dimanche, 07 avril 2013
Les tifs aussi…
Hier, Heure-Bleue, Tornade et moi sommes allés à Paris.
Quoi faire ? Aller au musée ? Aller au restaurant ? Nous promener ?
Que nenni ! Nous sommes allés en chœur chez le coiffeur !
Oui, nous avons occupé notre après-midi à nous faire une beauté –j’allais dire, avec l’aveuglement qui vient avec l’âge, « refaire » une beauté – dans ce salon où nous allons depuis une petite dizaine d’années.
Il y a eu du changement, pas dans la déco, dans le personnel officiant. La Véronique qui prenait soin d’Heure-Bleue est allée exercer ses talents sous d’autres cieux tandis que l’Esperanza qui s’occupe des épis de votre Goût préféré m’attendait avec l’impatience qui sied à celle qui attend Lancelot pour la tirer d’un mauvais pas.
Michaël a remplacé Véronique avec un talent de capilliculteur incontestablement confirmé. Malheureusement accompagné d’un talent commercial moins affûté…
Qu’il dise des bêtises n’est pas grave, qu’il les assène avec la force de mes arguments est d’autant moins dramatique que je m’en fous mais qu’il le fasse en contrariant de vieilles dames qui n’ont plus l’âge de se laisser emmerder, surtout en venant claquer plein de sous pour se faire transformer en casque bleu à coup de teinture bleutée sur leurs cheveux blanchis sous le harnais.
Là où il a fait fort, c’est en parlant d’un lac sur lequel il ne tarissait pas d’éloge.
Avec un manque d’à propos saisissant et une tendance à la déconnade affirmée, tandis qu’il disait « Aaah… L’ambiance autour de ce lac, ça me rappelle que… », je lançai « Un soir t’en souvient-il, nous voguions en silence, on n’entendait au loin sur l’onde et sous les cieux, que le bruit des rameurs… ».
Ebloui par la renommée du lac en question, il ajouta « ah non, ça je connais pas, mais c’est là que Véronique Jannot est née ».
Je marmonnai à l’adresse d’Esperanza « chacun ses références… » tandis que cette hyène d’Heure-Bleue me faisait remarquer que c’était le lac du Bourget et pas celui d’Annecy, la garce.
Je demandai à Esperanza :
- Vous ne vous rappelez pas ça ?
- Eh non ! J’ai été élevée en Espagne, moi.
- Ah oui, votre truc c’est plutôt « en la luna negra de los bandoleros cantan las espuelas »
- Caballito negro. Donde llevas tu jinete muerto ?… Vous connaissez Garcia Lorca ?
- Bien sûr, qui ne connaît pas ?
Là, elle a tourné le regard vers Michaël d’un air entendu.
Je sens que ce pauvre garçon va bientôt boucler des cheveux dans un autre salon…
C’est dommage pour Tornade, ce garçon est peu au fait de Lamartine mais se débrouille très bien à retirer les années de la tête de Tornade.
10:08 | Commentaires (12)
jeudi, 04 avril 2013
Un essai en vrai glandeur…
J’avais déjà constaté, au cours du long audit des services de l’hôpital qui a eu l’insigne honneur de récupérer un des deux rognons de votre Goût adoré, que pour la gent médicastre, nous ne sommes pas des femmes ou des hommes.
Nous sommes des tas d’organes plus ou moins en panne dont chacun suscite un intérêt qui dépend, non de votre charme ou de votre sociabilité mais uniquement de la spécialité du praticien qui vous reçoit. Le reste n’étant qu’un véhicule servant à apporter l’organe concerné.
Hier donc, le prof qui a remplacé mini-néphro regarde avec intérêt le résultat des examens qu’il avait demandé il y a un an et auxquels je devais procéder peu de temps avant de revenir le voir.
Il lit attentivement les deux feuillets recto-verso qui détaillent tout ce qui circule dans mes organes et est susceptible de faire déconner un organisme par ailleurs impeccable. Enfin presque. Ne chipotons pas sur le remplacement fortuit de petits carrés par un grand rond, balafré de surcroît, ni par le comportement aberrant de cette s… de balance qui m’a ajouté subrepticement quelques grammes kilos au cours des années, encore moins sur le souffle raccourci par des années de clopes qui m’empêche de gravir sans escale plus de quatre étages.
A la fin de sa lecture, le prof lève la tête et dit « Mais c’est parfait tout ça ! Pas de ci, pas de ça, ni de là. »
Il ajoute malheureusement pour moi après m’avoir vu ouvrir la bouche « Ah ! Vous voulez savoir quelque chose ! Allez-y. »
Et là, à force de déclamer pour vous, lectrices chéries, j’en ai pris l’habitude. Du coup, au lieu de déclamer, je déconne…
Evidemment le professeur qui me reçoit est peu sensible aux sirènes qui vous charment.
Pire, il accepte tout. Enfin presque. Le médecin est susceptible, vous le savez. Je peux vous donner une information plus pointue aujourd’hui.
Contrairement au médecin, le professeur n’est pas susceptible…
Non, le professeur est très susceptible !
La preuve ?
Je lui ai donc, à sa demande exposé tous les effets secondaires qui me pourrissaient la vie pour une efficacité toute relative et j’ai eu le tort d’ajouter :
- Eh bien j’ai l’impression que ce médicament a plus brillé par l’efficacité de ses effets secondaires que par des effets curatifs de toute façon superfétatoires puisqu’ils amélioraient des points qui ne le nécessitaient pas vraiment.
Il rumina quelques instants tandis que la température fraîchissait nettement dans la pièce.
- Bon, de toute façon, quel que soit le médicament, il faut le prendre ! Il y a des effets secondaires mais globalement ça marche. Il faut faire avec !
- Mais pourquoi ?
- Parce que vous êtes à risque ! Quand on n’a qu’un rein, on risque l’accident cardio-vasculaire ! Il faudrait peut-être faire une recherche de cardiopathie… Avec un seul rein… D’ailleurs, vous avez-vu un cardiologue ?
- Ben oui !
- Quand ? Je n’en vois pas trace là. Dit-il en tapotant le résumé de mon dossier.
- Il y a cinq ans, ici, je peux reprendre rendez-vous.
- Naaan, il n’y a plus de cardio à Tenon, je vais vous faire une ordonnance, le dernier cardiologue de Tenon est à Saint-Antoine.
Comme je faisais la gueule parce que je m’étais fourré tout seul dans cette situation, il eut le bon goût d’ajouter « Bon, tous les deux ans, ça devrait suffire, faut pas non plus exagérer, je vous reverrai l’année prochaine ».
Nan mais allo quoi ! T’es un garçon et t’as pas de néphro ! Allo…
10:37 | Commentaires (11)
mercredi, 03 avril 2013
Le veau de ville.
Je regarde la note d’Heure-Bleue, celle qu’elle a postée hier.
Je regarde ? Oui, je n’ai pas besoin de la lire, elle me l’a lue à voix haute.
Je regarde donc les photos qu’elle y a ajoutées.
Et, comme Mab, je me dis « C’est vrai que cette mode était jolie ».
J’y repense d’autant plus qu’hier, Heure-Bleue et moi sommes allés à Paris et que, comme toujours, je suis intéressé par les gens dans la rue, le bus.
Je regarde les visages, l’allure et beaucoup la mise. Non, je ne regarde pas que les filles, leurs yeux, leurs jambes. C’est justement là que je pense à la réflexion de Mab.
On ne voit quasiment plus rien des filles. A la limite on en voit plus chez les garçons, grâce à la mode du pantalon que j’appelais « mode garde à vue » avant que j’apprenne que ça s’appelle « baggy ».
On aboutit à ce paradoxe qu’on voit, dès qu’il leur faut se pencher, la raie des fesses des garçons alors qu’il est rare de voir les jambes des filles.
Grâce, ou plutôt à cause d’un gauchissement de la pensée de nombre de mâles, j’ai l’impression que les femmes ne sortiront plus guère qu’en scaphandre tandis que les hommes sortiront dans une tenue qui les fera tous ressembler, sauf les éphèbes comme moi, au « Gros dégueulasse » de Reiser…
Et ça, ça m’effraie.
Car non seulement « j’ai fait le plus gros » mais on s’ingénie à me pourrir ce qui me reste à vivre.
Je ne crois pas au paradis mais je peux vous affirmer que l’enfer existe.
Je suis en train d’assister à sa construction. Et elle va bon train…
07:54 | Commentaires (6)
mardi, 02 avril 2013
Les jeux de l’ego…
Aaahhh… Que se construire une identité est difficile.
Quand on y regarde de près, il faut prendre garde à tant de choses…
Prenez Merveille, par exemple.
Ces jours-ci, elle a dû admettre que la vie était bien plus belle avec de la variété mais a dû aussi composer avec la sérénité des parents.
Merveille a fait, la semaine dernière, une expérience enrichissante : Elle a déjeuné à la cantine.
Et elle a aimé. Les repas, bien sûr, ce qui va lui passer assez rapidement. Mais surtout la récré. Et je soupçonne que le gamin à la patte esquintée par le bout de verre qui a traversé sa chaussure mange, lui aussi, à la cantine.
Mais si voyons, vous savez bien, celui qui remplace le locataire de la « chaise des punis », celui qui est « bôôô » selon les dires mêmes de Merveille.
Puis, le week-end pascal est arrivé et là, Merveille a fait une autre expérience. Après avoir sans doute mûrement réfléchi, elle s’est dit qu’il fallait prendre soin de ses parents. Leur faire plaisir. Probablement un avatar de l’égoïsme qui permet de survivre…
Cette mûre réflexion l’a conduite à penser que pour que ses parents se sentent bien il fallait les maintenir dans l’illusion que le temps ne passait pas. Sans doute aussi parce que s’il ne passait pas pour eux, il ne passerait pas plus pour elle, ce qui lui garantirait une vie sereine à l’école maternelle.
Donc, quand Heure-Bleue a parlé du chocolatier, Merveille a dit « Chut ! Fais semblant Mamy ! C’est pour de faux ! »
C’est comme pour « la petite souris », Merveille n’y croit pas plus que ça mais joint la gentillesse à la rentabilité.
Merveille a découvert cette semaine le concept de jeunesse éternelle.
Je ne me demande même pas si c’est pour elle ou pour ses parents…
13:37 | Commentaires (5)
samedi, 30 mars 2013
Le serpent à sornettes...
Hier, un type qui n’a eu de rapports avec la religion que pendant son passage chez les Frères s’est rappelé, belle performance, que c’était, selon le calendrier de la Septuagésime, le Vendredi Saint.
Eh ! Fallait tout de même se le rappeler, mine de rien, que c'était la fin de la Septuagésime !
Ce fut surtout l’occasion d’aller chercher pour une petite fille élevée comme une mécréante, tous ces petits machins censés pousser les enfants sur le chemin de la chrétienté.
Ces chemins, qu’on soit athée ou croyant, passent souvent par une augmentation sensible du chiffre d’affaires des boulangers, pâtissiers et autres chocolatiers.
Et pour parcourir ce chemin, plein d’acide oxalique et de réflexions d’Heure-Bleue eu égard à ma goinfrerie de chocolat, je suis passé par le boulanger où le pain est bon.
J’aime bien cette boulangerie de Bretons. Il y a à la caisse une blonde aux yeux bleus «genre quinqua qui veut faire quadra mais a du mal » assez gentille. Je n’aime pas dire du mal mais c’est vrai, elle est gentille. Bon, elle semble ne pas avoir inventé le fil à couper l’eau chaude mais elle est gentille, ce qui doit être reposant. Mais parfois seulement.
Je l’aime bien parce qu’après lui avoir il y a des mois, débité une sornette que j’ai complètement oubliée, elle m’accueille en faisant des mines.
Et vous savez bien, lectrices chéries que j’aime, combien j’adore débiter des sornettes.
Au retour des vacances de février, j’avais déjà titillé le serpent à sornettes.
Heure-Bleue avait repéré la trop aimable caissière et déjà fait une remarque à propos d’un probable déficit neuronal. Pourquoi ?
Eh bien, alors que j’allais chercher la baguette qui nous plaît bien, à Heure-Bleue et moi, l’accorte caissière, de retour de vacances avait pensé ajouter une touche de séduction en protégeant son cou d’un foulard multicolore. En tendant mon écot et pour répondre à son « Boooonjouuur monsieuuuuur » souriant, je lui dis « Ah mince ! Je croyais avoir un ticket d’enfer et je vous retrouve avec le « Rainbow Flag » autour du cou, désolé mais vous me tuez le moral ! ».
Elle se récria « Mais non ! Voyons ! C’est pas le Rainbow Flag ! Enfin ! Est-ce que… » en clignotant des paupières. Depuis, j’ai l’impression que notre amour a du plomb dans l’aile, mais bon, faut savoir ce qui est important et là, l’important c’est la baguette.
Les jours ont passé, elle semblait m’avoir pardonné de l’avoir soupçonnée de penchants saphiques.
Hélas, une fois de plus, emporté par l’instinct taquineur, j’ai tout fichu par terre.
Hier soir, je pris donc ma baguette et d’autres choses et j’eus droit de nouveau à son souriant « Boooonjouuur monsieuuuuur » accompagné cette fois d’un « vous allez bieeeennn ? » et d’un sourire plein de dents.
D’humeur chiante, il y a des jours comme ça, et me rappelant qu’elle était probablement bretonne je laissai échapper d’un ton sévère « Mais comment pouvez-vous être aussi gaie en ce jour ? C’est Vendredi Saint ! Le jour où le Christ fut crucifié ! Cloué il fut ! »
Elle me dit d’un air triste « Ah oui ! C’est vrai ! Excusez-moi, j’avais oublié ! »
On aurait dit que c’était elle qui l’avait emmené au tombeau dont il serait censé sortir trois jours plus tard…
J’ai quand même réussi à garder mon sérieux jusqu’à la sortie.
Et Heure-Bleue m’a sermonné d’un « mais tu es infernal ! Tu n’es pas sortable quand tu as décidé d’embêter le monde ! »
Pour une fois que j’essayais d’être sérieux, lectrices chéries, on a tué dans l’œuf une vocation de moraliste…
10:56 | Commentaires (15)