mercredi, 02 mars 2022
Quinze ans !
Demain, Merveille aura quinze ans.
Avant-hier soir, on a commencé à les lui fêter.
On l’a d’abord emmenée au restaurant.
Là nous avons claqué pour la cinquième fois l’aumône gouvernementale.
Hier, les festivités ont repris leur cours impétueux.
Ça avait commencé doucement avec un déjeuner léger chez Lina’s, spécialiste du sandwich joliment présenté et qui remplit une dent creuse pour le prix d’une couronne céramique chez un cador de la dentisterie.
Le pire était à venir…
J’ai découvert dans l’après-midi que le patriarcat était une farce.
Du moins que celles qui le brandissaient n’avaient pas une vue objective de la situation.
Bien sûr, il se trouvera toujours quelques imbéciles pour tuer leur compagne mais même moi j’ai laissé tomber l’idée dès que je me suis aperçu que trois sœurs et une mère étaient assez fortes pour coller une raclée à un garçon qui voulait la jouer « chuis l’chef ! ».
Plus tard je me suis aussi aperçu que, non seulement on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre mais qu’il vaut mieux s’arranger pour qu’on ait envie de vous offrir ce qui vous fait envie plutôt que se servir, ce qui se révèle, pour ce que j’ai entendu dire, décevant pour tout le monde…
Bref, le patriarcat, donc, je l’ai encore constaté hier, c’est très surfait.
La lumière de mes jours et moi avons emmené Merveille dans un centre dévolu aux superfluités destinées à couvrir les appas des demoiselles et des dames de façon qu’elles les dévoilent plus qu’elles ne les voilent.
Occupé pendant des heures à regarder les jeunes gens et moins jeunes gens accompagnant les jeunes filles et moins jeune filles, qu’ai-je vu ?
Des jeunes et moins jeunes gens attendre, s’ennuyant ferme, passant d’une boutique de fringues à une boutique de vêtements.
Tout ce mâle monde faisant preuve d’une patience d’ange pendant que les camarades de jeu d’iceux virevoltaient d’un étal à l’autre, perpétuellement indécises et tentant d’obtenir l’assentiment muet d’un regard admiratif la confirmation que leur attrait était renforcé par le choix de leur nouvel atour.
J’ai remarqué une jeune femme, tenant devant elle un « petit haut » d’un rouge carmin qui rehaussait le teint éburnéen de sa peau de belle façon.
Son petit camarade rebeu prêt à la dévorer sur place, la langue pendante, la regard béat d’admiration la convainquit illico de faire main basse sur le vêtement.
Cela dit, j’ai passé des heures à attendre, j’ai lu au moins deux chapitre de mon bouquin, assis face à deux hommes qui eux aussi attendaient que leur compagne sorte des boutiques alentour.
Quelques heures plus tard, nous sommes enfin sortis.
Nous sommes allés boire un « café » qui s’est transformé en une énorme salade de fruits pour permettre à Merveille de reconstituer ses réserves énergétiques.
Nous sommes revenus à la maison.
J’ai rapetissé de l’épaisseur de mes talons et les bras allongés par le poids des courses.
Histoire de m’achever, l’Ours a amené P’tite Sœur, nous l’a laissée et j’ai dû confectionner un repas qui convienne à la petite.
Puis, après avoir joué, et fort bien, les pin-up genre « bombasse à tomber » car elle est fichue comme une déesse, Merveille a pris son « doudou » et est partie dormir comme une petite fille qu’elle est encore.
Ce matin, je suis donc mort.
Mais c’était bien quand même…
10:20 | Commentaires (10)
mardi, 01 mars 2022
Ces cas m’isolent de force...
Un grand merci à celui qui a pris cette photo et l’a diffusée, elle illustre parfaitement mon propos...
Lectrices chéries, comme j’ai déjà longuement tartiné sur la première partie de ma vie et que je vous parle volontiers de la dernière quasiment chaque jour, je ne vais pas me lancer dans autre chose qu’un bref résumé ce matin.
Et juste à titre de discipline épistolaire.
De ma naissance à la maternelle, je n’ai pas de souvenir marquant, sauf quelques scènes dont, en cas de doute, je parle à ma grande sœur afin que, comme archiviste de la famille, elle en précise les détails.
Il en ressort que, de la maternelle à la « grande école » je fus heureux des deux plus belles découvertes que je fis alors : les yeux bleus de Malika et la gentillesse de Mme Comprade.
Puis, de l’entrée à la grande école, je n’ai souvenir que de bagarres et d’un maître trop doux pour qu’un peu d’ordre régnât dans la classe.
Le résultat fut que dès la fin des vacances de Noël, je fus parachuté chez des dingues.
Ce fut une des périodes les plus malheureuses de ma vie.
Je suis resté quatre ans chez ces fondus.
J’en revins en possédant sur le bout du doigt l’art de l’argumentation spécieuse qui me servit tant par la suite, celui de garder le silence quand besoin est et cette tournure d’esprit qui conduit à se dire « la prochaine fois » plutôt que « si j’avais su » quand quelque chose tourne mal…
En regardant derrière moi, je constate que, hormis ces quatre ans, j’ai été plutôt heureux.
Après cet intermède carcéral, je mis donc à profit ma nature curieuse à ne manquer aucune des bêtises qui se présentèrent.
J’y ai laissé quelques pièces qui du coup méritèrent vraiment leur nom de « pièces détachées ».
Puis j’ai croisé Heure-Bleue un jour.
Louise de Vilmorin qui était dotée d’un l’esprit aussi léger que la jambe et elle eut bien raison avait dit « Le bonheur n’est pas tant une question de fortune qu'une disposition de l’âme ».
J’étais d’accord.
Heure-Bleue aussi.
Par chance, mon travail et le sien nous tinrent suffisamment éloignés pour que la lassitude n’arrivât pas.
Nous eûmes des orages.
Mais après la pluie le beau temps était là.
Aujourd’hui il fait plus souvent beau.
D’ailleurs, j’aurais apprécié ce matin de me réveiller à son côté.
Hélas j’ai dormi sur la banquette pour cause de Merveille.
Oui, nous avons Merveille à la maison pour quelques jours !
Elle s’est assise sur le canapé, en a tâté le matelas avec soin et a décrété « Ce canapé est rembourré avec des noyaux de pêche alors je dors avec Mamie et toi Papy, tu dors là ! »
Je préfère nettement sentir la peau d’Heure-Bleue contre la mienne que ces foutus coussins rêches que je jette par terre.
Heure-Bleue râle, soupire, allume la lumière en pleine nuit après avoir fait tomber ce qui traîne sur la table de nuit.
Mais bon sang, ce que je dors mieux contre elle…
Bref, la vie est belle et c’est bien…
10:31 | Commentaires (10)
lundi, 28 février 2022
Devoir de Lakevio du Goût N°115
Les portes ont toujours suscité chez moi des questions ou donné des ailes à mon imagination.
Petites ailes certes et j’espère que les vôtres vont se déployer largement d’ici lundi…
Racontez des histoires s’il vous plaît.
Nous en avons tous besoin…
Ce qui me tracassait, ce n’était pas ce qu’il y avait derrière cette porte du quatrième étage, non.
Je le savais bien, trop bien.
C’était chez moi.
Cet appartement de vingt-cinq mètres carrés où nous vivions, jouions, nous chamaillions, mes sœurs et moi.
Je le connaissais donc bien, très bien même.
Aujourd’hui je suis trop paresseux pour le décrire mais je le ferai sûrement un jour.
Ce qui m’intéressait se trouvait ailleurs.
C’était ce qu’il y avait de plus étrange dans cet immeuble.
Ceux que je connaissais, ceux où habitaient mes copains, tout comme le bâtiment de mon lycée, voyaient le dernier palier comme une fin clairement définie.
Un plancher, une ou plusieurs portes, parfois une fenêtre dispensant la lumière du jour sur l’escalier.
Des éléments clairs, nets, ne souffrant pas de discussion.
Un appartement, une salle de classe, c’est tout.
Un monde normal.
Mais dans mon immeuble, c’était autre chose, il y avait autre chose j’en étais sûr.
Pourquoi notre dernier étage n’était-il pas aussi clair et net que les autres derniers étages ?
Pourquoi y avait-il ces quatre marches supplémentaires donnant sur une porte dont personne ne savait ce qu’elle cachait ?
Ce léger décrochement menait-il vers un monde décalé de quatre marches ?
Je n’en ai jamais rien su…
Je me suis assis souvent sur la dernière de ces quatre marches.
Je m’asseyais à côté de la pile de journaux et de revues que ma mère posait là, une fois lus.
Parfois je prenais une revue, et commençais à la feuilleter et je m’arrêtais soudain, rêvant d’un monde autre auquel cette porte m’aurait donné accès.
Un peu comme dans ces romans de science-fiction où un quidam poussait une porte qui l’extrayait de son monde morne pour le jeter dans un monde d’aventures dont il était le héros, celui qui sauve la princesse en danger d’une mort atroce.
Cela dit, je n’ai jamais su ce que cachait cette porte.
Je n’ai connu que le poids des revues et des journaux qui, liés par ma mère en un colis lourd comme un âne mort qui nous était confié pour le porter au chiffonnier qui nous en donnait quelques pièces transformées au retour en « caramels à un franc ».
Pas assez pour un « mistral gagnant »…
10:15 | Commentaires (21)
samedi, 26 février 2022
L'état de l'Art...
La journée d’hier avait bien commencé.
Très bien même.
L’État venait d’offrir à la lumière de mes jours une aumône censée compenser la hausse du prix de l’énergie.
Il est heureux que nous n’ayons pas voiture car l’aumône versée à grands renforts de publicité nous eût tout juste permis de traverser le carrefour…
Bref, après avoir bouffé d’avance au moins trois fois l’aumône en question depuis sa première annonce, nous avons eu l’idée d’entamer la quatrième fois en allant au BHV pour acheter un abat-jour.
Tout se passa très bien.
Pour fêter cet abat-jour, Heure-Bleue acheta un livre à la librairie du deuxième étage.
Soulagés d’une somme rondelette, nous sommes allés nous remonter le moral en allant boire un « petit café » au « Drapeau », bistrot de la rue du Temple passé du stade de « bistrot du quartier de la Verrerie » à celui de « café branchouille du Marais ».
Emportés par notre élan, le « petit café » se transforma à l’insu de notre plein gré en « café + crêpe au caramel au beurre salé ».
Entre le «BHV et le « petit café », la septième moitié de l’aumône disparut d’un coup…
Nous avons donc décidé de passer par la rue Rambuteau pour y acheter du pain, du poisson et le vin, histoire d’entamer la huitième moitié de l’aumône.
Sur le chemin qui mène à l’arrêt du 29 nous savons croisé un ami chez qui nous irons déjeuner demain.
Ce qui risque bien d’amorcer la dépense pour la cinquième fois de l’aumône…
Et c’est là que j’ai vu Heure-Bleue grandiose dans une ire qui la vit, quoique censément épuisée, pester à haute voix, échanger avec la maréchaussée des mots qui eussent dû lui valoir un séjour en garde à vue.
Et pourquoi ça, vous esbaudissez vous.
Eh bien, le 29, faisant fi de son parcours habituel, avait décidé de s’arrêter près du « Gand Café » boulevard des Italiens.
« Qu’à cela ne tienne ! » nous dîmes-nous courageusement en nous engageant sur le boulevard des Capucines.
Las ! À peine devinions-nous l’enseigne de l’Olympia au loin que nous nous vîmes arrêtés pas la police qui barrait le boulevard.
Et Heure-Bleue de pester tandis que je demandais à une accorte représentante des « chaussettes à clou » si le bus 84 à la Madeleine était accessible.
« Mais bien sûr » me dit poliment la « maréchaussière ».
Vaguement rassérénés, nous avons continué notre marche.
Arrivés à quelques dizaines de mètres de l’Olympia, cette fois-ci ce furent des rambardes de béton et des policiers armés de pied en cap empêchant le passage des piétionsqui nous arrêtèrent.
Nous nous enquîmes cette fois du pourquoi de cette « entrave à la liberté d’aller et venir du citoyen d’un état de droit ».
« C’est pour la cérémonie des Césars » répondit un des flics.
« Mais ils nous emmerdent tous ! » s’écria la lumière de mes jours qui commençait à souffrir.
Se ravisant elle ajouta prudemment et d’une vois plus douce « Euh… Je ne parlais pas de vous… »
« On l’avait bien compris comme ça… » répondit un flic d’une voix un poil pincée…
Nous avons donc fait le tour en passant par deux rues et reprîmes notre errance vers la Madeleine.
Arrivés à l’arrêt du 84, l’affichage indiquait « service terminé, arrête non desservi ».
« Mais ils nous emmerdent ! » réitéra Heure-Bleue.
Elle ajouta rageusement « Tout ça pour voir passer des gens tellement maquillés qu’ils ne les reconnaîtront pas ! »
Puis, réfléchissant une seconde, clôt méchamment sur « Ou pire, parce qu’ils ne seront pas maquillés ! »
Elle m’a repris le bras et nous avons marché en direction de la gare Saint Lazare.
Où j’ai arrêté un taxi qui nous a ramené chez nous moyennant un morceau de la huitième moitié de l’aumône.
La lumière de mes jours toujours râlant après ces « stars bidons qui n’ont rien à foutre des Ukrainiens qui en prennent plein la g… pendant qu’ils s’autocongratulent !!! »
À part ça, le dîner fut agréable, j’avais préparé du dos de cabillaud avec des pommes de terre écrasées accompagnées d’une noix de beurre.
S’il n’y avait pas eu la Russie en Ukraine et les Césars à la Madeleine, c’eut été parfait.
Mais c’était quand même bien…
11:45 | Commentaires (7)
vendredi, 25 février 2022
115ème devoir de Lakevio du Goût.
10:14 | Commentaires (10)