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lundi, 12 juillet 2021

Devoir de Lakevio du Goût No 89

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Vous n’habitez pas forcément Paris, pas plus que vous n’en êtes autochtones.
Néanmoins, je suis sûr que vous savez ce qu’est la Tour Eiffel.
Peut-être même l’avez-vous gravie.
À moins que l’ascenseur, plus dispendieux mais plus reposant, ne vous ait fait découvrir sans effort Paris vu d’en haut.
J’en déduis que vous avez probablement quelque souvenir à raconter ou quelque opinion à nous faire partager.
Votre imagination sera sûrement sollicitée par cette aquarelle de John Salminen…
À lundi, d’accord ?

J’étais en sixième.
Je m’étais perdu.
Il ne faisait pas chaud cet hiver-là, surtout en culotte courte…
Je cherchais l’avenue Rapp, plus précisément le square Rapp.
Ce jeudi-là, je marchais…
J’étais descendu au métro Invalides et m’étais d'abord dirigé vers la Seine.
J’avais rebroussé chemin et, après avoir de nouveau regardé le plan sur le panneau de la station, avais continué jusqu’à la rue de l’Université.
J’étais venu par là dans l’espoir secret de croiser celle que j’avais croisée la seule fois de ma vie où j’étais allé aux « sports d’hiver ».
Je n’avais aimé qu’elle.
Je n’avais du tout aimé les « sports d’hiver », il faisait bien trop froid à mon goût et il y avait de la neige partout mais elle avait été si gentille avec moi.
Elle m’avait réchauffé les mains au bord de la piste.
Je me rappelle qu’elle avait de petites mains très douces et un air vaguement inquiet de me voir frigorifié.
Je me rappelle aussi cet anorak « bleu layette » que ma mère avait acheté et que je n’aimais pas.
Je me demande si ma détestation du « bleu layette » ne date pas de ce moment.
J’avançais donc lentement, rue de l’Université, sûr de croiser l’avenue Rapp à un moment ou un autre.
Peut-être même la croiserais-je, elle.
Elle s’appelait Brigitte B. et évidemment elle était très belle…
Non, ce n’était Brigitte Bardot qui dans mon esprit était « une dame » donc sans intérêt pour un jeune homme comme moi, âgé d’une dizaine d’années.
J’étais si occupé par l’idée de la croiser que j’ai raté l’avenue Rapp ce jeudi-là.
J’ai marché tout au long de la rue de l’Université jusqu’à ce qu’elle prît fin.
Elle s’arrêtait en une sorte de cul de sac inquiétant, dominé par la montagne métallique de la Tour Eiffel.
Je suis repassé par là un ou deux jeudis du « deuxième trimestre ».
Je n’ai jamais croisé Brigitte B. sauf dans mes souvenirs.
Je trouve étrange et merveilleuse cette aptitude des lieux à faire surgir des êtres de la mémoire où on les pensait enfouis à jamais.
C’est le côté magique de cette ficelle dont je viens de trouver une extrémité par hasard, que je tire alors et qui fait défiler les ans au fur et à mesure des déambulations dans les méandres de ma mémoire…
J’ai reconnu la rue de l’Université dès que j’ai vu cette aquarelle de John Salminen.
Je me demande si lui aussi n’était pas lui aussi à la recherche d’un instant enfui...

dimanche, 11 juillet 2021

Terrain vague.

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Avant-hier, on est allé du côté de l’Opéra boire un café avec une amie avant d’aller chez Orange changer cet fichue « livebox » qui, comme son nom ne l’indique pas était morte…
Cette chienne de boîte s’est arrêtée au moment le plus palpitant des dernières minutes de la dernière saison d’une série diffusée sur une chaîne dont j’ai oublié le numéro.
Bref, le mec meurt après avoir estourbi un psy et tué un type qui avait dû tenter des privautés quelconques mais on ne saura jamais quoi.
Puis, hier on est allé traîner du côté de Montparnasse avec un ami.
Nous avons une vie sociale « overbooked » ces temps-ci…
Ce fut assez chouette et, pour la première fois depuis… Pfiouuu… Longtemps, j’ai vu un vrai « terrain vague » à Paris.
Bon, ce n’était pas un terrain vague comme quand j’étais gamin, où on pouvait facilement entrer et où on trouvait des trésors comme une vieille machine à coudre ou mieux, un vieux réveil qui n’attendait que moi pour être démonté afin de connaître enfin ce qui le faisait fonctionner…
D’après la lumière de mes jours, la seule de la famille dotée d’un peu de bon sens, « Ce terrain vague verra pousser autre chose que de l’herbe… Un immeuble par exemple… »
Elle a sûrement raison car ce jardin impromptu est entouré d’une clôture qui estropierait n’importe quel gosse tentant de l’escalader.
On y voit des tas de fleurs dont des roses trémières magnifiques et d’autres dont je n’avait vu des exemplaires qu’à la campagne où elle ont évidemment disparu depuis longtemps pour cause de pesticides…
Encore un pas dans ce sens stupide de l’efficacité et on se retrouvera à vivre -ou mourir…- l’inverse de l’histoire de Fernand Raynaud où ce cantonnier dit à propos des airelles qu’on ne les trouve pas à Paris.
Ces airelles, c’était bon pour les cantonniers.
Bientôt, on ne les trouvera plus qu’en ville, seuls endroits épargnés par une agriculture qui ne veut voir pousser que ce qui se vend.
Cette journée à la campagne du côté de la gare Montparnasse nous a beaucoup plu, un peu d’air de la campagne ne nuit pas…
Et dire qu’il était moins une qu’on aille vivre dans « les territoires de la ruralité » emportés par une panique irrationnelle qui nous fit un instant penser qu’on s’en tirerait mieux « en région ».
Oui, maintenant on ne dit plus « à la campagne », encore moins « en province » ni même dans le plus récent « en région ».
Non, on s’expatrie directement « dans les territoires de la ruralité », que d’aucuns parmi la gent politique appellent « le fief de… ».

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samedi, 10 juillet 2021

89ème devoir de Lakevio du Goût

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Vous n’habitez pas forcément Paris, pas plus que vous n’en êtes autochtones.
Néanmoins, je suis sûr que vous savez ce qu’est la Tour Eiffel.
Peut-être même l’avez-vous gravie.
À moins que l’ascenseur, plus dispendieux mais plus reposant, ne vous ait fait découvrir sans effort Paris vu d’en haut.
J’en déduis que vous avez probablement quelque souvenir à raconter ou quelque opinion à nous faire partager.
Votre imagination sera sûrement sollicitée par cette aquarelle de John Salminen…
À lundi, d’accord ?

vendredi, 09 juillet 2021

La ballade de la balade.

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Quelque chose me chiffonne mais, comme dit « notre » médecin quand on lui conte nos douleurs, je suis sûr que « c’est un truc de vieux ».
Il y a peu, nous étions partis en balade.
Aux Galeries Lafayette, si je me souviens bien.
Il faut que je vous avoue que nous avons parfois ce que ma mère appelait « des goûts de luxe ».
Ça n’excède jamais pour moi le miel d’acacia « bio » car j’ignorais que les abeilles pussent fabriquer du miel avec des acacias « pesticidés »  et pour la lumière de mes jours, du beurre « Bordier » car il n’y a pas de raison pour que seuls les Bretons puissent avoir des tartines ointes de beurre de qualité.
Eh bien, comme toujours nous nous sommes retrouvés ailleurs…
Après avoir hésité en arrivant rue du Quatre Septembre entre la rue Montorgueil pleine de pièges tout aussi dangereux pour nos cartes Visa et la Bourse, pleine de souvenirs mais moins risquée.
C’est du moins ce que je croyais.
Descendus du 29 à la Bourse, nous avons été surpris par une version surprenante du « Temple du capitalisme » selon certains discours de mai 68.
Il n’y a pas que l’image, lectrices chéries.
Il y avait pire : Le son !
Nous avons eu un instant l’impression d’être arrivés dans une « rave party » , une « teuf d’enfer » si vous préférez.
Nous avons alors remonté, presque rapidement, la rue Vivienne.
J’aime beaucoup cette rue, c’est là que j’ai croisé la lumière de mes jour pour la première fois.
Nous ignorions alors que nous souffririons ensemble de « ces trucs de vieux »…
Nous étions alors comme le lierre et l’épée, indissociables.
Nous sommes maintenant comme l’ivrogne et son vélo, l’un ne peut tenir debout sans l’autre…
Heure-Bleue m’a demandé de mettre mon masque pour parcourir le passage Vivienne jusqu’au « Bistrot Vivienne ».
Devant la librairie Jousseaume, nous nous sommes arrêtés, comme toujours.
J’ai failli acheter « Le fils du chiffonnier » de Kirk Douglas.
En le feuilletant, j’appris incidemment qu’il avait fréquenté le lit de Marlène Dietrich.
J’ai reposé le livre et nous avons continué, gardant à l’esprit, cette boule de glace avec crème chantilly et café…
Après quoi, je me suis arrêté acheter une bouteille de vin chez ce caviste que j’aime.
Il présente des « jeroboam » de grands crus qui me font saliver mais dont les prix me font pleurer…
Bref, les balades, c’est bien…

jeudi, 08 juillet 2021

Ces exquis mots sont inouïs !

Ce matin, dans le huis clos de la cuisine, tandis que je préparais les petits-déjeuners, j’ai soudain été tiré de ma rêverie par une phrase.
« On sait ce que veut dire l’aspiration à la poésie dans la poussière d’un lycée et d’être celui qui danse trop mal et parle trop bien pour que les filles le regardent »
En un instant j’ai été ramené dans ce couloir sombre.
Ce couloir qui mène de la cour d’honneur où trône la statue de Rollin à « la cour des grands ».
Ce couloir était sombre, le sol était de mosaïque et les murs carrelés de blanc à hauteur d’épaule.
Il y avait une plaque de tôle émaillée qui clamait « Défense courir ».
Elle était fixée au-dessus de la partie carrelée mais pas assez haut apparemment pour empêcher quelqu’un, « un grand » sans doute, d’y ajouter « Sous peine de poursuite ».
J’ai toujours à l’esprit ce « Poursuite » sans « s » qui à mes yeux montre un sens de l’humour assez aigu pour souligner que le côté sportif l’emporte sur le côté juridique…
Je me rappelle être alors dans l’âge où « Notre prison est un royaume » était dépassé et où Cesbron était devenu « ce vieux con de Cesbron ».
C’est dire la faculté d’évocation de certains mots !
La phrase citée est de Michel Zink, académicien de son état et est assez bien dite par Léa Salamé qui, pour une fois ne « se la pétait pas ».
J’aime beaucoup Mr Zink.
Il avoue sans honte qu’il fut un moment imbuvable et se demande encore comment la femme qui partage sa vie a pu le supporter.
« Fier d’être un fruit sec » dit-il, se référant à sa façon de se faire mousser dans les dîners avec ses recherches.
Intéressant quand il parle de langues lues sans les connaître.
Passionnant quand il parle des bienfaits d’être fainéant.
Sur ce dernier point, il venait de voir grossir les rangs de ses admirateurs d’un disciple parfaitement convaincu.
Mais c’était juste parce que j’avais bénéficié d’un long entraînement à la flemme.
« Dans la poussière d’un lycée » justement…
Ce matin, je ne vous ai donc rien dit car l’idée de vous raconter notre balade d’hier, pourtant délicieuse, a été supplantée par cette phrase étonnamment rajeunissante entendue ce matin.