mercredi, 10 mars 2021
Pourquoi bon sang ?
Ce matin je pensais à « Sophie qui n’a pas de blog ».
Je suis presque sûr que vous avez oublié celle que j’appelais « Sophie qui n’a pas de blog ».
C’était une vieille dame qui nous rendait visite sur nos blogs.
Puis à qui on téléphonait de temps à autre car elle était seule.
Désespérément seule…
« Sophie qui n’a pas de blog » est morte.
Elle est morte l’année dernière.
Elle est morte seule.
Toute seule…
Je pense parfois que j’ai recueilli son dernier soupir car quand je l’ai appelée ce jour d’avril 2020, elle a décroché et j’ai entendu un vague soupir puis plus rien.
J’ai abandonné l’idée de l’appeler après quelques essais infructueux.
Ce matin au réveil, je ne sais pourquoi j’ai pensé à « Sophie qui n’a pas de blog ».
Sans doute parce que le soleil qui donne sur la cuisine, quoique pâlot, m’a rappelé le souvenir d’un de ses commentaires chez moi.
Ce commentaire disait :
« Il n'y a pas si longtemps, je me souvenais d'un flirt de mes 17 ans, et j'ai comme un annuaire qui s'est déclenché : je me souviens de son nom, mais également de son adresse avec une précision complète. Bizarre non ? »
Cette dame, morte l’an dernier à un âge avancé, pas assez sans doute mais avancé tout de même, avait ainsi gardé un souvenir de plus de soixante-trois ans assez vivace pour l’émouvoir.
Tout ce que je sais de cette histoire car elle me l’a dite est qu’ils avaient tous deux dix-sept ans.
Ils avaient dix-sept ans et elle n’avait jamais oublié son regard, sa voix, son souffle.
Pas même oublié son pas auquel elle s’attachait à accorder le sien…
Pourquoi donc cette histoire me revient-elle aujourd’hui ?
Elle parla même des doigts entrelaçant les siens.
Il y a des jours comme ça où l’air du temps est plus facile à respirer…
Dix-sept ans…
Pour ce que je me rappelle…
Vous, les filles aviez la peau tellement douce.
Nous, les garçons avions la barbe tellement dure.
Et nous avions tant de rêves…
Et nous passions tant de temps à tenter de les transformer en réalité.
Mais pourquoi « Sophie qui n’a pas de blog » ce matin ?
Mystère… Peut-être la lumière de la cuisine, celle de Montmartre…
Mais dix-sept ans, bon sang !
Et chaque printemps, j’ai l’impression que c’est la première fois.
Bon, il y a bien ce foutu genou qui déconne mais à part ça…
Bon, à part ça, il n’y a que la cervelle qui gigote encore.
Et encore, Heure-Bleue prétend que la mienne dévisse…
On est trahi que par les siens…
09:46 | Commentaires (15)
dimanche, 07 mars 2021
Devoir de Lakevio du Goût No 71
Pourquoi cet accoutrement si différent ?
Pourquoi est-elle là.
Pour se baigner ?
Pour s’amuser ?
Pour regarder les autres ?
Pour autre chose ?
Pourtant elle se distingue de tous.
Pourquoi ?
Depuis que j’habitais là, « Hôtel de la Plage », je la voyais.
Je la voyais tous les jours.
Qu’il pleuve, qu’il vente elle était là.
Du matin au soir.
Presque toujours vêtue de la même façon.
Bien sûr, elle avait parfois un pardessus élimé.
Celui qu’elle jetait l’hiver sur ses épaules…
Mais tout de même, je pensais qu’elle n’était pas frileuse.
Quand il faisait doux, elle avançait dans l’eau, pieds nus, jusque là où les vaguelettes lui léchaient les pieds.
Jamais plus loin.
Depuis cinq mois, ceux qui avaient suivi mon départ à la retraite, je vivais là et la voyais.
Elle le retirait jamais plus que le pardessus, gardant par tous les temps, même les plus caniculaires, cette robe qui ne ressemblait plus à rien…
Je ne me rappelle pas m’être réveillé un matin sans la voir depuis ma fenêtre.
Ni m’être couché sans qu’elle ne fût encore là, sous mon dernier regard au moment de tirer les rideaux de la chambre.
« Ça me tracasse ! » comme aurait dit ma mère.
Alors aujourd’hui je veux savoir.
L’hôtelier semblait bien disposé quand je l’ai salué.
- Je peux vous demander quelque chose ?
Avec un sourire amusé il m’a répondu :
- Si ce n’est pas du crédit ou de l’argent…
- La dame, celle qui passe toute la journée debout sur la plage, dans sa robe bleue…
- Ah, elle ! Elle est folle, juste folle...
- Que s’est-il passé ?
Un jour il est parti pour la pêche avec son bateau en disant « À ce soir. »
Et depuis, elle attend.
Ça fait plus de vingt ans qu’elle attend son retour.
On pourtant a retrouvé des débris de son bateau, on avait retrouvé son corps sur une plage du pays.
Rien n’y a fait.
Elle attend…
Personne n’a jamais su à quelle heure elle arrive le matin ni quand elle repart le soir.
Ni même si elle repart le soir.
C’est tout ce que je sais d’elle…
23:15 | Commentaires (23)
vendredi, 05 mars 2021
71ème devoir de Lakevio du Goût.
08:05 | Commentaires (9)
jeudi, 04 mars 2021
Elle a tout d'une grande...
Elle s’est approchée de moi, s’est assise sur mes genoux, m’a pris par le cou, m’a fait un bisou sur la joue et m’a chuchoté dans le creux de l’oreille « Je vais te dire un secret, papy. »
J’ai chuchoté « Oui ? »
Elle m’a dit « tu es mon papy préféré ».
J’ai été super content jusqu’à ce qu’une terrible vérité ne vienne me frapper :
Elle n’a qu’un papy, moi…
Mais bon, c’est la plus affectueuse de mes petites-filles.
L’autre n’a plus le temps, c’est une ado.
Rien qu’à la regarder faire la gueule quand on lui dit bonjour et lever les yeux au ciel d’un air désespéré quand on lui demande si ça va, on sait qu’elle a quatorze ans.
Et là aussi, on est super content qu’elle soit la fille de quelqu’un d’autre…
Et vous savez quoi ?
On est arrivé dix minutes avant le couvre-feu !
Oui ! Pour aller à onze minutes de Paris, il faut onze minutes.
Pour revenir du même endroit à onze minutes de Paris il faut près d’une heure et demie…
C’est ce qu’on appelle l’effet relativiste sans doute.
Il y en a un autre : L’humour de machiniste RATP.
Celui qui vous regarde sortir de la gare, vous regarde hâter le pas, vous laisse la porte ouverte jusqu’à ce que vous soyez à un pas de monter dans le bus, tourne la tête, ferme la porte et s’en va vous laissant sur le trottoir.
Heureusement que le chauffeur était une « Gauloise » sinon j’étais en passe de devenir raciste sur le champ.
Oui, je vous dis ça parce que beaucoup de chauffeurs de la RATP étaient « assimilés fonctionnaires » et, depuis la « furie économiste » qui frappe le monde censément « développé » on trouve derrière les volants des bus une foule de « contractuels courts » d’origines diverses, enfin surtout d’origine moins chère…
Le moins cher qui coûte, évidemment, on sait bien comment calcule un économiste.
J’en ai déduit une fois de plus qu’un bon économiste, surtout celui des transports, est le type qui se vante d’avoir fait économiser dix €uros à la Régie et ignore que son économie coûte un million d’€uros sur l’année.
Bref, le tout venant.
Ce fut malgré tout une bonne journée qui, comme toute journée de ce genre fait ricaner la balance le lendemain.
Enfin, du moment que mes petites-filles sont belles, libres, intelligentes, s’intéressent aux autres et se forgent une conscience politique.
C’est l’essentiel.
09:46 | Commentaires (10)
lundi, 01 mars 2021
Devoir de Lakevio du Goût N° 70
Que diable fait elle là ?
Qu’est-il arrivé ?
Qu’attend-elle ?
Attend-elle seulement quelque chose ?
J’espère savoir ce que vous en avez pensé lundi.
J’espère évidemment avoir quelque chose à vous en dire…
J’ai emprunté l’escalier et ai commencé à le gravir.
Je montai sans me presser, à peine impatient d’arriver dans un chez moi où personne ne m’attendait.
Arrivé au deuxième, les six premières marches menant au troisième gravies, juste au tournant de l’escalier, je l’ai vue.
Plus exactement j’ai été frappé par ce que laissait entrevoir ses jambes dont les genoux serrés laissaient à deviner ce qu’elle n’arrivait pas à cacher totalement.
Alors la première chose que je me suis dite n’est pas « Mais que fait elle là ? »
Non, je me suis dit « C’est fou comme certains vêtements et poses déshabillent bien plus qu’ils n’habillent… »
Elle a levé la tête en m’entendant puis m’a jeté un regard déçu.
- Oh ! J’ai cru que c’était Monsieur Z. !
Elle me jeta un regard de doute alors j’ai précisé.
- Navré mais il n’y a pas de Monsieur Z. dans cet immeuble.
Elle a eu un soupir de déception clos par :
- Il m’a bien eue…
- Le champagne, c’était pour lui ?
- Oui…
Elle posa brutalement les deux verres qu’elle tenait de telle façon qu’ils se brisèrent.
Elle a reniflé et a commencé à raconter sa mésaventure.
L’histoire courante d’un type qui drague dans le métro, croise une fille esseulée et la tape sous un prétexte quelconque mais de façon convaincante de 50 €.
Pour la convaincre, il lui tend sa carte et l’invite à dîner pour lui rendre ses sous.
J’en ai connu des comme ça, ils en vivent et investir dans un cent de cartes donnant un nom et une adresse fantaisistes est d’un bon rapport.
J’ai compati, soupiré et dit « Pleurez tranquillement vos 50 € pendant que je vais chercher deux flûtes… »
Je suis redescendu quelques minutes plus tard, pas certain qu’elle aurait attendu.
Mais elle était encore là et m’a tendu la bouteille en ébauchant un sourire gêné.
J’ai débouché la bouteille, l’ai servie et, assis deux marches plus bas, me suis servi puis ai tendu mon verre pour un toast.
Assis tranquillement deux marches plus bas, j’avais du mal à accorder à son visage toute l’attention souhaitée.
De ma position, mon regard était certes attiré par elle.
Non par son visage mais par ce que sa pose suggérait…
- Je suppose que vous n’aviez alors rien prévu pour le dîner ?
Elle a haussé les épaules alors j’ai dit :
- Alors montez encore quelque marches, je vais préparer quelque chose pour accompagner le reste de la bouteille.
- Vous êtes sûr ? Je ne vais pas déranger ?
- Mais non, pour vos 50 € je ne peux rien mais je peux vous nourrir…
Elle a ri.
Nous avons fini nos verres et sommes allés quelques marches plus haut.
Nous avons dîné.
Je l’ai raccompagnée.
Elle a promis de revenir dîner là.
Elle est revenue.
Là où finalement elle a fini par connaître quelqu’un.
Nous avons dîné de nouveau.
Mais je ne l’ai jamais tapée de 50 €…
07:55 | Commentaires (30)