lundi, 19 mai 2014
La paix des méninges…
Je ne sais pourquoi, une bluette particulièrement niaise nous est venue à l’esprit ce matin, à Heure-Bleue et moi.
Nous nous sommes mis à chantonner « Voici des roses blaaaanches, toi qui les aiiiimes taaaant… »
Connaissez-vous, lectrices chéries, une chanson plus nunuche ? A part « L’hirondelle du faubourg », bien sûr…
Les associations d’idées sont parfois curieuses.
Vous vous rappelez sans doute combien cette chanson est triste. Même qu’elle meurt à la fin, la « manman ».
De proche en proche, il me revint cette rentrée des classes, à ma seconde cinquième.
Une des expressions de l’époque était « pleure pas ! Tu la r’verras ta mère ! »
Dans un coin de la cour, ce jour de rentrée, un garçon dont c’était sans doute la première rentrée au lycée, était assis sur une des marches de l’entrée du couloir menant aux classes du premier étage.
Son cartable entre les jambes, il pleurait à gros sanglots, essayant d’évacuer un énorme chagrin et toutes les larmes de son corps.
Un copain et moi sommes passés à ce moment devant lui et, avec un ensemble parfait avons crié « Pleure pas eh ! Tu la r’verras, ta mèèèère ! »
Et là, le garçon a levé la tête et a dit simplement « ma maman elle est morte… » et à repleuré de plus belle.
Si vous aviez voulu savoir à quoi ressemblaient deux garçons avec l’air con, lectrices chéries, il fallait nous regarder à ce moment là…
11:09 | Commentaires (6)
dimanche, 18 mai 2014
Quand on avait encore le corps sage…
Mab a eu hier –comme quasiment tous les jours- la gentillesse de laisser chez moi un commentaire.
Commentaire qui posait « la question ».
Celle qui ne me vint que plus tard, bien plus tard…
« Avec la langue ou pas ? »
J’eus la réponse au mois d’août 1962.
Mais quand même, Mab, tu es gonflée ! Rappelle-toi ! A ces âges, on ne savait même pas que la langue pouvait servir à autre chose qu’à manger des glaces ou a se moquer des autres !
Du coup ça répond, au moins en partie à la question que posait Heure-Bleue il y a quelques jours.
C’est parce qu’on ne savait pas qu’en plus ce serait si bien pour des tas d’autres choses…
Et c’est sans doute pour ça que le temps s’écoule interminablement quand on est petit.
Et si vite quand on est « grand »...
10:17 | Commentaires (6)
samedi, 17 mai 2014
Le triangle dort.
Encore…
Hier soir, après les infos, nous avons regardé la série polar du vendredi soir.
Le dernier épisode se clôt évidemment sur un baiser passionné –je n’aime pas « torride », je trouve que ça fait plus porno qu’érotique- qui laisse penser qu’on passera à autre chose mais plus tard et hors du champ des caméras.
À regarder cette blonde rouler un patin à son brun partenaire, il m’est revenu le souvenir des soucis qui se posent à un enfant de huit ans dans une cour de pension.
Il y a quelque temps, environ cinquante sept ans, un copain et moi parlions d’un film, adossés à un des tilleuls de la cour de récré. Nous étions tous deux des Parisiens et bien que de quartiers différents nous avions vu le même film le dimanche précédent dans deux salles différentes. Grandes, les salles, avec une seule salle par cinéma.
Nous avions vu « L’homme qui n’a pas d’étoile », un western extra avec Kirk Douglas qui joue du Colt 45 comme personne.
A l’époque lui aussi était jeune, enfin c’est ce que je me dis maintenant car nous savions bien alors que c’était malgré tout « un vieux ».
Ce western, évidemment nous amena à nous poser des questions.
Et à apporter des réponses.
Rationnellement fondées sur des rumeurs, comme d’habitude, ce qui prouve que le Web n’a rien inventé.
Et pourquoi ces questions ? Parce que notre jeune âge et l’ambiance résolument spirituelle dans laquelle nous étions plongés eussent dû nous dissuader de penser à des choses comme ça.
Oui, nous nous demandions comment il se faisait que certains acteurs se tirassent vivants de certaines scènes.
Non, vous n’y êtes pas lectrices chéries, il ne s’agissait pas des scènes de fusillade.
On était ignorant mais on se doutait bien que la production d’un film ne se soldait pas forcément par des milliers de morts.
Non, il s’agissait de la scène « The End » avec ce baiser final entre le héros et l’héroïne, celle qui se fourre par idiotie dans des situations indémerdables d’où le héros la tire. (Pas de réflexions graveleuses je vous prie.)
Et là, la conversation entre mon copain et moi prit un tour philosophico-anatomique.
- Tu crois qu’il l’embrasse vraiment sur la bouche ?
- Non, c’est entre la bouche et le menton, en vrai c’est pour de faux.
- Tu crois ? Insistai-je. Parce que quand même, elle l’embrasse.
- Ouais, c’est sûr.
- Ben comment tu le sais ? « Relou » comme j’étais, je n’étais jamais satisfait d’une affirmation peu étayée.
- Ben tu parles ! S’il l’embrassait sur la bouche pour de bon, le vrai mari de l’actrice serait obligé de le tuer après !
- Et alors ? Ça prouve quoi ?
- Ben la preuve ! Il a joué un autre film après ! C’est qu’il l’a pas embrassée pour de bon !
Là, le raisonnement m’a paru inattaquable.
Le fait que nous tentions déjà de découvrir des trucs censés ne nous intéresser que bien plus tard en étant malgré tout persuadés que l’on ne pouvait embrasser quelqu’un sur la bouche sans être marié ne nous semblait pas particulièrement incohérent et ne nous émouvait pas plus que ça…
En éteignant la télé, je me suis dit qu’il était quand même heureux que la notion de propriété soit sortie du mariage sinon les allées des studios de cinéma –et probablement celles des supermarchés- eussent été jonchées de cadavres.
Combien de femmes et d’hommes n’eussent été alors que l’illustration du concept de nue-propriété, qui laisse aux uns la propriété et à d’autres l’usufruit…
07:55 | Commentaires (7)
vendredi, 16 mai 2014
Je n’aurais pas dû perde un œil, pourtant j’étais né pas laid…
Non, le confort n’est pas une notion relative !
À ceux qui, sous prétexte d’un séjour en prison ou dans un camp de réfugiés, prétendent que « le confort, bof, ça dépend » j’oppose ,un démenti formel.
Le T-shirt, par exemple, montre quelque rugosité à l’état neuf.
Au bout de quelques années, il atteint à cette douceur qu’on regrette dès qu’on a quitté le ventre maternel.
Au point que j'ai un mal fou à le laisser transformer par la lumière de mes jours en chiffon à poussière.
Pourquoi diable laisserais-je une commode ou un meuble quelconque profiter de la caresse quasiment sensuelle de ce T-shirt alors qu’elle est si agréable à ma peau ?
Il n’y a que la cruauté d’une épouse pour vous priver de ça !
A moins que ce ne soit la jalousie.
Allez savoir…
Bon, honnêtement, je réussis tout de même à préserver du goût d’Heure-Bleue pour le neuf –ça m’inquiète par moment quand je croise un miroir- , ces nids de douceur pendant un certain temps.
Cela dit, il va me falloir les quitter pour aller subir le « néphro-test » concocté et vicieusement amené par une mini-néphro qui s’est enfin décidée à apprendre comment manipuler les hommes –ce qui lui donne un air heureux qu’elle n’avait pas-.
Voilà pourquoi je suis obligé de mettre autre chose que ça :
Juste pour éviter la honte du siècle, non à moi mais à une Heure-Bleue qui a l’amour-propre ménager assez sourcilleux…
10:10 | Commentaires (4)
jeudi, 15 mai 2014
Les jours d'heureux pas sage...
Mon père, ce pied-noir au sourire si doux, avait parfois décidé dès le lever de taquiner.
« D’emmerder le monde » selon ma mère qui n’avait pas toujours soin d’éviter le « langage Porte de Clignancourt » dont elle nous protégeait à coup de taloche.
Elle ne disait pas toute la vérité qui était plutôt de l’emmerder, elle.
Et elle le savait. Aussi s’arrangeait elle pour ne pas passer trop de temps dans la même pièce que mon père.
Et ça ne marchait jamais.
Il commençait alors la journée par quelques piques soigneusement ajustées.
Les deux ou trois premières étaient accueillies par le sourire maternel.
Là, on pouvait être sûr que le piège se refermait et que le but indéfendable visé par mon père allait être atteint sous peu.
Au début, il pestait à mots couverts contre l’idée de faire le lit tout seul.
Il faut dire que ma mère était quelqu’un de très frileux, ne soupçonnait pas l’existence des couettes et aimait les couvre-lits épais, molletonnés et lourds comme des ânes morts.
Mon père avait un souffle rendu court par des années de clopes et le travail dans des produits qu’on n’oserait même pas regarder aujourd’hui.
Inutile donc de vous dire que l’idée de faire « au carré » un lit plein de couvertures, de draps épais comme l’humour de Canteloup et d’un couvre-lit de dix kilos ne l’enchantait pas. Il s’y mettait en pestant. S’arrêtait le drap du dessous à peine posé. Allait dans la cuisine fumer une cigarette. Disait à ma mère « tu sais que je t’aime toi ? »
Ça commençait insidieusement comme ça, vous dis-je.
Ma mère haussait les épaules, soupirait et grommelait « tu ferais mieux de finir le lit… »
Il y retournait en ayant posé sa cigarette sur le bord de la table et se faisait rappeler à l’ordre illico. La machine infernale démarrait insidieusement.
« Voyons ma poule ! Bon, je finis ma cigarette et j’y retourne. »
Tout se passerait bien si, au passage, alors qu’elle tenait une casserole sous le robinet, il ne profitait de l’occasion pour l’embrasser légèrement sur l’oreille.
Elle détestait ça et il le savait…
Elle se mettait alors « après sa peau » et l’engueulait de belle façon.
Lui la regardait d’un air enamouré –un peu faux-cul en réalité- et étonné.
Vous voyez le genre, l’air ébloui, plein d’amour et un peu niais.
Quand elle avait fini l’homélie, il la regardait encore silencieusement une dizaine de secondes.
Il retrouvait alors son accent pied-noir et déclamait « Ti sais que ti es belle, comme ça ma poule ! Ti es belle quand ti es en colère ! Ti as les étincelles qui sautent de partout ! Ti as les yeux qui rélousent ! Aïe aïe aïe ! Qué ti es belle ! Houuuu ma poule ! Viens m’embrasser ! »
Il s’en fallait de peu qu’elle ne l’estourbisse d’un coup de casserole ou ne le troue d’un coup de couteau.
Elle avait les yeux déjà très noirs, ils fonçaient encore plus. Elle se taisait, haussait les épaules et retournait à sa tâche.
Mon père, satisfait, allait finir le lit…
Il était heureux que nous autres, les enfants, ayons pu sortir après cette représentation d’une pièce que nous connaissions tous sur le bout du doigt et qu’on donnait régulièrement. Heureusement, la vie agitée de mes parents et leur absence courante nous rendait indulgents.
Jusqu’à ce que la mort de ma mère nous apprenne, à Heure-Bleue et moi, que deux de mes sœurs n’avaient pas cette indulgence.
C’est là que j’appris que je n’étais pas le seul à avoir quelques griefs envers ma mère.
Vous ne serez pas surprises, lectrices chéries, d’apprendre que c’était pour des raisons totalement opposées…
08:01 | Commentaires (10)