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dimanche, 14 juin 2015

Les mères veillent, les pères versent…

Aujourd’hui les pères versent et les mères veillent…
On est allé assister au spectacle de danse de l’école de Merveille.
Pourtant, le début ne présageait pas du tout ce dénouement heureux.
Ces enfants sont quand même petits et assez empruntés en public.
La directrice avait pris à cœur son rôle de directrice en commençant par vouloir faire taire une armée de parents accompagnée de hordes d’enfants trop petits pour aller à l’école.
J’ai été rassuré dès le début du spectacle.
L’Ours, une fois n’est pas coutume, a fait preuve de pragmatisme.
Oui lectrices chéries, mon fils est grand maintenant.
Il fait même preuve de discernement.
 Il m’en a administré la preuve.
Oui, il m’a glissé à l’oreille « T’as vu, papa ? C’est comme Arte sauf qu’on peut pas zapper. »
Et c’était très vrai…
On s’est dit « c’est pas possible, on va pas tenir l’après-midi ! »
L’Ours n’est pas branché musique, ni ballet et les émules Kurt Weill l’emm…nuient profondément
Puis, JJF est arrivée, grâce à un moto taxi, et a pu assister au spectacle de l’école de sa fille.
Ma fille, oui, c’est ma fille, est épuisée, réellement et ça me fait mal au cœur.
Ne riez pas, lectrices chéries, j’ai un cœur et il est fendu quand je vois ma fille réduite à cet état de fatigue.
Bon, le spectacle a quand même commencé.
Malgré P’Tite Sœur appelant « Papyyyy ! » dans la salle au point de couvrir la sono.
Le pire fut qu’elle a refusé d’appeler « Manou » ou « Mamie ».
Ouais, c’est comme ça dans la famille, les filles préfèrent les garçons et le font savoir…
La musique a quand même réussi à rythmer les mouvements des enfants.
Puis, les enfants se sont « dégelés », leurs mouvements sont devenus plus souples, plus déliés.
Merveille a commencé à s’engueuler avec son partenaire qui, apparemment ne faisait pas son boulot avec le soin requis.
Tout a fini par s’arranger jusqu’à la fin du spectacle.
J’ai été un peu chiffonné par les parents qui sont repartis avant la fin, leur gosse ayant fini sa participation.
Bon, on peut oublier la légende de la timidité de Merveille.
Je le sais, j’ai demandé à la maîtresse.
Elle fut d’abord ravie que je la remercie pour avoir fait oublier un instant ce petit quelque chose de la souplesse de Merveille qui faisait immanquablement penser à un verre de lampe…
Puis que j’aie, comme Heure-Bleue et Manou, remarqué qu’au moins deux des élèves de sa classe avaient ce don : Ils « savaient bouger », ce qui n’est pas si courant.
Merveille sur scène m’a rappelé que Maïa Plissetskaïa est morte il y a peu à quatre-vingt-dix ans.
Regardez la, elle avait alors cinquante ans :

Elle avait manifestement les pieds en meilleur état que ceux d’Heure-Bleue.
Et je ne parle pas de ses genoux en bien meilleur état que les miens. 
Vous voyez, lectrices chéries, j’aime Merveille.
J’adore Merveille.
J’ai même pour elle une indulgence coupable, que dis-je, quasiment de l’aveuglement..
Elle a évidemment très bien dansé cet après-midi.
Elle a été la meilleure.
Bon, tous les parents ont dit ça, cet après-midi.
Moi aussi.
Mais moi c'est vrai.
Mais honnêtement, maintenant que je suis rentré à la maison, je ne la sens pas encore prête à remplacer feue Maïa, étoile du Bolchoï...

samedi, 13 juin 2015

Le vaillant petit ailleurs…

Il y a longtemps, j’avais assisté à ce qui aurait pu tourner à un lynchage au Marché Malik.
C’est un de ces nombreux petits marchés qu’on trouve aux Puces de Saint Ouen.
A l’époque, on n’y trouvait pas que des antiquités plus ou moins antiques ni toutes ces boutiques de fripe chargées d’écouler les surplus du « Sentier Chinois » d’Aubervilliers.
Le Marché Malik, comme celui qui s’étalait le long de la rue Jules Vallès, était une espèce de large couloir plein de stands en enfilade et de boutiques plutôt dédiées à la vente de surplus de l’armée américaine, uniformes compris, d’appareils hors service et de pièces détachées récupérées sur des engins aussi bizarres que les  « magnétophones à fil ».
Surtout des tas de pièces détachées super intéressantes pour moi déjà à l’affût de la prochaine expérience.
C’était plein d’instruments en ruine, retirés de tableaux de bord d’avion, de vieux talkies-walkies, des tubes cathodiques à faisceau vert, des tubes cathodiques de radar, de petits moteurs électriques et même de galvanomètres dont certains avaient encore l'aiguille droite, tout ça...
Bref, des merveilles pour gamin curieux et j’y trouvais pour quelques francs des tas de ces bidouilles qui ont forgé ma vocation de bidouilleur d’ingénieur et redonné un coup de fraîcheur à un « langage Porte de Clignancourt » quelque peu rouillé par des années de pension et le début de ma période lycéenne.
Couche de rouille soigneusement épaissie par la surveillance féroce de ma mère…
Mais bon, je n’ai jamais eu « l’accent Porte de Clignancourt ».
Non que je ne sache le prendre mais je n’osais pas, ça m’aurait trop chauffé les fesses…
Vous vous demandez bien, lectrices chéries, ce qui vous vaut ce rappel des mœurs du coin dit « des interdits de séjour », ce qu’était Saint Ouen jusqu’à la fin des années 60.
C’est une polémique récente qui m’a rappelé cet incident.
Un samedi matin, donc, je m’apprêtais à rentrer dans le Marché Malik.
La première boutique, celle de droite à l'entrée, au coin de la rue Fabre et de l’allée du marché, était ce jour là assiégée par un attroupement d’une dizaine de gueulards dans lequel se distinguaient quelques képis.
Des cris s’échappaient de temps à autre et il semblait fortement question d’écarteler un malfrat quelconque.
Je me suis approché et, servi par une taille relativement grande pour l’époque et une oreille jeune et fine, j’ai assisté à un spectacle comique gratuit.
Quand je pense qu’aujourd’hui j’ai l’impression d’errer, quasiment nain, parmi une foule de basketteurs…
Un type donc, s’était fait serrer, la main dans la caisse d’un stand que le proprio avait imprudemment abandonné pour aller chercher un caoua.
Les tenanciers voisins s’étaient précipités, prêts à étriper l’indélicat tire-laine qui ne dût sa survie qu’à l’arrivée d’hirondelles alertées par les cris des partisans de l’accrochage immédiat par le cou à un store ou un réverbère.
Un des flics demanda quelques explications au lascar qui se lança dans un roman vaseux, quelque chose comme « J’ai vu la caisse abandonnée, j’ai aussitôt pensé que quelqu’un risquait de la voler, alors j’ai posé la main dessus pour lui garder sa caisse, m’sieur l’agent .»
En voyant le regard plein de doute du pandore, le type crut bon d’ajouter, ce qui faillit lui coûter la vie « C’est vrai, m’sieur l’agent, j’vous jure qu’c’est vrai… »
Du coup, l’explication avancée n’ayant pas convaincu, les chaussettes à clous l’ont embarqué…
Ça m’est revenu quand j’ai entendu l’excuse du Premier Ministre à propos d’un hold-up sur mes bons sous de contribuable pour aller voir un match de foot à huit cents bornes de chez lui.
Il m’est venu à l'esprit que ce tireur du Marché Malik aurait dû plaider, comme notre Premier Ministre « une erreur de communication »...
Vous ne croyez pas, lectrices chéries ?

vendredi, 12 juin 2015

Je suis plutôt preste, à terre…

Comme chaque année, lectrices chéries, il y a des choses qui reviennent avec les jours, les mois, les saisons.
Non, il n’y a pas que les impôts, n’allez pas croire des choses comme ça.
Depuis plusieurs jours ça me frappe le nez.
Délicatement.
Les tilleuls…
Oui, dans mon coin les tilleuls parfument ma rue.
Oh ! Pas partout, non ! Seulement en passant devant certaines maisons ou à de rares endroits de la « coulée verte ».
Avant-hier déjà, en suivant Merveille, ça m’avait chatouillé le nez.
Il n’y a pas, dans la « coulée verte », de tilleuls, ça vit très vieux mais ça pousse trop lentement.
Il n’y a de tilleuls que dans les jardins de certaines vieilles maisons que l’on peine à deviner derrière les bouquets d’arbres et les buissons de ronces et de chèvrefeuille.
Aussi, pendant plusieurs semaines il n’y eut que peu d’odeurs, assez délicates pour passer pour un parfum, à me caresser le nez.
Avant ces semaines, il y avait les acacias puis, leurs fleurs fanées, plus rien jusqu’à ces temps ci.
Et bientôt, ce sera le chèvrefeuille.
Pas l’essence à la senteur exagérée des parfums industriels.
Non, le vrai, celui des buissons qui habillent en certains endroit les côtés du chemin qui longe la  « coulée verte ».
Pour sentir quelque chose d’agréable, une fois l’eau de toilette évanouie, il n’y avait guère, il y a peu, que les rares seringats de l’avenue entre deux vagues de scooters.
Enfin, pour quelques temps, les tilleuls sont revenus me remplir la cervelle de souvenirs de dortoir, de pension
Du coin de ciel que je voyais de mon lit
Chaque année, si je prends un an de plus, il y a au moins ce moment, lectrices chéries, où j’ai six ans au plus.
Ça ne paraît pas, mais c’est toujours bon à prendre.
Et ce matin, les pluies de la nuit font que mon coin embaume jusque dans le séjour.
Les senteurs de fleurs et le parfum des tilleuls de la maison un peu plus loin me transportent en un endroit où je ne me suis pas amusé tous les jours mais où je ne me rappelle pas avoir eu un instant mal au genou droit…
Je crois bien qu’il y aura cinquante ans ce mois ci que je me suis esquinté ce fichu genou.
Mais il fait si beau et ça sent si bon…

jeudi, 11 juin 2015

Plus près de toi mon vieux…

Hier nous avons hébergé Merveille.
Oui, lectrices chéries, HE-BER-GE !
Merveille voulait retrouver un instant son statut de fille unique.
Tout se passa à peu près bien, le restaurant chinois à côté, le petit carnet et les trois stylos feutre.
Je passerai sur cette hâte étrange qui pousse les magasins à vendre la rentrée prochaine alors que les gamins sont encore à l’école.
Le retour chez nous avec Merveille fut assez drôle. Elle avait commencé par s’arrêter et s’asseoir pour dessiner sur son carnet les fleurs de genêts et une plaque du wagon. Puis fut intéressée et vaguement inquiétée par le passage régulier d’un type courant lentement, faisant plusieurs allers-retours.
Rien de spécial si ce n’est qu’il était vêtu d’un grand T-shirt et d’un short si lâche et si petit qu’Heure-Bleue et moi avons immédiatement pensé au « Gros dégueulasse » de Reiser.

gros_dégueulasse.jpg

Merveille a fini par rire avec nous quand les maigres attributs de « pervers-pépère » se sont échappés de son minuscule caleçon.
C’est de joyeuse humeur que nous sommes arrivés chez nous et avons entamé quelques parties de Boggle.
D’un coup, Merveille a lâché, « J’en ai marre de ma sœur ! », mourant de chagrin.
Oui, Merveille meurt très bien de chagrin. Si la voie vers la grande carrière scientifique qu’elle vise se ferme, une grande carrière de comédienne s’ouvre devant elle…
- Qu’est-ce qu’il y a Merveille ? Elle te saoule ?
- Elle est toujours après moi ! Je ne suis jamais tranquille !
J’ai pu dérider Merveille en lui rappelant quelques détails.
- Tu sais, Merveille, que le code pénal interdit certaines choses, notamment à propos des petites sœurs.
- Oui papy…
- Notamment qu’on n’a pas le droit de tuer sa petite sœur.
- D’accord papy.
- Même si on a envie…
- Pfff…
- Non, on ne doit pas.
C’est allé bien mieux et je l’ai raccompagnée chez elle après le dîner.
Et ça m’a poussé à admettre que ma sœur cadette et moi avons sans aucun doute pourri la vie de ma grande sœur.
Je me demande même comment elle a pu croiser ce jeune étudiant anglais en 1961 et sortir avec lui jusqu’à son départ pour la Birmanie. Sans compter d’autres, plus tôt dans sa vie, sans que ça de débouche sur des histoires à la maison.
Je me rappelle, encore plus tôt, sa correspondante anglaise, Faith. Ma grande sœur nous traîna avec elle au jardin du Luxembourg.
Je me rappelle bien les taloches qu’elle distribua car nous nous entêtions à appeler sa correspondante « fesse ».
Une fille brune et pâle aux yeux bleus clairs. Je me rappelle bien sa jupe bleue et son gilet bordeaux.
Vous ne trouvez pas, lectrices chéries, que c’est une étrange mécanique que celle du souvenir ?

mercredi, 10 juin 2015

La bêta dîne…

On ne sait plus ce qu’on disait en revenant à la maison.
Sûrement des commentaires sur ceux qu’on croisait sur notre chemin.
Je me rappelle qu’Heure-Bleue s’est arrêtée devant les grilles qui protègent le jardin et l’entrée d’une maison.
Elle était attirée par toutes les roses qui éclairaient le jardin.
J’en aurais volontiers cueilli une dans le bouquet mais elles ne dépassaient qu’à peine sur la rue.
Et puis, en regardant, nous avons vu qu’il y avait quelqu’un dans la maison et que le jardin ressemblait à un de ces jardins qui semblent un peu à l’abandon parce que les gens sont trop vieux pour s’en occuper correctement.
Alors on a laissé ses roses à la vieille dame…
On a recommencé à papoter en regardant le monde autour de nous.
Puis, Heure-Bleue est passée derrière moi car le trottoir est devenu trop étroit pour que nous marchions côté à côte.
L’écart s’est accentué car j’ai le pas plus long que la lumière de mes jours.
J’ai eu l’attention soudain attirée par une conversation derrière moi.
Une femme avançait rapidement, me rattrapant.
A l’entendre vociférer à propos d’un repas, dans son portable, avec un accent que ma mère aurait fait avaler à mes sœurs à coups de pieds dans le ventre, j’ai pensé « mon dieu qu’elle est vulgaire ».
En réalité j’ai pensé « P… ! Mais qu’est-ce qu’elle est vulgaire ! » car je soigne moins mon langage quand je pense que quand je parle.
Quand elle m’est passée devant, j’ai été d’accord avec moi.
Mon ouïe ne m’avait pas trompé.
Ma vue non plus qui a abondé dans le sens de mon ouïe en voyant passer une de ces fausses blondes à la peau trop mate dont même les mèches sont gueulardes.
Quand Heure-Bleue est arrivée à ma hauteur, je lui ai seulement dit « tu as vu ? »
Nous l’avons un instant regardée avancer devant nous.
Heure-Bleue l’avait vue avant moi.
Elle a lâché un laconique  « oui, elle a même le cul vulgaire... »
On est souvent du même avis en matière de vulgarité.
Et il faut avouer que c’est bien pratique.
Oui, ça nous évite de nous faire mutuellement honte en société…