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dimanche, 21 mai 2017

L’œil du cyclone.

Vendredi déjà, si l’idée de draguer m’avait effleuré l’esprit, elle eût été tuée dans l’œuf par la trace de lucidité qui me reste.
J’avais néanmoins passé une excellente journée.
Hélas, tout n’est pas, lectrices chéries, que luxe, calme et volupté.
Vous souvenez-vous de mon œil droit ?
Celui dont je vous ai déjà conté la mésaventure avec force détails ?
Cet œil, victime de l’intérêt pour les sciences qui tua déjà Pline l’Ancien, avait un regard qui n’était pas forcément celui de l’œil gauche.
Eh bien, lectrices chéries, un petit vaisseau a éclaté jeudi soir sur la conjonctive de l’œil gauche.
Vous imaginez bien qu’avec un œil merdique et un autre de lapin russe, toute idée de badinage est vouée à l’échec.
Mais il y a pire.
Ce samedi c’était la fête à l’école maternelle de P’tite Sœur.
Hormis le fait que je me suis dès l’entrée dans l’école retrouvé « fleur » avec les fameux tickets.
Mais si, vous savez bien lectrices chéries.
C’est comme ça depuis Jules Ferry, enfin depuis la communale de l’Ours.
On vous prévient que « le samedi gnagnagna de mai, il va y avoir « la kermesse à l’école » et que si… hein… Bon, vous faites ce que vous pouvez… »
On peut résumer ainsi :
- Vous achetez la farine, le sucre, tout ce qu’il faut.
- Vous faites un grand gâteau avec le plus grand plat à tarte que vous avez.
- Quand il est fini, vous le coupez en parts égales.
- Vous en tirez le plus grand nombre de parts compatible avec l’article  L241-3 du Code de commerce, celui qui réprime l’escroquerie.
Oui, il faut que le gâteau soit le plus rentable possible pour l’école…
- Vous redescendez acheter le rouleau de papier aluminium car le morceau qui reste est trop petit.
- Vous apportez le gâteau à l’école.
- La directrice vous tanne pour que vous preniez le plus de tickets possible.
- Le soda est tiède, vous le videz dans le bac à fleurs.
- La merguez est presque crue, alors vous la jetez en douce dans les toilettes.
- Vous finissez par vous rabattre sur votre gâteau, dédaigné évidemment par les autres parents.
A la fin, vous avez dépensé des sous pour faire le gâteau, vous avez acheté votre gâteau au prix fort et votre petite-fille n’a rien gagné avec le ticket de loterie que vous lui avez donné.
Samedi ce fut pire.
Avec mon œil injecté de sang, pas plus Merveille que P’tite Sœur n’a voulu approcher de son papy autrefois chéri.
« T’es un fantôme papy ! Tu me fais peur » a dit P’tite Sœur en mettant sa tête dans le blouson d’Heure-Bleue.
Merveille est une vraie garce qui m’a jeté un regard dégoûté et m’a dit « Si tu veux draguer, papy, te reste plus que le clin d’œil ! »
Même la lumière de mes jours frissonne chaque fois qu’elle me regarde.
Et ça n’a rien à voir avec les frissons que j’ai connus il y a… Tout ça…
Voilà comment on pourrit super efficacement un samedi de papy.

jeudi, 18 mai 2017

Je me souviens…

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Je ne sais pourquoi la rue Turgot me revient à l’esprit.
Peut-être le mois de mai.
Nous sommes le 18 mai, mais quoi ?
Ce coin reste obstinément accroché à ma mémoire comme une poche de ma veste était restée à une poignée de porte.
On croit qu’on l’en a détachée mais les conséquences de cet arrachage me marquent.
Je ne sais si c’est à cause du carrefour au bas de cette rue du IXème et du café où j’attendais parfois le 85.
Mais c’est comme ça, cette rue revient régulièrement flotter à la surface de ma mémoire, tirée par l’unique neurone qui me reste aujourd’hui.
Quelque chose qui me fait penser que la mémoire est comme une bibliothèque.
À la naissance, bien que pleine d’étagères, elle est vide.
Presque vide.
Sur une étagère du bas il n’y a qu’un micro-dictionnaire.
« Ouiinn », « Maman », « Papa »
Il y a aussi un mini-Bescherelle.
« Manger », « Dormir », « Toucher », « Entendre », « Sentir », « Voir ».
La bibliothèque se remplit chaque jour.
Pendant longtemps, elle est bien rangée.
Hélas comme toutes les bibliothèques de grands lecteurs, le bordel s’y installe.
Les années passent, les rayonnages se remplissent.
Puis, quand il n’y a plus de place sur les étagères, « on fait des piles ».
Les piles se multiplient avec les années.
Plus il y a d’années, plus il y a de tas informes à côté des piles.
Vient un moment où on a besoin d’une information dont on sait qu’elle est là, cachée au milieu du balagan.
Mais où ?
Tant que c’était rangé sur les étagères, ça allait.
Quand c’est dans les piles, ça va encore, suffit de trouver la pile.
Alors on fouine, on sait que ce n’est pas sur les étagères mais dans les piles.
Peut-être même dans les tas qu’on se met alors à fouiller.
Assez drôlement, on tombe sur un souvenir en cherchant dans un tas et, par je ne sais quel miracle il y a « une table des matières du tas » bien pratique qui permet de retrouver le déroulement de moments de vie…
Aujourd’hui, j’ai fait écrouler un tas par inadvertance.
En me penchant pour le relever, mon regard est passé sur une étagère.
J’ai vu un souvenir.
Les pages collées par les ans, je n’y vois que « Rue Turgot ».
Pas plus.
Un jour ça va sécher.
Il s’ouvrira…
 Je ne sais pas ce que vous en pensez mais c’est l’effet que ça me fait.

mercredi, 17 mai 2017

Transports...

« Euh… Minou… Tu te la pètes là… »
Et puis vos commentaires, lectrices chéries…
Je suis du coup gêné de la note que j’ai commise hier.
Heureusement, la série de mésaventures qui m’a accompagné pendant mon après-midi parisien m’a ramené à une plus juste perception des choses.
Tout seul comme un grand, je suis allé chez le médecin.
Il m’a ausculté, n’a rien trouvé à redire.
Il a aussi évité de me dire que je suis plus douillet qu’Heure-Bleue qui souffre plus que moi et tout le temps.
Après avoir trouvé qu’une moyenne de deux cachets analgésiques tous les deux ans était une consommation raisonnable, il a rédigé l’ordonnance qui m’éviterait de me fâcher avec mes pharmaciennes, dont je n’ai jamais vu les cornues mais qui m’ont avancé le médicament.
Horriblement plié par la douleur, bon, honnêtement, avec un reliquat de léger mal de dos, je suis reparti.
Et c’est là que ça a commencé à se gâter.
Je me suis d’abord dirigé vers la République avec l’idée de prendre le métro.
D’un pas finalement alerte, celui qui m’a fait monter au front la honte de gaspiller les sous de la Sécu, je suis arrivé au métro Temple.
Las… Une horde de flics en barrait l’accès me poussant à aller sur la place.
Je me suis arrêté un instant puis ai remonté le boulevard vide de toute circulation, dans l’espoir de prendre le20 qui m’amènerait à Saint Lazare.
L’affichage m’appris que le prochain arriverait dans « 74 min », autant dire jamais.
Il m’apprit aussi qu’une ligne de métro était à l’arrêt pour cause de colis suspect et qu’une autre l’était « pour cause d’incident voyageur »…
J’ai prévenu la lumière de mes jours que j’arriverai probablement vers la fin de la semaine.
Elle a eu l’air de dire que c’était parfait…
J’ai continué sur le boulevard.
Passée la porte Saint-Martin, l’entrée du boulevard de Strasbourg est squattée par une population croissante de petits commerçants sans compta ni boutique, de voyants, de marabouts, de marchands d’orviétan et de vendeurs de montres sur l’origine desquelles il valait mieux ne pas se pencher…
J’étais content d’avoir encore mon smartphone, ma montre et ma carte Visa…
Le calme est revenu à Strasbourg-Saint Denis.
Là une dame, genre pruneau sud-américain, m’a dit « bonjour ».
Je devrais me méfier de la tendance qui me fait me conduire en véritable nunuche en pleine rue et répondre poliment à ceux qui me saluent.
Idiot que je suis, j’ai répondu « bonjour madame ».
Avais-je l’air d’être dans une misère sexuelle si profonde, où simplement je n’avais pas Heure-Bleue accrochée à mon bras ?
Toujours est-il qu’elle s’approcha de moi en disant :
- Toi faire amour ? C’est vingt-cinq. »
- J’ai une tête à aimer les brunes ?
Usée par des années de tapin, elle avait sûrement appris des tas de trucs sur les Français mais pas le français, elle m’a fait peine.
Tandis que je continuais ma route, elle marchait à mon côté et insista :
- Toi pas vouloir alors ? Mais toi brun !
J’ai dit :
- Oui mais toi pas rousse…
Elle a haussé les épaules et m’a estourbi d’un :
- Pfff… Toi vouloir amour, pas vouloir cul…
C’est quand je suis arrivé au croisement de la rue Auber et du boulevard Haussmann que le 20 m’a dépassé.
À deux cents mètre de Saint Lazare.
En arrivant, les ascenseurs que j’avais pris au début de l’après-midi étaient déjà en panne…
Ça m’a rappelé « La chèvre », la scoumoune des transports habituellement réservée à Heure-Bleue a déteint sur votre serviteur…

mardi, 16 mai 2017

L’appeau de la peau.

De rien, Mab
« Sophie qui n’a pas de blog » me demandait hier, à propos de peau « Quelle musique sur ce thème là ? »
Je suis sûr qu’en écrivant ce commentaire, elle a eu l’air souriant, voire moqueur.
Mais pas que.
Je suis sûr qu’elle s’est demandé « Qu’est-ce qu’il va trouver qui va bien avec ce qu’il en dit, de ces peaux. Ah ça, il va chercher, c’est sûr… »
Assez bizarrement, en fouinant dans ma cervelle pleine de trucs inutiles et de rapprochements étranges, j’ai trouvé deux œuvres et une couleur.
Pourquoi une couleur ?
La couleur est celle de l’aigue-marine mais plus foncée.
Je la revois bien, une aigue-marine très foncée.
Elle m’avait frappé quand je l’ai vue, suffisamment pour qu’elle reste inscrite dans ma mémoire.
Allez donc savoir pourquoi.
Peut-être ai-je été frappé à ce moment par le mouvement d’une robe entrevue dans la rue ou au restaurant…
J’ai bien une idée.
Je suis sûr que la couleur de la robe en question rehaussait la pâleur d’une peau comme je l’aime.
Quant aux deux œuvres, ce sont deux « Nocturnes » de Frédéric Chopin.
Le N°1 et le N°20.
Il y a, quand l’interprète n’est pas un manchot, ce je ne sais quoi de si bien fichu, ce quelque chose qui fait qu’on est émerveillé à la fois par la sûreté du geste de l’interprète et cette façon de créer l’illusion de la timidité.
Ce talent qui laisse deviner ce léger sentiment de crainte devant l’inconnu, un peu de l’angoisse de la découverte.
Ces deux œuvres décrivent dans mon esprit toutes les hésitations qui peuvent surgir et retenir les doigts avant de savoir.
Eh oui « Sophie qui n’a pas de blog », on ne sait pas grand’ chose des peaux si on n’y a posé que le regard.
On ne sait rien d’elles avant d’y poser les doigts ou les lèvres.
Après, c’est affaire d’appréciation.
Que ce soit de l’œuvre de Frédéric Chopin, de la couleur aigue-marine ou des peaux qu’on a la chance de toucher.
Et il y a celle que l’on trouve belles, celles que l’on aime et celle qui rendent fou.
Ce ne sont pas forcément les mêmes.
J’ai comme ça un souvenir d’été dans le 29.
Derrière une Martiniquaise qui attendait la station suivante, vêtue d’une robe très décolletée du dos.
Elle avait une peau couleur d’acajou foncé, absolument sans défaut et qui avait l’air si doux que j’ai dû me retenir pour ne pas passer la main dessus comme sur un meuble parfaitement verni.
Et pourtant, ce n’est pas le type de peau que j’aime.
Elle allait sûrement très bien avec une biguine…
Tu me comprends je suis sûr, « Sophie qui n’a pas de blog ».



 

lundi, 15 mai 2017

Le cul béni, parfois…

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Dès que je suis entré dans le Cloître des Billettes, je l’ai vue.
Assise, rêvant à je ne sais quoi, elle ne regardait même pas son café.
J’ai cru un instant qu’elle admirait les voussures qui liaient les arcades autour de l’atrium mais non, elle attendait.
Je me suis arrêté derrière elle un moment.
Pendant de longues minutes j’ai admiré le mouvement discret de ses épaules que soulevait son souffle régulier.
Comme souvent, je m’arrêtai dans ce cloître.
Une paix et d’un silence rares dans le quartier des Archives y régnaient.
J’aimais y passer et déambuler dans la galerie, m’asseyant parfois sur le rebord de pierre qui entourait l’atrium et écoutant les accords de l’orgue qui arrivaient atténués à mes oreilles.
Là, je suis resté immobile derrière elle, regardant, avec gourmandise je dois dire, sa nuque dégagée par un chignon.
Le chignon tout simple.
Le chignon qui ne sert qu’à tenter le pauvre homme, le poussant presque malgré lui à vouloir vérifier du bout des doigts si la peau ainsi dévoilée était aussi douce qu’elle semblait l’être.
Tout était fait pour me faire soupirer derrière elle.
Même cette chemise blanche, un peu trop grande, exprès j’en suis sûr pour me donner envie de la remonter sur l’épaule ainsi dégagée.
Je ne connaissais pas cette femme et n’avais pas de goût particulier pour la blondeur mais je dois avouer qu’elle avait, dans cette posture d’attente rêveuse, quelque chose d’extrêmement attirant.
Quelque chose de surprenant aussi.
Malgré la fraîcheur du cloître, elle gardait cette épaule découverte et les manches retroussées.
Rien qu’à la regarder, pauvre frileux que je suis, j’en frissonnais.
J’ai osé dire doucement :
- Il n’est pas venu ?
Elle a soupiré.
- Non…
La chemise a glissé un peu plus quand elle a haussé les épaules.
Mon dieu cette épaule…
J’ai failli remonter moi-même l’emmanchure de la chemise pour la couvrir.
Je lui ai seulement demandé si son café n’était pas froid.
Elle a bien voulu en prendre un autre…