mardi, 21 juillet 2015
Quand ce qui est clos éclot.
Une de mes lectrices chéries, et en plus une que je croyais raide dingue de moi, se plaint.
Elle peste parce qu’elle a choisi « moderne » au lieu de « classique » au moment d’entrer en sixième.
Elle a pourtant eu bien de la chance, elle. On lui a demandé de choisir, à elle…
Revenons donc à son mouton.
Elle râle parce qu’elle n’a pas « fait latin en 6ème » et ne sait pas ce que signifie « ibis redibis non morieris in bello ».
Alors voilà, les Grecs, selon ce que rapportent les Romains, faisaient souvent la guerre. Et, à l’époque déjà, on avait de bonnes chances de n’en pas revenir. Comme il n’était question de se faire réformer pour y échapper, on tentait d’obtenir une info en s’en remettant aux dieux. Comme ces derniers ne nous causent pas, il faut des intermédiaires. Le bidasse grec se précipitait à Delphes et demandait à la Pythie de lui dire si ça se passerait bien ou non.
Hélas, cette Pythie de Delphes donnait des avis auxquels il manquait toujours le petit quelque chose qui les aurait rendus clairs.
D’où l’utilité du prêtre.
Ce préposé à la traduction de la pensée de la voyante était un peu vénal et surtout susceptible.
Du coup, il fallait y aller mollo. Un peu comme à la préfecture quand on veut un papier. Surtout ne pas gueuler après le guichetier.
Idem donc pour le guichetier de la Pythie.
Et si tu pars soldat, là il est urgent de faire gaffe…
Ecoutez bien Gwen et Emilia-Celina, voilà comment ça s’est passé.
Le prêtre a tendu l’oreille, écouté la voix hyper ténue de la Pythie puis s’est mis au boulot. C’est là que ça se joue.
Si le prêtre a écrit :
- « ibis redibis, non morieris in bello » avec la virgule avant le « non »
Ça, c’est le bon plan, ça donne :
- « Tu iras, tu reviendras, tu ne mourras pas à la guerre. »
En revanche, si tu l’as bousculé ou si ta tête ne lui revient pas, il écrira :
- « ibis redibis non, morieris in bello » avec la virgule après le « non » et ça c’est un mauvais plan :
- Tu iras, tu ne reviendras pas, tu mourras à la guerre. »
En réalité, cette affaire est un peu une arnaque de prélat car en latin, les mots ne sont pas séparés les uns des autres, il n’y avait que des lettres capitales, les mots étaient jointifs et on les séparait à la lecture grâce à leur désinence. Il n’y avait pas de ponctuation.
Bref, la Pythie causait mais n’écrivait ni n’agissait… Elle servait surtout à nourrir son clergé.
Peu de changement, donc…
08:34 | Commentaires (8)
lundi, 20 juillet 2015
C'est pour ça qu’un appeau long l'attire toujours…
De rien Mab, de rien ...
Apparemment, certaines de mes lectrices chéries pensent que c’est le résultat du referendum de 2005 qui a causé la perte de mon alliance.
Pfff… Vraiment, vous croyez ça ?
Vous croyez que le « Non » qui fut répondu par la France et la Hollande m’a poussé à poser mon alliance sur le coin de ma console ?
Pensez vous réellement qu’une chamaillerie avec Heure-Bleue pourrait me pousser à retirer mon alliance ?
Voyons, lectrices chéries…
Une d’entre vous va jusqu’à émettre l’hypothèse qu’une maîtresse m’aurait posé un ultimatum…
Allons, lectrices chéries, évidemment que j’ai une maîtresse.
Bon, il se trouve que je suis marié avec.
Et que ça ne l’amuse pas tous les jours…
Mais elle se venge régulièrement, quoique je ne sache pas toujours de quoi.
Elle me prend toujours au piège.
Pas que de ses yeux hélas.
J’ai parfois l’impression d’être maqué avec une sybille.
Je ne la comprends jamais vraiment et je suis toujours comme ceux qui allaient voir la Pythie de Delphes.
J’ai toujours droit à des demandes pas très claires, du genre « ibis redibis non morieris in bello »
Il me faudrait toujours un grand-prêtre pour mettre la virgule au bon endroit et il n’est jamais là.
Du coup je ne sais jamais si la virgule est avant ou après « non ».
Et ça change tout.
C’est ce qui fait que ça va bien se passer ou non…
09:55 | Commentaires (6)
dimanche, 19 juillet 2015
The bonds of love are difficult to loose…
Comme disait D.H.Lawrence en 1928.
Bon...
Il fait plus frais ce matin, l’orage de la nuit ne m’a pas réveillé.
C’est Heure-Bleue qui m’a réveillé vers deux heures du matin.
Elle a allumé sa lampe.
Comme elle voit assez peu clair, vous le savez lectrices chéries, je vous l’ai déjà dit, elle a une lampe qui pourrait éclairer tout le Jardin des Plantes.
Je me rappelle même vous avoir confié à propos de sa vue déficiente que ça m’avait bien arrangé quand je l’ai connue…
Heure-Bleue n’allait pas bien. Elle prétend que c’est la chaleur.
Comme la chaleur de la nuit avait déjà laissé place à la fraîcheur d’après orage j’ai pensé plutôt à une crise d’angoisse.
Elle prétend à l’instant qu’il faisait au moins 112°C dans la chambre.
C’est faux mais sur l’instant je n’ai rien dit.
Je me suis contenté de la rassurer de quelques paroles, du moins j’ai tenté avec quelques gentillesse.
Puis le reste de la nuit a passé calmement
Je me suis levé ce matin donc, et ai repensé à cette nuit un peu chamboulée.
Je me suis assis face à mon écran et tandis que je me demande quoi vous écrire alors qu’Heure-Bleue prend son petit déjeuner, je regarde ma main gauche tapant sur le clavier.
Et un détail me frappe.
Je n’ai plus mon alliance.
Et depuis suffisamment longtemps pour que même la trace pâle sur l’annulaire hâlé ait disparu.
Il me revient alors de façon impromptue quelque chose d’étrange.
Je n’ai plus d’alliance depuis des années.
Je l’ai perdue dans l'appartement que nous habitions dans le XXème avant d’aller habiter à Caen.
Je ne sais plus pourquoi je l’ai retirée et posée sur la table où repose mon ordinateur.
Elle est tombée de là sans que je le remarque et est vraisemblablement passée dans l'aspirateur.
Je ne l’ai jamais retrouvée.
Je me suis fait engueuler gravissime.
Et ce qui me revient, c'est quand je l'ai perdue.
C’est en mai 2005.
Quelque chose est arrivé en mai 2005.
Mais quoi ?
J’ai la mémoire qui flanche…
10:45 | Commentaires (11)
samedi, 18 juillet 2015
Le ventre de Paris.
Les réactions diverses de lectrices à la note d’Heure-Bleue relatant notre rencontre avec des personnages devenus plus ou moins des parias, célèbres mais parias tout de même, me remet en mémoire un de ces moments de la vie politique parisienne.
Au début des années 1980, il y eut l’élection des maires d’arrondissement à Paris au suffrage universel.
Pour je ne sais quelle raison eut lieu un soir une manifestation de soutien au RPR.
Oui, plus exactement, non l’UMP n’existait pas encore.
Cette manifestation se déroula à deux pas de chez nous, rue Beaubourg et partit de la République pour atteindre l’Hôtel de Ville.
Un ami et voisin de la rue du Grenier Saint Lazare me rejoignit.
C’était un homme extrêmement bien élevé et pour tout dire, comme votre serviteur, assez bégueule.
Nous avons regardé la manifestation s’écouler sous nos yeux, il y avait peu de slogans.
Le manifestant conservateur, du moins à l’époque où il était assez BCBG, ne hurlait pas comme le gauchiste, qu’il fût partisan de Georges Marchais ou d’Arlette Laguiller.
Le manifestant conservateur gardait cette dignité de notable qui, même à Paris, lui donnait ce côté province qui rassure si bien « les marchés ».
Il y eut malgré tout un accroc à la bonne éducation du coin.
Quelques huées se firent entendre, venant des trottoirs quand monsieur Dominati vint à passer, qui s’était signalé à l’attention des gens du quartier et de la justice pour de sombres histoires immobilières.
Il passa assez dignement je dois dire.
Mon ami le siffla. Je hurlai « bandit ! »
Hélas, un des soutiens de ce monsieur Dominati l’accompagnait.
Nous avons reconnu monsieur et madame Tiberi
Connus eux aussi pour d’autres malversations, électorales celles-là.
Ils nous entendirent et ça ne leur plut pas.
Sortant de son quant à soi, plutôt facilement nous sembla-t-il, monsieur Tiberi nous jeta à tue-tête « allez vous faire enc… »
Bien entendu nous n’y allâmes pas mais mon ami, qui ne fréquentait pas le monde de l’industrie, resta interloqué.
Il osa jeter assez fort « Mal élevé !!! » puis se tourna vers moi :
- Mais tu te rends compte ? Il nous a envoyé…
- Bon, on n’est pas obligé d’y aller non plus, hein…
- Mais quand même, Le Goût !
- Et tu croyais quoi ?
- Ben qu’ils ne disaient pas de gros mots ! Il y a des enfants quand même dans la foule !
Nous avions des enfants petits et leur éducation nous importait.
Oui, nous étions comme ça, à l’époque, plutôt bien élevés…
10:02 | Commentaires (8)
jeudi, 16 juillet 2015
Hors champ…
Hier, Heure-Bleue et moi avons revu « L’auberge espagnole ».
C’est un film sympa et qui renseigne assez bien les parents sur ce que font leurs enfants quand ils sont étudiants et vivent ailleurs que chez papa et maman.
Hélas pour nous, Heure-Bleue et moi qui avons la chance d’être parisiens, avons dû vivre chez nos parents.
Bon, on s’est quand même arrangé pour passer quelques moments ailleurs, histoire de parfaire notre éducation…
Un moment, nous avons regardé avec une attention soutenue une séquence où il était question d'assurer un minimum de succès à la conclusion des relations entre les garçons et les filles.
Nous nous étions dit que l’occasion était belle de rafraîchir des connaissances qui commençaient à dater un peu.
Nous avons plissé les yeux, avides de vérifier qu'il n’y avait pas eu de changement notable dans la curiosité et la façon de la manifester.
Hélas ! Trois fois hélas ! Nous sommes nous lamentés en constatant avec dépit que le plan suivant, au lieu de nous assurer que nous n’étions pas complètement dépassés, passait à autre chose.
Nous avons donc continué à regarder le film en échangeant de menus propos.
La fin du film approchait. Les souvenirs du héros l’ont cruellement ramené à ce premier baiser échangé avec celle qui venait justement de le plaquer.
Je ne sais pour quelle raison, enfin si mais bon, un plan m’a justement saisi à ce moment.
Heure-Bleue, qui n’était pas loin de moi, m’a regardé et dit :
- Oooh... Toi, tu connais cette rue…
- Ben… Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
- Ta tête… Tu aurais vu ta tête…
- Ben oui, je connais la rue d’Orchampt. Et même bien.
Bien sûr que je connais la rue d’Orchampt !
Évidemment que je la connais ! Il me suffisait de remonter la rue Dancourt en sortant du lycée puis, après un bref passage dans une rue qui fait à peine quelques dizaines de mètres, emprunter la rue Berthe pour y arriver.
Alors la rue d’Orchampt, hein…
C’est une de ces chouettes rues de Montmartre, étroite et pentue dont le début était fort heureusement garni de quelques porches accueillants.
On y était facilement à l’abri car l’époque n’était pas encore à l’emprisonnement des habitants des immeubles.
Le petit bout de la rue qui mène à la rue Lepic était, lui hélas bien trop étroit pour qu’on pût s’y arrêter, bien heureux qu’une voiture n’eût pas l’idée d’y passer en même temps.
On ne pouvait, dans cette portion de rue, marcher qu’un pied sur le trottoir et l’autre sur la rue…
Je ne sais pas ce qu’est devenue cette rue, Heure-Bleue, Lakevio et moi sommes passés par la rue des Abbesses qui n’est pas très loin mais nous ne l’avons pas empruntée.
J’ai quand même été content hier soir de voir qu’elle n’avait pas trop changé et que, selon notre écran, on s’y livrait toujours au même passe-temps…
Nous avons enfin vu le héros, sa peau d’âne décrochée, tenter de passer une vie d’ennui au Ministère des Finances et, à notre soulagement, s’enfuir pour s’adonner à la passion de l’écriture.
Passion qui avait peu de chances de le nourrir grassement mais lui permettrait au moins d’être vivant au lieu de se contenter de n’être pas mort.
08:09 | Commentaires (12)