lundi, 04 août 2014
Le passé simple ? Pas vraiment…
Heure-Bleue et moi dînions paisiblement quand nous nous sommes posé une question cruciale.
Qu’allions nous regarder hier soir ?
Nous avions vu « Le goût des autres » plusieurs fois.
« Le viager » encore plus souvent, quand ce n’était pas chez nous, c’était chez les parents ou chez nos sœurs.
J’avais, bien entendu repéré « Diabolo Menthe » que nous avions déjà vu et aimé, Heure-Bleue et moi.
J’aimais bien ce film de Diane Kurys qui peignait si bien l’ambiance du début des années soixante.
Je l’aimais bien aussi parce qu’il m’avait donné à voir à quoi ressemblait l’intérieur de ce lycée Jules Ferry dont je ne connaissais que l’extérieur.
Un moment, entre deux bouchées et deux commémorations de la guerre de 14-18, Heure-Bleue lâcha :
- Diabolo Menthe ? On l’a vu mais c’est chouette.
- Hon hon… Ça me dit assez, je vote pour « Diabolo Menthe »…
D’un coup, la lumière de mes jours me jette :
- Je suis sûr que tu vas penser à Dulcinée.
- Mais non, ça fait longtemps quand même…
- Mmmouais… Ne commence pas à penser à Dulcinée, hein !
- Mais non, attends…
- De toute façon, je le saurais. Si tu prends ton air niais, je le verrais.
- Voyons, j’aime bien ce film mais quand même…
Sur ce coup là, Heure-Bleue a eu tort. Si elle n’en avait pas parlé, je n’aurais jamais pensé à Dulcinée. Je n’y ai d’ailleurs pas pensé. Nous avons été trop occupés à remarquer que le temps avait embelli les souvenirs de Diane Kurys. Je n’avais jamais mangé à la cantine d’un lycée de filles mais Heure-Bleue si. Et l’idée de nappes à carreaux rouge et blanc sur des tables de cantine de lycée en 1963 nous a bien fait rire.
En revanche je n’ai pas été d’accord avec Heure-Bleue à propos du récit de la manif de Charonne fait par une élève.
Heure-Bleue a prétendu que nous – entendez « notre génération »- n’étions pas assez politisés à cet âge là pour que la jeune fille pût faire un tel récit.
Pour me rappeler certains récits faits par des cadors de ma classe, je sais qu’il y a des jeunes gens capables de ça. Et ça, ça marque.
10:22 | Commentaires (13)
dimanche, 03 août 2014
Ce siècle avait deux ans.
Paris remplaçait Nice
Déjà Le-gout-des-autres perçait sous Patrice…
Et la note d’Heure-Bleue me remet en mémoire
D’école maternelle cette terrible histoire.
Bon, d’accord, le siècle avait plus. C’était en octobre 1952.
Le conflit israélo-palestinien, lui, avait à peine quatre ans.
Sans le savoir et elle non plus, j’allais passer dans le camp des partisans de « l’union mixte »…
Au grand dam de ma mère si elle l’avait seulement soupçonné. Déjà une autre qu’elle, une étrangère en plus…
Je vous ai déjà parlé de cet épisode mais je me dois d’y revenir.
Une autre fois, je vous parlerai de mesdames C. et Ch. ayant été le préféré de la première, la seconde ayant eu l’idée malencontreuse de faire remarquer à ma mère que je n’étais pas tout à fait normal.
Avec cette rentrée à l’école maternelle, j’arrivais enfin en un lieu où j’avais un peu plus de place qu’à la maison.
Et surtout, oui surtout, il y avait d’autres enfants que ma grande sœur et mes deux petites sœurs.
Mes parents, ma grande sœur et mes deux petites sœurs, une très brune, une très blonde et une châtain clair avaient, comme moi, des yeux très sombres.
J’ignorais totalement que la couleur des yeux pouvait être différente du marron foncé que je voyais tous les jours, tant dehors qu’à la maison.
Oui, dans la rue où nous habitions, près de cette Porte de Clignancourt qui sera un repoussoir et dont la population restera l’exemple de ce qu’il ne faut surtout pas devenir selon mes parents, il n’y avait pratiquement que des Algériens et pas de Kabyles. Quant à des blonds, autant n’y pas songer…
Dès mon arrivée à l’école je me vis assigner par la maîtresse une place à côté d’une petite fille. Elle s’appelait Malika et je ne pouvais détacher mon regard de son visage.
C’était la première fois que je voyais des yeux autres que des yeux bruns et les siens me semblaient extraordinaires.
Ils étaient bleus !
Je les trouvais magnifiques et les regardais à la moindre occasion tant ils me semblaient beaux.
Bien plus beaux que ceux de mes sœurs ou les miens. Ils me paraissaient même plus beaux que ceux de ma mère ! C’est dire à quel point j’étais impressionné.
Ce qui me paraissait une particularité aussi rare que merveilleuse entraîna chez moi un bouleversement qui me plongea dans un abîme de perplexité. C’était la première fois que je me surprenais à aimer quelqu’un qui n’était pas de mes proches. Cette affection irrépressible pour une petite fille qui n’était pas une de mes sœurs était une bizarrerie qui n’avait pas fini de m’étonner.
Me voici donc assis à côté d’une petite fille aux cheveux aussi noirs que les miens mais longs et frisés, à la peau toute blanche et aux yeux tout bleus.
Ces yeux qui me feront me cogner dans les portes.
J’adorais grâce à elle, entrer en classe après la récréation, ce qui aura un effet bénéfique pour la suite de mes études.
Nous devions, à la fin de la récréation et dès l’appel de la maîtresse, nous mettre en rang par deux et, ô joie pour moi, donner la main à notre camarade pendant que nous rentrions.
J’étais toujours à côté de Malika pour entrer en classe et j'adorais lui tenir la main. En classe j'étais encore assis à côté d'elle à une de ces petites tables à deux places avec un petit banc solidaire de la table et je détestais lui lâcher la main. Heureusement pour moi, elle aussi.
Notre idylle ne dura hélas qu’un peu plus de deux ans. L’enseignement de l’époque, qu’il soit public ou privé, avait l’habitude d’instaurer une sévère ségrégation entre les filles et les garçons dès le CP.
Cette pratique a mis fin brutalement, j’en suis sûr, à nombre d’amourettes qui avaient pris naissance sur les bancs de l’école maternelle.
10:27 | Commentaires (8)
samedi, 02 août 2014
Ce vieux condor debout.
Hier, Heure-Bleue et moi, après moult tergiversations sur le chemin à emprunter, nous sommes rués lentement au Monop’ pour trouver le papier cadeau qui irait bien pour envelopper les cadeaux de P’tite Sœur, qui a eu un an avant-hier, de Merveille, parce qu’on ne fête pas les uns sans les autres, et de nous tous, sauf moi, pôv’ malheureux –plaignez moi, lectrices chéries- dont l’anniversaire arrive trop près de Noël et, du coup, trop loin du 31 juillet…
Après avoir emprunté le chemin le plus verdoyant pour arriver au Monop’, nous avons bu un café chez le soufi qui ne pratique pas vis-à-vis d’Heure-Bleue ce que lui recommande sa croyance.
Oui, si ce dernier me salue courtoisement, il voue à la lumière de mes jours une haine tenace.
Probablement due au fait qu’un jour pas fait comme les autres, elle l’a envoyé paître pour un motif connu d’elle seule.
Ne me demandez pas pourquoi elle y retourne. Probablement parce que sa terrasse est agréable, les consommations abordables et qu’elle se fout de l’opinion de l’iranien mastroquet à son endroit.
Mais je les connais, elle et son « regard balayant » comme dit Lakevio. Je sais que si elle a remarqué que le patron est un flemmard avéré et assez quelconque, il y a aussi ce jeune homme qui fait le service et qui lui a tapé dans l’œil.
Évidemment, un Perse, qu’elle trouve beau comme le jour et que je trouve brun comme la nuit…
Arrivés au Monop’, nous nous sommes séparés.
Si si si, lectrices chéries, on peut même faire quelques achats séparément ! Je suis allé me réapprovisionner en miel, vous savez bien, ce « miel bio » qui fait de moi « l’homme dispendieux », tandis qu’elle allait à l’étage chercher ce pour quoi nous étions venus.
Évidemment, nous n’avons pas ramené le papier cadeau mais un autre cadeau pour Merveille et du gel douche.
Ce n’est pas que ce soit passionnant mais c’est juste pour vous montrer de quelle façon Heure-Bleue et moi perdons nos boulons en route…
Un jour on va arriver chez l’épicier en morceaux disparates.
J’ai rejoint la lumière de mes jours à l’étage et nous nous sommes évidemment arrêtés au rayon librairie.
Là, j’ai eu l’attention attirée par un bouquin élégamment titré « Les nouveaux cons », oui, il me faut toujours savoir comment évolue ma maladie.
J’ai lu la quatrième de couverture, puis feuilleté. J’ai constaté qu’il n’y avait rien de nouveau mais que j’avais affaire à un expert qui connaissait la chose de l’intérieur…
J’en ai retiré l’impression tenace qu’on essayait de me vendre de la soupe.
L’impression s’est transformée en certitude quand j’ai vu qu’un certain Etienne Liebig avait écrit cet opuscule sans goût.
La prédestination, ça existe, lectrices chéries.
Que penser d’un type qui s’appelle Maggi et qui, pour ne pas se faire repérer prend Liebig comme pseudo ?
Comme disent les djeun’s « ya une c… dans le potage ! »
Je sais, c'était facile. Mais c'est les vacances, hein, après tout...
08:31 | Commentaires (5)