jeudi, 02 juillet 2015
L’eau rance d’Arabie…
Heure-Bleue dégouline dans son coin et il n’est pas question de lui proposer quoi que ce soit.
Déjà, une glace au caramel, c’est tout juste, alors vous pensez bien que n’importe quoi d’autre...
J’ai même peur, qu’on m’envoie le soir dormir sur le balcon.
Oui, le soir et la nuit, il fait plus frais dans la chambre que sur le balcon.
Du coup, pour m’occuper les mains en attendant l’heure propice à… aller faire quelques courses, eh bien je trie un sac de photos miraculeusement réchappées de nos sept déménagements depuis notre départ d’Israël.
J’y retrouve quelques photos de notre périple à Petra, la capitale cachée des Nabatéens.
Capitale qui est planquée là-dedans :
Je me rappelle qu’Heure-Bleue portait un chapeau pour être à l’abri d’un soleil éclatant.
Petra ? C’est 50°C à l’ombre.
Et y a pas d’ombre…
Et que trouvé-je, lectrices chéries dans ces photos ?
Que trouvé-je parmi des photos de temples creusés à même la montagne ?
Ça :
Une photo de votre Goût préféré en balade à Petra avec nos deux copains Polaks.
Ouais bon, encore en NewMan...
C’est Heure-Bleue qui avait l’Instamatic, d’où son absence des photos.
J’ai bien des photos d’elle à Rhodes mais décemment, je ne peux pas vous montrer mon odalisque lisant « Kathimerini ».
Surtout qu’honnêtement, ce n’est pas pour le journal que j’avais pris la photo…
Me voici donc, le chef habillé d’un keffieh et une bouteille d’eau minérale à la main.
Heure-Bleue et mon copain ont fait confiance à l’eau du coin.
Une erreur qui a dû faire monter le cours de l’action Johnson & Johnson, rien qu’à cause des ventes d’Imodium…
On s’est moqué de moi avec mon pull et ma chemise, surtout mon copain qui n’avait pas pensé qu’il allait cuire. Que dis-je ? Cuire ? Rissoler…
Heure-Bleue, n’en parlons pas, elle fond. Avec sa copine, la femme de mon comparse, elles engueulent quelques gamins arabes qui martyrisent un âne.
Bon, honnêtement, sur cette photo, j’ai déjà cinquante deux ans et ça m’amène à constater qu’à partir d’un certain âge, les années comptent double.
13:41 | Commentaires (20)
dimanche, 28 juin 2015
La race des seniors...
Berthoise et Brigitte me poussent à éclaircir quelques point à propos de mon père et de sa descendance.
En famille, mon père nous faisait souvent rire et il aimait ça.
Jamais en faisant le clown, ni des grimaces, non. En nous parlant des gens de notre quartier et en nous racontant des histoires.
Il aimait nous donner des « leçons de choses », ce truc qui existait bien avant « De natura rerum » et existera bien après les « cours de SVT ».
Nous quatre avons de lui appris des choses sur les fleurs, qu’il aimait, et les étoiles, qui le passionnaient, d’une façon autrement palpitante que dans les livres ou à l’école.
Il nous en a aussi appris pas mal sur la pêche à la ligne.
Notamment qu’on ne met pas un pied sur une barque mal attachée alors que l’autre est resté sur la berge.
Il nous a prouvé, exemple à l’appui, qu’il est toujours hasardeux de lancer sa ligne quand il y a plein d’arbres ou de lignes téléphoniques dans les environs proches.
Là, honnêtement, il pestait sévèrement. C’est comme ça que mes sœurs et moi avons appris nos premiers jurons.
En outre toujours à propos de pêche, le chemin était toujours montant, sablonneux, malaisé et terriblement long pour atteindre l’endroit où selon lui « vous allez voir les enfants, c’est plein de gardons qui n’attendent que moi pour sauter tous seuls dans la bourriche ! »
Mon père était effectivement quelqu’un de drôle, de cultivé et de charmant en société.
Quoique…
Il lui arrivait hélas de se réveiller le matin « avec l’idée d’emm… le monde », dixit ma mère.
Elle faisait preuve alors d’une patience que je ne lui ai connue avec aucun de ses enfants.
Nous avons appris plus tard que sa vengeance s’abattait les jours suivants avec une efficacité redoutable…
Il arrivait parfois à mon père que sa conception du sérieux fût un peu bancale.
Là, le connaissant, c’est quand il avait l’air absolument sérieux que ma mère se méfiait le plus.
Et à juste titre, même si elle s’y laissait parfois prendre, comme avec cette histoire de boulette...
Brigitte soulève donc un des points les délicats de la personnalité familiale mâle.
L’air sage est une spécialité.
Ça nous a servi à tous.
Que ce soit mon père, son fils ou l’Ours.
Si vous saviez comme on avait l’air sage, lectrices chéries !
On nous aurait donné le bon dieu sans confession…
Mon père, aux dires de mes tantes était, comme son frère, le plus jeune de la famille, un gamin infernal. Seule ma grand’ mère avait toujours trouvé que « Non mais tu as vu comment mon Gaby c’est un ange ??? »
Quant à ma mère, soyons honnête, elle ne l’a non seulement jamais trouvé sage mais ne lui a jamais trouvé l’air sage.
Son fils unique avait l’air sage et même sérieux mais les avis des gens qui se sont chargés de mon éducation divergent salement sur la question.
Ne parlons pas de l’Ours dont l’air angélique cachait « une âme de pas sage du tout » remarquée par la directrice de l’école dès le CE1…
12:04 | Commentaires (13)
vendredi, 26 juin 2015
La recherche…
Vous savez quoi, lectrices chéries ?
L’Ours m’a envoyé une photo qu’il a trouvée sur le Web.
Une photo de la classe de CM2 de 1930 dans une école primaire de Ménerville, devenue Boumerdès.
J’y ai repéré mon père à l’âge de neuf ans.
Il était né à Mostaganem et je ne sais pour quelle raison ses parents avaient déménagé à Ménerville.
Mon père, c'est le petit garçon N°25.
J’ai été surpris de voir que mon père avait eu l’air sage un jour.
Ce ne pouvait être qu’apparemment seulement. Je le connais.
Je me rends compte avec stupeur que mon père était un petit garçon très mignon.
Il l’était moins quand il est mort.
Mais lui, au moins, s’il a perdu des morceaux, il a gardé ses deux yeux…
Il est mort trop tôt. Vraiment trop tôt.
Franchement, l’amiante, ça dévaste…
Bon, il n’était jamais devenu adulte, c’est vrai.
Mais il était drôle, cultivé, sensible et poète à ses heures.
D’accord, les vues de ma mère et de mon père divergeaient sensiblement en la matière….
Je me rappelle ma mère regardant discrètement mon père, parfois amoureuse malgré des pommes de terre à l’eau un peu trop fréquentes.
Plus souvent houspilleuse, les jours où elle avait envie de le jeter par terre et de danser dessus.
Il m’arrive de penser qu’ils se sont mariés parce que chacun savait qu’il aurait un sujet d’expérience sous la main.
Je me suis souvent demandé ce qu’il faisait avec ma mère
J’ai bien une idée.
J’ai entendu mes tantes, les sœurs de mon père, en parler.
Mais si, vous savez bien, lectrices chéries, comment sont les sœurs quand une fille s'approche de leur frère.
Elles sont comme des mères quand une fille s’approche de leur fils...
Je l’ai appris à mes dépens, je sais bien comment faisaient mes sœurs et ma mère quand j’avais une chance d’échapper à la solitude.
De ces digressions, je retire que mon père a eu bien du mérite à rester ce petit garçon drôle, cultivé et poète parce qu’avec une mère, cinq sœurs, une femme et trois filles, ça n’a pas dû être facile tous les jours…
16:05 | Commentaires (15)
jeudi, 25 juin 2015
Gueule de bois ou « woody haleine » ?
C’est décidé, lectrices chéries, je vais divorcer.
Pas question pour autant de rester seul. Je déteste la solitude.
Jolie peau diaphane ? Pfff… Pas important !
Cheveux roux et bouclés ? Je m’en fous !
Superbes yeux verts ? Rien à battre !
Mignonne ? Rien à cirer.
Jambes de reine ? Je regarde même pas !
Je vais donc faire ce que j’aurais dû faire il y a… Pfiouu…
Établir des critères de choix un peu plus sérieux que le coup de foudre ou se laisser avoir à un regard ou des mèches indisciplinées qui volètent.
Sans parler d’une allure de liane qu’un Newman noir accentue, mal tenu qu’il est grâce à une épingle à nourrice censément invisible.
Newman qui n’est pas hélas, cette fois là, tombé sur ses chevilles quand elle s’est levée pour m'accueillir... Enfin, on n'a pas toutes les chances le même jour...
Cela dit, lectrices chéries, ne me sortez pas d’âneries genre « ouais mais quand même, y a l’amour ! »
Faut savoir être sérieux !
Donc, à partir d’aujourd’hui :
De bonnes dents, pas d'asthme, pas d’allergie et des pieds qui marchent !
Voilà, c’est décidé, je vais m’acheter une Kurde de Syrie.
Une nana qui peut survivre à daesh et à Bachar el Assad ne peut avoir qu’une santé de fer et des besoins réduits.
Imaginez, lectrices chéries, la vie de votre Goût adoré avec une femme habituée de longue date aux privations et à l’obéissance.
Parce qu’Heure-Bleue, rien que du point de vue de l’obéissance, pour l’expérience que j’en ai, c’est pas gagné.
Cela dit, un doute m’étreint.
Pour le peu que je sais des femmes et ce que j’ai pu constater à les écouter, rien que leur donner à manger est une bévue car elles se mettent alors à exiger des trucs qu’elles n’auraient même pas oser penser auparavant.
Et puis je suis habitué à papoter.
Mis à part l’approfondissement de mes connaissances en zyva, et en « neuf-trois », j’ai perdu l’habitude d’apprendre des langues depuis une quinzaine d’années.
Vous comprendrez donc, lectrices chéries que l’idée d’apprendre le kurde, ne m’attire pas plus que ça.
Pourquoi diable ai-je eu cette idée saugrenue.
J’ai autant de difficultés à comprendre Heure-Bleue que la première Kurde venue. Finalement, je ne gagnerais peut-être, car ce n’est que peut-être, que sur le dentiste.
Et j’y perdrais énormément…
13:33 | Commentaires (21)
mercredi, 24 juin 2015
Le prénom...
Vous savez quoi, lectrices chéries ?
Gamin, mon prénom ne me plaisait pas.
Mais alors pas du tout.
Vous vous en foutez, je le sais…
Maintenant je me suis habitué mais mettez vous à ma place, deux secondes.
A part un copain de pension qui s’appelait « Loïc » et qui me tannait avec la Bretagne, j’étais entouré dans mon quartier d’une foule de Michel, André, Roger, Jean-Pierre, Jean-Jacques et pire, de Philippe.
Je n’avais évidemment pas le droit de parler à la foule des Mohammed, Mouloud et autres Rachid, des fois qu’être arabe, ça soit contagieux…
D’ailleurs ils ne cherchaient pas non plus à me parler.
Depuis ma rencontre de la maternelle avec Malika, celle aux yeux si bleus qui me donnait la main, la méfiance s’était installée…
Pour les « Philippe », nés juste après guerre, je me demande à quoi avaient bien pu penser leurs parents pour les appeler « Philippe », parce que franchement…
Ma mère m’avoua bien plus tard avoir choisi mon prénom parce qu’elle était tombée amoureuse, avec un manque de clairvoyance désastreux, de Jean Marais dans « L’éternel retour »…
Je n’étais pas le snob que je suis devenu après des années de ce lycée de bourges.
Alors, lectrices chéries, si vous saviez comme j’aurais aimé que des « potes » et pas des « copains », m’appellent « Dédé », « Gégé » ou « Nanard » en me donnant des claques sur l’épaule.
Oui, « Nénesse » et « Bébert » étaient déjà passés de mode…
En foi de quoi, j’ai détesté mon prénom jusqu’à ce que je devienne copain avec un garçon de la rue Championnet.
Je vous ai déjà parlé de Bernard R. à propos du square Saint-Lambert quand nous étions plus vieux.
J’avais fait sa connaissance quelques années auparavant, alors que je faisais les courses dans le coin avec ma mère et que je regardais les photos du cinéma « Ornano Palace », là où j’avais vu « Les dix commandements ».
Bernard était un garçon brun et mat, comme votre serviteur mais en plus timide.
Nous avions engagé la conversation timidement sur Stewart Granger car évidemment, « l’Ornano Palace » proposait un vieux western.
Tout aussi évidemment nous ne fûmes « pas d’acc’ » parce que « Robert Vaughn, quand même, y tire mieux ! »
Un peu qu’il tirait mieux, d’ailleurs « Les sept mercenaires » le prouvaient…
Quand sa mère vint le prendre, on se donna rendez-vous pour le jeudi.
Ma mère ne dit rien mais n’agréa pas franchement jusqu’à ce que Bernard lui dise poliment « Au revoir madame ».
Ma mère, bien qu’elle n’appréciât pas vraiment pas vraiment que je devienne copain avec des garçons du quartier, dans sa hantise de « l’accent faubourien des voyous de la Porte de Clignancourt », fut satisfaite de mon nouveau copain.
Quelques années plus tard, s’il quitta l’école pour un travail d’apprenti mécanicien à la RATP toute proche, nous restâmes copains.
Et c’est lui qui, un après-midi d’été de sa dernière année d’école me confia quelque chose qui me fit considérer autrement mon prénom.
Bernard R. me confia tristement un jour qu’on était assis sur un banc du square Clignancourt, ce havre de paix quasiment bourgeois :
- Pfff… T’as du pot, toi.
C’était bien la première fois qu’on me disait que j’avais du pot.
J’allais au lycée, j’avais des devoirs, j’avais perdu un œil avec une fusée et ma mère m’achetait des habits choisis rien que pour me faire honte.
- Pourquoi j’ai du pot ?
- Ben tu t’appelles pas Bernard…
- C’est chouette Bernard ! Yen a plein !
- Ben justement… Toi au moins…
- Quoi moi ?
- Toi, ton nom « y fait classe », d’abord y en a pas beaucoup…
- Ah ?
- Ben t’es le seul que je connais…
Il est vrai que dans le coin, on croisait plus de Jeannot et d’Abdel que d’Alexandre ou Ismaïl…
Depuis, j’aime bien mon prénom. Il n’était devenu courant que vers les années soixante et a recommencé à se raréfier à partir des années soixante-dix.
J’aurais donc passé ma vie dans la rareté…
07:01 | Commentaires (27)