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lundi, 20 décembre 2021

Devoir de Lakevio du Goût N°109

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La rue d’Orchampt me saute à la mémoire chaque fois que je vois l’image de cette litho d’Utrillo.
Je l’ai parcourue plusieurs fois depuis que nous vivons dans le quartier et elle était déjà revenue dans ma cervelle à propos du film « L’auberge espagnole » qui est passé à la télé il y a plusieurs années.
Il m’était arrivé de l’emprunter assez souvent pour rejoindre la rue Lepic en 1962.
A l’automne 1962, pour revenir du lycée, je montais jusqu’à la rue d’Orchampt, si étroite qu’on était obligé de se coller contre les murs quand une voiture, optimiste quant à ses chances d’arriver au bout, s’y engageait.
Ça faisait un bon bout de chemin supplémentaire mais il fallait absolument que je le fasse au cas où…
Je dévalais ensuite la rue Lepic qui sinuait à flanc de Montmartre jusqu’à la rue Burq.
Pourquoi diable attendre la rue Burq pour emprunter la rue Caulaincourt et rentrer chez moi en passant par la rue du Mont-Cenis ?
Eh bien, comme souvent à cet âge, je faisais des kilomètres pour tenter de croiser quelqu’un.
Quelqu’un qui, dans ma « colo de curés », m’avait fait découvrir combien le goût des baisers pouvait être agréable.
Cette blonde aux yeux si bleus et à l’accent « pied-noir » très prononcé habitait rue Burq.
D’où mes pérégrinations dans un espoir de la revoir qui se révéla vain.
Un peu plus d’un an après, je la croisai et je m’aperçus qu’une fois les vacances passées, nous n’avions pas plus de choses à nous dire que de baisers à échanger…
Après ça, je pris des chemins beaucoup plus directs pour revenir à la maison.
J’ai souvent emprunté la rue Caulaincourt et j’y ai des souvenirs mais je passais aussi souvent par là car il y avait une boutique où une dame vendait des chaînes haute-fidélité et était d’une patience d’ange avec le jeune garçon que j’étais, ébloui par ce que j’entendais.
Elle a fermé un jour mais chaque fois que je passe par là, je pense à cette dame et à sa boutique.
C’était une époque où l’on n’achetait pas de quoi écouter de la musique dans les supermarchés et où ceux qui vendaient le matériel parlaient plus de musique que de watts.
J’ai d’autres souvenirs dans cette rue, d’autres encore rue Ronsard, au côté du jardin du Sacré-Cœur.
Certains plus tenaces encore vers la rue d’Orsel.
Et je ne vous parle pas de la rue Condorcet, là où elle croise la rue de Rochechouart et la rue Turgot.
Vous avez remarqué, lectrices chéries, que je vous parle de tout ça dès que le moment où les jours vont s’allonger approche ?
C’est le seul coin de Paris qui me retire plus de cinquante ans de la tête sans me retirer un an des genoux.
Quand l’idée que le printemps approche cesse-t-il de faire cet effet de rajeunissement de l’âme ?
Malgré ce p… de genou droit qui persiste à vieillir…
Bref, c’est ce que me dit cette litho de Maurice Utrillo.