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lundi, 25 mars 2024

Devoir de Lakevio du Goût N°189.

Devoir de Lakevio du Goût_189.jpg

Ce vendredi nous sommes le 22 mars.
Ce fut un moment où quelque chose d’important arriva.
Mais pas que pour moi.
Mais pour vous ?
Je suis sûr que nombre d’entre vous se rappelle quelque chose d’un 22 mars.

Ce matin, comme tous les matins, j’écoute France-Inter.
L’indicatif du bulletin d’infos de sept heures est celui de mes dix-neuf ans.
Car ce matin j’ai dix-neuf ans.
J’entends Daniel Cohn-Bendit, qui n’est encore que « Dany le Rouge », « ce Juif Allemand » comme disait Peyrefitte, renvoyer Charles de Gaulle à ses chères études.
Je me rappelle que ce mouvement avait pour origine l’interdiction pour les étudiants d’aller vérifier les différences entre les étudiants et les étudiantes.
Surtout d’aller étudier la chose dans les piaules des étudtantes.
Bref, une vieille histoire de curiosité légitime brimée par de vieux…
De Gaulle est en train de m’expliquer, alors que le temps est superbe, que je dois renoncer à « courir le risque de l’aventure » et, piquant le mot à Rabelais s’exclame « Mais c’est la chienlit ! » .
Pfff... Vieux con, va...
Je me rappelle que j’étais indigné par le fait que Violette Leduc et Roger Peyrefitte risquent la taule pour leurs préférences en matière amoureuse, occupé que je suis à essayer de donner corps aux miennes.
Je suis tout de même moins fainéant que je ne le deviendrai car je persiste à lire Sartre, Balzac et Châteaubriand.
Et se taper les Mémoires d’Outre-tombe en y prenant plaisir, faut être un peu dingue...
Cela dit, c’est une époque saine, où les forces de l’ordre jouent un rôle actif dans la discipline sportive de la gent estudiantine, toujours prompte à s’avachir.
Ces braves gens en uniforme nous assurent un entraînement à la course quasi quotidien, et, en échange, reçoivent quelques cailloux qui leur donnent du cœur à l’ouvrage.
C’est là qu’on constate hélas que l’étudiant romantique et maigrelet, plus musclé de la langue que des mollets, court nettement moins vite que le CRS entraîné et bien nourri...
Une fois ils entrèrent à la Sorbonne.
Ils en sortirent aussi peu diplômés qu’ils y étaient entrés.
Nous en sommes sortis avec plus de bleus qu’à l’entrée…
Pour ma part, je suis plus tracassé par d’autres soucis que les exams ou l’éducation de la maréchaussée car j’ai au cœur l’angoisse que ma copine du moment ne se jette dans les bras d’un trotskyste qui la regarde comme un gâteau.
Ce petit bourge est un traître à la cause du peuple, moi.
Elle me laissera sans doute le cœur brisé, la cervelle vexée et les convictions politiques ébranlées.
La suite donnera raison à mes angoisses, cette hyène se maqua avec un maoïste, fanatique de la « Révolution Culturelle ».
Bon, c’est surtout parce qu’il avait les yeux bleus et qu’il en avait deux, lui…
Quoique d’un caractère peu enclin à pleurer sur le lait renversé, je reprendrais bien un peu de ce mois de mai de l’an de grâce 1968, surtout qu’à l’époque, ce qui m’empêchait de courir, c’était la flemme, pas la clope…
Et puis, c’était une époque où l’on réclamait avec force le droit de vivre, pas de survivre.