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lundi, 06 juin 2022

Devoir de Lakevio du goût No 126

Devoir de Lakevio du Goût_126.jpg

Cette toile de Vettriano me fait irrésistiblement penser à Baudelaire.
Je verrais bien un devoir qui commence par :
« 
Je logeais dans la maison du principal, et j'avais obtenu, dès mon arrivée, la faveur d'une chambre particulière »

Et qui finirait par :
« Néanmoins un moment de réflexion me décida à attendre la fin de l'aventure. »
Ça, ce serait chouette…


Je logeais dans la maison du principal, et j'avais obtenu, dès mon arrivée, la faveur d'une chambre particulière.
J’étais content.
J’étais enfin près de celle de qui je voulais m’approcher.
J’avais certes « obtenu dès mon arrivée la faveur d’une chambre particulière » comme disait Charles, mais cette chambre était encore loin de celle où je souhaitais aller.
Allongé sur mon lit, regardant le plafond avec l’air d’ennui d’une amante déçue, je pensais que pour aller d’un matelas à un autre, le chemin ne se mesurait pas qu’en mètres…
De plus, les choses se compliquaient si j’en crois la lettre que j’ai reçue.
L’autre matelas s’éloignait à grands bruits de ressorts malmenés…
Il semblerait que l’objet de mon désir était un peu lasse de mes entreprises qui restaient au stade épistolaire.
Manifestement, si elle trouvait ces entreprises grammaticalement satisfaisantes elles  l’étaient beaucoup moins du point de vue des sens.
Tout ça tournait à la mauvaise pièce de boulevard et je risquais bien de me retrouver « gros jean comme devant », avec un logement obtenu par faveur mais dont, faute de travail, je serais incapable d’acquitter le loyer…
Devais-je m’en retourner chez mes vieux parents, honteux et « une main devant et une main derrière » comme on dit ?
La minceur de mon porte-monnaie m’incitait le faire au plus vite.
Devais-je plutôt me lancer hardiment à l’assaut de celle qui semblait d’un coup tiède à l’idée de m’accueillir ?
L’idée de passer mes nuits avec elle me tentait grandement.
Si grandement qu’à rêvasser de la chose je faillis échapper ma cigarette.
Mon dieu !
À mon âge ! Je devais partir, j’avais tout à perdre dans cette affaire !
Néanmoins un moment de réflexion me décida à attendre la fin de l'aventure…

samedi, 04 juin 2022

Contes d apothicaires...

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Depuis quelques jours, comme tout le monde sauf ceux qui sont vissés à « FaceB..k » ou « Tik-Tok », j’entends parler des grandeurs et misères de l’Éducation Nationale.
Dans le flot ininterrompu de plaintes des uns, des autres, des mal lotis mécontents parce qu’ils manquent de tout, des mieux lotis qui ont peur que les mal lotis leur demandent des explications, une phrase a soudain attiré une attention qui déclinait.
Mon poste de radio, vieux comme les promesses électorales, vient de crachoter, à bout de piles « En vingt ans le salaire des enseignants est passé de 2,2 SMIC à 1,12 SMIC ! »
Et mon petit « bavard électronique » d’ajouter « De plus, la tendance depuis de nombreuses années est de n’embaucher que des contractuels plutôt que titulariser des gens qui ont passé les concours. »
Le temps que l’information atteigne mon dernier neurone actif, un déclic se produisit et réveilla dans ma cervelle une information entendue il y quelques semaines.
Le curieux que je suis se précipita vers son ordinateur et la vérifia.
J’en ai retiré qu’en 2002, la fortune de Bernard Arnault, même s’il s’agit essentiellement de capitalisation et non de billets dans son petit portefeuille en peau d’ouvrier, se montait à 12 milliards d’€uros tandis que le SMIC brut atteignait 1035 €.
En bon petit élève, j’ai calculé immédiatement que l’enseignant moyen était payé en 2002 la modique somme de 2.277 € brut.
Puis, j’ai continué pour l’année 2022 et j’ai abouti aux résultats suivants :
- En 2022, selon le classement Forbes, la fortune de Bernard Arnault, même s’il s’agit toujours plus de capitalisation que d’espèces sonnantes et trébuchantes, atteint 147,5 milliards d’€uros tandis que l’enseignant est payé 1,12 fois un SMIC brut qui est passé à 1645 € soit 1.842 €...
Emporté par mon élan calculateur, j’ai vu que le revenu de Mr Arnault a crû en moyenne de  ~13% par an et celui de l’enseignant baissé de 2.5% par an.
Un bref passage par Mr INSEE m’a montré en outre que si l’instit voulait acheter en 2022 ce qu’il achetait en 2002 il lui faudrait gagner 2928 €uros.
Autant dire que l’enseignant a vu son pouvoir d’achat réel baisser de près de 1.000 € en vingt ans.
De plus cet enseignant moyen est depuis passé de titulaire tranquille pour son avenir et sa retraite à contractuel qui se demande comment manger le mois prochain.
Je comprends que dans ces conditions, le titulaire d’un quelconque diplôme équivalent à « bac+5 » préfère être ingénieur voire accepte un CDI de livreur.
Le livreur n’étant finalement pas plus mal payé que l’instit et ne risquant pas un mauvais coup de parents vexés par une mauvaise note attribuée au chérubin.
« En même temps » comme dit Jupiter, mal payer les enseignants et éviter de froisser la vanité les parents me semble la meilleure façon de faire un peuple imbécile et aisé à manipuler.
Si en plus il est pauvre, on peut le faire taire en lui distribuant une aumône de temps à autre...

vendredi, 03 juin 2022

126ème Devoir de Lakevio du Goût

Heartbreak Hotel.jpg

Cette toile de Vettriano me fait irrésistiblement penser à Baudelaire.
Je verrais bien un devoir qui commence par :
« 
Je logeais dans la maison du principal, et j'avais obtenu, dès mon arrivée, la faveur d'une chambre particulière »

Et qui finirait par :
« Néanmoins un moment de réflexion me décida à attendre la fin de l'aventure. »
Ça, ce serait chouette…

lundi, 30 mai 2022

Devoir de Lakevio du Goût N°125.

faim.jpg

Miss Tic, que vous connaissez sûrement, est morte il y a quelques jours.
J’ai vu pour la première fois ses traces sur les murs de mon quartier il y a près de cinquante ans.
J’avais été frappé par ce pochoir.
Et vous ?
Ce qui serait gentil, ce serait que vous y mettiez les mots suivants :

Mathématique
Papillon
Coquelicot
Terre
Soleil
Branche
Équation
Somme
Produit
Égal

« Tes faims de moi sont difficiles »… 
Si je me rappelle bien, sous ce pochoir il y avait écrit « there’s no place for me » et j’avais pensé que si, justement, « there’s »…
Je ne sais pas avec précision quand j’ai vu « en vrai » la première fois ce pochoir mais ça m'est égal.
Ce devait être au début des années quatre-vingt.
Mais je sais exactement où je l’ai vue.
Je la croisais chaque matin en partant travailler.
Toujours à la même heure, le même évènement s'est produit avec une précision mathématique, mon regard la fixait quelques secondes avant que je ne traverse la rue.
Quand j’ai lu ce superbe aphorisme sur le mur, beau comme une équation humaine, il y avait encore sur le trottoir en face, deux énormes étais qui empêchaient l’immeuble du 16 de la rue de tomber dans le jardin de l’École des Impôts.
D’aussi loin que je me rappelle, ce recoin a toujours été désigné par une pancarte émaillée qui intimait « Défense de déposer des ordures ».
Ça incitait évidemment à y jeter ses sacs d’ordures et uriner dessus…
Ça obligeait le passant à voleter tel un papillon pour éviter le monticule puant.
Comme disait Pérec, qui habitait le coin, « je me souviens » qu’à la place du Gymnase Michel Lecomte, il y avait le jardin de l’École des Impôts dans le fond duquel la vigne vierge qui rougissait le mur en automne ravissait mon père accoudé à la fenêtre.
Il aimait, les soirs d’été, regarder les bals de promo qu’y donnaient certaines grandes écoles parisiennes.
Il est entré dans une colère noire quand on a abattu les arbres du jardin et rasé le jardin où croissaient quelques coquelicots.
Plus encore quand on lui a bouché « son » soleil en bâtissant là un gymnase d’une laideur crasse.
Le renfoncement existe toujours mais plus une branche ne passe au-dessus du mur en face.
C’est la somme de tous ces instants qui a surgi quand j’ai appris qu’on venait de mettre « Miss Tic » en terre

samedi, 28 mai 2022

Je n'ai Dieu que pour ses saints...

Ouais, bon... Je sais...

Gustave_Courbet_-_Le_Sommeil_(1866),_Paris,_Petit_Palais.jpg

Hier, j’ai accompagné Heure-Bleue au Petit Palais.
Ce Petit Palais est toujours aussi beau.
Au cours de la visite de l’exposition, je me suis fait avoir.
Persuadé que j’allais soulever une grande indignation, j’ai remarqué à haute voix devant le portrait d’une princesse roumaine « T’as remarqué comme ce pays-là est toujours plein de princesses et de princes. Bon après tu les retrouves dans le métro et ils te font les poches… »
Las, les deux dames respectables et très « BCBG », au lieu de me regarder d’un air scandalisé, ont pouffé et hoché la tête avec approbation.
Tout fout le camp !
La tentative de convaincre le monde de nous aimer les uns les autres comme lui-même nous a aimés a manifestement échoué piteusement…
La visite de ce musée que je connais depuis longtemps, m’a convaincu que la muséographie est la plaie des musées.
Là où on pouvait laisser libre cours à son envie de découvertes, on est prié de suivre un cours magistral plus ennuyeux que les cours d’Histoire dispensés dans les années soixante…
Après avoir suivi la lumière de mes jours tout au long de l’exposition qu’elle avait décidé de voir, je l’ai à mon tour traînée dans la salle où je ne peux résister au plaisir sain de vérifier sur la toile « Le sommeil » que Mr Courbet savait ce qu’était la peau et les nuances qu’elle peut montrer.
 
Après ça, nous sommes sortis à la recherche d’un café ce qui n’est pas si facile dans ce coin.
Puis, après avoir traversé l’avenue des Champs Élysées et marché un moment, la lumière de mes jours a vu un attroupement plein de drapeaux, de vieux et bizarrement, de jeunes gens.
J’ai demandé à la maréchaussée présente ce qui se passait.
« Cérémonie d’anciens combattants… » m’a-t-on répondu.
« Anciens combattants ? Des fachos ouais ! » m’a dit Heure-Bleue.
Elle ajouta « des jeunes comme ça, ils sont anciens combattants de quoi ? De Marine oui ! »
Après quoi, nous avons parlé un moment avec deux balayeurs de la ville de Paris.
Deux Français d’origine africaine qui eux aussi se demandaient à quelle cérémonie ils assistaient.
C’est là que nous avons appris incidemment que leurs conditions de travail et de salaire avaient été améliorées grandement par Jacques Chirac, maire de droite donc et censément « ennemi de la classe ouvrière ».
J’ai appris aussi que Mme Hidalgo, censément socialiste et « soutien de la classe ouvrière » si ce n’est carrément une « partageuse » œuvrait activement pour la dégradation de leurs conditions de travail et la diminution du nombre de balayeurs…
On n’est jamais trahi que par les siens.
Plus exactement par ceux qui disent faire partie des nôtres…