mercredi, 23 avril 2014
La faim du monde.
Avant, Heure-Bleue sentait « L’Air du temps ».
Aujourd’hui, ma « bourgeoise rouge » respire l’air du temps…
Branchée un jour, branchée toujours.
Tandis que votre Goût adoré, lectrices chéries, est une valeur sûre.
Il ne change jamais de style. Le style passant d’étudiant attardé à tendance clocharde au fur et à mesure que la semaine avance.
Comme dit Heure-Bleue « le Goût a le chic fatigué »…
Elle ricane mais finalement, qui est à la mode tous les quinze ans ? Hmmm ?
C’est le Goût !
Et sans jamais faire aucun effort.
Plus jeune je n’avais que deux tenues. Le « newman + clarks » (ou mocassins dans les cas graves genre vue sur une probable gamelle sentimentale ) et le costume de premier communiant ou de bar-mitzvah, c’est selon. De toute façon c’est le même.
L’éternel costume bleu-marine, celui qu’on met pour se présenter au boulot, histoire d’endormir celui qui fera une tête bizarre quand la semaine suivante il vous croisera dans un couloir en « newman + clarks ».
Le costume qu’on met pour le premier rendez-vous avec elle.
Le costume que du coup vous remettrez pour aller à la mairie.
Heure-Bleue donc, respire l’air du temps.
C’est grâce à cette sensibilité olfactive particulière que l’idée lui est venue d’offrir un hamburger à une blinde à Merveille qui ne l’a pas aimé.
La dernière inspiration de boboïtude de la lumière de mes jours nous a conduits à jouer à « Carmen et la Hurlette » sur un banc pour y déguster les döners dont la « mode faucheman » nous gratifie ces temps-ci.
Sa sensibilité à l’air du temps, nous entraîne sur des chemins vraiment intéressants.
Contrairement aux foules qui se contentent de la compétition féroce mise en scène dans des émissions censément culinaires qui ne sont en réalité que des matches entre « tueurs », elle me fait entrer dans les pâtisseries les plus fines.
Et engouffrer les gâteaux les meilleurs.
La lumière de mes jours ne nous fait pas regarder ces mous de l’âme se battre pour avoir le gâteau le plus joli.
Non, mais elle élève salement notre glycémie à coup d’éclairs au caramel.
Elle menace même notre IMC à coup de mille-feuille de chez la Bretonne de l’avenue de Villiers qui va bientôt se payer une croisière rien qu’avec nos gâteaux.
Je ne dérangerai pas mini-néphro pour rien.
Je pressens l’engueulade.
Déjà qu’elle m’a balancé auprès de « mon médecin référent » sur ma façon de prendre mon médoc…
10:36 | Commentaires (9)
mardi, 22 avril 2014
Rien de neuf de Pâques.
Vous devez la note qui suit, lectrices chéries, à ce qui tomba sous mon regard acéré il y a quelques heures et m’agaça prodigieusement.
Il y a peu donc, je lus la plainte de plumitifs, vexés pour certains, scandalisés pour d’autres, qu’on leur interdise l’entrée de l’avant première de certains spectacles.
Je dois leur signaler que s’ils n'avaient pas pris la détestable habitude d’éreinter les spectacles avant même que le public ne soit averti de leur sortie, ils ne se feraient pas virer d'entrée.
Comme si l’obtention d’un bac L leur donnait droit de vie et de mort sur une œuvre quelconque.
Ils semblent avoir oublié qu’on leur demande, mais après coup et quand ils ont payé leur place, un avis, si possible éclairé, sur un spectacle.
C'est au public de décider -à tort ou à raison- qu'un spectacle est bon ou mauvais.
Ce n’est certainement pas une poignée de gens autoproclamés arbitres des élégances d'expliquer au public ce qu'il doit aimer. D’autant qu’entre ceux qui ont un compte à régler avec « ce monde de l’art qui ne les a pas compris », ceux qui font profession de dénigrer systématiquement parce qu’on leur a expliqué longuement que plus le public se presse, plus c’est mauvais et ceux qui se contentent de rapporter les communiqués des attachés de presse, ce qu’on lit des spectacles me semble sujet à caution.
Maintenant qu’Heure-Bleue a décidé de nous réapprovisionner en Télérama, le journal TV de ceux qui ne regardent pas la télé, il me revient le côté relatif et aléatoire de la critique cinématographique.
L’inoubliable « First Blood » plus connu par chez nous sous le titre « Rambo » sortit sur nos écrans. Télérama nous montra alors son petit bonhomme pleurant à chaudes larmes, nous signifiant par là que ce film était nul à ch… et qu’on gagnerait au moins le prix de la place à se contenter d’un café au Flore.
Des années plus tard, « Rambo » revint dans les salles à l’occasion de la sortie d’un nouvel épisode de cette saga dévolue à la gloire de la démocratie, de la liberté, de la grandeur de l’Amérique, de la libre entreprise et de la gonflette.
Le même Télérama afficha alors le petit bonhomme sautillant de bonheur à cette rediffusion.
Ça me permit alors de recouvrer mon statut d’intello pur sucre pour être allé le voir des années auparavant et en avoir tiré un peu d’agrément.
Comme quand on va voir un western quand on est gamin, quoi...
J’imagine une revanche malsaine sur les critiques qui tuent un spectacle avant même que le premier quidam ne l’ait vu.
J’imagine une poignée de critiques, au fait de la grammaire, de l’orthographe et de ce que doit être une dissertation, jugeant nos critiques si impitoyables avec le travail des autres sur leur orthographe, leur grammaire, leur connaissance du sujet et la finesse de leur analyse.
Avec la même sanction : L’article ne paraît pas et n’est donc pas payé si les critiques sont mauvaises.
Je pense que beaucoup de piges n’arriveraient pas à nourrir leur auteur…
07:47 | Commentaires (5)
lundi, 21 avril 2014
Elle a pris mon thé tard.
Lectrices chéries, c’est avec une grande douleur que je dois vous annoncer qu’à partir de dorénavant, ce ne sera plus comme désormais mais surtout plus comme auparavant.
Je vais tenter, en passeur de lien chargé de donner du sens à tous ceux qui sont en situation de demande de vous expliquer les raisons profondes de mon absence prolongée des territoires dont certains sont des territoires de la ruralité si favorable à la culture.
Non, je ne vais pas tenter de me ressourcer en allant passer quelque temps en région.
Surtout depuis qu’on ne va plus en province mais « en région ».
Non, je ne vais pas abandonner ceux qui sont en demande de socialisation.
Non, je ne vais pas laisser mes lectrices chéries, pas plus que mes rares lecteurs chéris – Jeanmi, tu peux sécher tes larmes- en situation de désespérance psychologique.
Je sais que maintenant que la résilience face à l’adversité dans la classe des post-ados, ceux qui sont passés en quelques années du stades de jeunes gens à celui « d’adulescents » est devenu un créneau sémantiquement rentable.
Donc, lectrices chéries, après des années de résistance, je cède.
J’ai décidé, après avoir ce matin entendu le journaliste de trop, de faire une psychanalyse.
Je n'ai jamais bien compris pourquoi les journalistes allaient tous voir un psy alors qu'ils devraient aller voir un prof de lettres...
Non que cette psychanalyse puisse m’être d’une quelconque utilité, je suis bien trop vieux et ai la cervelle bien trop sclérosée pour qu’une série d’entretiens puisse l’assouplir.
Vous pourriez penser au premier abord que cette psychanalyse allait alléger mon compte en banque, améliorer et adoucir les relations que j’entretiens avec Heure-Bleue, voire approfondir sévèrement le trou de la Sécu.
Eh bien non, à écouter la radio ce matin, mon vieux cerveau enkysté dans la gangue de la culture humaniste enseignée jusqu’à la fin des années soixante s'est rebiffé, je me suis rendu compte que cette psychanalyse allait m’apporter quelque chose.
Je ne parlais plus le français. Je ne le comprenais plus non plus. Du moins celui des media et des forces économiques qui font tourner le pays. Comme les épiciers par exemple.
J’ai, dans un de ces élans qui frappent si fort les jours où on ne peut rien faire de concret, tel le lundi de Pâques, décidé d’aller voir un psy pour la seconde fois de ma vie.
Eh oui, lectrices chéries, je me suis aperçu qu’avec la manie « du langage psychologisant » qui frappe dans tous les domaines, si je n’avais pas fait « mon analyse » je n’allais bientôt plus pouvoir acheter une salade ni demander mon chemin dans la rue…
09:49 | Commentaires (9)
dimanche, 20 avril 2014
Purée de nous autres !
Hier je suis allé au musée des Arts Déco avec un ami.
J’ai pu constater dans le train que les smartphones sont dangereux pour le cerveau.
Face à moi, deux jeunes filles.
Une, les écouteurs dans des oreilles plutôt délicates, genre deux coquillages, mais le regard désespérément vide.
L’autre, sans smartphone, le regard vif et manifestement passionnée par la lecture des Lettres Persanes.
Honnêtement, lectrices chéries, je fus surpris. C’était la première fois depuis bien longtemps que je voyais quelqu’un de moins de quatre-vingts ans lire Montesquieu…
Histoire de ficher le moral en l'air, Heure-Bleue me rappelle à l'instant que c'est bientôt le bac...
Arrivé à Paris, rien que prendre le 21 fut un enchantement.
D’abord parce que le 21 est un bus « hybride » donc silencieux la plupart du temps.
Puis parce que le chauffeur, probablement saoulé par les parlottes électroniques avait fait taire l’automate qui psalmodie le nom des stations à venir.
Ensuite parce que ce bus était quasiment vide.
Enfin parce qu’hier matin, le temps, quoique frais, était délicieusement beau.
Un vrai matin d’avril à Paris.
Et puis, aller de Saint-Lazare à la Comédie Française en passant par l’Opéra est toujours un beau voyage.
J’ai attendu mon ami au Nemours en buvant un café.
Mon ami, qui ne relève pourtant pas de l’aide sociale fut assez étonnamment ravi de se faire offrir une visite gratos grâce à ma bancalitude.
Il m’avait invité à l’accompagner à une exposition sur les laques et « le vernis Martin ».
J’ai appris que, parmi les quelques bizarreries de la langue français qui n’en compte pas plus que les autres langues que je connais, il y avait un changement de genre curieux.
Je me rappelais bien sûr ce trio « amour, délice et orgue » qui était masculin au singulier et devenait féminin au pluriel.
Au musée des Arts Décoratifs, on m’expliqua que le produit servant à laquer était « une laque » et que l’objet laqué était « un laque ».
Un truc de plus à ranger dans la boîte à malices de la langue…
Nous sommes sortis et avons traversé la place du Carrousel.
Nous avons quatorze ans de différence mais apparemment certaines choses sont immuables. Il m’a fait remarquer « T’as vu ça ? Ils ont asphalté là où il y a la pyramide mais là c’est toujours pareil. Et les mecs ont des godasses dégueulasses alors les nanas on dirait qu’elles viennent de les cirer… »
Nous avons traversé le bout des Tuileries puis la Seine et avons remonté la rue du Bac.
Pour me remercier de la visite, mon ami m’a traîné dans un restaurant.
Ce fut frugal mais néanmoins délicieux.
Sauf peut-être pour mes artères.
Avez-vous déjà goûté le carpaccio de daurade de Joël Robuchon ?
Et son ris de veau ?
Et sa célèbre purée ?
Eh bien c’est bon, très bon.
Mon ami et moi avons encore papoté un moment en revenant vers la Comédie Française et nous nous sommes quittés.
Je suis revenu à la maison.
Le soir, j’ai préparé du poisson et des pommes de terres écrasées avec une noisette de beurre.
C’était beaucoup moins bon que le poisson et la purée du déjeuner.
Mais c’était fait avec cœur…
08:59 | Commentaires (5)
samedi, 19 avril 2014
Ce soir, on bouffe parisien.
Bon, il faut que je vous explique, lectrices chéries. A propos de lecture.
Heure-Bleue tenait une librairie, d’abord pour quelqu’un puis pour elle.
Enfin, je dis pour elle…
Plus exactement pour la banque et le percepteur.
Quant à moi, n’ayant que peu de goût pour la voiture et les embouteillages, j’ai pris pendant des années le métro, le RER, le bus, mes pieds , pour aller gagner ma vie.
Et vous savez quoi ?
Une épouse libraire et une à deux heures de transports quotidiennes vous laissent assez de temps pour lire deux à trois bouquins tous les trois jours.
Le résultat, c’est qu’à raison de trois à six bouquins par semaine, on finit par avoir quelques lumières sur la littérature d’origines diverses.
De la Norvège à l’Afrique du Sud. De la Colombie britannique à l’Australie. De l’Argentine à la Chine. Bref, de partout, même du Japon.
Quand ce n’est de coins dont on ne soupçonnait même pas que des gens pussent y écrire des poèmes ou des romans tellement ils sont tristes.
Oui, il y a encore pas mal de coins en « noir et blanc » en Europe.
Vous auriez pensé qu’on pût écrire des romans dans l’Albanie d’Enver Hoxha ?
Oui, bien sûr, vous l’avez pensé. Mais il n’y a pas qu’Ismaïl Kadaré vous savez. Il y a un type dont je me souviens, Mehmet Myftiu, autant dire un quasi Turc, qui a écrit un truc très chouette qui fait penser à Romain Gary sur la « libération » de l’Albanie. Bon, son activité de « contre révolutionnaire » lui a valu d’écrire essentiellement pendant les longues heures de détente que laisse la prison. Je n’en ai lu qu’un livre, le premier. Après on n’en a trouvé que dans les années 90 mais j’étais passé à autre chose.
À force d’engloutir des livres, on finit toujours par en retenir quelque chose.
Je dois avouer à ma grande honte, que passées les années lycéennes où on ingurgite des classiques à haute dose, les années estudiantines où on engloutit les « polys », on passe par une phase plus reposante où on avale sans discernement des écrits qui vont du mauvais au pire en passant par l’horrible.
Mais bon, ça meuble. Vient enfin un moment où la gratuité des bouquins, gratuité relative, lectrices chéries, relative car j’ai vu les factures, vous donne accès à des œuvres intéressantes venues du monde entier.
On ne remerciera jamais assez la RATP, la SNCF et les compagnies de bus diverses pour leur aide à la dissémination de la culture générale dans la population.
C’est fou ce qu’on peut apprendre sur les gens, les peuples et les cultures quand on lit dans le métro, le bus ou le RER.
Même sur les gens de son coin.
Bon, c’est plus difficile aujourd’hui car le bruit des monologues dans les portables nuit grandement à la compréhension de ce qu’on lit et distrait l’attention.
Cela dit, ça permet d’en apprendre énormément sur la société dans laquelle on vit.
Sur la façon dont les patrons traitent leurs employés.
Sur la façon dont la police traite les gens qui vont au boulot à la sortie du RER.
Sur la façon dont les hommes considèrent les femmes.
Sur la façon dont les enfants sont transbahutés, endormis d’un mauvais sommeil.
Sur la façon dont on nous vend du rêve éventé.
Sur la façon dont tout ça s’est transformé en cauchemar.
Bref, les transports ne sont pas toujours de joie mais, même s’ils coûtent cher, sont toujours enrichissants…
08:15 | Commentaires (6)