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jeudi, 20 décembre 2018

Je me souhaitais un teint lumineux, hélas j’ai les ampoules aux pieds…

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Hier matin, j’ai préparé un café à « Imaginer » venue à la maison dire du mal de moi à Heure-Bleue sous le prétexte futile que je moque son addiction au sport alors que je me contente de faire comme Churchill.
Enfin presque.
Vous n’êtes pas sans savoir que je ne suis pas cousin de la reine d’Angleterre.
Je n’ai pas plus sorti mon pays de la mouise.
Je n’ai de Churchill que l’aversion pour le sport et le goût pour le malt écossais.
Hélas, je ne suis pas sûr que ça me permette d’atteindre les neuf décennies…
« Imaginer » nous a conté quelques malheurs qui m’ont remonté le moral.
Vous avez remarqué comme les malheurs d’autrui adoucissent les nôtres ?
Ça relativise l’idée que nous sommes seuls dans notre géhenne…
Après le départ de notre amie nous sommes allés à la FNAC chercher un livre pour Tornade et un autre pour Heure-Bleue.
Je n’ai rien trouvé.
Surtout parce que je n’ai rien cherché.
Puis j’ai feuilleté quelques bouquins sur les éventaires mais je n’ai rien pris.
Je sais que le Père Noël m’apportera le Prix Goncourt chez l’Ours.
En feuilletant l’un d’eux dont j’ai déjà oublié le titre j’en ai retiré que les gamins et les gamines, c’est quand même le regard le plus neuf sur le monde qui existe.
Ça pense à vérifier des choses extraordinaires qu’on ne verra plus jamais.
En pleine débine morale je me suis dit qu’en réalité on se réveille de l’enfance et on oublie ses rêves.
C’est bien dommage.
Le pire n’est hélas pas là !
Quand on se croit adulte, on pense qu’il ne s’agissait que de rêves.
Ce matin, devant mon clavier, j’en viens à me demander si ce n’était pas la vie et qu’elle s’est éteinte le jour où on s’est endormi dans la réalité…
Ça doit être l’effet des fêtes de fin d’année.
La tristesse de la lumière, l’ambiance d’ennui et de mal-être qu’on voit dans les rues, tout ça me tue le moral.
Heureusement que je suis frileux, que je sais nager et que j’aime la vie, sinon je me jetterais dans la Seine.
En plus elle est sale…
Alors j’ai acheté Libé et le Canard Enchaîné.
Inutile de vous dire que ça n’a rien arrangé.
Quand je pense que toute ma jeunesse j’ai entendu dire « La masturbation ça rend sourd ! »
À lire les journaux je constate que si quelque chose rend sourd, c’est l’exercice du pouvoir…
Donc, les enfants, vous pouvez y aller !
Ce n’est pas ça qui vous rendra sourds !
Une seule chose néanmoins : Rappelez vous que c’est mieux à deux.
Bref, ce matin, lectrices chéries,  je n’ai rien à vous dire.
Mon clavier, de ses petites touches immobiles, vous crie que ma cervelle est vide mais je tenais à vous le faire savoir.
Heureusement que dès samedi les jours seront plus longs…

lundi, 17 décembre 2018

Sed quis custodiet ipsos custodes ?

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Il resterait tout seul.
Là, sur cette île « battue par les vents » comme disent les romans d’aventure.
Enfin, « d’aventure » ou plutôt « de gare »…
Il resterait là, peinard peut-être, enfin il l’espérait.
Noël… Tu parles d’une affaire ! 
Noël, quand tu viens d’arriver là où ta boîte t’a envoyé justement parce que tu es tout seul, eh ben c’est pas Noël.
Noël pour lui, c’est quand il met la table et que le reste de la famille met la dernière main aux paquets cadeaux et qu’il attend qu’on l’appelle pour « une petite coupe ? »
Il a grandi, enfin un peu, il vient de trouver ce boulot alors il n’a pas pu refuser.
Le « CDI » est une denrée rare, surtout quand la paie est correcte…
Et puis il est temps de quitter le cocon familial.
Il n’a jamais vécu seul.
Évidemment, la contrepartie c’est qu’on n’est jamais tranquille.
Du moins jamais assez longtemps pour faire des bêtises.
Des « bêtises »… Qu’ils disent…
Il y pense souvent, à ces « bêtises »…
Alors quand on l’a envoyé là-bas pour remettre en état le système de commande de la loupiote géante il a accepté.
Quelle idée !
Le bled n’était accessible que par la mer.
Et la mer était remuante ces temps-ci.
Quelques lumières par-ci, par-là lui disaient que le coin n’était pas totalement désert.
Malgré son désir de solitude il était quand même content de voir que le coin n’était pas vide.
Il fut déjà bien heureux d’arriver sans avoir vomi sur ses chaussures.
Ses petits mocassins de type habitué à marcher sur de la moquette et des trottoirs.
Quand il fut sûr de n’être presque plus vert et que les nausées eurent disparu, il avança sur le quai, encore chaloupant, la terre ferme ne lui paraissant pas si stable que ça.
Le vent lui arrachant presque les cheveux, il attendit.
Quelqu’un devait venir le chercher pour le guider jusqu’au phare.
Ce soir quelqu’un était en retard…
Une silhouette informe approchait, penchée sous les assauts du vent.
Une chose indéterminée, toute jaune, avançait difficilement vers lui.
La silhouette se révéla un être humain enfermé dans un ciré, un foulard abritant son visage.
On le héla, une voix étouffée l’enjoignit « venez, vous allez attraper la crève ! »
Il obéit sans discuter et, une fois dans la maison il découvrit avec stupeur quand le ciré fut accroché à la patère de l’entrée que la silhouette informe à peine entrevue était une jeune femme absolument ravissante.
Il se sentit parfaitement idiot quand, se retournant, elle éclata de rire. 
Dans son petit costume de citadin, froissé par le vent et dévasté par la pluie il avait piètre allure.
Elle le regarda gentiment :
- Mais qu’est-ce que vous êtes venu faire ici à Noël ?
- Je suis venu réparer le phare…
Elle sourit 
- Je suis la gardienne du phare.
Elle prit une bouteille dans le réfrigérateur.
- Une petite coupe ?
- Volontiers, merci… Je peux vous demander quelque chose ?
- Hmmm…
- Il est souvent en panne, ce phare ? 
- Assez…
- Ça vous dirait un arrangement ? 
- Mais encore ?
- Mais juste pour la fiabilité du phare, hein.
- Dites toujours…
- Vous gardez le phare, je le répare.
- Et vous vivrez où ?
Plein d’espoir irraisonné il osa :

- Eh bien…
Elle le regarda, sourit très gentiment et dit :
- Mais vous serez sage, hein ?
- Bien sûr !
C’est quand il a ajouté « absolument » qu’elle lui a jeté un regard genre « N’exagère pas, tu veux… »
Mais bon, les promesses hein…

dimanche, 16 décembre 2018

On a besoin d'écrits vains...

Ouais... Mais c’est dimanche...

Sacré Coeur cet hiver.jpg

Ça, c’était l’année dernière.
Pourvu que ça ne recommence pas cette année...
Hier on a fait connaissance d’un couple sympa.
Ça eut pu être vraiment bien.
Hélas…
Non que nos compagnons de café eussent été désagréables, au contraire, mais le temps…
Ce temps « de mince » comme dit Merveille, nous a pourri le reste de la journée.
Nous avions commencé l’après-midi, emportés par l’enthousiasme.
Enfin, emportés par nos pieds car les bus ne daignaient emmener personne de peur, d’amener des passagers prêts à lutter contre les inégalités et le mépris à coups de gilets jaunes.
Les lignes de bus intramuros ayant tendance à frôler des palais et des magasins de luxe, elles furent toutes remaniées « service partiel ».
Notre bus nous amena donc deux stations plus loin, place de Clichy.
Là, les pieds maintenus à la température du trottoir et la tête trempée par la pluie nous sommes arrivés au square d’Anvers sentant le chien mouillé, les cheveux pendants tristement, sauf ceux de la lumière de mes jours.
Chez elle, l’humidité donne à ses cheveux un côté Edwige Feuillère dans « La folle de Chaillot », mais j’aime bien aussi même si elle préfère dire que ça lui donne la coiffure de Colette…
Nous sommes donc arrivés, trempés, gelés, dégoulinants, mais contents.
Après moult cafés, décaféinés pour une, allongés pour une autre, normaux pour un troisième et serrés pour votre serviteur, on s’est senti bien.
Nous étions au chaud, en agréable compagnie, avec des gens diserts et semble-t-il heureux.
Tout allait pour le mieux.
Les meilleures choses ayant une fin il a fallu emmener vers le Sacré Cœur nos compagnons de tourisme.
Là, ça s’est gâté.
Il faisait un froid de gueux, sans doute pour punir les manifestants qui se plaignaient justement de cette condition qu’ils croyaient évanouie depuis la « Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ».
En plus il pleuvait, sûrement pour faire plaisir à un gouvernement très embêté par cette affaire de « gilets jaunes ».
Alors il a fallu mener nos nouveaux amis là où ils pourraient acheter un parapluie.
Nous savions où ils en trouveraient mais nous n’y étions jamais entrés.
Alors, pour la première fois Heure-Bleue et moi sommes entrés dans une de ces boutiques de « schmattès » de la rue de Steinkerque.
C’est un bordel terrible avec des entassements de vêtements monstrueux.
Nous le savions mais nous n’avions jamais eu l’idée d’y entrer.
Pas de vendeuses ou de vendeurs, juste la caisse au fond du… au fond de… on ne peut pas dire « magasin », c’est juste un immense « décrochez-moi-ça » ou une bonne part du stock traîne par terre sans que quiconque songe à ramasser ce qui vient de tomber.
Nous avons laissé nos amis au funiculaire et sommes retournés à la maison.
Après avoir attendu, sous la pluie et le vent, un bus coincé dans les embouteillages, nous sommes arrivés, gelés, dégoulinants, frigorifiés, sentant le chien mouillé.
Mais ce fut quand même bien…

vendredi, 14 décembre 2018

Ah dieu que la guerre est jolie...

Je vous ai déjà parlé de « Poussin » ?
Non, pas le peintre, un autre, un qui était dans « ma » pension.
Un jeune garçon que ma grande sœur trouvait à son goût quand elle avait aux environs de seize ans.
Elle l’avait rencontré en venant me voir chez les Frères, un dimanche où, comme souvent j’étais consigné à la pension.
J’ai passé tant de dimanches là-bas pour des raisons stupides, essentiellement des questions dont j’ignorais qu’il était défendu de les poser.
Poser simplement la question sur le bien-fondé de certaines affirmations par exemple était très mal vu.
Ma grande sœur était alors « désignée volontaire » pour « aller voir ton petit frère qui s’ennuie de toi ma petite chérie ».
« Petite chérie » croisa donc un printemps un pensionnaire que je ne croisais jamais car il était dans la « division des grands » et qui avait le même âge.
Je ne sais toujours pas, près de six décennies plus tard comment elle le croisa.
Je sais seulement qu’il quitta la pension la même année que moi et qu’il revit ma grande sœur.
J’en ai néanmoins retiré à l’époque que « les grands » avaient des techniques à eux pour échapper aux diktats des vieux…
Je repensai donc à « Poussin » que je n’ai connu que sous ce nom, nom que lui donnait sa mère en le couvant de son regard de mère.
Ce « Poussin » fut probablement le premier grand amour de ma grande sœur.
Honnêtement je me suis demandé longtemps comment ils avaient pu s’y prendre.
Surtout que je connaissais ma mère…
J’e l’ai su plus tard en réussissant la même chose…
De ce « Poussin » je n’entendis plus parler que quatre ans plus tard.
Il se rappela au souvenir de ma grande sœur de façon dramatique quand sa mère prévint ma sœur à l’été 1962.
« Poussin » venait d’être tué par une balle perdue exactement quarante minutes avant le cessez-le-feu en Algérie.
Ma grande sœur pleura car elle eut un grand chagrin en apprenant la mort de « Poussin », si jeune, pour rien et pour s’être trouvé au mauvais endroit au mauvais moment…
J’ai encore dans les yeux le regard de la mère de « Poussin » et le souvenir d’une écharpe jaune qu’il portait.
J’ai longtemps pensé que sa mère l’appelait « Poussin » à cause de cette écharpe jaune clair…

jeudi, 13 décembre 2018

J'ai toujours eu du goût pour les cornues, si si…

 Ouais, je sais, c’est un truc de gamin…

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Je me suis toujours dit que j’avais de la chance.
Toutes les femmes chez qui j’ai vécu, de ma grand’mère maternelle quand j’étais enfant jusqu’à mon âge moins jeune –j’allais écrire « adulte », inconscient que je suis-  chez Heure-Bleue, ont toujours fait preuve d’une patience d’ange à l’égard de mes trouvailles.
Quand je repense à la façon dont il m’est arrivé de transformer la maison en véritable laboratoire d’épouvante, je me dis que toutes ces femmes ont été des saintes.
Même mon père, qui n’était pas terrible comme femme, a fait preuve de cette patience angélique.
Je me souviens ainsi d’un soir qui se révéla fumeux.
J’étais sorti depuis peu de l’hôpital ou j’avais passé tout le deuxième trimestre de ma première cinquième et le printemps sonnait les premières soirées d’avant dîner entre voisins.
Les voisins, les parents de S. que je n’aimais pas, étaient à la maison.
La maison était calme, mes sœurs étaient dans la chambre.
Ce soir là, Madame S. était dans le « boyau-cuisine-entrée » avec ma mère.
Monsieur S. discutait avec mon père et ils disaient du mal de De Gaulle.
Monsieur S. c’était celui qui passait souvent le soir à la maison.
- Gaby, t’aurais pas une cigarette, j’ai…
- Je sais, t’as oublié ton paquet dans ton placard…
Je sais que S. n’était pas là, cette petite chose fragile et faux-cul était « chez sa mémé » car il souffrait, disait Madame S. d’une « crise de croissance ».
Je jouais, accroupi aux pieds de mon père.
Tous étaient indifférents à ce que je faisais.
Ils n’auraient pas dû…
J’avais une boîte en bois, une sorte de coffret qui avait autrefois contenu des cubes, de ces cubes de bois qui permettaient de reconstituer six images différentes.
J’en ai encore au moins trois en tête bien que les cubes eussent été perdus depuis des milliers d’années.
Dans cette boîte, ce soir là il y avait des trucs que normalement mes parents auraient dû jeter depuis mon arrivée à l’hôpital.
Hélas, on ne peut penser à tout et beaucoup de ces choses étaient inoffensives.
Plus exactement auraient dû être inoffensives.
Il y avait évidemment de petits bouts de « fil électrique », une pile de 4.5V de la marque « Durandal » aujourd’hui disparue, un tube d’aspirine dont le contenu avait échappé à la méfiance de mes parents, quelques épingles et une mine de crayon bien pointue.
Je jouais donc tranquillement quand l’idée m’est venue.
Les tubes « d’Aspirine Usines du Rhône » étaient à l’époque en aluminium.
Celui là contenait un mélange de chlorate de soude, rescapé de la dernière fusée, de soufre et de limaille d’aluminium.
La limaille d’aluminium m’avait déjà valu une taloche car elle avait flingué une lime à ongle de ma mère.
Ma pile, deux morceaux de fil dont l’un entourait le tube, l’autre lié à la mine de crayon furent l’élément qui déclencha l’aventure.
Je vérifiai qu’en plongeant la mine dans le mélange, il ne se passait rien.
Il ne se passa rien.
Hélas, la pointe de la mine se colla à l’extérieur du tube, rougit, fit rougir l’aluminium du tube au point de contact et le mélange s’enflamma.
Re hélas, ce genre de mélange est inextinguible.
Mon père et Monsieur S. bondirent, se ruèrent vers la cuisine pour chercher de l’eau en criant « ah le petit con ! ».
Ma mère arriva, me colla une taloche en me promettant l’enfer.
La maison puait affreusement et on voyait à peine les murs.
Ma mère a ouvert les fenêtres.
Ce soir là on a dîné chez les S.
C’était bon…