
•.¸¸.•*`*•.¸¸☆

Écrit par : celestine | dimanche, 18 août 2019

Les commentaires sont fermés.