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lundi, 03 octobre 2022

Devoir de Lakevio du Goût No139

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D’après vous, qu’est-ce qui m’a poussé, à voir cette toile, à vous proposer un devoir ?
Oui, comme la semaine dernière, c’est une toile d’Émile Friant.
Celle-ci m’a particulièrement interpellé.
Pourquoi ?
Je vous le dirai lundi.
Mais vous ? Que vous a-t-elle inspiré ?
Ce qui serait vraiment bien, c’est que vous commenciez votre explication par :
« J’arrive tout couvert encore de rosée »
Et que vous la finissiez par :
« Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches. »

J’arrive tout couvert encore de rosée et que vois-je ?
Elle !
Là, comme disaient les « djeuns » de l’époque où je faisais partie des « djeuns », et là, vous dis-je « ça me troue » !
Non qu’elle fut particulièrement laide ou belle, non, ça ne m’intéressait pas vraiment.
Plus exactement, ce n’est pas ce qui a attiré mon regard.
Mon dieu ! Ce chapeau !
Non, mais quelle horreur ! On eut dit que cette pauvre femme s’était trompée de siècle !
Même ma mère n’en portait plus des comme ça depuis des décennies !
Pour un peu je me serais précipité sur elle en luis disant « Voici des fruits, des fleurs et des branches », je l’aurais joué Verlaine.
Ça marche assez bien quand on est ado, mais là, je n’étais pas sûr, surtout qu’elle savait peut-être qu’il avait la mauvaise habitude de baffer sa femme et d’être assez indécis en matière de préférences…
Malgré tout, je l’ai regardée un peu plus attentivement.
Elle avait de jolis yeux, au regard hélas plus intéressé qu’intéressant, une couleur de cheveux que j’aimais bien mais ce chapeau, bon sang ce chapeau…
Le pire étant à mon goût ce corsage d’un rose épouvantable et repassé manifestement avec un fer froid.
Bref, je lui aurais volontiers tendu un bon de réduction chez un grand faiseur en lui recommandant néanmoins, à voir ses mains d’une bonne taille pour un terrassier « Ne le déchirez pas entre vos deux mains blanches »…

dimanche, 02 octobre 2022

Songe d’une nuit d’automne…

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Je profite que nous sommes dimanche pour vous parler de mardi dernier.
Mardi dernier, la lumière de mes jours et moi sommes allés voir l’expo Füssli au musée Jacquemart-André.
C’était chouette.
Nous avons passé près de deux heures à regarder l’œuvre de Mr Füssli, Suisse de naissance qui arriva en Angleterre à l’âge de vingt-quatre ans.
Il y mourra soixante ans plus tard après avoir peint plein de femmes plus ou moins habillées et habitées de visions et rêves étranges et inquiétants…
Après ces près de deux heures devant des peintures, nous avons passé un peu moins de temps à la terrasse du café du musée à digresser sur ce que nous avions vu, à goûter ce gâteau, un peu trop sucré mais délicieux, à boire ce café serré presque aussi bon qu’un Clooney préparé à la maison.
Un tableau m’a séduit, car j’aime toujours autant regarder des femmes alanguies, reposant sur un divan et les yeux clos sur un rêve intérieur que je suppute, comme d’habitude, délicieux.
Mais il ne m’a pas séduit que pour ça.
Il m’a rappelé une blogueuse que j’aimais beaucoup.
Ses cendres ont rejoint les racines des plantes qu’elle prenait tant de plaisir à mutiler à coups de sécateur.
Elle avait pour moi une qualité que je trouve admirable : Elle aimait beaucoup les titres de mes notes.
Pourquoi est-elle revenue faire un tour à la surface de ma mémoire alors que je pérégrinais devant ces toiles ?
Eh bien parce que si cette blogueuse n’a rien à voir avec la femme alanguie dont je parlais, elle en portait le nom en diminutif et pseudonyme.
Bon, honnêtement, je connaissais le personnage de la légende grâce à cet enseignement de l’anglais dispensé à ma génération, enseignement qui vous rendait incollable sur Shakespeare, Keats ou Coleridge mais hélas vous laissait incapable de renseigner un touriste qui vous demandait où trouver la boulangerie du quartier…
Pour en revenir à mon propos, il ne me serait jamais venu à l’esprit de comparer la blogueuse que nous connaissions avec la reine de fées de Shakespeare…
Feue Mab, blogueuse amie, n’avait pas de goût pour Roméo et Juliette et son mari n’étant pas non plus le roi des elfes ne m’a pas non plus fait penser au Songe d’une nuit d’été…
Cette visite au musée a finalement réveillé chez moi le souvenir d’une disparue qui ne l’est jamais tout à fait.

samedi, 01 octobre 2022

Le sort, ce foutu sort…

Ce n’est pas que je sois routinier, non, c’est seulement que j’aime par moment que certaines choses soient immuables.
Que le jour choisisse le matin pour se lever.
Que la nuit choisisse plutôt le soir pour tomber.
Toutes ces choses auxquelles ont finit par s’habituer, comme le « T-shirt » s’habitue à tomber pile à côté du panier à linge, le savon à côté de la baignoire quand on est dedans ou le rideau de la boulangerie qui se baisse pile-poil quand on s’aperçoit qu’on a oublié le pain.
Bref, parmi ces éléments aussi immuables que le principe de conservation de l énergie ou celui de la conservation de la quantité de mouvement, un se rappelle à mon souvenir aussi régulièrement que l’alternance des jours et des nuits.
Celui des jours où Heure-Bleue, d’humeur optimiste, se dit qu’elle portera tout le jour ce pull « bleu layette » qu’elle adore et que j’abhorre.
Le sort, farceur comme toujours, lui donne tort dès le premier repas.
Je me demande depuis qu’elle eut l’idée saugrenue de le porter pourquoi il faut toujours que ce soit lorsque les repas sont entamés par une rondelle de cervelas, hélas accompagnée d’une vinaigrette jaune moutarde ou simplement constitué d’une assiette de spaghetti accompagnés de sauce bolognaise.
L’une ou l’autre sauce voyant ce pull décoré avant même le dessert, « d’or-moutarde » ou de « rouge-communiste » qui lui donne un côté maréchal russe ou général mexicain, selon le mets.
Bien heureux si le repas ne se termine pas par une mousse au chocolat…
Ce qui néanmoins me turlupine depuis maintenant plus de vingt ans, c’est cette terrible question qui devient quasiment existentielle chez moi :
Pourquoi ces évènements ne se produisent-ils qu’avec ce pull « bleu layette » ?
Le surnaturel pointerait-il son nez dans cette maison peuplée de cartésiens, et athées de surcroît ?

vendredi, 30 septembre 2022

139ème devoir de Lakevio du Goût

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D’après vous, qu’est-ce qui m’a poussé, à voir cette toile, à vous proposer un devoir ?
Oui, comme la semaine dernière, c’est une toile d’Émile Friant.
Celle-ci m’a particulièrement interpellé.
Pourquoi ?
Je vous le dirai lundi.
Mais vous ? Que vous a-t-elle inspiré ?
Ce qui serait vraiment bien, c’est que vous commenciez votre explication par :
« J’arrive tout couvert encore de rosée »
Et que vous la finissiez par :
« Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches. »

jeudi, 29 septembre 2022

Mon père, ce héros au sourire si doux.

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Et aux réflexions parfois si cruelles…
Comme vous le subodoriez peut-être, lectrices chéries, le couple de mes parents allait cahin-caha.
Cahin quand l’un voyait bien l’autre dans le rôle d’Abel.
Rôle assez bref si vous vous rappelez cette sombre histoire qui survint dans la Genèse. Caha car il était rare que tout allât bien dans un logement exigu où six personnes devaient cohabiter.
Là où ça se passait le moins bien, c’était les samedis et les dimanches d’hiver. Ma mère était frileuse comme une vieille chatte et mon père supportait mal que l’appartement « sentît la loutre » selon son expression.
Ça entraînait immanquablement de nombreuses disputes que ma mère savait lancer plutôt astucieusement.
Elle savait pouvoir compter sur la réflexion désagréable qui lancerait mon père.
Elle oubliait souvent que sa réflexion permettrait à mon père de faire montre de l’humour détestable dont il savait faire preuve quand ma mère le titillait un peu trop. Ça marchait à tous les coups, elle sortait perdante de la joute et ils se disputaient jusqu’à ce que le soufflé retombât et qu’arrive l’heure de préparer le repas ou celle des informations à la radio.
Un de ces samedis de février me revient où ma mère s’était levée du pied gauche.
Il faisait froid dans la maison, le poêle s’était, comme toujours, éteint vers le milieu de la nuit.
Mon père, qui travaillait comme un esclave, devait encore aller faire « des heures sup’ » histoire d’allonger la dose de margarine dans les pâtes.
Notre drame ? Personne n’aimait les épinards et le beurre était trop cher.
Ce matin-là, ma mère lui demanda d’allumer le poêle avant de partir.
Il aurait dû se méfier, mes sœurs et moi avions depuis longtemps remarqué que, quand notre mère était en forme, elle appelait mon père « Lemmy ».
Quand tout semblait aller pour le mieux entre eux, elle l’appelait « Chéri ».
Hélas, quand elle était « mal virée » elle l’appelait « Gaby ».
Ce fut donc un jour néfaste qui commença par :
- Gaby !
 Mon père, qui la connaissait aussi bien que nous, savait que « Gaby » ça voulait dire emmerdements à brève échéance.
Il en profitait parce qu’il savait aussi que quand il l’appelait « ma poule », elle détestait ça et le piétinerait volontiers.
- Oui ma poule ?
Ça ne rata pas. Profitant d’heureuses dispositions pour la chamaillerie elle jeta :
- Rhoouuuu ! Je te giflerais quand tu m'appelles « ma poule » je déteste ça !
- Oui ma poule…
- Il faut rallumer le poêle, les enfants vont attraper la crève !
Il s’y mit, froissa deux ou trois feuilles de « Paris Presse-L’intransigeant », mit une poignée de petit bois par-dessus et la séance commença :
- Fais attention en retirant le bac à cendres, Gaby ! Tu vas en mettre partout.
Silence paternel, pas même un soupir.
Il prit le bac à cendre et le versa dans la poubelle en ne soulevant qu’un peu de poussière.
Je le regardai attentivement car, comme tous les petits garçons, j’aimais bien l’idée de jouer avec le feu.
Il remit le bac à cendre à sa place, ouvrit la gueule du poêle, prit le seau à charbon et en versa un peu sur le petit bois.
«  Aaaaattttentiooonnn !!! » Cria ma mère, « tu vas tout salir !!! »
- Mais non ma poule…
- Je te connais comme si je t’avais fait ! Tu ne sais pas faire le feu !
J’ai senti que c’est là que ça allait commencer car mon père allumait souvent le feu, et très bien.
Il releva la tête.
- Ouais, ben à propos de feu, il y a des jours où je comprends le docteur Petiot…
- Justement, si tu étais docteur, on ne serait pas là, dans ce taudis.
Quand on en arrivait là, nous savions tous que ma mère avait perdu la bagarre qu’elle avait elle-même lancée.
- Si j’avais été médecin, je ne t’aurais pas croisée, ma poule…
Et il se mit à chantonner l’air de « Comment épouser un millionnaire ».
Ma mère est partie, vexée, vers le boyau qui servait de cuisine en pestant « j’aurais dû me marier avec un gendarme, au moins ils sont bien logés ! »
Puis mon père est parti travailler…
Il savait, en dehors de chercher des histoires à ma mère, faire des tas de choses qui intéressaient les enfants.
Quelques années plus tard, nous saurions même exactement quand elle lancerait la mauvaise réflexion, celle qu’attendait mon père, confiant dans le caractère routinier de ma mère.