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vendredi, 01 mai 2015

Le poids des mots…

Il faut que j’explique à Berthoise pourquoi Merveille dit « un temps de mince ».
Comme vous avez pu le deviner lectrices chéries, et comme nous-mêmes avons pu nous en rendre compte, Merveille est plutôt futée et sait assez bien naviguer entre les exigences d’une éducation plutôt stricte et les nécessités de la verdeur d’expression de la vraie vie.
Un parler impeccable est exigé chez ses parents et chez nous.
Nous savons qu’il en va probablement autrement à l’école…
Nous-mêmes, et l’Ours plus encore, prenons des libertés avec les règles dont on exige de Merveille qu’elle les respecte.
Sauf que… Comme dit Heure-Bleue. Sauf que…
Eh bien sauf qu’il nous est arrivé il y a quelque temps de dire « merde ».
Merveille, pas folle en a profité pour tenter l’expression, ce qui a évidemment donné lieu à une engueulade et une modification du langage qui a conduit tout le monde  à dire « mais quel temps de mince ! » plutôt que le bien plus clair « mais quel temps de merde ! »
Il y eut par la suite, tout aussi évidemment, une de ces disputes courantes entre un père et sa fille.
La dissension fut telle que Merveille, exaspérée  jeta à son père « Mais quel papa de mince ! »
Le résultat fut assez fumant mais finalement, Merveille comprit que, même édulcoré, un terme glissant pour qualifier son père était, comme la conduite de Clinton envers miss Levinsky, « inapproprié ».
Et voilà pourquoi Berthoise, Merveille dit plutôt « mais quel temps de mince ! » que « mais quel temps de merde ! »
Elle dispose comme ça de quelques mots de substitution qui lui permettront sans aucun doute de tenir un langage de carabin dans un salon sans faire lever un sourcil à une nonne…
Ainsi, un jour de toilette avec mamie elle aborda le problème de ce que sa mère appelle pour elle « la quiquinette ».
Nous apprîmes alors que selon sa fille, l’Ours ne disait pas toujours « quiquinette » mais que « papa il ne dit pas toujours « la quiquinette », des fois il dit « la femme du chat » mamie ! »…
Mamie qui l’appela et râla alors après son fils préféré et unique…
Genre « c’est pas comme ça qu’on t’a élevé ! » 
 
Capisci Berthoise ?

jeudi, 30 avril 2015

Ça fait un peu mal vers l'aine...

« Ô doux bruit de la pluie
   Par terre et sur les toits »
Honnêtement, en vrai lectrices chéries, si ces deux vers me sont venus à l’esprit en entendant la pluie quand j’ai ouvert un œil, je n’ai pas poursuivi par
« Pour un cœur qui s’ennuie » mais par « Quel temps de mince ! » car je cause parfois comme Merveille quand il ne fait pas beau.
Ce n’est d’ailleurs  pas de cela que je voulais vous parler mais du plat que j’ai concocté à la demande de la lumière de mes jours.
Rendu hélas « inflammatoire » par une erreur de lecture de mes notes sur le petit carnet qui m’accompagne partout.
Vous vous rappelez sans doute que nous sommes allés déjeuner hier chez l’Ours.
Nous avons été accueillis par l’Ours et surtout une P’tite Sœur affamée qu’il a fallu sustenter sur le champ.
Puis, l’Ours nous a servi un plat de sa composition, un qui montre que son goût pour les « Langues O » ne s’est pas démenti au cours de années.
Un truc délicieux à base de riz et de poulet plus des tas d’autres petites choses qui ont fait de ce plat exotique un régal.
Pour la première fois depuis longtemps nous avons pris un vrai repas le midi.
En réalité, deux repas car c’était si bon que nous avons recommencé.
Puis JJF est arrivée et P’tite Sœur à pris elle aussi un second déjeuner et a apprécié le plat concocté par son père en pillant l’assiette de sa mère.
Heure-Bleue a dit :
- C’est bon, hein ? Tu m’en referas, Minou ?
Minou a acquiescé et a demandé à l’Ours comment on fait.
Minou a noté dans son carnet.
Quand nous sommes repartis, détour habituel par le Monop’ et là, dans les allées du magasin, la lumière de mes jours a demandé d’une voix inhabituellement douce :
- Tu me le referas, ce soir ?
Vous savez comme je suis, lectrices chéries, je n’ai pas pensé immédiatement au poulet…
Raisonnable comme je suis j’ai commencé par répondre :
- Bien sûr, ma Mine…
- Il y a tout ici pour le faire…
J’ai donc compris que dès ce soir je devais refaire le plat qui nous avait tant plu.
Je m’y suis mis en arrivant à la maison. Je ne sais pas comment on s’y prend mais quelle que soit l’heure à laquelle nous partons et le temps censé être passé dehors nous ne rentrons qu’après dix-neuf heures…
Tout s’est déroulé à merveille.
Enfin presque.
C’était aussi bon quoique très différent. C’est le charme de la cuisine pas industrielle.
A un petit détail près. Ça « emportait la gueule ».
Nous nous sommes retrouvés « bouche ouverte tête nue » mais pas « la nuque baignant dans le frais cresson bleu ».
C’est en relisant mes notes que je constaté que dans une des préparations, après « hacher la botte de coriandre, ajouter dix cuillers à soupe de sauce de soja et une cuiller à café de poivre noir » j’avais continué avec la cuiller à soupe.
Eh bien, lectrices chéries, « une cuiller à soupe de poivre noir », c’est pas pareil du tout qu’ « une cuiller à café de poivre noir ».
Mais c’était bon quand même…

mercredi, 29 avril 2015

La Muse erra tôt…

J’ai failli vous parler d’un truc pas drôle, le deuil au mois de mai, celui qui arrive à causer des douleurs genre chéloïde, inguérissables mais j’ai décidé de parler d’autre chose parce que finalement ça n’intéresse que les concernés.
Ceux qui chantonnent dans leur salle de bains un poème de Théophile Gautier sur la musique de Berlioz mais n’ont malheureusement pas la voix de Régine Crespin qui elle aussi est morte.
Mais si, vous savez bien, lectrices chéries :

      « Ma belle amie est morte :
        Je pleurerai toujours ;
        Sous la tombe elle emporte
        Mon âme et mes amours.
        Dans le ciel, sans m’attendre,
        Elle s’en retourna ;
        L’ange qui l’emmena
        Ne voulut pas me prendre. »

En réalité, quand ce mauvais vent m’est passé par la tête, j’étais parti pour raconter à Muse cette histoire de violon.
Alors, Muse, voila.
Ma mère, avait croisé le grand squelette qu’était mon père, sur le coup de leurs vingt-cinq ou vingt-six ans, en 1946 ou 1947, le moment avait gardé un certain flou car ma mère, assez faux-cul en matière du vrai, n’a avoué que par inadvertance à Heure-Bleue qu’elle avait quand même salement pris des acomptes avec ce grand squelette avant de passer devant monsieur le maire.
Seulement voilà, ma mère était veuve d’un type qu’elle avait épousé en 1941 qui s’était fait descendre avec un de mes oncles par les Allemands en 1942.
Ce monsieur premier mari était, selon ma mère et quelques photos conservées par ma grande sœur, l’opposé de mon père et se fit tuer laissant ma mère avec un bébé sur les bras.
Mon père était maigre comme un chat errant, brun comme un pruneau, drôle même si ce n’était pas tous les jours, poète à ses heures, peintre à d’autres heures et détaché des trucs tous bêtes comme les fins de mois, le sérieux et autres machins qui vous gâchent la vie d’un pinson.
Le père de ma grande sœur lui, était un homme plus en chair, plus âgé que ma mère de quelques années, blond, pâle de peau, sérieux, s’occupant de bois précieux et amateur de musique au point de savoir se servir, dixit ma mère, d’un violon dont il jouait paraît-il un peu moins bien que Jascha Heifetz mais tout juste.
Ce monsieur était issu d’une famille néerlandaise assez cossue et ma grande sœur avait plein de tantes chez qui elle passa finalement pas mal de temps.
Mr le père de Grande Sœur étant parti ad patres, il laissa à ma mère un bébé, des souvenirs et un violon. Ce violon survécut jusqu’à mes dix-huit ans et mourut malencontreusement broyé par un meuble lors d’un déménagement qui nous ramena à Paris. Il mourut broyé parce qu’après avoir perdu ses cordes les unes après les autres, l’archet et la colophane, je ne sais qui de la fratrie crut bon d’en utiliser l’étui comme valise à je ne sais quoi.
Mais un truc de filles. Dans cette histoire ce n’est pas moi le coupable.
Nous avons tous essayé de sortir de ce violon un son qui ne ressemblât pas à un grincement de porte ou un miaulement de chat martyrisé.
Sœur Cadette abandonna la première et se fit offrir une guitare dont elle joua aussi mal que Florence Foster-Jenkins de sa voix. Exit la guitare. J’ai tenté la flûte au lycée mais l’instrument étant hors des moyens des parents et le pipeau assez gonflant, ça s’arrêta rapidement.
Ma petite sœur, elle, après des exemples aussi calamiteux s’abstint de toute tentative de faire de la musique. Je me suis quant à moi cantonné aux concerts, à la réalisation de matériel audio plutôt fidèles et la constitution d’une discothèque aujourd’hui éparpillée à quelques pièces près.
Les miettes de ce violon traînent avec celles notre enfance seulement dans la mémoire de ma grande sœur et la mienne…

mardi, 28 avril 2015

Certains pots tachent, peu élèvent…

A lire vos commentaires, lectrices chéries, je me demande pourquoi le mot « patience » est un mot féminin...
Reprenons…
Ce 14 juillet nous fûmes prêts voire bousculés exceptionnellement tôt tant mon père était pressé de nous emmener.
Le pourquoi de la hâte est moins reluisant. C’est là que j’ai appris le mot « embuscade »…
Mon père avait tenté de l’utiliser à titre d’excuse mais ça n’a pas marché.
La veille au soir, ma mère ronchonnait et s’inquiétait. Mon père n’était pas rentré.
Le dîner expédié, ma mère est partie faire la vaisselle. On a entendu frapper à la porte.
Je me suis approché quand ma mère a ouvert la porte. Mon père était sur le pas de la porte, il avait l’air, comment dire… Instable.
Ma mère a soupiré et dit :
- Eh ben… Te voilà beau, mon cochon…
- Euh… Ça va pas…
- Je vois ça ! Allez, va te coucher, tu me fais honte…
C’est là que le drame s’est noué et a laissé un souvenir plutôt vif.
J’ai suivi mon père jusqu’à la chambre pendant que ma mère à repris la vaisselle en marmonnant.
Mon père s’est abattu tout habillé à plat ventre sur le lit. Tout habillé. Encore avec son imperméable. Puis, alors que je le regardais, inquiet, il a vomi une immense flaque rosâtre et malodorante sur le lino. J’ai crié « Maman ! Maman ! Papa est malade ! Il va mourir ! »
Ma mère est accourue, a constaté le désastre et a renoncé à hurler car rien ne réveillerait mon père. Elle a ramassé et lavé par terre. Elle a seulement retiré, et avec bien du mal, l’imperméable et la veste de mon père. Elle a dormi avec ma grande sœur qui avait un lit plus grand.
On a été réveillé de bonne heure quand mon père est allé à mi-étage. Il avait essayé de ne pas faire de bruit.
Je crois que même s’il avait volé, ma mère l’aurait chopé au vol…
Aujourd’hui encore, je me demande si ma mère n’avait pas surveillé le sommeil paternel toute la nuit. Ma mère a bondi et la sérénade a commencé. Elle aurait pu être brève si mon père, qui ne buvait pas, avait su garder les yeux baissés et au moins avoir l’air un peu contrit. Même nous, les petits et ma grande sœur on l’a trouvé bête sur ce coup là.
Il sourit à ma mère et, alors qu’elle savait bien ce qu’elle avait ramassé la veille au soir, il crut bon de dire :
- J’ai pourtant presque rien bu, ma poule.
- Un « presque rien » de combien ?
A-t-elle dit d’un ton inquiétant.
- Eh bien, avec des collègues, comme c’était fête on est allé boire un coup après le boulot.
- Un coup… Tu me prends pour une andouille ? Tu écris « un » comment ?
Il eut pile poil le mot explosif.
Celui qui montrait à l’évidence qu’il prenait ma mère pour une imbécile.
C’est cette phrase là qui est restée gravée chez moi :
- Tu sais , ma poule, je crois que je ne supporte pas le Clacquesin, c’est ça qui m’a rendu malade…  Un seul Clacquesin… Je n’en boirai plus ma poule.
Le Clacquesin, comme excuse avait eu un effet mortel.
Je ne savais pas ce qu’était le Clacquesin mais ça a donné un élan insoupçonné à mon père pour se préparer et à ma mère pour son entrée en scène.
Ce 14 juillet là, on est parti très vite prendre le métro. J’ai vu des chameaux pour la première fois de ma vie. Des vrais, avec des spahis dessus. On a regardé tout le défilé, on est même arrivé tard pour le déjeuner.
Mon père n’a pas eu faim et il est reparti se promener tout l’après-midi.
Il lui est arrivé en de très rares occasions d’avoir « des semelles à bascule » mais je n’ai jamais vu mon père boire du Clacquesin.
En revanche, pendant des années, au moins jusqu’à mon entrée au lycée, j’ai entendu ma mère parler du « 14 juillet au Clacquesin »…
Je vous dirai plus tard cette histoire de violon.

lundi, 27 avril 2015

Singer, priez pour nous…

Pour continuer un instant sur cette histoire de MAC comme dit Lakevio, il y eut par la suite un autre incident. Assez salissant et générateur de hurlements.
Que je vous dise, lectrice chéries, ma mère qui avait déjà un organe peu apte à interpréter Violetta, la phtisique de la Traviata,  pouvait sous l’effet de la colère dépasser le niveau sonore de Maria Callas à la fin du troisième acte de Tosca.
La seule que j’aie jamais entendu hurler plus fort à ce jour reste Lara Fabian. C’est dire…
Mon père donc, avait acheté cette superbe Singer à ma mère parce qu’à ce moment il travaillait chez Singer.
C’était un travail extrêmement sportif qui consistait à vendre ces machines à des gens qui, s’ils en avaient besoin car l’époque était à la couture et au retournement de manteaux et de robes doublées, n’avaient pas forcément les moyens de les acquérir.
D’autant plus sportif, le job, que les ascenseurs étaient rares, les concierges peu regardantes, les étages nombreux et souvent élevés.
Un de ces mois un peu fastes, les plus rares, il avait fait un bon chiffre et obtenu, non une prime, faut pas rigoler, mais une remise importante sur la machine qu’avec un culot monstre Singer avait osé dire « portative ».
D’expérience, je peux vous affirmer qu’elle était tout juste « transportable ».
Bon, elle fut achetée par mon père en 1954 et elle fonctionne encore chez ma sœur cadette ce qui montre que l’époque n’était pas à « l’obsolescence programmée ».
Je sais que c’était en 1954 car cette année là mes parents avaient claqué des sous aux « Galeries Barbès 55 Boulevard Barbès à Paris ! » en achetant des meubles « style rustique » de chêne foncé dont un neveu à encore « la grande armoire », l’Ours le coffre et nous la bonnetière. En plus la date de livraison est encore écrite au dos de notre bonnetière avec un de ces crayons bleus ineffaçables.
Brève période d’aisance relative que mes parents mirent donc à profit pour s’équiper.
Que je vous dise, lectrices chéries, auparavant, le mobilier, hormis un buffet blanc, une table et six chaises, se composait de deux placards et d’un semainier.
J’y perdis donc des possibilités d’exploration.
J’étais trop petit pour atteindre les tiroirs du haut et les étagères du haut des placards mais quand les meubles sont arrivés, les vrais, les rustiques, il y avait des clefs aux portes, clefs que ma mère mettait dans la niche de la bonnetière…
Il ne restait que le coffre, mis devant la fenêtre de « la grande pièce » et plein de bouquins et d’un violon.
C’est vers cette époque que j’ai essayé de jouer du violon. Violon du père de ma grande sœur que ma mère planquait tant bien que mal.
C’est très dur de sortir un son agréable d’un violon, lectrices chéries, je vous l’assure mais ce n’est pas de ça que je voulais vous parler mais d’un quatorze juillet de cette année.
Peu après l’entrée de cette machine Singer à la maison, une mésaventure est arrivée que mon père mit longtemps à faire oublier. De fait ce fut impossible, ma mère était une femme et , comme toutes les femmes, si elle perdait la tête parfois, elle avait une mémoire infaillible et ineffaçable pour ce qui l’avait froissée.
Je sais que c’était arrivé un 13 juillet parce que mon père nous a emmenés, ma sœur cadette et moi, voir le défilé le lendemain matin.
Cette note risque d’être un peu longue, lectrices chéries aussi je vous raconterai la suite demain.