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jeudi, 07 juillet 2016

Les droits de l’Homme sont bafouillés...

Je ne m’habituerai jamais au « parler fille ».
Jamais, lectrices chéries, jamais !
Heure-Bleue s’appuie sur le balai.
- Minou reconnais quand même qu’il y a des bailleurs qui sont fondus, regarde le café !
- Quel bailleur et quel café ?
- Mais si, c’est en balayant que ça m’est venu.
- Oui mais quoi ?
- Mais si, le café à louer, le bailleur exagère !
- Mais de quoi me parles tu ?
- Mais si ! Je repensais à ce que tu disais au type du salon de thé.
- Mais comment voulais tu que je sache de quoi tu parles ?
Après des décennies, l’abîme d’incompréhension qui nous unit –si, si, je vous assure, sinon l’un de nous se serait enfui il y a longtemps- n’a pas rétréci d’un millimètre.
L’avantage c’est qu’il y a toujours de la nouveauté dans notre vie même si nos conversations sont souvent étranges.
Je me demande même par moment si en matière de surréalisme, André Breton ne fait pas petit joueur à côté de nos conversations…
Puis, les minutes passant, un autre détail me tracasse.
La lumière de mes jours me semble acquérir rapidement une technique que j’ai repérée chez ma mère.
Celle-ci avait une méthode remarquable pour faire de petits bagages impossibles à décoller du sol si on n’était pas déménageur de piano.
Ce qui faisait que tout départ voyait mon père pester « il y a bien quelqu’un qui te proposera de t’aider à porter tes bagages » et laisser ma mère marcher devant lui.
Après avoir dit à mon père tout le bien qu’elle pensait de son aide, une crainte se faisait alors jour chez ma mère, surtout dans ce quartier où « il y avait vraiment trop d’Arabes ».
C’est souvent là que ça tournait mal.
C’est quand il la rassurait d’un « ne t’inquiète pas, de toute façon il ne pourra pas s’enfuir avec… » que ça dégénérait...
Eh bien, avant-hier, quand nous sommes revenu de notre balade avec L., une fois le dîner pris et je ne sais quel bulletin d’informations n’intéressant que les amateurs de foot nous faisant éteindre la télé, je me suis attelé à la tournée habituelle des petites tâches à mener à bien le soir.
Éteindre les ordinateurs, trouver les lunettes d’Heure-Bleue, retrouver son Télérama et nos bouquins respectifs, chercher où est passé ce foutu smartphone qui sert surtout d’horloge et amener tout ça dans la chambre.
C’est alors qu’elle était dans la salle de bains que j’ai apporté au pied du lit « le cadeau d’avance » que je lui ai offert pour un anniversaire qu’elle n’espère pas voir arriver fin juillet mais dans vingt ou trente ans…
Quand je l’ai acheté, il était léger comme le bagage intellectuel de Cyril Hanouna.
Quand avant-hier soir je l’ai attrapé, ce sac était devenu lourd comme l’humour du même.
Ce sac, que j’ai acheté vide, de petit format, fait de deux pochettes accolées, un fois meublé par la lumière de mes jours se révèle « importable ».
Celui qui s’essaierait, au cas où la bandoulière tiendrait le coup, y laisserait un poignet définitivement luxé et une épaule démise.
Mon bras s’est allongé de deux tailles de chemise rien qu’à le poser sur le lit.
Non seulement je frémis à l’idée du délai nécessaire pour y trouver son porte-monnaie mais à mon état quand elle me dira « Minou, tu ne veux pas tenir mon sac deux minutes ? »
Il ne contient paraît-il que l’indispensable.
Alors, pour une fois que le poids des ans est plus supportable que celui de l’indispensable…