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mercredi, 28 janvier 2015

Histoire de lard...

Ma sœur cadette est née le jour des crêpes.
Pas comme la petite qui est née le cinq février et s’est plainte toute son enfance d’être « née le jour de rien, elle est née le jour des crêpes, lui le jour des rois et c’est pas juste ! »
Ma mère n’avait jamais remarqué que la Chandeleur était un anniversaire qui eût dû la laisser indifférente.
Emmener Jésus à la synagogue ne faisait pas partie des évènements qui devaient attirer son attention.
Bon, ma mère n’était pas très pieuse. Et même pas du tout. Ni très calée en Ecritures.
Elle avait des lubies bizarres même pour un chrétien averti.
Il y avait évidemment le respect du jeûne du Vendredi Saint qui ne m’avait jamais empêché de dormir. J’avais été guéri de toutes ces histoires par un séjour chez les dingues.
Je lui mentais ce jour là avec aplomb en rentrant à la maison.
Quand par hasard elle était là, elle me demandait « Tu as « fait maigre » au moins mon fils ? »
C’est en ces occasions que j’ai appris que l’on peut mentir à deux conditions :
- Que ce soit dans dommage pour quiconque.
- Le faire avec aplomb.
Alors que mon père s’en foutait allègrement qui savait bien, lui, qu’on peut prendre des arrangements avec le bon dieu sans être emmerdé par autre chose que sa conscience, ma mère craignait toujours des représailles à mon impiété.
Ça allait de « il ne faut pas se couper les ongles le Mercredi des Cendres, c’est couper du pain bénit au Diable » à « faire la lessive la Semaine Sainte, c’est préparer son linceul. »
Chaque fois ce n’était pas d’avoir offensé un bon dieu dont ma mère semblait penser que c’était un brave gars mais plutôt mollasson, un type sympa mais un peu faiblard...
Non, ce que ma mère craignait quand je manquais de piété, c’était que la prunelle de ses yeux courût le risque de me trouver face au diable une fois ma dernière heure venue.
Il faut dire que si dieu n’impressionnait pas ma mère, le diable lui semblait quant à lui un sérieux client.
Pas un machin gentil comme le bon dieu, plein de bonté, d’amour qui parlait de pardon et autres gaudrioles finalement inutiles au maintien de l’ordre dans un monde en perpétuel bordel.
Bordel surtout causé par ses enfants.
Non, non, non lectrices chéries ! Le diable c’était un méchant,  un vrai méchant, un qui vous cramait pour l’éternité à la première connerie.
Si ça se trouve, vu le nombre de pécheurs, le réchauffement climatique, c’est lui…
C’était quand même un type qui venait vous tirer par les pieds pendant votre sommeil, histoire de vous faire regretter d’avoir bouffé en douce une cuillerée de confiture en montant sur une chaise.
Ou pire,  avoir piqué un franc dans le porte-monnaie maternel pourtant d’accès peu aisé...
Elle a continué comme ça longtemps ma mère, persuadée qu’une bonne mère ne doit surtout pas s’occuper de foutre la paix à son fils.
Persuadée qu’elle était qu’une fois hors de sa vue, l’occupation permanente de la prunelle de ses yeux était de chercher à copuler avec des filles à la vertu discutable.
Pourtant, un moment dans mon enfance, j’écoutai avec attention l’histoire sainte chez mes fondus. Déjà intéressé par le feu qui prenait sans allumettes, cette histoire de buisson ardent m’avait intrigué.
Non que je fusse crédule mais cette affaire me turlupinait et je me demandais bien par quel miracle, la chose pouvait ainsi s’enflammer.
Puis je l’oubliai jusqu’à l’adolescence où, en quelques occasions elle me revint à l’esprit.
Je fus alors forcé de constater que cette affaire de buisson ardent n’avait été à l’époque qu’une erreur d’interprétation de ma part.
En y réfléchissant plus tard, l’idée que c’était bien là la vraie révélation du dieu éternel et unique qui fait marcher le monde, n’était finalement pas si fausse…

mardi, 27 janvier 2015

Le jour où la mère est entrée dans l’éther.

Ce 28 février 2005 j’étais au café, avec un futur client quand mon portable a sonné.
Je me suis excusé auprès de lui.
J’ai regardé qui appelait.
C’était ma sœur cadette.
Elle a commencé d’une voix hésitante.
- J’hésitais à t’appeler, je ne sais pas comment te le dire.
- Quoi donc ?
- Aujourd’hui, maman est morte…
Assez bizarrement, la première chose à laquelle j’ai pensé en entendant ma petite sœur dire ça, ce n’est pas à ma mère mais à Camus.
Puis, ma pensée glissant j'ai pensé à mon père qui était mort depuis 1988 et qui avait quitté Alger en 1939 pour n’y jamais retourner.
Bizarre, non ?
Ce n’est que bien des mois plus tard, plus d’un an en réalité, qu’un soir m’est enfin venu un sanglot en pensant à ma mère.
Il m’avait fallu plus d’un an pour m’apercevoir, pour découvrir, que j’avais perdu ma mère.
Ce fut la seule fois que j’en ai éprouvé un vrai chagrin.
Je ne lui en voulais plus depuis très longtemps.
Même quand trois mois avant sa mort, elle m’a dit, du ton qu’on prend pour dicter ses dernières volontés,  « Tu sais, mon petit garçon, tu devrais divorcer d’Heure-Bleue, cette fille n’est vraiment pas faite pour toi ! ».
A ce moment, je n’ai fait que lever les yeux au ciel.
Ce furent ses dernières volontés.
Je ne les ai pas respectées.
Elle avait seulement oublié que depuis toujours aucune fille n’était « faite pour moi »…

lundi, 26 janvier 2015

Guère épais le jeudi, pas d’histoire d’eau le dimanche…

Mab, encore elle, du haut de son expérience m’avait averti qu’il en allait des kilos comme des filles : Un de perdu, dix de retrouvés.
Je vais même vous dire, lectrices chéries, du haut de la mienne, d’expérience, ça marche bien mieux pour les kilos que pour les filles.
Mab était allée jusqu’à parler d’une taxation supplémentaire genre TVA.
Bon, ce matin je bénéficie encore d’un taux réduit mais j’ai bien peur que ça ne dure pas.
Et ça n’a rien à voir avec la victoire de SYRIZA aux législatives grecques.
Ça a tout à voir avec le dîner chez les enfants hier soir.
Je reste dans le salon, à donner à manger à P’tite Sœur, et, seul et misérable, je tape dans les pringles et les olives pendant que les autres papotent dans la cuisine.
Inutile de vous dire qu’après avoir fait ingurgiter ses petits pots et ses petits suisses à P’tite Sœur, je n’ai plus faim.
Ben oui, un petit pot et deux petits suisses pour une ont leur pendant chez moi.
Un, peut-être deux, oui, c’est ça, deux bols d’olives, une large coupe de chips et une assiette de chipsters m’ont calé pendant que j’essayais d’occuper P’tite Sœur en regardant tant bien que mal le résultat des élections grecques.
Le dîner est enfin arrivé. L’Ours avait réussi un « curry vert de poulet ».
Piquant et délicieux.
Les conversations donnent soif et nous sommes tous bavards.
Y compris les Merveilles qui resteront épaisses comme des salaires bangladais car elles sont à l’eau.
Bilan ?
Désastreux…
J’aurais pu me contenter de réduire la perte de poids.
Eh bien non. Non seulement j’avais compensé en trois ou quatre jours une grande partie des kilos perdus la semaine dernière mais le dîner d’hier soir a fait que j’ai un peu « surcompensé »…
Bon, tout n’est pas perdu, P’tite Sœur a absolument tenu à monter sur mes genoux pour me faire un câlin.

dimanche, 25 janvier 2015

Le lit, mon fertile...

C'est là que le matin je trouve l’inspiration.
Le problème c’est que pour le plaisir de Mab, sur les vingt minutes que je passe à faire ma note, j’en passe quinze à trouver un titre...
A propos de « Joselito, l’enfant à la voix d’or » qui passa à l’Ornano 43 vers le début des années soixante, il me revient que vers la fin des années cinquante il arrivait encore à ma mère de chanter à la maison.
Elle nous avait emmenés, ma sœur cadette et moi, voir « La belle de Cadix » sorti quelques années plus tôt.
Ce dimanche là, je fus assez content pour des tas de raisons.
D’abord, j’échapperais au foot qui sourdait doucement du poste de radio pendant la sieste de mon père.
On aurait aussi, ma sœur et moi, le droit de parler à voix normale, c'est-à-dire plutôt piaillante comme il est courant chez des enfants de sept ou huit ans.
Enfin on serait dehors et ça c’était bien.
Nous sommes donc entrés à l’Ornano 43 ce dimanche là, ma mère nous tenant chacun par une main.
Elle avait la démarche à la fois fière et gênée des gens qui n’ont pas l’habitude d’évoluer en public devant d’autres gens immobiles, un mélange de timidité et d’affectation. Quelque chose qu’Heure-Bleue appelle « la démarche de l’oie »
Ma mère nous avait emmenés car la « Carte Familles Nombreuse » de la SNCF donnait droit à une réduction sur les places de cinéma et parce qu’une femme seule qui va au cinéma, hein…
Et puis il n’était pas question que ma mère laissât échapper une réduction, pour quelque raison que ce fût et l’idée de payer une place et demie au lieu de trois était déjà la moitié du plaisir de la sortie.
Pour autant qu’il m’en souvienne, je n’avais pas été passionné par « La Belle de Cadix ».
Ma petite sœur non plus…
Mais nous avions été content quand même, même si l’envie nous avait saisis à voir d’autres enfants lécher un « eskimo ».
Honnêtement, ils étaient peu nombreux à lécher ces glaces car beaucoup de familles du coin tiraient le diable par la queue.
De surcroît, l’ambiance manquait un peu de spontanéité car la présence de nombreuses mères dans l’assistance dissuadait les plus grands de modifier les paroles de la « réclame ».
Cette « réclame » qui scandait « Bonbons, caramels, eskimos, chocolat » dont les derniers mots étaient remplacés le jeudi par « sucez les mamelles à Lollobrigida »…
Ma mère fut ravie d’entendre son idole chanter « Rossignol de mes amours ».

Mon père, s’il n’avait, comme tous les hommes, aucune idée de la façon dont les femmes fonctionnent, savait très bien ce qui faisait bondir ma mère.
Un talent inné pour la composition d’âneries et la modification scabreuse était chez lui prétexte à faire hurler ma mère.
Ce dimanche là fut pour lui l’occasion de vérifier que les mêmes causes engendraient les mêmes effets.
Ma mère rentra à la maison avec nous, rangea son manteau et nous déshabilla.
Mon père, que la sieste avait reposé et mis de bonne humeur demanda à ma mère  « c’était bien Luis Mariano ? »
Il ne l’aimait pas, soupçonnant qu’un type jeune, beau, doté d’une telle voix et toujours célibataire à son âge n’était pas « normal » selon les critères de l’époque.
Mon père avait lui-même une assez belle voix de baryton qui parfois charmait ma mère.
Mais pas toujours. Ça dépendait plus des paroles que de la musique…
Ce dimanche là, ma mère avait commencé à préparer le dîner.
Elle se mit à chanter « Rossignol de mes amours ».
Mon père, dans un élan d’où la poésie était absente reprit en canon « Il était une fois, une fille de joie au cœur plein de tristesse… »
Ma mère lui jeta un regard noir.
C’est quand il continua délicatement par :
« Elle avait marre d’aimer, de se faire en… » que ça s’arrêta net.
Ma mère l’avait stoppé d’un « 
Gaby !!!! » monstrueux.
Je sais maintenant qu’il se serait arrêté avant que nous disposassions d’un renseignement précis sur les problèmes de princesses.
Mais ma mère n’en était jamais sûre, d’où ce « Gaby ! » péremptoire.
On a failli apprendre quelque chose ce jour là mais tant pis, on était sûr qu’on saurait plus tard…


samedi, 24 janvier 2015

Le calme art n’est pas encore né…

Hier, lectrices chéries, Heure-Bleue et moi sommes allés à Paris.
« Waouuuhhh !!! » vous exclamez vous devant la nouvelle ébouriffante.
Bon, faut relativiser quand même, il ne s’agissait que de prendre successivement deux bus pour aller là où nous allions.
Nous étions partis pour profiter de la seule chose qui rende la vie du Français moyen supportable : Un peu de superflu.
Où trouver du superflu joli et abordable dans un cadre agréable où l’on n’est pas harcelé par des annonces intempestives de promotions sans intérêt ?
Au Bon Marché.
Dans sa librairie nous nous sentons au calme.
D’ailleurs, aller « là où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté » est réconfortant.
Pour le prix de trois bouquins de poche et d’un « tatin de tomates » qui trouera l’estomac de la lumière de mes jours, nous passons un délicieux moment.
Y aller et en revenir me confortera quant à moi, qui suis frileux comme une vieille chatte, qu’il n’y a vraiment que deux types de bus, celui qu’on vient de rater et celui qui n’arrive pas…
Malgré tout, la population dans les transports publics semble être l’exemple de la « réserve naturelle ». Nul besoin d’aller dans de lointaines contrées pour y trouver un spectacle sans cesse renouvelé.
Le bus est une véritable merveille de ce point de vue.
Le voyage de retour n’a déçu aucun de mes espoirs.
Lorsque nous sommes montés dans le 84 à Sèvres-Babylone, la foule des voyageurs était clairsemée et une jeune blondinette, à vue de nez pas plus de 450 grammes avec le sac à main, papotait avec le machiniste et vérifiait nonchalamment que les voyageurs « validaient leur titre de transport ».
Peu avant la Concorde est monté l’exemplaire attendu du « moi à leur place je ferais plutôt comme… »
Il a commencé par apostropher la blondinette « Votre ligne est très mal gérée ! »
- Écrivez, monsieur, il y aura un retour…
- Je vais leur dire, moi, comment on fait, il faudait peut-être que les bus aillent tous là où ils doivent !
- Je vous le dis, monsieur, écrivez, il y aura une réponse.
J’attendais, j’étais sûr qu’il me donnerait l’occasion…
- Oui ! Tous les bus devraient aller jusqu’à la Porte de Champerret !
Ouais ! La voilà. Alors j’ai dit au type.
- Tout le monde doit aller à la Porte de Champerret ? Mais ceux qui n’habitent pas là-bas ?
- Mais ! Tous les bus doivent aller Porte de Champerret !
- Mais non, si on habite à la Nation ?
La blondinette est intervenue.
- C’est vrai, ça, si on habite l’Est parisien on ne passe pas par…
- N’empêche, cette ligne…
J’ai repris :
- Oui mais…
Heure-Bleue m’a arrêté, c’était dommage, le type s’énervait, une dame de sa rangée souriait.
J’étais sûr que j’arriverais à le saouler mais Heure-Bleue n’a pas voulu.
La blondinette était contente. Le mec faisait la tête.
Ce fut un beau voyage.
Cette journée fut parfaite.