jeudi, 07 mai 2015
C’est le printemps, alors tout Verdi, c’est bien…
Le printemps semble pousser une de mes lectrices chéries aux soupirs.
Elle alla, probablement après une quinte de toux, jusqu’à écrire « à y repenser, j’étais la Traviata. ».
J’ai alors imprudemment proposé de lui raconter dans une note l’après-midi où mon quartier recula jusqu’au milieu du XIXème siècle.
Oui lectrices chéries, je suis comme ça, j’aime bien raconter de belles histoires aux filles que je ne connais pas.
Évidemment, j’ai appris il y a longtemps qu’une phrase bien faite, c’est un sujet, un verbe et un compliment.
Au cours de l’année 1983, je suis revenu à la maison en passant voir ma libraire préférée à sa boutique.
La voiture (mal) garée, je suis sorti et me suis retrouvé dans le Paris du milieu du XIXème siècle.
Des hommes en redingote, « huit reflets » haut de forme, botte à haute tige et canne à la main arpentaient la rue.
A leur bras, des femmes en crinoline, portant capeline ou chapeau à voilette, les épaules couvertes d’un châle de tissu chatoyant et marchaient à petits pas sur des chaussures montantes assez inconfortables à mon sens.
Je suis passé par la rue de Braque pour éviter quelques carrosses et surtout le crottin.
Là, j’ai été assez surpris parce que la rue, pavée et sablonneuse, je le sais parce que j’y avais vécu quelque temps auparavant et que j’y passais souvent avait été rhabillée de faux pavés exactement comme les vrais qui étaient en dessous…
La rue n’avait pas changé puisque qu’elle est courte, comportait et comporte encore, quelques immeubles anciens et trois hôtels particuliers qui n’avaient pas bougé depuis le XVIIème siècle.
Sauf le tout à l’égout et l’électricité.
La banque qui se trouvait face à l’entrée de la rue dans un hôtel particulier, occupé en partie par le Trésor Public, avait été habilement « déguisée » avec quelques plantes qui en cachaient l’enseigne comme aux autres boutiques de la rue du Temple.
C’est là que j’ai vu Franco Zefirelli soi-même et que j’ai compris pourquoi les films coûtaient si cher.
Au lieu d’aller faire les courses ou de garer ma voiture correctement comme la sagesse le commandait, j’ai regardé un long moment le tournage de « La Traviata ».
Je dois avouer que si j’ai parfois été stupéfait par le côté foutraque du travail, j’ai été ébloui par le travail des comédiens et Violetta m’a époustouflé.
C’était la première fois que j’entendais Teresa Stratas chanter l’air qui clôt le premier acte.
Bref, j’ai fait les courses tard et pris « une prune » pour stationnement interdit mais ce fut un chouette après-midi.
Ma libraire-lumière-de-mes-jours à servi des clientes qui sortaient tout droit d’un tableau de Renoir ou Caillebotte, la mode ayant semble-t-il peu changé depuis « La dame aux camélias »…
11:23 | Commentaires (6)
mercredi, 06 mai 2015
Tour de vice…
Bon, lectrices chéries, certaines d’entre vous ont manifestement des trous dans l’éducation à la vraie vie.
Ou, pour paraphraser Madame Vallaud-Belkacem, certaines d’entre vous « ne sont pas en capacité de vie sécure par manque d’apprentissage à l’autonomie en milieu extra-scolaire »
Vous, Berthoise, Liv Fourmi, Brigitte, Emilia-Celina !
Que diable vous ont appris vos parents ?
Pas un ne vous a mises en garde contre les pièges tendus habilement par des garçons, genre « voyous de la Porte de Clignancourt » ?
Eh bien il vous a manqué une mère comme la mienne !
Une qui usait le soleil à nous mettre en garde contre tout, surtout les autres.
Il vous manquait aussi un père comme le mien.
Pas très habile en discours sur l’éducation mais cador en éducation par l’exemple.
Il savait vous montrer dans les rues tout ce qui devait nous servir de repoussoir ou de modèle.
Il me montra, à défaut de m’expliquer, des exemples à ne pas suivre.
Les boulevards entre Stalingrad et Place Clichy, méritaient bien le qualificatif de « boulevards en enfilade », riches qu’ils étaient en « arpenteuses d’asphalte » et autres « cueilleuses d’asperges » qui donnaient une appréciation différente de Socrate sur l’enseignement de la philosophie.
Ces péripatéticiennes dispensaient un enseignement d’un autre ordre…
Je ne suis pas un expert de l’argot de l’époque d’Aristide Bruant, mon père m’apprit alors que « marcher au pantre » c’est faire marcher le bourgeois bon à gruger, celui qu’on peut facilement amener dans son lit et qui se retrouve tout bête, à poil et sans portefeuille après un coup mal tiré…
Il n’utilisa pas exactement ces termes car il était, comme votre serviteur, assez bégueule, mais l’essentiel y était.
Il ne laissait son langage « coincé » que lorsqu’il s’agissait de faire bondir ma mère.
Écoutez bien lectrices chéries, la chanson « Rue Saint-Vincent » est très claire là-dessus.
« Mais le p’tit Jules était d’la tierce
qui soutient la gerce, aussi l’adolescent.
Voyant qu’ell’marchait pas au pantre,
D’un coup d’surin lui troua l’ventre.
Rue Saint-Vincent… »
C’est pourtant clair, non ?
« Elle s’app’lait Rose, elle était belle. » et comme « elle sentait bon la fleur nouvelle » ben le P’tit Jules a voulu l’envoyer sur le trottoir pour pécho du bourgeois en mal de galipette…
06:57 | Commentaires (8)
mardi, 05 mai 2015
Les ailes des moulins, etc…
Vous vous rendez compte, lectrices chéries ?
Patachou à lâché la rampe !
Même ma mère chantait les chansons de Patachou.
Je sais aussi bien que Mab, à qui j’ai le plaisir de les coller dans la tête pour la journée, des choses comme « La complainte de la butte ».
Avec ses escaliers qui ne sont pas durs qu’aux miséreux, hein Mab ?
J’aimais bien Patachou, elle chantait mon quartier et celui que je traversais pour aller au lycée.
J’ai en fait, de chouettes rencontres, dans ce quartier…
Et je sais aussi bien que ma mère « Rue Saint-Vincent ».
Je sus quelques années après, pour l’avoir demandé à mon père ce que voulait dire « marcher au pantre ».
Il me l’expliqua vaguement en me montrant des dames boulevard de Rochechouart où nous allions au cinéma.
Ce qui me valut, suite à un pari stupide, un épisode gênant quelque temps plus tard en sortant du lycée.
Quand l’un et l’autre arrêtaient de chanter Patachou, Edith Piaf, Mouloudji, Montand et autres morts, la radio prenait le relais.
J’ai remarqué que si ma mère chantonnait volontiers « Marinella » ou « Bella Catarinetta tchi tchi » mon père évitait soigneusement de chanter Tino Rossi.
Probablement parce qu’il détestait « ce Corse calamistré qui chante avec une voix de châtré ».
Mon père avait, comme son fils, une chevelure rebelle et pleine d’épis et je le soupçonne d’avoir pensé que ma mère avait le béguin pour ce brun si bien peigné.
Je l’ai même entendu dire à ma mère, à propos de la femme de Tino Rossi et d’autres qui avaient épousé des hommes beaucoup plus vieux qu’elles « elle au moins, elle sait ce que ça fait de prendre un coup de vieux… »
Ça faisait bondir ma mère et pas nous car nous n’apprîmes que bien plus tard les différentes acceptions du terme…
Bref, mon père était parfois ce qu’on appelle en français moderne « une langue de pute ».
Pour en revenir à Patachou, sa mort m’a quand même fait quelque chose.
Ces temps-ci, des pans entiers de ce que fut la radio de ma jeunesse s’effondrent.
Même si à 96 ans Patachou avait largement l’âge de faire un mort.
Ça me fait penser qu’il ne me reste du coup qu’une trentaine d’années à tirer.
Et que ce n’est que « peut-être »…
09:50 | Commentaires (8)
lundi, 04 mai 2015
Aujourd’hui, c’est bitch volée…
Une accroche a attiré mon attention en ouvrant mon navigateur.
Un article du Parisien qui du coup me semble tout à fait Libéré…
J’ai lu l’article.
J’en ai retiré que les mouvements de libération des femmes avaient obtenu un succès très relatif en matière d’éducation de leurs protégées.
A la place d’Elisabeth Badinter et de Simone Veil, j’aurais même un peu honte que puisse arriver ce genre d’aventure…
Esprit mal tourné que je suis, profitant de l’inattention de la lumière de mes jours en train de vous écrire une note, je me suis dit que si certaines avaient aussi peu de cervelle, c'est-à-dire aussi peu que certains mecs, j’avais peut-être quelque chose à glaner dans cette affaire.
M’avait traversé l’esprit un instant que si un type de soixante-huit piges, chauve, petit et bedonnant, pouvait amener des femmes d’une trentaine d’années à jeter leurs habits aux orties et s’allonger les yeux bandés rien qu’en leur racontant des histoires à dormir debout, je devrais pouvoir en faire autant si Heure-Bleue voulait bien regarder ailleurs un moment.
Ayant pour une fois un poil de jugeote, je me suis rapidement dit que ça amènerait surtout la lumière de mes jours à m’étriper sans ménagements et des tas d’emmerdements...
Certaines sont quand même assez gonflées et oublient facilement qu’elles ont fait preuve d’un manque de discernement qui devrait les pousser à se faire oublier.
La dernière a eu l’idée d’allumer la lumière pour découvrir que le jeune premier était un vieux dernier.
Au lieu de bondir, de se rhabiller, de baffer l’imposteur, balancer un coup de pied dans le siège social de sa carrière amoureuse et de se gifler pour sa niaiserie, elle a eu le culot de porter plainte.
Le plus surprenant est qu’il s’est quand même trouvé un procureur pour qualifier la chose de « viol par surprise ».
J’aurais compris qu’une gamine surprise à sa toilette et agressée par un maniaque voie dans la chose un « viol par surprise » et un procureur aussi.
Mais qu’une godiche se déshabille les yeux bandés devant un type qui lui a donné rendez-vous dans une piaule et qu’elle n’a jamais vu autrement qu’en photo sur Internet et se voie accorder le statut de victime d’un « viol par surprise » parce qu’il appert Adonis était Quasimodo me laisse pantois.
Mon dieu, lectrices chéries, que vous êtes parfois mal représentées...
J’ai oublié de vous dire qu’il s’est quand même trouvé 342 nunuches pour se faire prendre (!) à ce genre de piège.
« Piège à con » me semble du coup tout à fait adéquat.
10:28 | Commentaires (15)
samedi, 02 mai 2015
Il aurait mieux fait d'aller dans la gironde…
J’ai vu ce jeudi soir une « Dyna Panhard » en regardant la télé.
Ça m’a rappelé quelque chose de ce passage de ma jeunesse à la Porte Clignancourt…
Un des voisins, celui du deuxième étage, avait une épouse plutôt gironde mais à la vertu discutable.
Comme toujours dans ces cas-là, tout le monde le savait sauf lui.
Même moi je le savais car j’avais selon l’expression maternelle « les oreilles qui traînent ».
Ce voisin, Mr M. et pas celui du troisième avec ses deux filles et son fils, avait acheté, pour meubler les dimanches de sa famille, une Panhard « Dyna » d’occasion.
D’occasion car dans le quartier, les seuls à pouvoir s’offrir des voitures neuves étaient les boulangers et les voyous.
Cette Dyna donc, si le quartier l’a entendue, je ne suis pas sûr que quelqu’un l’ai vue autrement qu’immobile.
Le « père M. » passait, à peine le printemps arrivé et le soleil revenu, ses dimanches non pas « dans » mais « sous » la voiture.
Il animait le passage Championnet de bruits de tapotement, de clefs heurtant le métal, de jurons et de « ssshhhh » quand il s’écorchait une main.
Je le regardais de la fenêtre du quatrième, ses jambes dépassant de la voiture, sortant de sous la voiture en une reptation bizarre qui faisait dire à mon père que ce voisin amusait « s’il faisait ça à la mère M., elle serait drôlement contente… »
Ma mère, qui avait l’oreille extrêmement fine, arrivait d’un pas vif et engueulait mon père car « quand même Lemmy, tu as des enfants ! Des filles en plus ! »
Il n’arrangeait rien en ajoutant « C’est justement parce que j’ai fait des enfants que je sais que la mère M. aimerait bien que… »
Ma mère lui collait une tape sur le bras, haussait les épaules et retournait à son occupation en bougonnant.
Nous, on continuait à regarder « le père M. » bidouiller sa voiture.
Vers cinq heures, ma mère est arrivée et nous nous sommes serrés à la barre d’appui.
« Le père M. » se mettait enfin au volant et tentait de démarrer la « Dyna ».
Devant la mauvaise volonté de ce moteur, il soulevait le capot. Et manipulait avec douceur des pièces inconnues de moi.
La voiture démarrait alors dans un bruit de tôles froissées que je n’ai jamais entendu sortir d’une autre voiture.
Mon père a commencé « tu vois bien que j’avais raison ma poule, elle démarrerait comme ça s’il … »
Ma mère l’aurait piétiné. Elle lui redonnait une tape sur le bras, il disait « Aïe ! » pour de faux et ça s’arrangeait.
Au moins pour un temps.
Ce n’est que plus tard que j’ai saisi le sel de ces réflexions.
Il n’empêche qu’il n’avait pas tort.
Si Mr M. s’était préoccupé de sa femme avec le soin qu’il apportait à sa « Dyna », il ne se serait peut-être pas promené avec une paire de cornes qui amusa le quartier pendant des années.
Je me demande si je ne tiens pas de mon père cet « esprit mal tourné » qui agace parfois, si ce n’est souvent, la lumière de mes jours...
08:55 | Commentaires (10)