samedi, 02 juillet 2016
La vie est un film erratique…
« Chaque âge a ses plaisirs » entends-je seriner régulièrement.
Je veux bien.
Je voudrais seulement qu’on me dise lesquels…
Pour la jeunesse je vois assez bien.
C’est après que ça se gâte…
Pourquoi vous dis-je ça, lectrices chéries ?
D’abord parce que je le pense, ensuite parce que je le vérifie souvent.
Hier par exemple, Heure-Bleue et moi sommes allés traîner à Paris, comme souvent.
Le temps plus vieux a fait des siennes dès notre montée dans le bus.
Un vieille petite fille d’au moins soixante dix ans a fait des siennes.
Je n’ose pas raconter ce qu’elle a dit au cours de la brève conversation décousue qu’elle a eue avec Heure-Bleue.
Elle vous racontera ça mieux que moi…
Après notre döner chez les Turcs de la rue des Petites Écuries, elle et moi avons changé de circuit de pèlerinage.
Nous en avons une grande réserve et nous piochons dedans en fonction de divers critères.
De quoi voulons nous déjeuner.
De quoi voulons nous dîner.
De quoi voulons nous rêver.
De quoi voulons nous nous souvenir.
De quoi voulons nous parler.
Pour le dernier, nous n’avons que l’embarras du choix.
De toute façon nous parlons tout le temps, alors…
Cet après-midi là, la lumière de mes jours et moi avancions rue Vivienne.
Nous nous sommes souvenus des mêmes moments.
- Chaque fois qu’on passe rue Vivienne, je pense à toi…
- Hmmm ?
- Je nous revois, moi te suivant et te regardant, ta mini-jupe verte super courte, et tes jambes pâles super longues.
- Celle dont tu disais que c’était plutôt une ceinture un peu longue ?
- Oui, celle là...
- Chaque fois qu’on passe rue Vivienne, Minou, je pense à toi…
- Hmmm ?
- Je nous revois, toi me suivant et t’arrêtant avec moi devant les vitrines. Tu étais plein d’épis et tu me regardais comme un gâteau…
Nous avons commencé à soupirer puis nous sommes partis dans une discussion à propos du café dans lequel nous nous sommes arrêtés et qui avait bien changé depuis le début des années soixante-dix.
- Il y avait un comptoir, là, Minou, et j’y ai mangé les meilleurs croissants que j’aie jamais mangé.
Après un silence, elle a ajouté d’un ton de regret :
- Je n’ai jamais su où ils les achetaient…
Puis nous sommes passés sur le petit marché de la place de la Bourse et j’ai acheté des poireaux et des cerises pour faire un clafoutis à la lumière de mes jours.
Pour les poireaux, j’ai juste eu l’impression qu’on les avait fait pousser au Parc Monceau et que je venais d’acheter en même temps six ares du parc…
Mais quand même, ce fut une longue et délicieuse promenade que nous avons finie place de la Madeleine.
C’est dans le bus que j’ai appris de la lumière de mes jours, qui n’avait pourtant pas bu que les cerises qu’elle préférait c’est « les bigorneaux ».
Des cerises à coquille dure, en somme, ça nous a fait rire jusqu’à la Porte Champerret.
09:04 | Commentaires (12)
mercredi, 29 juin 2016
Recordar, volver, llorar y desear…
La journée d’hier fut vraiment une journée délicieuse.
Du moins pour nous. L’actualité semble moins enthousiaste sur le sujet…
Nous étions partis pour déjeuner d’un « bô-bun » avant d’aller au cinéma.
Le « bô-bun » de la rue des Dames, puis le café au Wepler et enfin voir « Julieta » au Wepler, le ciné.
Notre balade avait commencé de façon assez sympa dans le train.
Tout en conversant nous promenions le regard sur les voyageurs.
Sur la banquette devant nous un couple.
Deux jeunes gens, une brune de type espagnol et un châtain « genre j’ai trop chaud ».
Quand elle ne lui passait pas la main sur la joue elle le tenait par le cou, ne le lâchait que pour lui embrasser le cou et ne décollait ses lèvres que pour se coller un peu plus contre lui et lui passer le bras autour des épaule.
Le jeune homme devait avoir l’impression de voyager avec une pieuvre.
Nous papotions, Heure-Bleue et moi quand je lui ai dit :
- Tu as vu ça ? Elle ne le laisse pas respirer !
- Oui, j’ai vu. Finalement elle est comme toi, c’est un truc de brun ça…
- Ah, j’étais comme ça ?
- Oui, oui…
- Quand même pas !
- Pire même, Minou…
Bon, maintenant on fait plus ça.
Il faut bien avouer qu’à nos âges ça fait moins joli qu’à vingt ans et quelques…
Heure-Bleue a voulu changer de route pour rejoindre « Pho 9 ».
J’ai dû insister car la lumière de mes jours tenait absolument à partir dans la direction opposée en prétendant que ce serait plus court.
À 40.000 kilomètres près, c’était vrai.
Elle a néanmoins choisi un chemin montant, pas sablonneux mais malaisé pour nous mener à ce « bô-bun ».
Depuis la terrasse du Wepler où nous prenions un café, nous regardions passer les passants…
Heure-Bleue me disait de temps à autre :
- Tu as vu celle-là, celle aux cheveux longs ? Je suis bête, bien sûr que tu l’as vue…
Cela dit, tout fout le camp.
Le tabac de voyous sur la place n’a gardé que le coin tabac et le reste de ce grand café est devenu un « Starbucks » tandis qu’à côte de « Charlot Le Roi des Coquillages » a fleuri un « McDo ».
Même « La Taverne du Régent » a disparu qui accueillit des générations de gamins attendant les gamines qui sortaient du lycée Jules Ferry.
L’heure venue nous sommes allés au cinéma.
« Julieta » nous a passionné.
C’est un des plus chouette film sur le manque, tous les manques et sur l’absence, que j’aie jamais vu.
Même si un point a à mon sens a été une « hypertrophie symbolique », ce film mérite d’être vu.
Même revu.
Le castillan est vraiment une belle langue…
09:39 | Commentaires (11)
lundi, 27 juin 2016
Une grande marche...
Lakevio, tu as de ces idées…
- Reprenons… Vous me disiez, Madame, que vous vous étiez arrêtée.
- Oui, parce que j’ai entendu quelque chose de curieux dans la voiture…
- Mais tout de même, cet arrêt brutal…
- Mais enfin, Monsieur l’inspecteur !
- Madame ?
- Mais il n’écoute rien ! Il ne fait attention à rien !
- « Ne faisait », Madame, « Ne faisait »
J’ai pris mon mouchoir et me suis tamponné les yeux, est-ce que ça allait encore durer longtemps, ce cinéma ?
- Oui bon, il a ouvert la porte et est descendu, voilà…
Je renifle, un léger hoquet, un petit coup de mon mouchoir sur les yeux.
Ce petit machin de dentelle m’irrite les paupières et n’est même pas humide.
Je suis en train de flinguer mon maquillage et de perdre mon temps.
Mais qu’est-ce qu’il fout avec cette tablette ?
- Reprenons, Madame.
- Oui Monsieur l’inspecteur, excusez mon émotion, mais tout de même, mon mari…
- Je sais Madame, il est mort. C’est même pour ça que vous êtes ici…
- Vous ne…
- « Je ne rien », reprenons donc. Vous me disiez que vous vous étiez arrêtée, l’attention attirée par un bruit.
- Oui, je me suis arrêtée, je pensais qu’un problème survenait dans le moteur.
- Et vous avez posé cette tablette sur le siège…
- Oui, c’est la tablette de mon mari, je la lui ai prise, je sais bien que…
- Oui, c’est effectivement interdit quand on est au volant mais ce n’est pas ça qui m’intéresse.
- Oui, je me suis arrêtée, je voulais vérifier que rien ne clochait dans la voiture.
- Et c’est à ce moment que votre mari…
- Oui, je vous l’ai dit ! Il ne faisait attention à rien ! Il n’écoutait rien !
- Vous m’aviez dit que depuis qu’il était cloué dans son fauteuil roulant, il ne prêtait attention à rien d’autre que les promenades que vous faisiez avec lui.
- Oui ! Hélas, il était toujours impatient…
- Donc, vous vous êtes arrêtée et…
- Et il a ouvert la porte de la voiture, il a poussé la manette d’avance rapide du fauteuil et il est tombé directement dans le ravin ! Oh mon dieu ! Quelle horreur !
- Oui… Pourtant…
- Pourtant quoi ? C’est épouvantable de perdre aussi brutalement un être cher avec qui on a passé tant d’années !
Encore un petit coup de tampon brodé sur mes mirettes… Il m’énerve ce flic.
D’abord qu’est-ce qu’il a à tapoter cette tablette ? Qu’est-ce qu’il m’agace !
- Justement madame, la présence de cette tablette n’est pas fortuite.
- Que fait elle là ? C’est la tablette de mon mari.
- Je sais bien, vous me l’avez dit, justement, c’est pour ça que vous êtes là aussi.
- Mais…
- Votre fournisseur d’accès, ainsi que la loi m’a autorisé à le lui demander sur décision du juge, m’a communiqué les derniers échanges véhiculés par cette tablette entre votre belle-sœur et votre mari.
- Mais…
« Bon, je vais te laisser, la voiture s’est arrêtée, on doit y être, je ne vois rien avec ce soleil dans les yeux… »
« Bisous, à plus. »
Ce con n’a pas coupé la communication !
« Mon chéri ! Ça y est ! On est arrivé ! Allez hop ! Dehors ! »
« Clac… Aaaaaaaahhhhhhhhhhh !!! »
« Enfin ! A moi les picaillons ! Exit ce vieux con radin ! »
- Vous comprenez pourquoi vous êtes là, Madame ?
09:18 | Commentaires (14)
dimanche, 26 juin 2016
La guerre des deux rosses…
Déjà, il y a peu je me suis demandé comment un sexagénaire tardif, euphémisme pour septuagénaire qui veut faire djeuns, pouvait sombrer dans le ridicule autrement qu’en se mettant une chemise « fleurs + col pelle à tarte ».
Eh bien j’avais vu ça hier en allant chercher le pain.
Le septuagénaire allait sous peu se casser le col du fémur s’il jouait à ça souvent.
Imaginez le, cheveux gris, dessus du crâne lisse mais hélas la tonsure trop longue et maigrelette retenue par un catogan.
Lui pense que c’est pour tenir ses cheveux.
Je pense quant à moi que c’est pour empêcher cette maigre mèche grise de s’enfuir.
Ma « baguette Tradition » sous le bras, je le regarde tenter de voltiger sur sa trottinette alors que la bouée qui lui ceint le ventre nuit à toute tentative de légèreté de sa part.
J’ai attendu mais non, il n’est pas tombé malgré une embardée au feu rouge près de l’arrêt de bus.
Près de soixante-dix piges et en trottinette !
J’aime bien voir des choses comme ça dans la rue, ça me fait des trucs à vous raconter, lectrices chéries.
Aujourd’hui c’était bien plus joli.
On est allé à l’école de Merveille pour la fête de fin d’année.
Merveille est montée sur le podium des vainqueurs de la compétition de dictée.
Toutes les classes de même niveau étaient en compétition.
Les trois vainqueurs des classes de CE2 n’étaient séparées l’une de l’autre que d’un petit point sur deux-cents-vingt-huit points.
La troisième, Merveille, vexée de n’avoir que deux-cents-vingt-six points faisait la tête.
On a applaudi très fort quand même parce que, hein…
Une chose m’a frappé : Sur quinze élèves, à raison de trois par niveau, du CP au CM2, seuls trois garçons s’étaient hissés sur le podium.
Deux d’entre eux en CM2.
Le troisième en CE1.
La médaille d’or échut à un garçon nommé Yasser.
Sympathique et bien élevé ce garçon avec qui j’ai échangé quelques mots mais je pressens quelques difficultés pour la suite car l’an prochain il passe haut la main chez les brutes de l’autre côté de la rue.
Je me suis demandé pourquoi ces enfants plutôt gentils, discrets et si mignons se transformaient en barbares à peine traversée la rue qui sépare l’école primaire du collège.
Les moyens de l’école publique n’ont pas dû réellement augmenter puisque même « le Prix de Bonne Camaraderie » n’est plus décerné…
J’ai regardé la suite attentivement.
Surtout quand P’tite Sœur s’est invitée sur scène dans un groupe de danse.
J’ai remarqué que parmi toutes les élèves présentes, seules trois petites filles avaient une élégance de gestes naturelle.
Une dont j’ai appris qu’elle s’appelle Ludivine, puis une petite métisse magnifique et bien sûr, Merveille.
J’ai aussi appris tout à fait incidemment que chacune avait des deux autres une opinion disons « plutôt réservée ».
Bon, d’accord, en vrai français de tous les jours, chacune voit les deux autres comme d’épouvantables petites pétasses.
Toutes trois ont neuf ans et déjà le syndrome de la multiplicité des crocodiles dans le même marigot se pointe…
08:07 | Commentaires (4)
jeudi, 23 juin 2016
L'effet mère dure longtemps...
- J’ai pas d’amis…
- Tu ne viens que rarement dans ce jardin, Merveille, tu ne peux pas y avoir d’amis.
- …
Heure-Bleue a dit :
- Va demander à la petite fille, là-bas si elle veut jouer avec toi.
- Celle avec la robe rose ?
- Oui, elle a l’air de s’ennuyer aussi.
- Je n’ose pas…
Merveille s’avance vers le banc où « Robe rose » s’ennuie activement.
Fait cinq ou six pas.
Revient vers nous.
- Si elle ne veut pas ?
« Ce n’est pas grave. » dit Heure-Bleue.
« Si tu ne demandes pas, tu ne sauras pas. » dis je.
Merveille repart, refait ses cinq ou six pas et revient.
- Oui mais si elle ne veut pas ?
- C’est un risque, essaie…
- Mais, papy je vais passer pour une imbécile !
- Mais non ! On ne passe pas pour une imbécile en allant vers les autres.
Merveille repart, fait cinq ou si pas, recule de deux et se lance.
Elle dit quelques mots que nous n’entendons pas à la petite fille.
« Robe rose » se lève.
Elle vont toutes deux vers les bidules où grimper, tomber, glisser.
Bref s’amuser.
Elles jouent ensemble un moment puis la mère de « Robe rose » se lève, appelle sa fille et dit quelques mots à Merveille.
Puis, la mère vient vers nous et nous dit que Merveille est très bien, qu’elle a osé aller vers sa fille et que c’est très courageux, qu’il est rare que les gens osent aller vers les autres.
Nous avons été très fiers de Merveille, Heure-Bleue et moi.
On a même failli s’étouffer avec ces grandes gorgées de petit-lait.
Il nous a quand même fallu sortir de ce jardin, acheter de quoi sustenter ce piaf qu’est Merveille.
Puis la faire dîner.
Enfin la ramener chez les enfants.
Elle n’a même pas chougné !
Ce fut une très chouette journée.
08:52 | Commentaires (16)