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samedi, 21 avril 2018

On a un général boulanger…

Emilia-Celina semble surprise que des touristes nous disent où trouver une bonne boulangerie dans notre quartier.
Je pense que c’est parce qu’Emilia-Celina ne croise pas souvent de ces touristes qui viennent à Paris.
Je ne parle pas là de ces touristes chinois qui restent dans le triangle circonscrit par l’Opéra, le Printemps et l’église de la Madeleine.
Les plus aventureux se risquant place Vendôme.
Je ne parle pas plus de ces touristes américains timorés qui restent dans des endroits comme le triangle Etoile-Kléber-George V.
Non, Emilia-Celina, je parle du touriste curieux, de celui qui cherche à suivre les pas d’Hemingway dans « Paris est une fête », du couple de touriste qui, quand il est à Saint Lazare, ne tourne pas ses pas vers les grands boulevards mais vers le nord, vers le « quartier de l’Europe ».
Quand il est arrivé en haut de la rue de Rome, au lycée Chaptal, il voit la basilique du Sacré-Cœur, cette confiserie dont je ne sais pas si elle est de plus mauvais goût que la cathédrale Sainte Thérèse de Lisieux ou non.
Et là, il y va, il tombe raide dingue, il va suivre les pas de Bruant, de Degas ou Toulouse-Lautrec.
Peut-être même chantonner comme Cora Vaucaire ou Patachou s’il les connaît mais plus sûrement comme Montand ou Piaf.
Il va traîner des heures dans les petites rues terriblement pentues.
Probablement se faire étouffer son morlingue par un tire-laine.
Il se dira, après avoir souhaité le rétablissement de la Question, de la peine de mort et de la roue, que ça valait quand même le coup.
Mais il va flâner, tester les croissants et les baguettes des boulangeries, les manger tranquillement sur un banc en se moquant discrètement des autres touristes, ceux qui ne savent pas où est « la bonne boulangerie »…
Nous nous sommes assis, Heure-Bleue et moi pour recharger nos batteries pendant que les petites usaient leurs kWh en excédent.
C’est là que le couple de touristes nous a expliqué comment rentrer chez nous et où acheter le pain.
Ils étaient charmants et nous ont dit comment ils avaient pris l’habitude de louer un petit appartement une semaine chaque année dans le quartier.
Nous les reverrons peut-être rue Saint Vincent l’année prochaine…
Mais nous savons qu’il y a plus bas une boulangerie meilleure que celle qu’ils nous ont montrée…
Nous n’osons plus y acheter de croissants car rien qu’à les humer on sent nos artères se boucher.
Mais leur baguette a un avantage inégalable.
Quand on l’achète vers cinq heures du soir, on ne la regarde même pas de peur de la dévorer sur le champ et la lutte est âpre au dîner pour qu’Heure-Bleue ait du pain frais le lendemain matin pour son petit-déjeuner.
Car le lendemain matin, c’est encore du pain frais.
Oui Emilia-Celina

vendredi, 20 avril 2018

Festival de cannes.

De rien, Mab, de rien…
Comme vous le savez, tandis que JJF allait se faire défigurer, que dis-je, étriper un pied à Garches, je tentais quant à moi de ne pas étriper mes petites-filles.
Bon, j’exagère, j’ai eu seulement envie de les jeter par terre et de danser dessus, de les piétiner.
Mais je me suis retenu.
Mais c’est seulement parce que leur père, mon fils, est plus fort que moi.
Sinon…
Alors, pour les occuper nous les avons emmenées dans les jardins du quartier qui sont nombreux, dont le Sacré-Cœur.
C’est là que j’ai vu que la reprise économique était en marche.
Il y a des signes qui ne trompent pas.
J’ai vu, rue de Steinkerque, de nombreuses « EURL » nouvellement créées, entièrement dévolues à tirer le plus de subsides possibles du passant sans en déclarer le moindre €uro à l’administration fiscale.
Je n’avais en effet jamais vu autant de joueurs de bonneteau qu’il y a plus de cinquante ans du côté du Marché aux Puces.
L’activité est en plein boom  et la présence de la maréchaussée ne dérange pas les joueurs de bonneteau acharnés à soutirer le pécule des touristes.
Hélas, la concurrence déloyale des Chinois a tué le commerce de cravates vendues à la sauvette dans un parapluie.
Heure-Bleue serrait son sac à main, je gardais prudemment la main dans ma poche histoire d’être sûr que c’était la seule à tenir mon « smartphone ».
 Le mois d’avril à Paris, lorsqu’il fait beau, est un piège redoutable qui réveille la tendance romantique du touriste et la tendance chapardeuse du pickpocket.
Le second étant aidé par la veine rêvasseuse du premier.
Ce fut une chouette promenade qui nous mena vers le haut de la butte, puis rue Saint Vincent où nous n’avons pas vu celle qui s’appelait Rose et sentait bon la fleur nouvelle.
Nous l’avons descendue tranquillement jusqu’à la place Constantin Pecqueur.
Là, j’ai failli me rappeler une veste mémorable quand les petites et la lumière de mes jours ont voulu faire une halte au petit jardin de la place.
Heure-Bleue a été émue quand P’tite Sœur lui a amené une jonquille magnifique.
Puis elle s’est rappelée soudain qu’il était mal vu de dépouiller les parterres des jardins publics et en a fait part à P’tite Sœur qui n’en a rien eu à cirer…
Le moment est alors venu de traverser la place pour prendre le pain dans « cette boulangerie qui fait paraît-il une excellente baguette » aux dires d’un couple de touristes avec qui nous avions conversé.
Heure-Bleue s’est levée, m’a tendu la jonquille et dit, à voix suffisamment haute pour attirer l’attention d’autres promeneurs « Minou, tu ne veux pas prendre ma fleur ? Maintenant ? »
Le printemps à Paris est une merveille vous dis-je…

jeudi, 19 avril 2018

Panorama

On se promène beaucoup dans notre coin.
Nous avons déjeuné avec une amie au début de la semaine.
C’est une amie que nous rencontrons de façon intermittente mais régulièrement et toujours avec plaisir.
La dernière fois, ce fut très bien. Nous étions avec Merveille et P’tite Sœur.
Merveille voulait depuis longtemps voir Paris du haut du dôme du Sacré-Cœur.
Tâche impossible tant pour les pieds d’Heure-Bleue que pour les éponges défaillantes de votre Goût préféré.
J’ai donc accompagné notre amie au Sacré-Cœur tandis que la lumière de mes jours emmenait P’tite Sœur dans un jardin plein de balançoires, de jeux et de jouets.
Puis j’ai attendu, assis sur un plot du parvis.
J’ai regardé et écouté les gens. C’était passionnant.
C’est fou ce hiatus permanent entre ce que veulent les enfants et ce que les parents pensent que veulent les enfants.
Et c’est pareil pour les couples.
A les regarder comme ça, réussir à n’être jamais d’accord sans se chamailler, je me suis demandé si le temps printanier ne faisait pas plus pour la paix dans le monde que les discours philosophiques qu’on nous sert pour nous inciter à penser que « régression » c’est pareil que « réforme ».
Puis mon esprit a commencé à dériver.
Comme tout presbyte qui se respecte, je vois assez bien de loin.
Très loin même.
Surtout dans le temps…
Je me suis donc accoudé à la rambarde et ai regardé vers le bas de la butte.
J’ai vu mon lycée puis, légèrement sur la gauche, le square d’Anvers.
Il m’a suffi de ma mémoire pour traverser l’avenue Trudaine et descendre la rue Turgot.
J’ai clos les yeux un instant et revu un a un tous les immeubles, le bureau de Poste, cette maison qui me plaît tant.
Je me suis rappelé le centre EDF, celui du 14 de la rue, aujourd’hui désaffecté.
Et puis, encore et toujours, cette sensation de manque et d’oubli.
Quelque chose qui m’échappe toujours chaque fois que je pense à cette rue.
Que je l’arpente de mon pas lent ou de la mémoire.
Quelque chose de cette rue me manque et m’échappe.
Mais un jour ça me reviendra, je le sais…
Puis, je me suis relevé et approché de l’escalier de la basilique.
Juste quand notre amie et ma petite-fille sont ressorties.
Je sais, lectrices chéries, j’ai dit « ma petite-fille » alors que nous en avons deux.
Mais celle-ci, c’est Merveille…
Merveille nous a guidés jusqu’à un café qui lui plaît et où elle sait qu’on lui permet de faire pipi sans lui fourguer un café.
Nous y avons pris un café et Merveille une limonade puis nous avons descendu les escaliers de la butte qui ne sont pas durs qu’aux miséreux.
Nous avons abandonné peu après notre amie rue Lepic, pile au droit du Moulin Rouge, en vue de la station Blanche qui la mènerait chez elle.
Et nous avons fini à pied jusqu’à la maison.
Je ne sais pas comment elle peut marcher en parlant autant sans perdre le souffle !
Merveille est vraiment très bien…

dimanche, 15 avril 2018

Le Livre de Merveille.

Ô surprise, hier matin l’Ours a téléphoné.
« Les petites veulent vous voir ! » affirma-t-il.
L’Ours nous a donc amené Merveille et P’tite Sœur dans l’après-midi et s’est enfui aussitôt.
Nous avons donc, Heure-Bleue, les filles et moi, longuement discuté de l’ordre dans lequel on devait faire les courses, les jeux et le goûter.
Pour le goûter, les desiderata des unes et de l’autre enfin définis, nous sommes partis.
Pour le goûter, que je vous résume :
Heure-Bleue : rien.
Le Goût : rien.
Merveille : « Je ne sais pas, peut-être un bout de pain ».
P’tite Sœur : Tout.
Je savais que je finirai par manger la moitié du pain au chocolat que P’tite Sœur me tendrait en ayant l’air de me faire un cadeau alors qu’elle hésitait seulement à le jeter dans le caniveau de peur de se faire engueuler…
Nous avons laissé à la marchande de barbe-à-papa du square assez de sous pour sortir le Yémen de la misère, nous avons fait les courses et sommes revenus à la maison.
C’est là que j’ai vu dans un geste que les choses changent.
Merveille grandit.
Je l’ai su hier rien qu’à sa façon de s’asseoir sur mes genoux.
Il y a quelque temps, elle m’évitait encore vaguement, dans cette période où les filles et les garçons ne veulent rien avoir à faire ensemble.
Habituellement, Merveille s’assied sur mes genoux comme on enfourche un vélo, assez brutalement.
Puis, une fois installée, me raconte des choses très importantes qui doivent absolument rester secrètes même si elle les a dites à ses copines, ses parents et ses grand’ mères.
Hier, pas de vélo.
Je suis sûr, lectrices chéries, que vous connaissez ce mouvement élégant.
Ce mouvement de hanches très féminin, fait pour repousser légèrement une jupe et s’asseoir sans la froisser.
Eh bien Merveille a fait ça, mais en leggins et pour s’asseoir sur mes genoux.
Mieux, elle a levé les yeux au ciel d’un air vaguement douloureux et dit « Aïe papy ! » Et a ajouté d’un ton souffreteux « Je me suis fait mal aux seins… »
J’ai regardé Merveille d’un air interrogatif.
Elle m’a dit « Si, papy, j’ai les seins qui poussent. »
J’ai regardé son T-shirt.
On ne pouvait pas dire que « Déjà Jayne Mansfield perçait sous Merveille »…
Je me suis rappelé le temps pas si lointain où elle était en CE2.
- Papy, je voudrais avoir des titis…
- Pourquoi ça, Merveille ?
- Parce que les robes tombent mieux quand on a des titis.
Bref, hier soir elle m’a « montré ses seins ».
De fait, les deux lentilles que j’avais toujours connues ont été remplacées par deux petits pois.

vendredi, 13 avril 2018

Magic Johnson…

Tout à l’heure.
C’est-à-dire dans dix minutes, je vais aller dans la salle de bains.
Et je vais me laver les cheveux.
Normal, penserez-vous lectrices chéries.
Vous ajouterez in petto « mais pourquoi nous raconte-t-il ça ? On le sait bien que tous les matins il va dans la salle de bains ! »
Eh bien, voilà : La lumière de mes jours a un certain nombre de petits proverbes à usage perso piqués au hasard de ses conversations, de ce qu’elle entend à la radio ou qu’elle retire de ses lectures.
Un des derniers en cours, récupéré je ne sais où, prétend « Il faut changer de shampooing souvent, sinon les cheveux… »
Comme elle « parle fille », je ne sais pas trop ce que feront les cheveux.
J’en ai seulement retiré que si on applique à la lettre ce judicieux conseil, probablement répandu par un fabricant de produits de beauté, je ne vais bientôt plus pouvoir poser ma mousse à raser ni mon rasoir, ni même moi, dans une salle de bains envahie par diverses bouteilles de shampooing.
Mais aujourd’hui c’est important, lectrices chéries.
Je vais inaugurer un shampooing magique, dégotté par Heure-Bleue au Monop’ de la rue de Lévis.
Un shampooing que si tu te laves les cheveux avec, dès le dixième lavage, tu as récupéré la toison « absalonesque » qui faisait ton charme, mon Goût chéri, dans ta jeunesse.
Hélas, un détail que n’a pas repéré la délicieuse créature qui partage ma vie et ses sous, vient gâcher la fête.
Il y a contradiction entre la promesse de la jeunesse capillaire récupérée grâce à ce shampooing et la nécessité de changer de shampooing aussi souvent que possible.
Il faudra donc, compte tenu du nombre infernal de shampooings disponibles, au moins trente ans, pour que le shampooing magique montre ses effets.
Il n’y a plus qu’à souhaiter que cette histoire de cheveux qui continuent à pousser dans la tombe ne soit pas qu’une légende…
« En même temps », comme dit un jeune président, il paraît qu’à l’idée de penser à la mort, certains se font des cheveux…
J’ai la composition de ce shampooing magique.
C’est la même que celle de tous les autres shampooings.
Essentiellement de l’eau et « moins de 5% d’agents anioniques », le reste étant un de ces parfums divers et artificiels utilisés par l’industrie pour vous faire croire que vous descendez d’un pommier ou d’un oranger au lieu de sortir de la douche…