mercredi, 03 janvier 2018
Un conte d’hiver.
J’ai fait un rêve bizarre.
Je traînais dans les allées du cimetière de Montmartre, une femme un peu plus vieille que moi que je ne pense pas connaître me tient par le bras.
Elle me fait passer dans des allées inconnues où des tombes renferment des gens non moins inconnus.
Je ne sais pourquoi j’ai la gorge qui se serre.
Nous avançons parmi les rangées de tombes simples, pas un seul de ces mausolées clinquants ni de ces tombes bizarrement théâtrales dont ce cimetière est riche.
Elle me traîne devant l’une d’elles et s’arrête.
Il n’y a rien, seule une dalle de béton vaguement quadrillé et son rebord lisse et taché de lichens indique que c’est une tombe.
Mon guide me force à me pencher pour que je lise les quelques mots vaguement gravés sur le ciment et déjà presque effacés par le temps.
À mon amie
17 Fév. 1949
18 mai 2005
Je dis seulement « Elle était jeune… »
Elle me serre brusquement le bras, je la regarde et je vois les larmes couler sur ses joues.
Je la fixe un moment puis je regarde la tombe et je me mets soudain à pleurer à gros sanglots.
Je suis submergé par un chagrin insurmontable.
J’ai les épaules secouées de façon irrépressible.
C’est là que je me rends compte que je ne crois plus en rien et que ça fait trop longtemps que j’ai quitté la pension.
C’est pour ça que quand j’ai voulu prier je me suis aperçu que je ne savais plus prier.
Je n’ai rien d’autre que les pleurs pour calmer un chagrin dont je ne connais même pas la cause.
Un portable sonne.
Je me réveille contre Heure-Bleue.
Au moins la journée commence bien.
Je lui parle de mon rêve.
La lumière de mes jours me dit que je pleure souvent la nuit et que j’ai des nuits agitées…
C’est dingue, non ?
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mardi, 02 janvier 2018
Tous ces écrits vains m’ennuient…
Bon, nous voici aujourd’hui dans l’année 2018.
Tornade vient de repartir.
Un calme aussi surprenant qu’olympien s’est abattu sur la maison.
Le pessimisme hivernal qui s’abat sur votre serviteur et le recouvre de septembre à mars est bien installé maintenant et berce mon cœur d’une langueur monotone.
Merde, ça a déjà été écrit, il me semble.
J’ai fait mon tour quotidien sur ce qui s’écrit à droite et à gauche.
Même si j’ai un tempérament plutôt « fleur bleue », je suis effrayé à lire partout des tas de choses dégoulinantes de bons sentiments que je sais d’expérience tous plus faux les uns que les autres.
On vit dans un monde de Caliméro !
La guimauve coule abondamment et ça m’inquiète.
Ça me pousse à craindre que la prochaine guerre n’éclate bientôt, encore plus féroce et insane que la dernière grande guerre
Ce que je lis me fait irrémédiablement penser à ces tempéraments d’Europe de l’Est ou de l’époque dite « Romantique ».
Ces temps et ces gens censément délicats, qui fondent en larmes à écouter un rossignol ou regarder un cygne, ces gens qui éconduits se morfondent puis se consument de chagrin.
Puis soudain se révèlent d’une férocité sans pareille et se jettent sur un ami proche et l’énucléent avec une cuiller à café pour un désaccord sans réelle importance.
Les mêmes qui, tout en pleurant tout le sirop de leur sentimentalisme, remplissent les charniers des corps de ceux qui ne sont pas d’accord…
Alors, pour cette année, je ne vois rien de particulier si ce n’est :
Si vous êtes heureux, profitez-en.
Si vous êtes dans la dèche, surnagez et tentez de voler sans vous faire serrer un fruit agréable sur un étal.
Si vous êtes malheureux, ça va passer, si si, vous verrez, il suffit souvent de croiser plus malheureux que soi.
Si vous êtes seule, dites vous que vous croiserez une autre solitude et qu’à deux seuls on n’est plus seul.
Si vous êtes victime d’aigreur de l’âme, là c’est mal parti, rien ne trouvera jamais grâce à vos yeux.
Mais à tous je souhaite une année 2018 aussi bonne que possible.
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samedi, 30 décembre 2017
Longtemps je me suis couché de bonheur, et la lumière à peine éteinte, hein...
Lectrices chéries mes amours !
Comme je suis heureux de vous retrouver aujourd’hui !
J’ai cru que j’allais mourir.
Si si ! J’étais même sûr que ce matin je serais mort, allongé dans un tiroir de l’IML, quai de la Rapée.
Et pourquoi cette certitude affreuse ?
Hier, j’étais tranquille, chose des plus rares ces temps-ci.
Heure-Bleue était partie avec Tornade traîner dans Paris, faire quelques courses du côté de Saint Lazare et de la rue des Petits Champs.
Pendant ce long moment de calme, j’ai écouté Marie-Claire Alain interpréter des œuvres de Jean-Sébastien Bach.
Consacré à son époque plus grand improvisateur de son temps.
Pourvu aussi d’un « caractère de mince » qui le poussa sous un mauvais prétexte à rosser un bassoniste pour cause de manque de talent.
J’étais donc en train d’écouter religieusement de la musique profane –ouais, bon, je sais- quand soudain un frisson me parcourut l’échine.
Je me rendis soudain compte qu’un froid sournois m’envahissait.
Tout en écoutant l’orgue de l’église de Värde au Danemark, je me frottais les mains.
Mes extrémités, sauf celle à l’abri, oui celle-là, gelaient petit à petit.
Je grelottais.
Je savais que je n’avais pas la grippe, mon front comme mes mains était glacé.
Pendant que Marie-Claire s’amusait avec ses claviers, je partis fouiner sur le Net à la recherche de renseignements sur cette soudaine sensation de froid qui m’envahissait.
On m’a proposé, en dehors de la grippe, tout un tas de pathologies propres à vous envoyer ad patres en deux temps trois mouvements.
Je me voyais terrassé par une endocardite infectieuse.
Sans parler d’autres saletés toutes plus sournoises les unes que les autres.
Je me sentais mourir quand une sensation de mieux est arrivée.
Oui, Heure-Bleue et Tornade sont arrivées.
Néanmoins, passée la première sensation de chaud qu’elles ressentirent à leur arrivée, j’avais toujours aussi froid.
Ça alla mieux le temps de préparer le repas, je n’ai pas eu froid dans la cuisine.
Ni pendant que nous le dégustions car je me suis fait aider par un Gewurztraminer d’une bonne année.
Normalement, c’est pour Tornade, mais là, hein… La maladie…
C’est en allant nous coucher que j’ai su la cause de ma maladie.
Heure-Bleue, qui a toujours trop chaud, avait ouvert le matin la fenêtre de la chambre pendant que Tornade et moi étions partis faire les courses.
Évidemment, la lumière de mes jours n’ayant jamais froid elle ne l’avait pas refermée…
La maison est restée ouverte à tout vent par une température de 5°C…
Ça m’a du coup guéri instantanément.
Alors, ce matin, je suis sorti chercher des croissants pour mes deux commensales.
Il faisait un temps superbe et une température printanière.
Je me suis fait la réflexion qu’il y avait peu de pigeons dans le quartier.
Puis j’ai vu les corbeaux qui prenaient l’air en croassant.
Je crois qu’ils bouffent les pigeons car les corbeaux sont gras comme des oies.
Bref, je suis content d’être encore parmi vous ce matin, lectrices chéries…
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jeudi, 28 décembre 2017
La cour des contes.
Hier soir, Tornade est arrivée à la maison.
On a l’impression que l’appartement a perdu une pièce…
Mais c’est sympa.
Je ne sais plus de quoi on parlait qui m’a rappelé quelque chose.
Je me suis fait sourire tout seul.
C’était ma troisième année chez les fous, l’avant-dernière de mes quatre années de prison .
J’avais un copain qui s’appelait Alain.
Je n’ai jamais su son prénom, Alain était son nom de famille.
Il était devenu mon « voisin de pupitre » car on nous avait séparés, mon ami Loïc et moi.
Alain était petit, très petit.
A la récré de dix heures, on jouait à une guerre quelconque entre deux bandes quand Alain fut agrippé par un ennemi.
Affolé il hurla mon nom « Le Goût ! Il va me tuer ! »
N’écoutant que mon courage, je me ruai à son secours et tentai d’attraper le poignet de « l’ennemi » en criant « Je serais toi, je ferais pas ça ! »
Même pas inquiet, « l’ennemi » osa « viens-y viens-y ! »
Je cherchai alors une réplique bien sentie.
Elle arriva sans peine, sortie de la dernière aventure de Blek le Roc que j’avais lue il y a peu, juste avant les vacances de Noël.
« Si tu lèves la main sur mon ami, je laisse tomber la mienne sur toi et elle est plus lourde que tu ne penses ! »
C’était vachement mieux que « Mille castors ! »
Bon, je ne muerais pas demain alors ça faisait moins sérieux que ça n’aurait dû mais j’ai tenté le coup.
J’aurais bien tenté une autre, lue plus loin quand Blek le Roc menace un « Tunique rouge ».
« J’ai du prurit sous mon gilet et ça me démange ! »
Mais comme je ne savais pas ce que « prurit » ça voulait dire, je ne l’ai pas dite.
On se sait jamais, dans une pension de Frères, si un mot inconnu ne va pas coûter « une heure » ou pire « une heure avec ».
Et comme par hasard, quand ce mot arrivait, on pouvait être sûr qu’une oreille « fraternelle » traînait dans les environs…
Sachant que « une heure », c’était une heure à genoux et que « une heure avec » c’était une heure à genoux sur une règle.
Ça incite à la prudence…
10:02 | Commentaires (11)
dimanche, 24 décembre 2017
Conte de Noël...
Le Christ se pencha vers le monde et soupira…
« Il faut y retourner, ça n’a pas marché, mon truc » se dit-il et prit donc la décision de faire ce qui lui trottait par la tête depuis un moment.
Son père tourna la tête vers lui :
« Fiston, tu vas faire une connerie ! Cette fois ci je te laisserai te démerder ! »
C’est un minimum quand on est le bon dieu de ne pas avoir à demander à son fils ce qu’il a en tête.
Il ajouta « Et ne sois pas mal poli ! » quand il entendit son fils penser « pour ce que tu m’as apporté comme aide la dernière fois… »
Marie, regarda son fils et, comme toute mère juive se dit « Il est beau mon fils ! Il n’a pas changé ! »
De fait, le Christ avait trente-trois ans depuis plus de deux mille ans maintenant.
La Vierge Marie se tourna vers le bon dieu.
« Tu ne crois pas que je devrais l’accompagner ? » dit-elle d’un air innocent ?
Elle se disait que vraiment, ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas vu le Saint Esprit et que ça commençait à lui peser…
Le bon dieu, en bon dieu expérimenté qu’il était, savait bien que dans certains cas, faire semblant de rien était la meilleure solution et opina de l’auréole…
Après tout, c’était son anniversaire, au fiston...
Le Christ se demanda où commencer sa visite et jeta son dévolu sur la France.
Non que cette histoire de « Fille aînée de l’Eglise » l’ait convaincu mais son regard périodique sur le monde lui avait montré qu’il y avait autant de truands dans l’enceinte du Vatican que de mafieux à l’extérieur.
Et puis, les autres pays se disant chrétiens ne valaient pas vraiment plus cher que les pays qui n’avaient rien à cirer de son enseignement qui était pourtant simple :
« Aimez vous les uns les autres comme moi-même je vous ai aimés ! »
Justement, à propos d’amour, il avait été mal avisé de dire à Marie Madeleine ce « Noli me tangere » qui l’avait probablement vexée…
Rien qu’y repenser, l’idée de redescendre lui sembla vachement intéressante.
Aussitôt dit, aussitôt fait ! Hop !
La navigation étant d’une précision relative, le Christ arriva du côté de la place Victor Hugo.
Il descendit l’avenue et croisa une sorte de synagogue avec une décoration qui lui parut du plus extrême mauvais goût.
Toutes ces croix ! Ça lui rappelait un très mauvais souvenir…
Il eut une pensée peu charitable pour son père mais fut distrait par l’entrée dans l’édifice de femmes particulièrement accortes.
D’autant plus accortes que, bien que le temps fut plus frais qu’en Palestine les femmes y étaient nettement moins couvertes.
Le souvenir de Marie-Madeleine le tenailla…
« Noli me tangere »… Non mais quel con il avait été !
Il entra dans l’église, sur une espèce d’estrade perchée, un type racontait des trucs.
Il sursauta : On parlait de lui, de Jésus.
L’assistance écoutait respectueusement le type.
Le type redescendit et dit aux fidèles « Ite missa est ! »
Ça fit comme à la fin de l’école, tout le monde se rua avers la porte.
Il demanda « Où sommes-nous ? » à une dame.
« Saint Honoré d’Eylau, monsieur ! »
Comme il était jeune, bronzé et bizarrement accoutré d’une toge, la femme se détourna rapidement et dit à son voisin « Encore ces étrangers, on est envahi ! En plus ils sont pauvres, on va encore nous demander de les aider ! »
Oubliant qu’elle ne faisait rien d’autre que les boutiques et employait déjà des étrangers qu’elle oubliait de payer, elle ajouta « Ils n’ont qu’à faire comme nous, travailler ! »
Le Christ, scandalisé les suivit dehors et leur cria, exaspéré « En vérité je vous le dis, vous n’avez rien compris à mon message ! »
L’assistance fut surprise.
Un type hargneux hurla « Encore un de ces partageux ! On va régler ça tout de suite ! »
Il se dirigea vers un chantier tout proche et en revint avec deux grandes planches.
Les autres hurlèrent « Ouais ! Une croix ! »
Ils le reclouèrent en hurlant « Communiste ! Gauchiste ! Assisté ! »
Le bon dieu le vit arriver et dit platement « Je te l’avais bien dit que c’était une connerie ! J’aurais dû te prévenir, fiston, c’est eux qui m’ont créé… Ils auraient dû se cantonner à la roue et au tire-bouchon… »
Marie, revenue en pleine forme de son voyage et ravie de sa rencontre avec un Saint-Esprit récent lui dit « Allez viens, raconte tes malheurs à maman… »
09:32 | Commentaires (10)