vendredi, 06 mai 2016
Il y a toujours un Pont Cardinet.
De rien, Mab, de rien…
Et ne te moque pas, Berthoise.
Nous sommes partis joyeux à Paris, il faisait 22°C.
J’ai laissé tomber le col roulé de cachemire et le blouson « polaire » pour la chemise et le blouson léger.
Déshabillée d’un haut super light, la lumière de mes jours est sortie disant déjà « j’ai trop chaud ».
Mais elle est très gentille puisque, bien qu’elle en ai assez, elle a bien voulu aller chez « Ladess » manger un döner.
Sur le chemin qui mène de Pont-Cardinet à l’avenue de Clichy, nous avons remarqué que le restaurant qui, il y a peu offrait pour une fortune une boîte de sardines, frimait avec une nouvelle enseigne censément britishophone : « Brunch Lunch Dîner ».
Même pas foutus d’écrire « Dinner » ces andouilles…
C’est là que nous avons croisé deux jeunes gens de sexe ambigu mais du genre voyou.
La lumière de mes jours a commenté d’un « il en faut pour toutes les bourses ».
Ce fut notre premier fou-rire.
Tout avait bien commencé, le döner était bon, pas de frites, pas gras, tout ça quoi, généreusement arrosé d’eau du robinet.
Et nous revoilà partis, le pas léger et l’œil vif vers Saint Lazare.
Nous avions dans l’idée de boire un café sur cette petite place où se croisent les rues de Moscou, de Turin et Saint Pétersbourg.
C’est là qu’on a gagné le droit de faire tout le chemin à pied jusqu’à la Porte de Champerret…
Parce qu’un döner, ça va mais un döner plus une glace pour elle et des profiteroles pour moi, ça fait beaucoup…
Surtout des profiteroles pas entièrement dégelées, du genre qui vous garde un goût de rassis atténué seulement par la crème en bombe premier prix.
Bref, nous avons continué notre chemin jusqu’à Saint Lazare, puis pris la direction de la Madeleine pour acheter notre Clooney mensuel.
Un seul petit bémol à cette longue promenade : Heure-Bleue déteste le soleil alors je dois être à l’ombre.
Elle refuse de marcher sur le trottoir à l’ombre en me laissant sur le trottoir ensoleillé.
Près de Saint Augustin, nous avons pris un autre café.
Nous savons pourtant que tout café ne fait que préparer le suivant…
Un moment, elle cherche à me dire quelque chose, est bloquée et s’apprête à mimer pour me faire comprendre.
Elle s’arrête d’un coup.
Il fut bon qu’elle se soit arrêtée, le mime de l’amatrice de pipe tarifée n’est pas du meilleur effet en public…
En fait, il était question de l’aérosol anti-asthme…
Ce fut notre second fou-rire.
Après avoir traversé un parc Monceau bondé, nous nous sommes arrêtés à l’arrêt du bus de Courcelles et avons regardé les passants quelques minutes, le temps de reconstituer la peau des pieds d’Heure-Bleue.
Là j’ai vu quelque chose que je dois vous absolument conter, lectrices chéries.
Sur le trottoir en face, deux pétasses, une blonde et une brune, la démarche décontractée, une bayant aux corneilles, l’autre le smartphone à la main, à part elles, personne.
À près de cinquante mètre l’une de l’autre elles se voient et le spectacle commence.
Elles se redressent, prennent la démarche de star montant les marches à Cannes, se toisent, se croisent.
Il n’y a pas un chat à part elles et elles se font concurrence ! Elles sont folles !
A peine se sont elles croisées, et une dizaine de mètres parcourus, elles reprennent la démarche précédente…
A part ça, tout fou le camp, j’ai même vu une Ferrari bleu layette.
Bleu layette ! Une Ferrari !
« Il Commendatore » doit se retourner dans sa tombe…
Nous avons fini par prendre le bus Porte de Champerret.
J’ai préparé à la lumière de mes jours un lapin sauce moutarde qu’elle a aimé.
Hélas tous ces kilomètres n’ont pas incité la balance à l’indulgence.
Mais c’était bien quand même.
10:16 | Commentaires (7)
mercredi, 04 mai 2016
Ode au rat…
Ouaip, j’ai un nouveau clavier !
Un avec la sérigraphie sur toutes les touches !
Et une nouvelle souris !
Une qui réagit au quart de poil sous mes doigts.
Mais non, ne frémissez pas d’angoisse, lectrices chéries, je reste irrévocablement collé à Heure-Bleue…
Et du coup, vous savez quoi ?
Non, n’ayez crainte, je ne vais pas me remettre, comme Coumarine, à la poésie.
Même si je sais que j’arrive à un âge où il faut recommencer à s’habituer aux vers…
Je vais plutôt régler quelques dissensions entre les générations à propos de « combinaisons ».
Vous n’étiez pas d’accord avec ce que j’en gardais comme idée.
Hélas, lectrices chéries, fort seulement de souvenirs, je me suis trouvé hier, comme la cigale de la fable, fort dépourvu.
En plus, aucune bise n’est venue me consoler.
Ouais, bon, je sais, Berthoise, c’est mauvais mais que veux tu…
Célestine m’a proposé comme produit de remplacement des choses comme des « nuisettes » vendues par le trio helvétique.
Berthoise m’a parlé de « fond de robe ».
Pour ce que j’ai vu, c’est plus proche de la combinaison.
Hélas, Berthoise, c’est bien trop court !
En 1958, un tel « fond de robe » eut fait jeter des cailloux à la première distraite qui aurait oublié de mettre une robe sur ce « fond de robe ».
Alors j’ai cherché et j’ai trouvé.
Voilà, lectrices chéries, ce qu’était une combinaison dans ces années où ce n’était pas encore l’espoir d’un bien-être à venir qui courait dans les rues mais le soulagement palpable que la dernière bagarre générale fût enfin terminée.
Franchement, est-ce que ça ressemble à une « nuisette » ?
A ces époques, Georges Rapin s’apprêtait à assassiner Domino et finirait massicoté au début des sixties.
Mary Quant ne m’avait pas encore permis de deviner chez d’autres ce que mes petites camarades ne m’avaient dévoilé qu’avec prudence au cours d’échanges d’informations.
Les dames sérieuses n’entraient pas dans les églises « en cheveux » et les messieurs préféraient aller au bistrot en face pour garder leur béret .
Bref, c’était un temps où on ne rigolait pas avec la pudeur, du moins publique.
C’était mieux que l’Espagne de Franco où un baiser dans la rue vous valait un procès verbal.
Alors, ces combinaisons, Lakevio et Mab, ça ne ressemble pas plus à ce que vous avez vu sur vos mères ?
09:47 | Commentaires (16)
mardi, 03 mai 2016
Le violon sur le moi...
Avant de faire mon devoir pour Lakevio, je viens de chez elle.
Bon, d’accord, le coup du muguet, hein…
Paul Fort, j’aime bien.
Ce vers me rappelle le film où M’sieur Eddy, Sabine Azéma et Michel Serrault nous charment.
Mais Lakevio a remué d’autres souvenirs en mettant cette photo du « Ladies home journal » de 1954, « le journal que les dames croient ».
De cette couverture, ce n’est pas le côté bucolique qui me remue la cervelle.
Non, lectrices chéries, ce qui me touille la gamelle à souvenirs, c’est la vêture de la dame de la couverture.
Cette « lady » était vêtue d’une robe qui m’a rappelé les femmes de mon coin dans les années cinquante.
Ça me rappelle ces étés de la seconde moitié des années cinquante, avant que n’arrivent les robes « vichy » si bien mises en valeur par Brigitte Bardot.
Avant 1960 on voyait de juin à septembre beaucoup de ces robes sans manches, à la taille marquée et qui laissaient deviner le genou sans le découvrir.
Ma mère regardait avec avidité la couverture de « Elle » sur l’étal du marchand de journaux du boulevard Ornano, tout contre le bureau de tabac « Le Fontenoy » qui servait à lui seul de séparation entre le boulevard Ornano, la rue Championnet et le passage Championnet.
Elle ne l’achetait pas.
Pas plus qu’elle n’était d’accord pour m’acheter « Kiwi »...
Seul mon père était d’accord. Alors j’hésitais longuement entre « Battler Britton », « Tex Tone » et « Kiwi ».
Mon père, beaucoup plus patient que ma mère, entamait la lecture de son journal et la commentait avec le mari de la marchande de journaux.
Comme je vous l’ai déjà dit, mon père était un de ces gens curieux, un « communiste d’extrême droite » qui hurlait en voyant le titre de l’Huma et lisait la presse qui s’accordait à son humeur du moment.
Assez étonnamment, je l’ai vu lire des canards aussi différents et opposés que « Paris-Presse l’Intransigeant », « Rivarol », « Combat », « L’Aurore » ou « Paris-Jour ».
D’aussi loin que je me souvienne, il a toujours pesté après « France Soir ».
Quand il s’est mis à lire « Paris-Jour » je me rappelle qu’il a dit à ma mère « Il n’a pas de pot Lazareff, le seul du journal qui avait le certificat d’études est parti à Paris-Jour… »
J’aimais bien quand on me traînait par la main dans le quartier.
Que ce fut ma mère pour des courses ou acheter « Confidences » ou mon père pour acheter ses Bastos au Fontenoy.
Pour en revenir à ces étés des années cinquante, j’aimais regarder les gens, les dames avec ces robes que j’ai revues hier chez Lakevio.
Parfois mon père me montrait, un matin d’été, une dame, que la chaleur et la distraction avaient trompée, sortie dans la rue vêtue seulement d’une « combinaison », accoutrement aujourd’hui disparu qu’on portait sous une robe ou une jupe et un corsage.
Je sais bien Mab que « corsage » a disparu du vocabulaire depuis longtemps mais ce matin je suis revenu avant 1960, alors il n’y a pas encore de blouse, de chemisier ni de chemise chez les femmes…
08:03 | Commentaires (8)
lundi, 02 mai 2016
Aaaahhh… Faire aumône…
Je les ai regardé passer.
Oh ils étaient à l’aise, ça se voyait.
Elle, comme toujours, toisait un monde à peine digne de la porter.
Déjà, quand elle daignait marcher on se posait la question « il y a des œufs par terre ? »
Lui, comme toujours, se foutait de tout ce qui n’était pas mieux que « quatre sous le par ».
Où qu’il aille, quel que soit le temps, il allait, sa casquette vissée sur le crâne.
Je savais bien pourquoi.
Ses cheveux aussi « sortaient du green »…
Je les connaissais. Même mieux qu’ils ne le pensaient.
Aujourd’hui elle l’accompagnait.
Je savais bien pourquoi.
Il y avait compétition.
Je savais aussi qu’il frimait avec son « quatre sous le par ».
Comme d’habitude, il finira « double bogey » et je ricanerai.
Sa pimbêche beaucoup moins.
Elle souhaitait toujours être « la meilleure ».
Ou, à défaut, « être avec le meilleur ».
Aujourd’hui j’avais fait un sale coup.
Je les connaissais, je vous dis.
Alors j’avais aussi invité l’autre, l’habituée des pelouses.
Celle qui l’avait harponné.
Celle qui fait dire « le vrai piège du golf, c’est le dix-neuvième trou »…
Persuadée, celle-là, qu’était célibataire celui sur qui elle avait jeté son dévolu.
Ce que je préfère, dans le golf, c’est le spectacle.
Il promettait d’être grandiose…
09:40 | Commentaires (10)
samedi, 30 avril 2016
Ça me dit, chéries...
Samedis chéris…
Quel « temps de mince » ! Comme dit Merveille.
Heure-Bleue me rappelle les samedis où je « jouais à la marchande » dans sa librairie.
Je me rappelle ces samedis où j’avais des « clientes chéries » comme aujourd’hui j’ai des lectrices chéries.
Je me rappelle entre autres une jeune femme, une Allemande qui, au bout de quelques samedis m’appelait « Monsieur Patrice ».
J’avais eu beau lui expliquer qu’en France, Monsieur suivi du prénom, ça faisait tenancier de maison close, rien n’y faisait.
Elle ne voulait pas m’appeler « Monsieur » ni m’appeler « Patrice ».
Le lumière de mes jours et une amie, non deux amies, m’ont un soir cassé ma cabane, les garces…
Quand cette jeune Allemande est arrivée et m’a salué avec un sourire éblouissant, elles se sont exclamées, avec de faux trémolos dans la voix « ooohhh !!! Monsieur Patriiiice ! Comme c’est mignon… »
La jeune femme a rougi, a eu un sourire contraint.
Elles ont ajouté « Hmmm… Ça cache quelque chose… »
Les hyènes !
Elles m’ont cassé ma cabane !
Non que j’ai eu une idée quelconque derrière la tête mais quand même.
Cette Allemande, aux cheveux châtain clair, pâle de peau et bleue d’yeux, s’est enfuie.
Elle n’est jamais revenue.
Je suis sûr qu’après elle est allée chez Marissal, la « deutsche buhhandlung » de l’autre côté de la rue Beaubourg.
J’ai eu comme ça quelques « clientes chéries » qui passaient le samedi quand je n’étais pas envoyé au diable vauvert par mon boulot.
J’aimais bien.
Même un client, un type sympa qui passait surtout pour voir la lumière de mes jours mais venait parfois vers midi faire goûter un whisky qu’il avait dégotté à « La maison du Whisky ».
On n’a jamais été déçu par les malts qu’il amenait.
Je me demande s’il n’avait pas une « libraire chérie » comme j’avais des « clientes chéries »…
10:37 | Commentaires (11)