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vendredi, 21 octobre 2022

Désenchantement matinal…

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Après avoir lu un articulet sur la prochaine bévue d’un ministre de l’Intérieur qui pense réduire une famille au statut peu envié de SDF pour punir un des rejetons « qui fait dealer », j’ai commencé à me demander « mais dans quelle direction va-t-on ? »
Alors j’ai laissé tomber cette lecture pour écouter la radio.
C’est là que j’ai entendu que revenait sur le tapis une « promesse », celle de conditionner le versement du RSA à un travail de quinze heures hebdomadaires. Comment peut-on appeler « promesse » cette indignité ?
Ça ne consisterait pas à prouver qu’un travail n’existe que s’il est bénévole ou financé par le contribuable ?
Apparemment le travail disparaît dès qu’il est question  de le payer de façon que celui qui le fait puisse en vivre.
Heureusement, une dame qui devrait avoir honte a remarqué que « par chance les personnes en situation de handicap constituent un vivier d’emplois indispensable quand les entreprises ont du mal à recruter de la main d’œuvre »…
Lassé par ces assauts de cynisme infligés de bon matin, je me suis dit « tiens, si j’écrivais une petite note ? Histoire de distraire mes lectrices chéries. »
C’est là que je me suis rappelé la sensation terrible de cocufiage qui m’a saisi quand j’ai « fait valoir mes droits à la retraite » comme dit l’opuscule qui décrit le labyrinthe administratif, dernier « coup de collier » qui vous attend si vous souhaitez vous reposer d’une vie de labeur.
C’est là que j’ai repensé à mon métier.
J’ai pensé travailler toute ma vie pour améliorer le sort commun.
J’ai même rêvé, c’est dire ma naïveté, que quand une machine soulage le travailleur – le vrai, celui qui va au charbon - c’est pour lui permettre un accès plus aisé à d’autres activités sans perte de revenus.
Je pensais connement à la culture, l’ascension sociale, les loisirs, l’éducation, des trucs comme ça, des idées de gauchistes, quoi....
Je dois avouer que se rendre compte au moment de prendre sa retraite qu’on a juste augmenté la rentabilité des industries et que leurs actionnaires, leurs présidents et leurs directeurs ont licencié les gens et gardé les bécanes.
Ils se sont contentés d’exporter le boulot dans des pays trop pauvres pour refuser des aumônes quand l’homme était indispensable à la tâche.
J’ai aussi remarqué qu’en lâchant simplement une miette de leurs dividendes, la fameuse « compétitivité » dont ils nous rebattent les oreilles aurait été préservée.
Quelques miettes de plus auraient même permis de faire sortir les pays pauvres de la misère pour leur permettre d’accéder à la pauvreté…
Bref, les bienfaits supputés n’ont pas atterri sur les bonnes cibles.
Alors je comprends ceux qui le savent et sont dégoûtés d’avance de choisir de vivre plus frugalement de choses et d’activités plus simples et plus directement utiles…
Bon sang, quel triste matinée…

140ème devoir de Lakevio du Goût

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J’ai été un poil effrayé par cette toile d’Edward Hopper.
Mais vous ?
Qu’en direz-vous lundi ?

jeudi, 20 octobre 2022

« Attends »…

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Combien de fois entends-je cette injonction : « Attends ! »
Je fais chaque matin le lit.
Rien d’extraordinaire me direz-vous mais l’affaire commence là.
Je fais le lit, tire les draps, pose la couette puis le plaid – au cas où…- et je commence à étendre dessus le truc bizarre qu’Heure-Bleue a trouvé « chouette », une sorte de drap blanc, fait d’un tissage « mâtiné cochon d’Inde » dont je ne sais s’il s’agit d’un tissu damassé ou d’un macramé étrange.
Ce machin est difficile à poser correctement car les motifs s’en déforment selon que la tension du tissu est ferme ou lâche.
Bref, poser ce machin est emm…nuyeux au possible.
J’appelle donc Heure-Bleue à l’aide.
Évidemment arrive ce « Attends » qui ne devrait pas m’étonner.
Les heures passent et nous décidons d’aller nous balader.
Vers Saint Lazare très souvent car c’est plein de boutiques, certaines lui plaisent, d’autres me plaisent.
Nous sommes généralement satisfaits de ce que nous voyons.
À un détail près toutefois.
Heure-Bleue s’arrête brusquement devant une vitrine, intéressé par une autre je continue mon chemin.
À peine éloigné j’entends « Attends ! », elle arrive quelques instants plus tard et peste, se dit abandonnée.
Elle hésite tout de même à ajouter façon Sarah Bernhardt « seule au milieu des éléments déchaînés » mais l’idée est là…
Je devrais être habitué mais non.
Dès l’idée du départ, quand elle dit « Bon, on y va… » je sais qu’elle devra mettre ses chaussures, faire pipi, aller dans la chambre.
Elle dit, « Ça y est ! Je suis prête ! ».
Alors que j’ai déjà ma pelure sur le dos et les clefs à la main, je pose la main sur la porte et j’entends « Attends ! »
Pourquoi, alors qu’elle est censément prête ?
Parce qu’en réalité, elle a bien commencé à ouvrir la penderie mais a été arrêtée par un petit bout de papier tombé d’une poche qu’il faut, toutes affaires cessantes aller mettre dans la poubelle de la cuisine.
Quant à moi, soit je ne l’aurais pas vu, soit je l’aurais remis dans ma poche.
Donc « Attends » est une ponctuation dans la vie de la femme de ma vie.
Je me demande, au train où vont les choses ce qui pourrait obliger la lumière de mes jours à prendre conscience de ce qu’est l’urgence.
Je la vois bien, en cas de bombardement.
Alors que je la prends par la main pour la tirer vers l’escalier et la descendre à la cave, elle regarde les premiers décombres tomber du plafond, elle me dit « Attends » et prend le balai et commence à ramasser les morceaux du plafond…

mercredi, 19 octobre 2022

En sortant de l'école.

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Hier nous avons regardé une émission qui portait sur l’école.
« Histoires d’une nation : L’école »
Nous avons trouvé ça plutôt passionnant.
L’école que nous avons connue, celle des années cinquante et soixante, y est assez bien présentée.
Bien que l’école et le lycée fussent assez différents entre Paris et « la province » ou « les Territoires de la ruralité » si vous êtes branchés « novlangue ».
Il semblerait même que, quelles que soient les classes sociales et les époques, les soucis soient les mêmes…
Un Michel Cymes que je n’aurais pas soupçonné sous cet angle a raconté une histoire d’école primaire qui l’a éprouvé.
« Il y avait une petite fille dont j’étais tombé éperdument amoureux et je me disais en la voyant « quand je la croiserai, je lui dirai « ton chien s’appelle comment ? », je lui dirai ! »
Et, cet homme de soixante-cinq ans aujourd’hui nous dit ça avec la même émotion que quand il avait six ou huit ans…
D’autres personnes connues sont venues le dire de façon un peu différente mais toutes avaient pour « L’École » une admiration et une reconnaissance qui ne s’était pas amenuisée avec les années.
Qu’Ariane Ascaride, Michel Cymes, Nagui, Daniel Pennac et Martin Fourcade nous en parlent avec la même émotion que celle qui parfois m’étreint quand je passe devant mon lycée ou dans les escaliers de Montmartre me rassure.
Je ne suis donc pas complètement cinglé quand je me rappelle avec nostalgie ces moments de mon enfance, de ma jeunesse et de tous les tracas qui vont avec.
Si des gens qui ne sont ni des « nuls en tout » ni des « cadors en tout » subissent les mêmes tracas entre trois et dix-huit ans, c’est au moins le signe que nous appartenons à la même espèce.
Néanmoins, au cours de ces deux heures, une autre information que la marche de la société française se dessine.
Quand on écoute les participants, une différence se fait jour entre les hommes et les femmes dès le moment où les unes et les autres n’étaient encore que des filles et des garçons, voire des fillettes et des garçonnets.
Les filles, déjà, se montrent plus disertes que les garçons sur l’école elle-même, que leurs études aient ou non été couronnées de succès.
Que ces derniers aient été « bons élèves » ou non, leur souci semble de s’être demandé comment faire pour parler aux filles…
Je me demande ce qui a mal tourné dans les vingt dernières années pour que la corporation la plus détestée des jeunes ne soit plus la police mais l’école...
Et ça, ça me semble bien plus inquétant que les bêtises lénifiantes qu’on nous raconte sur l’école.

dimanche, 16 octobre 2022

La cigarette des vraies tumeurs

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La note de Clodoweg a fait soudain ressurgir le souvenir d’un songe que j’ai fait il y a des années, un songe dont je ne sais toujours pas si c’est un rêve ou un cauchemar.

J’ai eu froid, d’un coup.

Je me suis levé d’un lit qui disparut dès que fus debout.
Il faisait nuit.
Je suis allé vers la porte, elle ne fermait plus.
La serrure n’était pas cassée, non, simplement l’huis et le chambranle ne se joignaient plus.
Un jour de plusieurs centimètres empêchait la serrure de faire son office.

Et quelqu’un montait l’escalier.
Quand il a atteint le palier et qu’il a voulu ouvrir la porte, miraculeusement celle-ci a accepté de se fermer.
J’avais peur quand même, ma mère n’était pas là.
Mon père non plus.
Pas plus que mes sœurs et l’ameublement de l’appartement avait quelque chose de bizarre.
La moitié des meubles avait disparu au profit d’échafaudages inconnus.
Le jour s’est levé d’un seul coup, comme une lampe qu’on allume alors je suis sorti.
Je suis allé sur le boulevard.
C’était le boulevard Ornano, je l’ai reconnu tout de suite.

Le cinéma proposait un film que j’avais déjà vu mais dont je ne pus lire l’affiche.
Je savais seulement que je l’avais déjà vu.

J’ai avancé vers la rue Ordener.
J’ai vu mon père arriver vers moi.
Je l’ai appelé.
Plusieurs fois. Plein de fois.

Il portait sa gabardine grise, celle que je lui connaissais depuis des années.
Il avançait sans regarder autour de lui.
Il ne venait pas.
Il n’allait pas.
Il partait.
Il quittait tout pour je ne sais où.
Je l’ai encore appelé.
Il ne m’a pas entendu.
Il est passé sans me regarder.
Une vague de tristesse m’a alors submergé, telle que je me suis mis à pleurer à gros sanglots.
On m’a secoué.
Je me suis réveillé.
Heure-Bleue m’a demandé :
- Ben alors Minou ? Qu’est-ce que tu as eu ? Tu as fait un cauchemar ?
- J’ai rêvé de mon père. Je crois bien qu’il est mort maintenant…
Mon père était quelqu’un de gentil.
Taquin, voire infernal mais gentil.
Vraiment gentil.
Je ne sais pas si je dois remercier Clodoweg de m’avoir remis cette nuit-là en tête mais je ne peux pas lui en vouloir de m’avoir rappelé mon père qui fut si vivant…