mardi, 13 septembre 2022
Crise de nerfs ou crise de l’énergie ?
Mon agacement allait croissant.
Je comprenais bien, tant que d’autres étaient dérangés, que seuls ces autres pussent être agacés du nombre d’appels indésirables tentant de leur vendre des choses dont ils ignoraient l’existence, dont ils n’avaient donc nul besoin, d’autant qu’ils n’avaient pas le premier sou pour les acheter.
Las, je fus à mon tour importuné par un de ces marchands d’orviétan.
Ce dernier, a plusieurs fois tenté de me vendre du gaz à un tarif élevé dû aux soubresauts du marché.
Sachant d’où vient le gaz qui était pour l’heure coupé, j’ai décliné poliment.
D’autant plus poliment que, nous souvenant de la tendance des vieux à vaporiser un immeuble par distraction, j’ai prudemment décliné de GDF un abonnement au gaz lors de notre dernier déménagement…
J’ai donc demandé à mon interlocuteur de supprimer mon numéro de leur base de données.
« Bien monsieur. » me fut-il répondu.
L’âme sereine et l’humeur souriante, ainsi qu’il convient à l’homme dont l’intestin fonctionne bien, j’ai raccroché.
Las… Quelques jours plus tard, Total Énergies réitéra son appel.
Ma réponse fut moins aimable mais je réitérai mon souhait et prudemment toutefois, bloquai le numéro dérangeant.
Tranquille quelques jours, je pensai l’affaire réglée.
Hélas une fois de plus, hier soir mon portable sonna quand je sortais ma carte pour régler « une tradi, s’il vous plaît, Madame ! »
Je décrochai en bénissant l’inventeur du « sans contact ».
Ce ne fut alors que pour maudire l’inventeur du harcèlement téléphonique.
Après avoir dit son fait à l’importun (en réalité lui avoir dit méchamment « vous m’emm… ! » j’ai pris ma « baguette tradition » qui venait d’augmenter de 8% dans la journée soit 20% depuis le mois de février.
Arrivé à la maison, j’ai pris ma plus belle plume mon plus beau clavier, pour dire par voie de mail à Total Énergies ce que je pensais de leurs façon de faire.
Ce matin j’ai reçu une réponse me présentant d’abord les excuses de l’entreprise.
Elle m’a assuré ensuite que le N° 06 xx xx xx xx avait été retiré de leur base de données
J’ai « biché comme un pou sur les c… du pape » car c’est la première fois qu’une multinationale qui fait deux milliards d’€uros de résultat net mensuel me présente des excuses comme si j'accédai soudain à l'existence véritable, celle de la reconnaissance des grands de ce monde.
Un détail m’a néanmoins tracassé et poussé à cliquer sur l'onglet « Répondre » pour leur poser cette question :
« Par quel miracle avez-vous, rien qu’en voyant le mail privé de l’expéditeur, réussi à le lier à mon N° de téléphone, tout aussi privé ? »
Je sais bien, après avoir lu d’un dirigeant de Go..le il y a quelques années que « La vie privée ? C’est une notion de vieux c… ! » mais tout de même...
12:12 | Commentaires (9)
lundi, 12 septembre 2022
Devoir de Lakevio du Goût No136
Cette toile de Gustave Courbet dite « Jo la belle Irlandaise » me dit quelque chose.
Pas seulement parce que « Jo, la belle Irlandaise » a permis à Gustave Courbet quelques privautés.
Mais vous, qu’en avez-vous à dire ?
J’aimerais que cette note commençât par « À quoi bon ? Enfin… Vous ne supposez pas que ce n’était pas en apparence ? »
Aussi qu’elle finît par « J’ai bien été le premier à vérifier l’exactitude de la chose, quand j’étais votre amour… en apparence. »
À lundi j’espère…
- À quoi bon ? Enfin… Vous ne supposez pas que ce n’était pas en apparence ?
Elle secoua sa chevelure avec dédain.
Elle soupira et ajouta après un instant de réflexion
- Vous auriez pu vous douter que des cheveux comme ça n’existent que pour vous faire rêver, vous autres…
J’ai secoué la tête, vaguement déçu qu’effectivement de tels cheveux pussent n’exister que pour me faire rêver.
Encore que…
S’il n’y avait eu que ces cheveux, mais il y avait cette peau pour parfaire le rêve.
Elle le savait bien, qui triturait savamment sa chevelure en penchant la tête de façon à dévoiler son cou dont la pâleur me donnait envie de le dévorer de baisers.
Et si ce n’était que le cou…
J’ai soupiré à mon tour, elle sourit.
- Vous voyez bien que vous savez.
Cruelle, elle insista :
- Dites-moi, Gustave, vous ne pensiez pas, même avant, que…
- Que ?
- Que j’étais « toute » comme ça ?
De fait, je savais bien que le flamboiement qui auréolait son visage n’était pas totalement un cadeau de la nature et qu’un artifice l’avait allumé.
Et pour cause, je me rappelais très bien où j’avais recueilli l’information.
J’y passais beaucoup de temps et y pensais très souvent.
Un peu trop même à ses yeux…
Elle insista.
- Vous savez bien mon cher Gustave que cette couleur n’est qu’apparence et n’est pas, comment dire, uniformément répartie…
Je me suis demandé un instant si je pouvais… Mais son visage vaguement fermé me dissuada de tenter une nouvelle vérification de ma part.
Je me contentai de lui répondre de façon amène :
- N’oubliez pas que vous étiez mon modèle…
Elle souleva un sourcil.
- Et ?
- Vous souvenez-vous de « L’Origine du Monde » ?
Elle se demanda ce que j’avais voulu fixer sur la toile mais n’eut plus de doute quand j’eus ajouté
- J’ai bien été le premier à vérifier l’exactitude de la chose, quand j’étais votre amour… en apparence.
NB : Selon certains « exégètes » de l’œuvre de Gustave Courbet, l’intimité exposée dans « L’Origine du Monde » serait celle de Joanna Hifferman qu’il connut, au sens biblique du terme.
08:25 | Commentaires (15)
samedi, 10 septembre 2022
136ème devoir de Lakevio du Goût
Cette toile de Gustave Courbet dite « Jo la belle Irlandaise » me dit quelque chose.
Pas seulement parce que « Jo, la belle Irlandaise » a permis à Gustave Courbet quelques privautés.
Mais vous, qu’en avez-vous à dire ?
J’aimerais que cette note commençât par « À quoi Bon ? Enfin… Vous ne supposez pas que ce n’était pas en apparence ? »
Aussi qu’elle finît par « J’ai bien été le premier à vérifier l’exactitude de la chose, quand j’étais votre amour… en apparence. »
J’espère que vous aurez une histoire à raconter à partir de ces deux phrases tirées des « Contes d'amour, de folie et de mort » d’Horacio Quinoga.
À lundi…
09:27 | Commentaires (6)
jeudi, 08 septembre 2022
Le pain perdu.
Notre « boulanger d’en bas » est ouvert, comme il l’était au mois d’août.
Mais cette fois il m’a semblé avoir fait cuire le pain par un boulanger, un vrai.
Non qu’il fît lui-même la pâte, qu’il la pétrît chez lui car il n’est pas « artisan boulanger » mais cet été, vacances obligent, nous avions laissé tomber l’idée de lui acheter du pain.
Il avait apparemment décidé de congeler ses « pâtons » pour l’été.
Le pain congelé a une caractéristique ennuyeuse : vous vous trouvez, en cas de choc en sortant de la boulangerie, avec un tas de miettes dans le fond du sac.
En l’absence de choc, ce n’est guère mieux : Avec une baguette achetée le soir vers dix-sept heures, vous avez une bûche de chêne le lendemain matin.
En repensant à ce pain, un autre pain me revient à l’esprit, moins appétissant que la « Tradi » d’un « boulanger bio » de ma connaissance.
Ce pain qui me pousse à demander « une baguette, s’il vous plaît, plutôt cuite et chaude. »
Pourquoi ? Parce que cette nouvelle va, j’en suis sûr, vous laisser estourbies de surprise, car je suis sûr que je ne vous ai jamais parlé de ma mère.
Ma mère avait une idée précise de ce qui fait un « enfant bien élevé ».
Sans parler mais ce sera pour une autre fois, de l’idée encore plus précise de qui était digne d’être aimée par son fils, c’est-à-dire personne à part elle.
Ma mère donc nous envoyait chercher immuablement le pain qui, à ses yeux, représentait le nec plus ultra de la nourriture bourgeoise : le pain blanc.
Pour elle, le pain idéal était « un pain parisien bien blanc s’il vous plaît. »
Le pain qui finirait de cuire dans l’estomac s’il n’était pas vigoureusement, au besoin à l’aide d’une taloche, recommandé de le manger rassis.
Pour éviter disait-elle « les lourdeurs d’estomac quand on mange du pain frais ! Ça fait mal au ventre quand on mange du pain chaud ! ».
Elle nous envoyait chercher le pain « Et chez Galy, hein ! Pas chez Marion ! » car « Marion » faisait du « pain moulé », sacrilège aux yeux maternels.
Elle surveillait le pain comme le lait sur le feu et claironnait, au moment de mettre la table « Pas le pain frais ! Il en reste d’hier soir ! »
Ce « Il en reste d’hier soir, il est encore bon ! » me rappelle cruellement les façons de faire de ma mère.
À cette époque bénie où les enfants étaient presque sages, on ne se servait pas de pain entre les repas et à table il fallait le demander.
Tout manquement à la règle entraînant immanquablement une taloche, on y regardait à deux fois avant de piquer le croûton du pain.
Et il n’était pas question de baguette, ni même de « bâtard ».
Non, non, seul le « pain parisien de 400 grammes », le pain d’ouvrier, trouvait grâce à ses yeux, ce pain qui se garde trois jours.
Le pain qui finit en « pain perdu » et pas perdu pour tout le monde.
Même trempé dans le lait un bon moment avant d’être saupoudré de sucre et de cacao, le pain du fond de la huche avait bien du mal à ramollir…
Grâce à ce « Il en reste d’hier soir, il est encore bon ! » je suis encore aujourd’hui en mesure de digérer des briques sans grande difficulté.
Heure-Bleue ne peut pas en dire autant, amollie qu’elle est par une éducation qui la fit passer de la batiste au cachemire.
Ma mère réussit donc, à défaut d’enfants sans névroses, à nous assurer une digestion dans les règles de l’art.
10:42 | Commentaires (9)
mercredi, 07 septembre 2022
Sonate d’automne.
Ouais, je sais, c’est Bergman, pas moi mais ce film m’a plu.
J’en connais même deux qui me disent régulièrement « Oui mais toi tu aimes les trucs chiants ! »
Ce à quoi j’ai renoncé depuis longtemps de rétorquer « C’est vrai, d’ailleurs je vous aime… »
C’est une note décousue mais je suis sûr que vous saurez la raccommoder.
Ce matin donc, la lumière de mes jours et moi papotions.
La fenêtre de la salle de bain et de la chambre étaient ouvertes.
Elle pliait le linge à repasser tandis que je faisais le lit.
Vêtu d’un « T-shirt » et d’un caleçon, j’ai eu un léger frisson.
- Eh ! Il fait froid ce matin !
- Ah mais non ! Il fait bon !
Une de nos premières dissensions venait de refaire surface.
C’était une vieille histoire entre nous qui datait d’une bonne cinquantaine d’années.
L’automne approchant, la saison des coups de pieds nocturnes arrivait elle aussi…
Tandis que je posais – mal – les oreillers sur le lit, Heure-Bleue dit :
- C’est à la mi-juillet qu’on a eu le « Covid-19 », puis on est allé voir ma sœur.
- …
- C’est ça qui nous a fatigués, non ?
- Tiens, c’est bizarre, j’avais oublié qu’on avait eu le « Covid-19 ».
Aller voir ma belle-sœur m’a paru bien plus grave, du moins plus difficile à vivre qu’attraper le « Covid-19 » …
Ça prouve bien que les malheurs ne laissent pas tous la même empreinte.
L’automne de ce matin me fait penser à Modiano, je ne sais pourquoi.
Sûrement cette vieille douleur due à une mauvaise position, celle qui me rappelle que je suis bien parti pour être de « ceux qu’on ne voit plus », de ceux qui sont « devenus invisibles » comme dit la lumière de mes jours…
Je me rappelle aussi ce qu’on était, ce que nous étions tous avant…
Mais ils sont là et passent et repassent dans les rues, persuadés que les trottoirs portent encore la trace de leurs pas, que les murs gardent encore la marque de leurs regards.
Et je sais bien que d’autres « anciennes jeunes femmes et anciens jeunes gens d’une vingtaine d’années » gardent encore le souvenir de leurs regards.
Il me suffit de descendre une rue et de revoir une vitrine poussiéreuse pour que deux ou trois bulles de souvenir éclatent à la surface de ma mémoire et me fassent faire à « rebrousse-poil » la plus grande partie de ma vie.
Parfois avec bonheur, parfois plus tristement.
Quand c’est avec bonheur, je me délecte de revivre l’instant.
Quand ce n’est pas gai, le moment s’enfonce de nouveau dans ma mémoire, juste avant que la tristesse ne m’envahisse.
C’est curieux, je ne me mets à penser à la rue Turgot ou au café du croisement de la rue Condorcet et de la rue de Rochechouart que quand l’automne arrive…
Ça doit être la rentrée des classes, surtout celle de Merveille, qui me fait cet effet.
Ou bien ce temps d’automne si particulier à Paris où la température est encore clémente mais où la lumière faiblissante incite à la rêverie…
Je sais bien que je vous ai déjà parlé de la rue Turgot mais l’automne arrivant, c’est le moment où je vous parle de ça.
10:11 | Commentaires (5)