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mardi, 16 avril 2019

Notre Père, qui êtes soucieux...

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Hier soir, nous étions effondrés à regarder Notre-Dame flamber de toutes ses poutres.
C’est à regarder l’incendie que je me suis dit, avec une patate de deux kilos dans la gorge, que je voyais toute ma vie partir en fumée.
Toute ma vie, enfin… Du moins ma vie jusqu’à jeudi dernier, jour où avec une amie nous étions allés manger des choux chez Odette.
C’est en accompagnant notre amie à l’église Saint Nicolas des Champs qu’on est passé devant Notre-Dame encore entière et que j’ai pris la photo qu’Heure-Bleue a mise sur son blog.
Nous avons regardé les informations jusqu’à plus de vingt-trois heures et nous avons pensé à ce qui disparaissait sous nos yeux.
Notre-Dame est avec moi depuis que je suis tout petit.
Ma grande sœur m’a emmené en haut des tours alors que je n’avais pas huit ans.
Elle m’a aidé à monter les cent milliards de marches qui menaient jusqu’au « Grand Bourdon » dont j’ai entendu le son. Il était produit par le guide qui passait sur le bord une clef anglaise monstrueuse.
Plus tard, je suis remonté en haut des tours avec une… Une… Une camarade.
Je me rappelle lui avoir posé mon pull sur les épaules car il y avait du vent en haut des tours.
Puis je suis souvent passé devant en allant à la fac, je la regardais le long du quai de Montebello, je me retournais pour la voir depuis le quai la Tournelle et je continuais ainsi jusqu’à Jussieu.
Plus tard, j’y suis allé au mois de janvier 1972.
Je m’en souviens car Heure-Bleue était enceinte et eut une envie de cerises.
J’en ai trouvé près de Notre-Dame.
Des cerises en janvier… Je crois qu’on a fini de les payer quand l’Ours a eu son bac…
Après, on l’a emmené au square Jean XXIII –le seul pape aimé de tous sauf des chrétiens car il était humain- pour jouer.
L’Ours a tenté, vainement je dois avouer, de poser un grain de sel sur la queue d’un pigeon.
Puis on l’a visitée tant de fois, cette cathédrale.
Un Américano-pakistanais avec qui j’avais travaillé à New-York, musulman de son état, était venu me voir à Paris.
Il avait été ébloui par la beauté de Notre-Dame qu’il avait visitée un peu craintivement au moment d’entrer puis conquis une fois dans la nef.
Cette cathédrale, finalement m’accompagne comme beaucoup de Parisiens, depuis que je suis tout petit.
Nombre de cathédrales ont été esquintées par les guerres et restaurées intégralement en un temps raisonnable.
J’espère bien y retourner avec la lumière de mes jours avant notre fin dernière…
Je suppose que le type qui a mal écrasé sa clope en partant s’était déjà rongé les ongles jusqu’au poignet à minuit en regardant la télé…
Puis pour sortir de mon égoïsme petit-bourgeois, je me suis dit que nombre de Syriens voyaient leur vie et leur enfance disparaître sous les décombres depuis des années.
Mais j’aimerais bien revoir Notre-Dame…

lundi, 15 avril 2019

Ce n'est pas dur qu'aux miséreux...

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"En haut de la rue Saint-Vincent, un poète et une inconnue,
S'aimèr'nt l'espace d'un instant, mais il ne l'a jamais revue.
Cette chanson, il composa, espérant que son inconnue,
Un matin d'printemps l'entendra quelque part au coin d'une rue."

(La Complainte de la Butte)

C'est de "l'espace de l'instant" que je voudrais que vous me parliez.

Histoire inattendue, éphémère, dès lundi !


J’aime la rue Paul Albert, celle du tableau que tu proposes, Lakevio.
Oui, je suis sûr que c’est celle-là car je reconnais, au bas de l’escalier mille fois arpenté, la rue Ronsard.
Au coin de la rue Ronsard, juste en face de l’escalier, quand les rues Charles Nodier et André Del Sarte la rejoignent, il y avait une boulangerie.
Je pense parfois à cette boulangerie « l’espace d’un instant »…
Il y a des instants comme ça, des instants qui devraient durer l’éternité.
À la revoir au coin de la rue alors qu’elle est remplacée par un bistrot me plonge dans un de ces trop brefs moments où vous sentez votre cœur près d’éclater et un sourire irrépressible vous venir aux lèvres.
Je ne connais que trop bien cette sensation étrange qui vous pèse dans le ventre et vous dilate la poitrine et en même temps vous allège.
Le « paradoxe du bonheur triste » sans doute.
Ce sentiment écartelant qui vous saisit quand vous revient le bonheur d’avoir vécu l’instant et la certitude qu’il s’est enfui à jamais.
Il suffit de peu, très peu de choses, une vitrine de boutique un éclat de lumière, le passage d’un nuage, une odeur vous pousse à clore les paupières et vous ramène dans des temps où tout était plus léger.
« L’espace d’un instant » qui me saute à l’esprit comme un pavé dans la g… d’un flic.
L’espace de cet instant qui me vit, marchant lentement, mon cartable me battant le mollet.
J’étais tout seul et ça ne me plaisait pas mais il faisait beau et doux alors, en haut de la rue de Steinkerque, je suis entré dans le jardin du Sacré-Cœur.
J’ai monté le « pas d’âne » qui mène en haut, puis j’ai pris la sortie qui donne sur la rue Paul Albert et je suis sorti pour descendre les escaliers jusqu’à la rue Ronsard.
Je me suis arrêté devant la vitrine de la boulangerie,  juste à côté de la porte.
Un instant plus tard elle est sortie, son cartable dans une main, un « pudding » dans l’autre.
Le « pudding » des boulangeries était exactement ce que ma mère appelait « le pain perdu ».
La boulangère a crié « la porte ! » quand elle s’est retournée, ne sachant que faire, les deux mains encombrées.
J’ai dit « je peux fermer la porte ».
Je ne sais pourquoi j’ai dit ça. Peut-être, sûrement même, parce que je la trouvais jolie.
Elle a dit « oh merci ! », j’ai fermé la porte.
Quand je me suis retourné elle m’a tendu son cartable.
Elle a retiré le papier, a arraché un petit morceau du « pudding » et m’a dit « tu en veux ? »
J’ai juste hoché la tête et, les deux mains encombrées, je me suis penché. Elle a glissé délicatement le petit morceau de « pudding » entre mes lèvres et a dit « T’es en quelle classe ? »
J’ai eu très chaud aux oreilles, je le sais bien.
J’ai réussi à avaler ma salive avec la petite bouchée de « pudding », je l’ai regardée et j’ai dit « en sixième… » elle m’a répondu « Ah moi aussi ! »
Avant de descendre la rue André Del Sarte et la rue de Clignancourt qui m’amènerait chez moi je l’ai suivie du regard, elle descendait la rue Charles Nodier.
Nous n’étions pas du même monde…
Mon dieu que j’aurais aimé faire partie de son monde à ce moment, le mien était bien plus dur…
J’en ai fait partie « l’espace d’un instant » et j’aurais donné ma vie pour qu’il durât toujours.
J’ai suçoté en rêvant ce morceau de « pudding » jusqu’à la maison et aujourd’hui oublié le visage de cette petite fille mais pas un instant de la scène…
Cet « espace d’un instant » est un des nombreux instants de bonheur grappillés au long de ma vie.
Et il y en eut...


samedi, 13 avril 2019

« The lazy dog jumps over the quick brown fox »

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Ne me dites pas que cette note est ennuyeuse et inutile, je le sais.
Comme celle du titre, la phrase « Voyez le brick géant que j’examine près du wharf » bien connue des gens de l’informatique contient toutes les lettres de l’alphabet.
Alors voilà où je voulais en venir : J’ai démonté mon clavier une fois de plus.
Non, deux fois.
Vous rappelez-vous que les touches se mouvaient comme dans du sirop ?
Eh bien, c’était normal.
De plus, chaque fois que je tapais un mot, s’élevait du clavier une odeur de vinasse qui m’agaçait de plus en plus.
J’ai donc démonté de nouveau le clavier.
J’ai passé la partie comprenant les touches sous le robinet d’eau chaude.
Au début, quelques ruisselets rosés ont coulé…
J’ai persisté jusqu’à ce qu’une eau claire coulât du dispositif.
J’ai enfin posé le clavier sur le radiateur.
Radiateur à peine tiède.
Alors je suis descendu voir la voisine charmante du deuxième étage.
Elle m’a prêté bien volontiers son sèche-cheveux.
Une fois les touches parfaitement mobiles et sèches, j’ai remonté le clavier.
Las… Il ne fonctionnait plus du tout.
Il restait d’un mutisme d’élève un jour de récitation…
Alors je l’ai démonté pour la seconde fois de la journée.
Je dis « seconde » parce que j’espérais bien que ce serait la dernière fois.
J’ai sorti mon voltmètre de son carton et ai commencé à vérifier certaines connexions.
Tout allait bien, ce qui ne laissait pas de m’inquiéter car quand tout va bien, c’est seulement qu’on n’a pas trouvé ce qui ne va pas.
J’ai enfin mis le doigt, que dis-je, la pointe de touche, là où ça péchait.
Un interrupteur microscopique avait pâti du démontage.
J’ai mesuré la consommation du clavier et en ai déduit que s’il était toujours « ON » je changerai les piles tous les ans au lieu de tous les deux ans.
J’ai ressorti mon fer à souder, rangé depuis que j’avais réparé la « platine vinyle » d’un ami, c'est-à-dire environ trois ans.
C’est avec plaisir que j’ai constaté que je n’avais pas –encore- besoin de loupe ou d’autres lunettes pour souder le minuscule « strap » qui allait remplacer le microscopique interrupteur.
Et voilà, lectrices chéries, pourquoi vous pouvez ce matin lire cette note qui n’a d’autre intérêt que vérifier que le clavier fonctionne de nouveau parfaitement.

vendredi, 12 avril 2019

Les vieux brouillés...

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C'est la plus petite rue de Paris...
Elle est chouette, non ?
Contrairement à votre serviteur, le temps est frais…
Néanmoins, ça n’empêche pas de marcher.
Loin de là.
Je ne sais plus quelle remarque entendue à la radio ou de la bouche d’une amie nous a conduits, Heure-Bleue et moi, à vérifier si nous parcourions, bien et pédestrement, les kilomètres qui, selon la Faculté, maintiennent notre cœur en bon état.
Si j’en juge par nos élans divers, nos cœurs fonctionnent plutôt bien.
Ils s’emballent moins que quand nous avions quinze ans mais ils s’emballent quand même assez souvent.
Il suffit que nous croisions des gens qui nous émeuvent, des fleurs dans un parterre sauvage comme il en reste à Paris.
De petites choses qui sur le moment nous semblent importantes.
Parfois, le simple fait de renverser mon verre de vin sur un clavier acheté l’après-midi même suffit à faire naître une émotion dans la maison.
Le genre d’émotion qui me donne envie de me coller des baffes.
Hélas, c’est aussi le genre d’émotion qui donne à la lumière de mes jours l’envie de me coller des baffes…
D’ailleurs, si mon clavier fonctionne, il a quelque chose de différent qui le rend pénible à utiliser.
Les touches nécessitent un effort plus important pour s’enfoncer et mettent plus de temps à reprendre leur position de repos.
Je soupçonne le besoin d’un démontage supplémentaire.
Si les circuits ont été nettoyés et ont repris une fonction normale, il n’en va pas de même pour les cabochons de plastique eux-mêmes…
Mais ce n’est pas de ça que je voulais vous entretenir.
Je voulais vous faire partager le plaisir d’errer le long des boulevards dits « Grands Boulevards ».
Ce plaisir fut un peu gâché par une circulation si intense que la lumière de mes jours eut quelque difficulté à respirer.
Nous apprîmes que les retraités en étaient la cause, qui manifestaient vers la République.
Un instant j’ai voulu tuer tous ces vieux qui nuisaient à la respiration d’Heure-Bleue.
Puis je me suis rappelé que j’en faisais partie, alors j’ai repoussé l’idée.
Parti à rêvasser, comme d’habitude à ce que devenaient ces « Grands Boulevards » qui me semblaient avoir une fâcheuse propension à retrouver l’air dans la débine qu’ils avaient jusqu’au milieu des années soixante.
La lumière de mes jours m’a tiré de mes réflexions en me montrant une boutique.
Cette boutique a été remplacée par un centre dentaire.
Heure-Bleue a dit d’un ton un peu rageur « ils veulent condamner les cabinets de dentistes à la faillite ou quoi ! »
J’ai opiné car ce n’est pas le premier de la même enseigne que nous voyions.
La restauration, les concerts, la médecine, la dentisterie, la lunetterie, l’alimentation, tous ces domaines qui nous soignent, nous distraient, nous nourrissent sont devenus la proie d’investisseurs qui se comportent comme des prédateurs invasifs.
Cette note est parfaitement décousue mais je vous la livre telle quelle, lectrices chéries.
N’empêche, cette journée, comme « elle » dit, eh bien « c’était bien ».

mardi, 09 avril 2019

Après les petits Condorcet ceux de Jacques Decour…

Ne dites rien, j’ai déjà honte…
Je m’en suis aperçu de façon  fortuite.
Une amie, la lumière de mes jours et moi buvions un café à la terrasse du « Grand Comptoir d’Anvers ».
Déjà, sur le chemin qui nous menait de la crêperie de la rue des Martyrs au café du square d'Anvers, quelque chose me disait que le monde changeait.
Des choses surprenantes allaient sans aucun doute se produire.
Le premier signe se produisit quand nous sommes passés devant le lycée.
La porte monumentale qui donne sur l’avenue, toute neuve, était déjà re-noircie !
Des jeunes gens pressés de marquer leur désaccord  avec le Ministre chargé de la tâche impossible de les éduquer avait encore eu une trouvaille étrange.
Vaguement dégoûtés par le comportement de ces jeunes gens, nous avons continué vers le café.
Nous eûmes quelques pensées vaguement fascisantes desquelles il ressortait que la remise en état de la porte à leur frais, surveillés par une armée de dobermans sans muselière leur ferait du bien.
Je me suis arrêté de penser des choses comme ça en me souvenant de mes voyages en métro jusqu’à la station Anvers pour aller au même lycée.
Déjà, des vieux de mes âges pestaient à nous entendre, jetant des « J’te foutrais tout ça sur les autoroutes avec des pelles et des pioches ! Et les cheveux à ras s’il vous plaît ! Non mais ! Ah c’est pas avec ça qu’on va relever la France ! »
Alors ramené à une plus grande indulgence j’ai suivi mes deux commensales jusqu’au café.
Néanmoins, c’était le premier signe !
Le second est apparu de façon tout à fait impromptue quand, après avoir reposé ma tasse, j’ai posé ma main sur la table.
C’était là ! Le second signe !
Oui ! Je deviens un homme sur le tard !
Sur la première phalange du majeur de la main gauche il y avait deux poils.
Des poils poussent enfin sur les doigts d’une main qui n’en avait jamais eu sauf peut-être sur la paume…
Le troisième signe que tout allait changer est alors arrivé.
Surtout moi qui allais me retrouver tout seul comme une andouille si je continuais dans cette voie risquée.
Après un dîner réussi qui avait beaucoup plu à Heure-Bleue j’ai débarrassé la table.
Puis j’ai posé mon verre qui contenait encore du vin à côté de mon clavier.
Hélas, je n’ai pu le boire.
Posé en partie sur le pied de mon écran il s’est renversé sur le clavier vieux de deux semaines qui remplaçait le précédent noyé dans le thé…
J’ai démonté le clavier.
Entièrement !
Nettoyé !
Entièrement !
Le soir, au coucher, j’ai vérifié autre chose, inquiet à l’idée qu’une seconde puberté risquât de  me gâcher la vie.
Mais non, ce devait être une erreur, je n’avais toujours pas un poil sur la poitrine hormis les sept poils qui me donnaient un air viril depuis mes dix-huit ans.
Ce matin  le clavier avait séché et m’a permis, comme les autres matins, de vous raconter toutes ces petites choses sans importance qui encombrent mon blog…