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samedi, 23 avril 2016

Mai moire ma mémoire

Un jour je repasserai rue Turgot.
C’est obligé.
Je suis sûr que j’ai raté quelque chose.
A priori il n’y a rien d’extraordinaire dans cette rue plutôt courte qui relie l’avenue Trudaine à la rue Condorcet et la rue de Rochechouart.
Elle part du square d’Anvers et va jusqu’à la petite place triangulaire formée par la conjonction de ces trois rues.
Je l’empruntais souvent pour aller prendre le 85 qui me ramènerait chez moi.
Je repense à cette rue dès que le mois de mai approche.
J’ai failli écrire « le moi de mai », vous vous rendez compte lectrices chéries ?
Cette rue donc, a quelque chose, j’en suis sûr.
Je ne sais quoi.
Tout ce que je sais c’est que je l’ai raté.
J’ai dû apercevoir ou entendre quelque chose qui m’a profondément marqué.
Ou quelqu’un…
Cette rue n’a pourtant rien de particulier, elle descend en pente douce le flanc de la colline de Montmartre et, pour ce que je me rappelle, à part un grand bureau des PTT et un d’EDF, il n’y avait rien d’autre qu’une école primaire et quelques jolis immeubles.
Ah si ! Il y avait aussi une « maison de ville », je frémis aujourd’hui au prix qu’il faudrait payer pour l’habiter.
Mais non, ce n’est pas ça.
J’ai peut-être croisé quelqu’un que je connais, ou connaissais, et qui m’a marqué.
Quelqu’un que je n’ai pas revu depuis très longtemps.
On croise tant de gens dans une vie.
Une chose est sûre, pour que ça ressurgisse en un souvenir flou dès que le mois de mai approche, ça m’a marqué.
C’est peut-être une nouvelle triste, allez savoir.
Peut-être que quelqu’un que je connaissais vivait dans ce coin et est mort au mois de mai.
Ça doit être ça parce qu’habituellement, ce sont plutôt des souvenirs agréables qui me viennent quand je pense à ce coin.
J’y retournerai.
Je descendrai à Pont Cardinet, je remonterai la rue Cardinet jusqu’à l’avenue de Clichy, je m’arrêterai peut-être chez Ladess pour manger un döner.
Puis je prendrai le 54 qui s’arrête un peu plus loin après le restaurant et j’irai jusqu’à Anvers.
Je traverserai le square d’Anvers et, à la sortie de l’autre bout, je n’aurai qu’à traverser l’avenue pour être rue Turgot.
Je l’arpenterai plusieurs fois, de haut en bas, puis de bas en haut.
J’examinerai chaque immeuble, la maison, pas l’école ni la Poste ni EDF.
J’examinerai presque tout.
Je m’arrêterai au café où j’attendais le 85 et qui a changé de nom.
Oui, celui qui est sur la photo.
Maintenant, sans doute à cause de l’école toute proche, il s'appelle « Jolis mômes ».
Puis je remonterai la rue.
Je finirai pas me rappeler.
Il est impossible qu’il en aille autrement.
Je ne peux pas laisser cette griffure sur ma mémoire se réveiller chaque approche du mois de mai.

 

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vendredi, 22 avril 2016

La dame de piques.

Hier j’ai écouté Noémie Delattre défendre avec conviction la condition de la femme et combattre avec sa pugnacité coutumière toute forme de sexisme.
Je suis généralement totalement d’accord avec elle, notamment quand elle se demande « Si les femmes sont concernées par les droits de l’Homme, à quoi bon une journée du droit des femmes ? »
Hélas, ce matin là, elle avait enfourché son destrier avec tant d’élan qu’elle a vidé les étriers avant même que d’être en selle.
Il était question de « Babycook » ce petit engin cher et remarquablement pratique pour nourrir les bébés.
Elle s’est illico élevée avec véhémence contre la publicité de l’engin dont elle a probablement fait l’acquisition pour mettre le petit à l’engrais.
Oui, les mamans, croyantes ou athées, sont toutes des mères juives en la matière.
Ça se résume grossièrement quand c’est un garçon à :
« Il a bien mangé, c’est bien, regardez comme il est beau, ah la la, les filles elles vont tomber raides ! Comme sa maman, hein mon bébé chéri !  »
Bref, elle entame d’entrée l’éducation qui en fera un macho accompli…
Noémie n’a pas saisi l’ironie de la situation.
Elle n’a remarqué qu’une chose :
« Avec Babycook, les mamans vont découvrir le plaisir de, etc. »
Outre que j’espère que les mamans auront découvert le plaisir avant d’acheter un Babycook, je dois dire qu’elle s’est plus attachée à la façon maladroite de présenter l’outil qu’à son utilité.
C’est à ce moment que me revient qu’à près de trente-huit ans elle a donné naissance à un bébé il y a peu.
Et, j’ai repensé à la façon dont la lumière de mes jours a usé de moi.
Pour fabriquer la chair de sa chair, d’abord.
Pour s’en occuper ensuite.
Je me suis alors aperçu que j’avais trente ans de plus que Noémie Delattre et sans aucun doute changé des bébés bien plus souvent qu’elle.
Et pendant bien plus longtemps, vu l’âge du sien…
Même mon père né en 1921 a plus souvent changé des bébés que Noémie Delattre.
Aaah… Lectrices chéries ! Si vous saviez !
Si vous saviez tout de cet arrangement conclu entre Heure-Bleue et moi.
Aaaahhh... Le coup du « Mon Minou, la nuit un biberon sur deux c’est moi, un sur deux c’est toi »
Oui, à cette époque aussi lointaine que bénie, j’étais « Mon Minouuuuu… », pas « Minou ! »
Le genre d’arrangement qui démarre dès la première nuit par « Mon Minou, c’est ton tour ! »
Le suivant, ça se gâte et j’ai droit à « Mon Minou, tu veux pas prendre mon tour ? Minou… »
Avec yeux qui papillotent et moue qui donne illico envie d’entamer la fabrication du suivant.
Envie réfrénée aussitôt par un regard qui dit « n’y songe même pas ! Si tu t’approches je t’émascule d’un coup de dents ! »
Donc, lectrices chéries, n’allez pas prendre au premier degré et pour argent comptant ce que dit Noémie Delattre avec un talent d’escroc de haut vol.
Elle vous défend avec conviction.
Comme si vous ne le faisiez pas depuis longtemps.

jeudi, 21 avril 2016

Mère d’alors…

Je viens de lire le billet de Coumarine.
Coumarine se débat dans des querelles de maître-queux « viande ou pas viande ».
Elle n’aime plus la viande.
Elle me rappelle d’un coup les chamailleries que j’avais avec ma mère à propos de viande.
Depuis très longtemps, avant même que l’Ours n’aille à la maternelle, j’avais été dégoûté de la viande rouge pour un long moment à cause de tournedos trop tendres.
Je ne me suis résolu à en remanger que sous la forme « Rossini ».

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Ce qui ne peut se faire quotidiennement sans mettre un budget en danger…
Depuis, je vous donne donc une nouvelle dont vous vous foutez éperdument :
Oui lectrices chéries, je n’aime que la volaille, le veau et le filet mignon.
D’où de nombreuses escarmouches avec ma mère qui eut jusqu’à sa mort un goût marqué pour le bœuf.

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Elle ne l’aimait pas saignant, encore moins « bleu » mais si sa cuisson préférée, entre semelle et carton, aurait fait hurler un boucher, pour elle des choses comme le poulet ou l’escalope de veau c’était « de la viande de fillette ».
Des décennies dans le Marais lui avaient fait éviter des locutions mettant en cause les préférences amoureuses de son prochain.
Elle assortissait ses recommandations de ces dictons idiots comme « c’est la viande qui nourrit la viande ! »
Bref, des âneries…
Elle se faisait chaque fois piéger par un fils qui a toujours eu un tempérament d’emmerdeur.
- Maman, et les bœufs ? Ils font comment ? C’est de la viande qui mange de l’herbe !
- Aahh… Tu m’énerves, t’es bien comme ton père, toujours à chercher la petite bête !
- Il l’a trouvée…
- Oh mon fils ! Tu n’as pas honte ?
Il me faut vous dire que ma mère n’excédait pas un mètre cinquante.
La maison a toujours été animée et je ne sais toujours pas si c’est parce que mon père avait la langue pointue ou parce que ma mère avait la dent dure…

mercredi, 20 avril 2016

Tels Guillaume, les petits suisses…

Hier, j’avais fait des efforts.
J’avais commencé par un désaccord avec la lumière de mes jours.
Oh, rien de grave, une histoire de petits suisses.
Il y en avait, j’en étais sûr, deux dans le réfrigérateur.
Je le sais, je les avais gardé pour les mettre dans le poulet afin qu’il gardât le moelleux espéré.
Ces foutus petits suisses avaient disparus, emportés j’en suis sûr par les lutins ou les Martiens.
Mais si, vous savez bien, lectrices chéries, ces farceurs qui vous piquent votre gomme et qui la remettent sous vos yeux quand vous en avez déballé une neuve…
Heure-Bleue, qui s’était éblouie toute seule de se lever si tôt, alla jusqu’à proposer d’aller acheter les petits suisses disparus.
J’ai failli tomber à la renverse.
J’ai regardé l’heure.
Elle partit à la salle de bain.
J’ai craint un moment que les petits suisses n’arrivassent trop tard au point de fondre dans un poulet déjà cuit.
Mais non !
J’ai préparé une mayonnaise avec un peu de paprika, mis les pommes de terre dans le plat, rincé et réservé les haricots verts, décortiqué les crevettes, épluché la mâche qui les habillerait.
Puis j’ai attendu pour préparer les avocats.
J’avais la hantise la veille qu’ils fussent aussi durs que des procureurs, mais non…
Évidemment, l’un des quatre était un avocat marron.
Il finira dans mon assiette.
Nos invités sont arrivés.
J’aime beaucoup nos invités.
J’ai vérifié que la moitié femme de nos invités avait toujours les yeux verts que je lui connais depuis l’été 2007.
J’ai constaté une fois de plus qu’il est inutile de faire la conversation.
Lui et moi avons échangé quelques mots mais surtout écouté.
Nous avons bu un vin blanc à deux points de permis.
Puis un vin rouge à au moins quatre points.
Le cru le plus répandu a été délaissé.
J’ai noté le peu de succès de la Volvic…

mardi, 19 avril 2016

L'alibi d'eau de ma muse m'amuse...

Dimanche dernier, j’ai lu ton billet, Berthoise.
Cette hyène d’Heure-Bleue est allée directement te dire qu’on avait, toi et moi, le soupir facile.
En réalité, elle frime, je vis avec depuis assez longtemps pour savoir qu’elle n’a pas le cœur desséché d’Ebenezer Scrooge mais  elle aime se donner de temps à autre un côté pragmatique qu’elle met hélas assez peu en pratique.
Enfin… Ça lui donne un air sérieux.
Sérieux dont nous avons bien besoin, elle et moi.
Je te disais donc, Berthoise que l’on m’avait quasiment dicté mon billet d’aujourd’hui.
Et tu vas voir, Heure-Bleue, je vais t’en donner, moi, du soupir !
Faites confiance à un spécialiste de la guimauve.
Donc disais-je, ce dimanche, j’ai reçu un mail de Blogspirit m’avisant que « Sophie » dont je sais qu’elle ne s’appelle pas Sophie et n’a pas de blog, ce que je regrette, « Sophie » donc, m’avait laissé un commentaire.
Une de ses réminiscences a attiré mon attention :
« Il n'y a pas si longtemps, je me souvenais d'un flirt de mes 17 ans, et j'ai comme un annuaire qui s'est déclenché : je me souviens de son nom, mais également de son adresse avec une précision complète. Bizarre non ? »
Sophie, je dois te dire que non.
Mieux que « non », plutôt  « Ah mais non ! Ce n'est pas bizarre du tout ! »
Et j’espère bien que tu te rappelles bien d’autres choses que son nom et son adresse.
Du coup tu ravives mon goût pour l’anaphore, cet artifice rhétorique qui, outre qu’il souligne bien les choses, permet de faire d’un tout petit billet une longue tartine…

Rappelle toi tes dix-sept ans Sophie.
Rappelle toi ses dix-sept ans Sophie.
Rappelle toi son regard, Sophie.
Rappelle toi son souffle, Sophie.
Rappelle toi sa voix, Sophie.
Rappelle toi son pas,Sophie, auquel tu accordais le tien.
Rappelle toi, Sophie, ses doigts entrelaçant les tiens le long des rues.
Rappelle toi l’air du temps, Sophie.

Dix-sept ans…
Pour ce que je me rappelle…
Vous, les filles aviez la peau tellement douce.
Nous, les garçons avions la barbe tellement dure.
Et nous avions tant de rêves…
Et nous passions tant de temps à tenter de les transformer en réalité.
Il est même arrivé que « ça marche ».
Tu vois pourquoi on s’en souvient avec tant d’acuité ?
Dix-sept ans…
Bientôt pour la quatrième fois.
Et chaque printemps, j’ai l’impression que c’est la première fois.
Bon, assez soupiré pour aujourd’hui, j’ai un poulet à préparer…